00:00Le quart d'heure américain tout de suite sur Smartboost, on est ravi d'accueillir, de retrouver Pierre-Yves Dugas.
00:09Pierre-Yves, bonjour.
00:11Bonjour Fabrice.
00:13Avec vous dans un instant, on va voir si les pessimistes se trompaient, quels sont les arguments des optimistes à Wall Street.
00:18Mais Pierre-Yves, je voudrais revenir sur ce dont on vient de parler en plateau il y a quelques instants avec nos invités,
00:22ce fameux Taco Trade, encore un acronyme.
00:25Est-ce qu'on en parle aussi du côté des médias US ?
00:30Oui, oui, on en parle.
00:31On en parle.
00:31D'abord, c'est évidemment une double entente, puisque tacos, ça veut dire taco, tacos,
00:38cette espèce de mini crêpe croustillante dans laquelle on met un petit peu n'importe quoi dans les restaurants pseudo-mexicains.
00:47Ah, vous nous donnez ça déjà.
00:48Donc, voilà.
00:50Donc, Trump always chickens out.
00:55Ce qu'on pourrait traduire Trump est une poule mouillée, si on veut garder l'image du poulet, l'idée étant bien entendu qu'il y a probablement de l'argent à perdre.
01:07Si l'on vend dès que Donald Trump annonce d'énormes droits de douane, parce que 48 heures plus tard, il va les retirer et le marché va rebondir.
01:13Ça va marcher tant que ça va marcher.
01:19Faut-il en faire une pratique systématique de trading ?
01:23Je pense que c'est dangereux, surtout, surtout depuis ce que l'on observe depuis 24 heures, avec ce rebond de la dispute entre Washington et Pékin.
01:34Ces accusations américaines, selon lesquelles l'accord du 11 mai serait violé par les Chinois, la réponse assez forte des autorités pékinoises.
01:46Et cette soi-disant conversation téléphonique qui devait avoir lieu entre le président Trump et le président Xi, dont on ne connaît toujours pas la date et dont on se demande si elle aura vraiment lieu, nous ne l'oublions pas.
02:01Dans le passé, très souvent, Donald Trump a annoncé qu'il était sur le point de s'entretenir directement avec son ami, le président Xi, et les choses ne se sont pas matérialisées.
02:11Et ça, c'est pour TACO. Rappelons que TACO a des cousins. Il y avait TINA, qui était très populaire au moment où la réserve fédérale pratiquait l'assouplissement quantitatif,
02:24ce qui avait écrasé complètement les rendements obligataires. Et donc, there is no alternative to stocks.
02:30Il n'y a pas d'alternative à l'achat d'action, puisque les obligations ne rapportent rien.
02:34Et puis, il y a également le fameux autre cousin, FOMO. FOMO, Fear of Missing Out.
02:43La peur de se retrouver sur le quai de la gare alors que le train est parti et que le marché haussier s'est envolé.
02:51Donc, tous ceux qui ont tendance à vendre trop tôt se trouvent a posteriori des raisons de le regretter.
02:56Pierre-Yves, on s'intéresse justement aux arguments des optimistes à Wall Street, qui disent que cette économie américaine,
03:05elle pourrait résister à la guerre commerciale et peut-être même en sortir renforcée. Expliquez-nous.
03:11Alors, Fabrice, moi, ce qui me frappe, c'est le caractère extrêmement négatif et extrêmement pessimiste de toute la couverture de presse
03:19relative aux signaux donnés par l'économie américaine ou donnés par des sondages relatifs à l'économie américaine depuis six mois.
03:28Et ce contraste entre les données réelles, effectives du comportement des consommateurs, de l'investissement, de l'embauche,
03:36qui sont nettement moins dramatiques. Il est clair, je l'ai déjà dit et je le redis,
03:43la presse américaine à 99% souhaite que Donald Trump échoue et la presse américaine a décidé systématiquement,
03:51non sans raison, de souligner tout ce qui est dangereux, dramatique, dans les initiatives radicales et insensées,
03:59bien souvent, qui sont prises par la Maison-Blanche. Dans ce contexte, cet extrême pessimisme peut faire oublier certaines bonnes nouvelles.
04:08L'emploi, pour le moment, on va le vérifier vendredi prochain, l'embauche résiste bien.
