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  • il y a 5 jours
L'eurodéputée Renew Nathalie Loiseau était l'invitée de franceinfo soir le 16 juin 2025.

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Transcription
00:00Saint-Fossoir, l'invité, Agathe Lambret.
00:04Bonsoir Agathe Lambret.
00:05Vous êtes députée européenne du groupe Renew, le parti centriste au Parlement de Strasbourg.
00:09Vous êtes présidente de la sous-commission Sécurité et Défense aussi,
00:13et membre du parti Horizon, le parti d'Edouard Philippe.
00:17C'est une guerre ouverte qui fait rage désormais entre Israël et l'Iran depuis vendredi.
00:22L'Union Européenne a appelé à la retenue, mais concrètement, où est-elle ?
00:26Est-ce qu'elle est restée sur la touche ?
00:28Bien sûr, c'est le droit international qui est resté sur la touche, et depuis longtemps.
00:33Depuis la guerre américaine en Irak, depuis 2003, le droit international est malmené.
00:39Depuis, évidemment, l'invasion russe de l'Ukraine, le droit international est bafoué.
00:45Et aujourd'hui, les pays qui le peuvent recourent à la force pour essayer de faire entendre leurs priorités.
00:53Vous voulez dire qu'Israël a violé le droit international en menant cette offensive ?
00:57De la même manière que l'Iran a violé le droit international en ayant un programme nucléaire clandestin,
01:02en soutenant le terrorisme, en ayant non pas des prisonniers étrangers, mais des otages.
01:07Le droit international est en mauvaise posture.
01:10Il n'y a plus à peu près qu'en Europe qu'on le respecte.
01:12On fait bien de le respecter, mais effectivement, le reste du monde est devenu une jungle.
01:17Une zone de non-droit. L'Europe qui n'a pas son mot à dire sur ce sujet, qui depuis le 7 octobre est assez inaudible.
01:25Elle n'a rien pu faire pour la situation à Gaza, rien pu faire au moment de la guerre en Iran.
01:30Aujourd'hui, à nouveau sur le dossier iranien, l'Union européenne qui était aussi marginalisée,
01:35qui n'était pas au cœur des discussions, des négociations entre les Etats-Unis et les Iraniens.
01:41C'est Donald Trump qui se moque de l'Union européenne ?
01:46Donald Trump est quand même largement responsable de la situation que l'on subit aujourd'hui.
01:51C'est lui qui avait déchiré l'accord nucléaire conclu en 2015,
01:56avec les Etats-Unis, mais aussi avec les Européens et avec l'Iran,
01:59considérant qu'il n'était pas suffisant.
02:02Beaucoup sous l'impulsion de Benjamin Netanyahou déjà à l'époque.
02:07Et puis d'un seul coup, il s'est mis à renégocier d'une manière qui n'allait à peu près nulle part.
02:14C'est probablement ce que le Premier ministre israélien a voulu stopper
02:19par des premières frappes ciblées que tout le monde a vues et que beaucoup ont compris.
02:29Des frappes ciblées sur les sites nucléaires iraniens,
02:34sachant que l'Iran continue à vouloir la destruction d'Israël.
02:39Vous voulez dire qu'Israël n'aurait pas mieux fait de laisser Donald Trump
02:42aller au bout de ses négociations avec l'Iran ?
02:45Israël pouvait, comme les Européens, avoir des inquiétudes
02:48sur le fait que ces négociations n'iraient nulle part.
02:52Le problème, c'est que le recours à la force,
02:55quand il ne s'agit pas seulement de frappes ciblées sur des sites militaires,
02:59quand on voit aujourd'hui à Téhéran la télévision iranienne frappée,
03:07qu'est-ce qui fait que vous arrêtez ces frappes ?
03:10Quand vous entendez le ministre israélien de la Défense
03:13dire aux habitants de Téhéran qu'ils doivent s'inquiéter,
03:18quel est le but de guerre de Benjamin Netanyahou ?
