Montée des eaux : une ville du Finistère détruit des maisons, une première en France

Sud Radio

09/06/2025

Avec Stéphane Le Doaré, maire de Pont-l'Abbé et président de la communauté de communes du Pays Bigouden Sud

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00:00Le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Jean-Jacques Bourdin.

00:03Les mers et les océans sont en danger, le réchauffement climatique provoque une montée des eaux.

00:11Il y a ce sommet à Nice qui réunit plus de 160 ou 170 pays,

00:18réunis pour réfléchir à ce qu'il faut faire pour protéger, mieux protéger les mers et les océans,

00:25interdire le chalutage de fonds par exemple, renforcer la protection des aires marines,

00:29des parcs marins seront interdits à la pêche un peu partout sur la planète.

00:35Et puis il y a le réchauffement climatique et il faut trouver des solutions.

00:39Des solutions, pourquoi ? Parce que le réchauffement climatique provoque une montée des eaux et une érosion,

00:45une érosion qui menace le littoral.

00:48Nous partons dans le Finistère avec Stéphane Ledouaret, bonjour.

00:54Bonjour.

00:54Merci d'être avec nous, maire de Pont-l'Abbé, président de la communauté de communes du pays Bigoudin Sud.

00:59C'est cela ?

01:01C'est cela. C'est cela. Un des territoires, mais un peu vulnérable, effectivement.

01:05Magnifique territoire. Magnifique territoire, mais vulnérable.

01:09Alors vulnérable, je le disais il y a un instant, à la montée des eaux.

01:12Oui, oui, on est soumis à un double phénomène sur la commune de Tréfié-Gatte,

01:19submersion et érosion, malgré tous les systèmes qu'on a pu mettre en œuvre,

01:24des enrochements, des pieux, des stables de plage.

01:29En fait, on s'aperçoit année après année que nos systèmes ne tiennent pas face à une montée des eaux

01:35qui est réelle, avec le réchauffement climatique.

01:37Et donc, on a un quartier, on a 366 habitations qui sont en zone de submersion forte.

01:45Et donc, 7 maisons qui sont sous le coup du double phénomène érosion-submersion qu'on n'arrive plus à protéger.

01:52Alors, 366 maisons, c'est beaucoup.

01:54Il y a des maisons qui sont si proches du littoral, bien qu'on ne peut plus les protéger.

01:59– Quelle est la menace ? Qu'elle soit engloutie, que le sol s'effondre sous elle ?

02:06– Alors, engloutie, ce n'est peut-être pas tout à fait l'image,

02:11mais effectivement, quand on a des tempêtes, régulièrement, on perd 2 à 3 mètres de dune par nuit.

02:17– 2 à 3 mètres de dune par nuit ?

02:20– Ah oui, oui, en quatre domaines extrêmement tempétueux.

02:25En fait, c'est une conjugaison des fonds marins, de la houle.

02:29Et puis, il faut bien admettre, les enrogements qu'on a faits, en fait, ils sont plus néfastes que protecteurs.

02:35Puisque vous construisez une partie dure contre laquelle la mer vient taper,

02:40avec une énergie cinétique qui, du coup, n'arrive pas à se dissiper.

02:44Et la mer, en repartant, elle vous emmène tout ce qu'elle a,

02:47c'est-à-dire une partie parfois des enrogements, et puis le sable.

02:51Et donc, votre plage qui était plutôt plate, sur laquelle la vague venait s'étaler lentement,

02:58se retrouve très abrupte, et du coup, elle vient taper beaucoup plus fortement.

03:01Donc, le risque, c'est effectivement une brèche, une brèche dans laquelle la mer rentre.

03:05Et puis, on a sept habitations qui sont à une altimétrie trop basse,

03:09pour qu'on puisse les protéger de façon pérenne.

03:13Pour preuve, il y a un an et demi, pendant la tempête de Sierra,

03:15le préfet avait ordonné l'évacuation de ces sept maisons,

03:19parce qu'aujourd'hui, on a trop d'incertitudes sur le sujet.

03:22– Des maisons qui ont été construites quand, Stéphane Le Doiré ?

03:27– Écoutez, certaines après la Seconde Guerre mondiale, globalement.

03:31Il y en a eu un petit peu avant, mais sans doute qu'avant,

03:34on ne se posait pas les mêmes questions.

03:35Et puis surtout, il y a des riverains qui vous disent,

03:38« Ah oui, mais il y a quelques années, la dune était 30 mètres ou 40 mètres plus loin. »

03:42Donc, voilà. Mais c'est ce que je dis régulièrement aussi aux gens.

03:48Quand vous regardez, on fête les 80 ans de la Libération,

03:51et quand vous allez sur les plages aujourd'hui, globalement,

03:53les blocos, ils sont au milieu de la plage, dans la mer.

03:56Mais il y a 80 ans, ils étaient bien sur le haut de la dune.

03:58Ça veut bien dire que le littoral a regagné sur la terre.

04:00– Oui, oui, le littoral. Et oui, la mer gagne.

04:05La mer gagne. L'érosion, l'érosion, peu à peu.

04:08Stéphane Ledouaret, ces maisons, j'imagine que les propriétaires sont indemnisés.

04:14Comment les indemnisez-vous ? À partir de quelle valeur ?

04:18Comment fixez-vous la valeur de l'indemnisation ?

04:22– Là, on est sur un cadre très particulier,

04:24puisque, ce que je vous disais, ils sont soumis aux deux phénomènes,

04:27submersion et érosion.

04:29Donc, du coup, on les rachète à la valeur du marché.

04:31– Voilà, c'est un cadre un peu exceptionnel, sans décote.

04:35C'est-à-dire que les services de l'État, des domaines,

04:39sont venus dans chaque maison, ont estimé chacune des maisons.