04:16On n'est pas très loin de 200 000 créations nettes d'emploi tous les mois.
04:20L'inflation ne s'est pas envolée. La consommation s'affaiblit, mais pas dramatiquement.
04:30L'orage est peut-être imminent, mais ça fait maintenant quatre à cinq mois qu'on nous le dit et il n'a toujours pas éclaté.
04:36Alors, cela ne veut pas dire qu'en juin et en juillet, les données solides de hard data relatives aux agrégats américains
04:46ne vont pas se détériorer fortement et que les cassandres auront raison.
04:50Mais pour le moment, sur le fond, les signaux effectivement donnés par la conjoncture ne sont pas dramatiques.
04:56Si je prends, pour exemple, l'indice de la Réserve fédérale d'Atlanta,
05:01qui cherche à mesurer en temps réel ce que pourrait être la progression du PIB avec son indicateur GDP Now,
05:09ce matin, la fête d'Atlanta nous prédit un taux de croissance en rythme annuel pour le second trimestre de 2,2%.
05:18Ça n'est pas si mauvais que cela.
05:20Il y a d'autres raisons, si l'on veut absolument trouver des arguments positifs d'espérer et de croire que le pire est peut-être passé.
05:29Le principal tient au fait que le vent semble tourner dans ses initiatives radicales de Donald Trump
05:35parce que le mur très solide du contre-pouvoir de la justice américaine est en train de faire des bosses sur la tête de la Maison-Blanche,
05:45en particulier avec cette décision de la Cour de commerce international de New York
05:53d'invalider le gros des mesures douanières punitives annoncées début avril.
06:00Effectivement. C'est vrai qu'on a l'impression qu'on disait tout à l'heure qu'on avait un Trump omnipotent
06:05qui pouvait décider de tout de manière complètement unipersonnelle.
06:09Il est un petit peu rattrapé en ce moment.
06:11Ça se complique pour lui sur plusieurs fronts, fronts commerciaux, fronts budgétaires, fronts fiscales
06:15et donc cette décision de la Cour de commerce international.
06:19Oui, on a envie de dire qu'on n'est pas dans le secret des dieux,
06:23mais il aurait dû écouter ses services, c'est-à-dire que les responsables politiques
06:29qui ont été nommés par Donald Trump depuis le 20 janvier et qui dirigent,
06:34beaucoup d'entre eux n'ont pas encore été confirmés d'ailleurs par le Sénat,
06:37et qui dirigent ou vont diriger les agences fédérales américaines,
06:44n'ont pas écouté les experts du commerce qui leur ont dit
06:47« Attention, cette loi de 77 sur les mesures d'urgence que l'on peut prendre comme ça en claquant du doigt
06:54pour imposer des droits de doigt massifs à qui l'on veut,
06:58sans avoir à justifier de la réalité de cette urgence,
07:01cette loi est probablement d'une constitutionnalité douteuse
07:05et il y a de fortes chances que son invalidité soit confirmée, mi-juin peut-être,
07:12car on sait que la Cour d'appel a demandé aux plaignants,
07:17les importateurs qui s'estiment victimes de ces droits de doigtes punitifs,
07:21d'une part, de rendre ces conclusions le 5 juin
07:25et au gouvernement américain, d'autre part, de les rendre le 9 juin
07:29pour une décision qui interviendra quelques jours plus tard.
07:32Cela dit, l'orage de la guerre commerciale n'est pas passé,
07:35le président Trump dispose de toute une boîte à outils de mesures protectionnistes
07:42et de lois qu'il peut invoquer pour faire de la protection.
07:45Il l'avait fait au cours de son premier mandat
07:47avec la fameuse section 301 de la loi commerciale de 1974.
07:52Il peut invoquer la section 232
07:54et il peut même aller jusqu'à invoquer la loi de 1930,
07:59celle qui avait contribué à la crise économique mondiale,
08:03le fameux Smoot-Horley,
08:06qui lui permet d'imposer des droits de doigt
08:08à des pays qui font de la discrimination à l'égard des produits américains
08:11jusqu'à 50%.
08:13Donc, il y a des raisons de croire que l'orage peut encore arriver, oui.
