- 25/06/2025
Vendredi 27 juin 2025, retrouvez Pierre Taugourdeau (Secrétaire général, Conseil des maisons de ventes) dans ART & MARCHÉ, une émission présentée par Sibylle Aoudjhane.
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00:00Générique
00:00Bonjour à tous et à tous, bienvenue dans Arrêt Marché, votre émission hebdomadaire consacrée au marché de l'art.
00:13A partir du 28 juin 2025, un nouveau règlement européen entrera en vigueur concernant l'importation de biens culturels au sein de l'Union Européenne.
00:22Ce texte vise à lutter contre le trafic illicite d'objets culturels.
00:26Pour mieux comprendre les enjeux de ce règlement, nous recevons dans un instant Pierre Togourdeau, secrétaire général du Conseil des maisons de vente, l'autorité de régulation des maisons de vente aux enchères en France.
00:37C'est parti, c'est Arrêt Marché.
00:43Les exigences en matière de provenance d'un objet d'art se durcissent.
00:47A partir du 28 juin 2025, un règlement européen sur l'importation des biens culturels dans l'Union Européenne est mis en application.
00:55Donc quels sont les nouveaux contrôles qui vont être réalisés et surtout les conséquences sur le marché de l'art.
01:00Pierre Togourdeau, secrétaire général du Conseil des maisons de vente est mon invité pour en parler.
01:05Merci beaucoup d'être avec nous.
01:06Merci Sybille de me recevoir aujourd'hui pour parler de ce nouveau règlement qui effectivement entre en application très prochainement.
01:14Très prochainement.
01:15Est-ce que vous pouvez nous dire quel est l'objectif tout simplement de ce règlement ?
01:20Quel est peut-être le constat de départ ?
01:22Alors le constat de départ, si on revient un peu en arrière, c'est que la réglementation de la circulation des biens culturels pendant longtemps a été focalisée sur la protection des patrimoines nationaux.
01:36Et donc on ne surveillait, on ne contrôlait que les exportations pour protéger le patrimoine national et éviter que les trésors quittent le pays.
01:44Avec les événements politiques dramatiques dans la région du Proche-Lé Moyen-Orient, qui est une région très riche sur le plan archéologique, puisqu'on y situe l'origine des civilisations,
01:59s'est imposée l'idée qu'il fallait protéger le patrimoine par-delà les seuls pays, donc protéger le patrimoine de manière universelle.
02:08D'où l'idée de contrôler l'ensemble des mouvements, y compris les importations de biens culturels, avec aussi comme idée sous-jacente que certains trafics permettent de financer, ont été utilisés pour financer certaines activités terroristes.
02:24Donc on ne contrôle plus seulement ce qui va sortir des pays.
02:29Moins en amont, plus aussi en aval, et qu'en cas que les deux acteurs soient l'un comme l'autre autant concernés.
02:35Absolument. Donc tant au niveau de l'exportation que désormais au niveau de l'importation, pour s'assurer que tous les biens culturels qui circulent ont une origine légale,
02:46et en tout cas, oui, conforme aux réglementations en vigueur.
02:50Donc plus de poids sur les épaules des marchands, donc notamment, on va parler de la France, puisque nous sommes en France,
02:55donc les marchands français ont plus de règlementations, de règles à respecter.
02:59Est-ce que vous pouvez nous donner les grandes lignes de ce règlement ? Est-ce qu'il va peser sur leurs épaules ?
03:05Oui, alors effectivement, ce sont des formalités supplémentaires qui vont venir s'imposer aux professionnels du marché de l'art,
03:12qui doivent déjà en assurer beaucoup. Le règlement, en fait, prévoit trois règles essentielles.
03:21D'abord, une interdiction générale de vente de biens qui seraient sortis illicitement de leur pays d'origine.
03:29Oui, ça semble effectivement assez logique, mais voilà, cela va passant sans problème,
03:38non pas parce que les professionnels souhaiteraient vendre des biens sortis de manière illicite de leur pays d'origine,
03:44mais parce qu'il n'est pas toujours possible de déterminer les conditions de sortie d'un bien provenant d'un pays extérieur.
03:51Donc, cette interdiction générale pour les biens sortis de manière illicite.
03:56Ensuite, le règlement distingue les biens archéologiques, donc ceux qui sont la cible initiale compte tenu des régions concernées,
04:05les biens archéologiques dont l'importation est soumise à l'obtention d'une licence.
04:12Licence, c'est-à-dire une décision de l'administration du pays d'accueil,
04:16qui va vérifier que le bien est sorti de manière illicite, là encore, de son pays d'origine,
04:22donc avec les documents concordants.
04:24Et enfin, ces biens archéologiques étant définis comme étant les biens provenant de fouilles de plus de 250 ans.
04:33C'est quand même assez récent finalement par rapport à notre histoire.
04:35C'est un des problèmes, c'est à la fois une des beautés du débat,
04:43mais un des problèmes pratiques qui va se poser aux professionnels,
04:46c'est que le bien archéologique ne se définit pas de la même manière selon les pays,
04:52selon les régions, selon les histoires.