03:21Je vais vous interroger là-dessus dans un instant.
03:23Mais alors, que doit dire la France ?
03:25Parce que quand on vous entend, on comprend que la situation est inquiétante
03:29et que l'attaque israélienne n'est pas totalement légitime,
03:32qu'elle interroge en tout cas.
03:33Or, après le lancement de l'offensive israélienne,
03:36non seulement la France n'a pas condamné l'attaque,
03:39mais Emmanuel Macron a aussi réaffirmé le droit d'Israël à se protéger.
03:43Emmanuel Macron qui a précisé que la France participerait
03:45aux opérations de défense d'Israël si elle était en mesure de le faire
03:48et si elle était sollicitée.
03:50Il y a un changement de ton de la part du président
03:53qui, il y a encore quelques semaines, qualifiait le blocus de Gaza de honte.
04:00Qu'est-ce qu'il veut se rabibocher avec le gouvernement israélien ?
04:03Non, il y a deux choses très différentes.
04:04Il y a ce qui se passe à Gaza, qui est une tragédie et qui ne va nulle part.
04:11Est-ce que les otages ont été libérés ? Non.
04:14Est-ce qu'aujourd'hui le Hamas est défait ? Non.
04:17En revanche, des morts par milliers, on n'a pas le chiffre exact puisque c'est le Hamas qui les donne,
04:22mais enfin des victimes civiles, un territoire complètement dévasté,
04:27des populations déplacées en permanence,
04:30des propos de l'extrême droite israélienne consistant à nier la solution à deux États.
04:36Et on va en parler dans un instant.
04:37D'accord, mais vous distinguez, comme Emmanuel Macron, vous dites,
04:40l'Iran, le nucléaire iranien, c'est une menace existentielle pour l'Union européenne ?
04:44C'est une menace existentielle pour Israël.
04:47Alors on n'en était pas, si on en croit le renseignement américain,
04:50qui suit ça de près, on n'en était pas à l'existence d'une arme nucléaire iranienne.
04:55On était à un taux d'enrichissement et à une quantité d'uranium enrichi iranien,
05:03qui n'avait rien à voir avec un programme civil,
05:05mais de là à passer à une arme nucléaire, on n'y était pas du tout.
05:10Simplement, ça fait aussi très longtemps qu'Israël alerte,
05:13en disant qu'il y a un pays qui veut nous rayer de la carte,
05:16et qui est en train de se doter, quoi qu'il dise,
05:18des moyens d'aller vers une arme nucléaire.
05:21On peut comprendre l'inquiétude d'Israël,
05:23mais il faut évidemment arriver à la désescalade.
05:28Et c'est aussi tout de suite ce qu'a dit le président Emmanuel Macron.
05:31Il faut qu'on arrive à cesser le feu dans cette guerre,
05:36puisque c'est une véritable guerre.
05:39L'Iran est affaibli après que le Hezbollah a été affaibli,
05:43mais le régime iranien ne va pas s'effondrer,
05:46parce que ça ferait plaisir à Israël de voir le régime iranien s'effondrer.
05:50Ça n'est pas la Syrie de Bachar el-Assad.
05:52Ça pose la question du but de cette guerre.
05:55Qu'est-ce qui se joue, selon vous, la vraie raison de ces attaques ?
05:57Est-ce que c'est l'imminence d'une bombe nucléaire iranienne ?
06:00Vous n'avez pas l'air d'y croire.
06:02Ou la volonté de décapiter le régime iranien ?
06:05Écoutez, la volonté de décapiter le régime iranien,
06:07elle est d'abord celle de beaucoup d'Iraniens eux-mêmes.
06:11Mais vous n'avez pas, comme vous aviez en Syrie,
06:13des groupes armés capables de prendre le pouvoir.
06:16Vous avez un pouvoir iranien qui va tout faire pour sa survie.