08:17En tout cas, il y en a un qui a disparu du paysage,
08:20c'est le fameux Elon Musk qui avait défrayé la chronique,
08:23qui devait faire des coupes sombres et faire beaucoup d'économies.
08:26Finalement, il est retourné à ses affaires peut-être plutôt prévues.
08:30Pierre-Yves ?
08:31Moi, j'ai un faible pour Elon Musk.
08:33Je trouve que le personnage est extrêmement intéressant,
08:37même s'il y a beaucoup de bêtises dans ce qu'il fait,
08:40il y a beaucoup d'outrances, il y a beaucoup d'erreurs,
08:42il y a beaucoup de mauvaises appréciations de sa part
08:44sur la manière dont on peut faire avancer les choses à Washington.
08:48Il a fait du mal à la cause de la réduction des dépenses publiques
08:52en allant beaucoup trop fort et en faisant n'importe quoi,
08:54et en misant de manière assez méchante
08:56sur la carte de la démoralisation des fonctionnaires américains.
09:00Mais en tant que journaliste, je vous assure,
09:02si vous posez une question à Elon Musk,
09:04vous allez avoir une vraie réponse de la part d'un vrai individu
09:07qui n'a pas une langue de bois et qui dit vraiment ce qu'il pense.
09:10Et ça change tellement, tellement de la norme des super milliardaires américains
09:15que quelque part, je considère qu'Elon Musk a fait avancer les choses.
09:19Alors il y a des gens au Sénat qui jugent que le Doge, dont l'activité continue,
09:25même si elle n'est plus sous la houlette d'Elon Musk,
09:28que le Doge doit poursuivre sa tâche
09:31et qu'il faut suivre les exemples qui ont été avancés par Elon Musk
09:37pour ligne par ligne, voir dans toutes les dépenses de l'oncle Sam,
09:42ce qui peut être supprimé ou ce qui ne l'est pas.
09:44C'est un des arguments de Ron Johnson, le sénateur du Wisconsin,
09:52qui fait partie de ces trois ou quatre sénateurs
09:55qui sont très réticents à l'idée d'adopter cet énorme paquet fiscal
09:59qui a été adopté par la Chambre des représentants
10:02et qui reprend l'essentiel des généreuses promesses du président Trump.
10:07En tout cas, le président Trump, on le voit,
10:09qui a peut-être rattrapé en ce moment,
10:11c'est une grande démocratie, par des forces de rappel,
10:14on l'a peut-être oublié,
10:16mais les institutions sont là pour encadrer quand même
10:18la fonction présidentielle et les fameux beers
10:21qui ont été passés peut-être trop rapidement.
10:24Oui, il y a des contre-pouvoirs.
10:27Jusqu'à présent, ils se sont manifestés en appel
10:32ou par des mesures d'urgence,
10:34mais in fine, l'ultime contre-pouvoir sera,
10:37dans deux ou trois cas qui vont faire jurisprudence,
10:40les décisions que la Cour suprême sera amenée à prendre.
10:45Et la Cour suprême peut faire deux choses,
10:48soit tranchée en faveur d'une interprétation restrictive
10:51des pouvoirs du président dans toutes sortes de domaines,
10:54que ce soit le domaine commercial,
10:55le domaine de l'immigration,
10:57le domaine de la réforme de la fonction publique,
10:58ou alors elle peut, de manière plus perverse,
11:03s'abstenir de se prononcer en jugeant que ce qui a été tranché en appel
11:07et qui serait conforme à ceux qui veulent brider Donald Trump dans sa croisade,
11:15jugeant qu'il n'est pas nécessaire d'en dire plus
11:18et que le processus d'appel a joué son rôle.
11:20Merci en tout cas Pierre-Yves Dugas,
11:23je rappelle que vous êtes notre correspondant américain,
11:26voilà, pour ce quart d'heure américain,
11:27c'est tous les lundis dans Smart Bourse.
11:30Cette édition de Smart Bourse touche à sa fin,
11:33merci de nous avoir suivis,
11:34on continue bien évidemment demain,
11:36demain sera avec Nicolas Pagné,
11:37qui va voir lundi prochain,
11:39quant à moi je vous retrouvez vendredi.
11:40Vendredi, excellente soirée à tous et à très bientôt.