04:54Et donc, effectivement, 250 ans, c'est relativement récent.
04:58Les biens précolombiens d'Amérique latine sont concernés parce qu'effectivement,
05:04ils ont été produits, ils ont été fabriqués à peu près au 16e siècle pour les plus récents,
05:10et donc ils sont directement concernés par ce règlement.
05:13Effectivement, encore une fois, 250 ans, c'est récent,
05:16mais on parle aujourd'hui des recherches archéologiques sur des biens de la Première Guerre mondiale,
05:21donc qui ont beaucoup moins de 250 ans.
05:23Donc là, encore une fois, l'archéologie, une définition qui est à parfaire
05:29et qui n'est pas forcément la même selon l'État européen concerné,
05:34puisque, encore une fois, ça provient d'un règlement européen.
05:38Et puis, la dernière partie du règlement concerne les autres biens culturels,
05:43donc de plus de 200 ans d'âge et de plus de 18 000 euros de valeur,
05:49parce qu'il fallait quand même mettre un seuil de valeur sous peine d'enfouir l'administration
05:56sous les demandes ou sous les déclarations, puisqu'en l'occurrence, il s'agit d'une déclaration.
06:01Donc, pour importer de tels biens, il faut déclarer l'importation,
06:05c'est-à-dire qu'il n'y a pas de décision de l'administration à attendre.
06:09L'importateur déclare le bien, déclare que le bien a été sorti de manière licite de son pays d'origine,
06:17on y revient toujours, et peut importer le bien.
06:20Il doit s'en assurer, il ne faut pas qu'il fasse n'importe quoi,
06:23parce que les douanes sont susceptibles de porter des contrôles sur ces importations.
06:28Mais, en tout cas, il n'est pas besoin d'attendre une décision de l'administration.
06:33En tout cas, il y a plusieurs annexes relatives à ces trois points,
06:37avec une liste quand même très, très large d'objets concernés.
06:41Et ça touche beaucoup plus que seulement des antiquités,
06:44comme on pourrait se penser de manière assez, enfin, en dehors des professionnels.
06:49Oui, ça touche.
06:50Alors, d'abord, l'ensemble des productions d'arts plastiques classiques,
06:55donc les peintures, les sculptures.
06:57Et ça touche tout ce qui est objets de collection.
07:00Et là, effectivement, le règlement va des timbres jusqu'aux monnaies,
07:08enfin, en passant par tout type d'objets.
07:11L'objectif, évidemment, est d'englober le maximum de biens culturels.
07:18On peut dire que ça a la vertu d'être une énumération, et donc c'est limitatif.
07:23Oui, au moins.
07:24Voilà, parce qu'après, chacun peut voir un bien culturel dans un objet
07:28que l'autre considéra comme un bien vulgaire.
07:31Et je voyais qu'il y avait des différentes terminologies
07:33entre autorisation, certificat d'exportation.
07:36Est-ce que tout ça, c'est juridiquement très différent,
07:38ou ce sont à peu près les mêmes choses ?
07:40C'est à peu près les mêmes choses,
07:42mais selon la réglementation de l'état d'origine,
07:45ça peut prendre une dénomination différente.
07:47Donc là aussi, le règlement essaye d'englober le maximum de textes.
07:53Et donc là où c'est la plus grande difficulté,
07:56on va dire que c'est pour l'aspect numéro 2,
07:58et trouver, avoir cette licence pour cet objet
08:03dont on n'a pas forcément toute l'histoire de la provenance,
08:08vu que parfois, ils sont passés par plusieurs mains,
08:10et on n'a pas forcément tous les documents.
08:12Absolument.
08:13Donc c'est la difficulté majeure,
08:15c'est que, autant pour les biens qui sont,
08:21enfin, soit vous avez des biens qui ont fait l'objet de transactions
08:24structurées, donc avec production d'une facture,
08:29ou production d'un document établissant le transfert de propriétés,
08:34vous n'avez pas de problème,
08:36mais on sait qu'aujourd'hui,
08:37la majorité des biens culturels qui circulent,
08:40sans être l'objet d'un trafic,
08:45sans être de manière illicite,
08:50passés de main en main,
08:52en fait, ne sont pas documentés.
08:54Et ça peut être très près,
08:56ça veut dire que l'objet que vous recevez de votre grand-mère
09:00n'a pas de provenance,
09:03et vous ne pourrez jamais établir la provenance de cet objet,
09:06comme ça peut être des biens qui ont fait partie de collections anciennes
09:12et qui, depuis, sont passés de main en main,
09:14sans qu'il soit possible d'établir cette origine
09:18et ce parcours particulier.
09:20Et donc, ça intervient, en fait,
09:23dans un mouvement général
09:24qui met la provenance comme critère essentiel
09:29des biens culturels,
09:31c'est-à-dire que, de plus en plus,
09:34et ça part d'une finalité vertueuse,
09:38on va chercher à connaître la provenance
09:41des biens culturels qui circulent
09:43et écarter du marché
09:44les biens culturels dont la provenance ne serait pas certaine.