06:20Et le pouvoir iranien, il a déjà utilisé le terrorisme.
06:24Il peut être tenté de bloquer le détroit d'Hormuz,
06:27donc un pays dont le régime est affaibli.
06:30Mais le changement de régime au Moyen-Orient,
06:33ça a été tenté par les Etats-Unis en Irak.
06:37Ça a conduit au chaos.
06:38Ça a été tenté en Libye.
06:41Kadhafi est mort, mais la Libye reste dans un état de très grande instabilité.
06:46Ça a marché deux fois dans l'histoire récente.
06:49Ça a marché en Allemagne, en Asie.
06:51Et ça a marché contre le Japon à la fin de la Deuxième Guerre mondiale.
06:55Dans les deux cas, il a fallu envahir ou lâcher une bombe nucléaire sur le Japon
07:00et que ces pays soient conduits à capituler.
07:04Aujourd'hui, Donald Trump n'a aucune envie de partir en guerre
07:07pour faire effondrer le régime des Mola.
07:10Donc potentiellement, Israël, avec cette offensive,
07:12s'expose à des années de menaces et d'insécurité.
07:17Écoutez, la boule de cristal pour les géopolitologues en ce moment,
07:21je ne la conseille pas parce que ceux qui auraient été capables de dire
07:24il y a quelques semaines ce qui se passe aujourd'hui sont très peu nombreux.
07:28Mais je ne suis pas du tout sûre que Benyamin Netanyahou est un plan de sortie.
07:33Il va falloir maintenant que les Etats-Unis, les Européens,
07:37tous ceux qui peuvent s'entremettre, mettre le paquet.
07:40Alors, Donald Trump s'est dit ouvert à ce que le président russe, Vladimir Poutine,
07:45joue un rôle de médiateur dans ce conflit.
07:47Qu'est-ce que cela dit ?
07:49Cela dit la grande confusion géopolitique de Donald Trump.
07:53Un pays qui lui-même agresse son voisin en Ukraine,
07:56un pays qui lui-même viole le droit international,
08:00qui dépend de l'Iran pour la fourniture de missiles,
08:04ne fait pas un bon médiateur dans la crise entre l'Iran et Israël, à l'évidence.
08:09Vous parliez tout à l'heure de la situation à Gaza.
08:11La première conséquence de cette guerre Iran-Israël,
08:14c'est le report de la conférence du 10 juin sur la Palestine à New York.
08:18Gaza devait forcément en faire les frais ?
08:22Ce qui est certain, c'est que cette conférence,
08:26utile pour rappeler que la seule solution, c'est une solution à deux Etats.
08:30Cette solution, elle est en train d'être bafouée par le régime de Benyamin Netanyahou.
08:36Cette conférence avait du sens, mais comment voulez-vous que le monde arabe,
08:41et notamment l'Arabie saoudite qui co-présidait cette conférence avec la France,
08:45puisse aller de pair entre une reconnaissance par un certain nombre de pays occidentaux d'un Etat de Palestine
08:52et la reconnaissance d'Israël, puisque c'était ça le projet,
08:57et le désarmement du Hamas, et la réforme de l'autorité palestinienne ?
09:01Tout ça reste souhaitable. Est-ce qu'au moment où on parle, c'est réaliste ?
09:05A l'évidence, non.
09:06Mais les conditions n'étaient pas réunies avant non plus.
09:09Alors on pourrait dire que ce report peut-être arrange bien Paris.
09:13La conférence à New York promettait d'être un fiasco diplomatique,
09:16disait Laure Fouché, maîtresse de recherche sur le Moyen-Orient.
09:19Dans le monde, vous êtes d'accord ?
09:21Elle était mal embarquée parce que, ne serait-ce que des ministres arabes
09:26qui voulaient se rendre à Ramallah pour rencontrer l'autorité palestinienne,
09:30en ont été empêchés par le gouvernement de Benyamin Netanyahou.
