Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 19/06/2025
Il est fini le temps où les dirigeants citaient Michael Porter comme on évoquait Clausewitz : pour structurer l’action, lire les rapports de force, fixer des priorités. Les matrices du BCG ou de McKinsey n’étaient alors pas des gadgets, mais des grilles de lecture du réel. La stratégie incarnait alors une ambition : exercer la souveraineté intellectuelle de l’entreprise sur son destin. [...]

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Il est fini le temps où les dirigeants citaient Michael Porter, comme on évoquait Clausewitz.
00:12Pour structurer l'action, il y a les rapports de force fixés des priorités.
00:17Les matrices du BCG ou de McKinsey n'étaient alors pas des gadgets, mais des grilles de lecture du réel.
00:23La stratégie incarnait alors une ambition, exercer la souveraineté intellectuelle de l'entreprise sur son destin.
00:31Mais ce temps s'est érodé.
00:32Aujourd'hui, évoquer la chaîne de valeur ou la courbe d'expérience suscite au mieux un sourire poli.
00:39L'appétence pour les méthodes classiques d'analyse stratégique s'est étiolée.
00:42SWOT, 5 forces de Porter, Matrice Ansoff ou Boston.
00:46Pourquoi un tel désamour ?
00:49Eh bien, le premier responsable est sans doute la prolifération des méthodologies.
00:54Des décennies d'inflation méthodologique ont transformé la stratégie en mille feuilles illisibles.
01:00Chaque cabinet, chaque école y a ajouté son modèle, sa grille, son canevas.
01:04Résultat ? Confusion, saturation, désaffection.
01:08Henri Mintzberg, dès les années 1990, dénonçait déjà cette illusion d'un pilotage rationnel par la planification.
01:16Pour lui, la planification stratégique a tué la stratégie en la privant de créativité.
01:24S'ajoute une forme d'usure.
01:25Trop de dirigeants ont vu leur plan stratégique finir oublié dans un tiroir,
01:29leur matrice produire des banalités ou des erreurs.
01:33L'effet performatif, faire croire qu'on en agit, ne suffit plus.
01:37Richard Rommelt, dans Good Strategy, Bad Strategy, leur rappelle une vraie stratégie.
01:43Ce n'est ni une grille, ni un objectif vague, mais un diagnostic lucide, un choix fort, une action cohérente.
01:52De plus, le basculement managérial vers la finance, la performance à trois mois, le reporting temps réel,
01:58ont marginalisé les temps longs.
02:00Or, la stratégie est un art lent, un pari sur le futur.
02:05Dans un monde dominé par la tactique, par l'agilité et la réactivité,
02:09les dirigeants préfèrent les indicateurs à l'intuition, les KPI au schéma mentaux.
02:16La stratégie a cessé de fasciner parce qu'elle a cessé d'être politique, au sens noble du terme.
02:22Elle n'est plus en effet un exercice de choix, de vision, de conflit assumé sur les finalités de l'entreprise.
02:29Elle s'est peu à peu technicisée, réduite à un exercice d'optimisation dans des cas Excel ou de PowerPoint,
02:35vidé de sa capacité à produire du sens.
02:39Là où elle devrait trancher, elle neutralise.
02:42Là où elle devrait mobiliser, elle automatise.
02:46À force de modélisation, elle a été aseptisée.
02:50Ce n'est pas la stratégie qu'il faut abandonner,
02:52mais la croyance qu'elle peut encore reposer sur des modèles figés.
02:55Les disruptions technologiques, intelligence artificielle, plateformes, nouveaux entrants,
03:01redéfinissent les règles plus vite que les entreprises ne s'y adaptent.
03:05Clayton Christensen l'avait montré.
03:07Ce sont souvent les organisations les plus performantes qui ratent les ruptures,
03:12paralysées par leur logique passée.
03:14Alors plutôt que de tenter de prévoir l'imprévisible,
03:17la stratégie doit redevenir un acte de positionnement clair.
03:21Une vision engageante, capable de fédérer dans l'incertitude,
03:26vaut mieux qu'un plan trop bien huilé.
03:29Car dans un monde chaotique,
03:30on n'attend plus les dirigeants qu'ils prédisent l'avenir,
03:33mais qu'ils parviennent à le provoquer.
03:36Sous-titrage Société Radio-Canada
03:39Sous-titrage Société Radio-Canada
03:42Sous-titrage Société Radio-Canada

Recommandations