09:48Donc, de votre œil,
09:50quelles seraient les conséquences sur le marché ?
09:51Est-ce que c'est une conséquence positive ?
09:53Parce que, finalement, ça apporte beaucoup plus
09:56de sécurisation,
09:58de lien de confiance avec le vendeur et le marchand.
10:00ou une vraie problématique de soupsigne
10:04et d'objet en présence ?
10:06Les deux.
10:07J'ai envie de dire les deux.
10:09La finalité est vertueuse,
10:11il n'y a aucun doute là-dessus.
10:13Et j'ai envie de dire,
10:15aucun professionnel du marché de l'art
10:18n'a envie de proposer à la vente
10:21un bien dont il saurait
10:22que son origine est illicite,
10:25soit qu'il soit sorti de fouilles illégales,
10:29soit qu'il ait été
10:32spolié durant la Deuxième Guerre mondiale,
10:35volé dans telle ou telle période.
10:38Aucun professionnel
10:39n'a envie de proposer ça à la vente.
10:43Donc, encore une fois,
10:45cette finalité est vertueuse.
10:46Les démarches demandées aux professionnels
10:51sont cependant problématiques,
10:54mais j'ai envie de dire problématiques
10:56de manière temporaire,
10:57puisqu'on est dans la phase de transition
10:59où on vient leur imposer
11:00ces nouvelles obligations administratives
11:02qui, comme je l'ai dit en préambule,
11:05viennent s'ajouter à de nombreuses autres.
11:08Donc, effectivement,
11:09il y a une adaptation à faire,
11:11une adaptation également
11:12pour les administrations
11:14qui vont contrôler la mise en œuvre
11:16de cette nouvelle réglementation
11:20pour voir, effectivement,
11:23jusqu'où ce qu'on peut demander
11:25aux professionnels,
11:27jusqu'où on peut aller
11:28dans la connaissance
11:29de la provenance des objets
11:30et là où, au contraire,
11:32on doit accepter l'idée
11:33que certains biens
11:34ne pourront jamais être documentés,
11:38dont on ne pourra jamais
11:39en connaître la source
11:41et se posera alors la question
11:43de savoir si on écarte définitivement
11:46ces objets de la vente,
11:48du marché et même de l'exposition,
11:51puisque les mêmes questions
11:52se posent pour les musées.
11:54Donc, est-ce qu'on en fait
11:55des objets des resnoulous,
11:57des objets qui n'existent plus
11:59au motif que...
12:02On n'a pas de place légale, en fait.
12:04Exactement.
12:05Ou alors, est-ce qu'on accepte
12:06que c'est bien qu'on qualifie
12:08d'orphelins passe de main en main,
12:12soit exposé avec l'idée
12:14que si jamais un jour
12:16on découvre qu'ils ont fait
12:17l'objet d'un trafic
12:18ou qu'ils ont un propriétaire légitime
12:21qui a été spolié,
12:23on les restitue à ce propriétaire légitime.
12:25En tout cas, vous serez d'une oreille attentive
12:29et même proactif dans l'accompagnement,
12:31j'imagine, des maisons de vente
12:32qui sont présentes au sein du Conseil des maisons de vente.
12:35C'est l'objectif du Conseil
12:36d'accompagner les maisons de vente
12:39dans la mise en œuvre de cette réglementation,
12:42dans les relations qu'elles pourront avoir
12:45avec les administrations
12:47en charge de la mise en œuvre du règlement,
12:50le ministère de la Culture
12:51pour ce qui concerne la délivrance des licences,
12:54et puis les contrôles par les douanes,
12:58l'information donnée aux professionnels
13:01sur ce règlement,
13:03parce qu'il va falloir faire preuve de pédagogie,
13:06la formation des commissaires-priseurs,
13:09mais encore une fois, ça intervient,
13:10donc il y a le règlement
13:11et par-delà le règlement,
13:13il y a tout ce qui concerne la provenance
13:14qui s'installe comme critère essentiel
13:17et on n'a pas de doute
13:20que ce soit une préoccupation vertueuse,
13:22mais on comprend les difficultés pratiques
13:24de mise en œuvre
13:25que cela représente pour ces professionnels,
13:29donc le Conseil fera le maximum,
13:31fait déjà le maximum
13:32pour accompagner les professionnels.
13:35Merci beaucoup Pierre Togourdeau,
13:37vous êtes secrétaire général
13:37du Conseil des maisons de vente,
13:39merci de nous avoir explicité
13:41cette loi qui va donc être mise en application,
13:43cette loi sur règlement européen
13:44qui va être mise en application
13:45à partir du 28 juin 2025,
13:48et merci à vous toutes et tous
13:49de nous avoir suivis,
13:50c'était Arrêt-Marché.
13:51Arrêt-Marché.
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