09:34Comment voulez-vous que les mêmes ministres recommandent à leur chef d'Etat de faire un geste ?
09:39Beaucoup le souhaitent. Beaucoup souhaitent un apaisement.
09:42Beaucoup sont inquiets de l'embrasement du projet du Moyen-Orient.
09:45Beaucoup de chefs d'Etat arabes sont favorables à une paix, à la reconnaissance d'Israël.
09:52Et c'est vers ça qu'il faut aller.
09:53Est-ce qu'on peut le faire là, maintenant, cette semaine ? La réponse est non.
09:57Peut-être que le président s'était un peu avancé
09:59quand il a émis l'hypothèse de la reconnaissance d'un Etat palestinien par la France ?
10:02Il a raison d'en faire un horizon.
10:05Parce qu'on ne peut pas laisser disparaître la solution à deux Etats.
10:10Parce que sinon, on considère qu'il n'y aura pas de paix au Proche-Orient pour les décennies à venir.
10:14Et ça, ça n'est pas acceptable.
10:16La situation géopolitique s'est invitée au Salon du Bourget où vous étiez aujourd'hui.
10:21Le Salon international de l'aéronautique et de l'espace.
10:23Plusieurs stands israéliens qui exposaient des armes offensives
10:26ont vu leur accès condamné sur décision du gouvernement.
10:30Ce qui a provoqué la colère d'Israël.
10:31Est-ce que vous comprenez cette décision de la France ?
10:34Ce sont des décisions compliquées.
10:36C'est un peu tartuffe de dire, venez, mais pas avec tous vos équipements.
10:40Mais cacher ce stand que je ne saurais voir, en quelque sorte.
10:45Pour autant, ça, on dit beaucoup sur l'isolement dans lequel Benyamin Netanyahou a entraîné Israël.
10:51Entre l'après 7 octobre, où il y a eu un élan d'émotion et de compassion
10:58pour ce pogrom abominable qu'a vécu Israël est aujourd'hui, 2025.
11:05Ce qui se passe à Gaza fait que plus personne ne comprend ce que recherche Benyamin Netanyahou,
11:11sauf à trop bien comprendre qu'il veut se débarrasser de Gaza,
11:17de la Cisjordanie dont on parle très peu,
11:19mais où les colonies progressent,
11:22où les violences des colons sont là en permanence,
11:25validées par le gouvernement israélien.
11:27On a un gouvernement israélien qui vit de la guerre
11:30et qui, lui aussi, est dans une logique de survie par la guerre.
11:34Dernière question, Nathalie Loiseau, au cœur de ce salon du Bourget,
11:37la défense, c'était un peu une ambiance, j'imagine, industrie de guerre.
11:42Où en est l'autonomie stratégique de la France et des Européens ?
11:45Elle progresse enfin.
11:47Et vous ne me l'auriez pas entendu dire il y a 6 mois,
11:49ça fait des années que j'y travaille,
11:51que même le début de la guerre en Ukraine nous avait rendu capables d'aider les Ukrainiens.
11:57Et aujourd'hui, l'aide européenne est supérieure à l'aide américaine vis-à-vis de l'Ukraine.
12:01Ça, c'est un point très positif.
12:04Et puis, les Européens ont compris que le monde était vraiment dangereux.
12:07Ils ont compris aussi que les citoyens européens nous demandaient de faire beaucoup plus
12:11et se mettent en place des moyens de financement
12:15qui permettent à nos industries de défense d'accélérer leur cadence.
12:19Moi, j'ai vu des représentants d'entreprises de défense
12:22qui ont douplé et qui vont quadrupler leur cadence.
12:26Non pas pour que la guerre atteigne l'Europe, au contraire.
12:29Pour être en état de dissuader quiconque,
12:32quel adversaire que ce soit, de venir nous attaquer.
12:34Merci beaucoup Nathalie Loiseau, députée européenne,
12:37d'avoir répondu aux questions de France Info.

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