04:43Donc, ça va de 250 000 à un peu plus de 700 000.

04:46Et on a rencontré chaque propriétaire individuellement.

04:49Et on a discuté avec lui le prix, parce que c'est une négociation amiable.

04:53Ils ne sont pas obligés d'accepter.

04:55– Ils ne sont pas obligés d'accepter, oui.

04:56– Mais vous imaginez bien que, potentiellement,

05:01dans 5 ans, on va prendre un arrêté de péril et ils seront...

05:05– Ça doit faire mal au cœur à certains propriétaires, Stéphane Lodoret.

05:10– Oui, c'est une négociation difficile, parce que c'est une histoire familiale.

05:15Vous êtes né là, vos enfants sont nés là, vous avez grandi,

05:18vous avez partagé plein de choses.

05:19Et puis, vous savez, le Français est quand même très attaché à la pierre,

05:22ce qui serait sans doute moins vrai en Angleterre ou dans d'autres pays.

05:24Mais là, oui, oui, c'est difficile.

05:29Pour autant, ils comprennent bien quand même que le risque est devenu insoutenable.

05:34Et parfois même, en fait, ils en font des cauchemars à chaque tempête, ils ont peur.

05:38Moi, j'en ai déjà signé 4 sur les 7, on en achète 7.

05:42Il y en a 4 qui sont déjà acquises, on est passé à l'acte.

05:45Et les 3 autres, ça va être dans les 18 à 24 mois,

05:48pour différentes raisons, c'est qu'on s'est adapté à chaque situation.

05:50Donc, il y a un monsieur qui a 92 ans, bon, ben voilà,

05:54ce n'est pas raisonnable de le déplacer de chez lui,

05:56et jusqu'au jour où il ira en EHPAD ou autre,

05:59ben là, du coup, on fera l'acquisition définitive pour l'acheter,

06:03pour la déconstruire.

06:05Il y a une famille qui doit reconstruire une maison sur la commune d'à côté,

06:09qui a acheté un terrain, donc on les laisse dans leur maison le temps d'eux.

06:12Et pour la troisième, c'est une résidence secondaire,

06:14donc on a convenu qu'on leur laissait les deux derniers étés pour, entre guillemets,

06:19faire le deuil de ce bien familial, sachant que l'été, on n'a pas de risque majeur.

06:23Mais par contre, dans tous les cas, ils savent qu'en cas de tempête,

06:28on peut très bien leur dire à 17h,

06:30vous ne dormez pas chez vous ce soir, on vous évacue,

06:32parce que le risque, il est là.

06:33Parce que le risque est trop grand, Stéphane Le Douret.

06:35Mais je vois que c'est fait avec beaucoup d'humanité,

06:37et avec beaucoup d'approches en tenant compte de la sensibilité des uns et des autres

06:48et du passé et de l'histoire de la mémoire des uns et des autres, Stéphane Le Douret.

06:53Ça, moi, je trouve ça formidable.

06:55Je vous mets en exemple.

06:57Il y a combien ?

06:58Plus de 360 maisons à protéger, non ?

07:02C'est ça ?

07:03Oui.

07:04Donc, 366 maisons, et on a une station d'épuration aussi,

07:07qu'on va devoir déconstruire et délocaliser,

07:10parce que la station d'épuration, si on a de l'eau de mer qui rentre dedans,

07:13en fait, c'est les tuyaux qui vont refouler, ce qui n'est pas très agréable.

07:17Et donc, en plus, pour protéger les autres maisons,

07:19on est obligé de construire deux digues rétro-littorales,

07:23une de 600 mètres et une de 800 mètres de long,

07:26de façon à ce que, le cas particulier de Léance,

07:29il y a un marais avec un étang,

07:33c'est que quand l'eau de mer va rentrer,

07:35il y avait sept maisons qui se retrouvaient automatiquement sous l'eau,

07:39c'est que la vague puisse se dissiper dans l'étang et repartir.

07:42Et donc, les autres maisons, on les protège avec une autre digue

07:46qu'on construit dans les terres,

07:48enfin, deux autres digues,

07:49pour faire en sorte que les autres habitants puissent continuer à habiter là,

07:54mais avec un risque quand même recul du trait de côte

07:57qu'on est en train d'analyser,

07:58on est en train de faire une cartographie.

07:59Parce que les scientifiques nous disent aujourd'hui

08:02que ça va être 4 degrés et 1 mètre à 1,10 mètre d'élévation du niveau de la mer.

08:06Donc, effectivement, ça a des conséquences très lourdes.

08:11Oui, évidemment.

08:12Mais alors, on est un peu les premiers,

08:14on est un peu ce que j'appelle les poissons pilotes sur l'affaire.

08:17Oui.

08:17Puisque la faute sur mer,

08:18on a détruit une fois que le sinistre avait eu lieu.

08:21Le signal en Gironde,

08:23on a détruit parce que l'immeuble se retrouvait sur la plage.

08:26Et nous, en fait, on est en train d'anticiper,

08:29on fait de la prévention de risque,

08:31ce qui va se passer dans les 10 prochaines années.

08:33C'est formidable.

08:35Et je suis très content de vous avoir reçu, Stéphane Ledoiret,

08:38parce que quand on vit à l'intérieur des terres,

08:41on ne se préoccupe pas de ça.

08:42Et on devrait cette érosion

08:45et le réchauffement climatique,

08:46évidemment,

08:47qui entraîne une montée des eaux,

08:49une poussée des océans,

08:51des mers et des océans,

08:53et qui entraîne l'érosion.

08:54Merci Stéphane Ledoiret

08:55d'avoir été avec nous ce matin sur l'antenne.

08:58Merci vraiment.

08:59Sur l'antenne de Sud Radio.

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