- 20/05/2025
DB - 20-05-2025
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00:00:00Un soir de l'été dernier,
00:00:29chez la baronne de Mascramy,
00:00:32une des femmes de Paris qui aime le plus l'esprit comme on en avait autrefois
00:00:36et qui ouvre les deux bâtons de son salon,
00:00:39un seul suffirait,
00:00:41au peu qui en reste parmi nous.
00:00:44Est-ce que dernièrement l'esprit ne s'est pas changé en une bête à prétention
00:00:48qu'on appelle l'intelligence ?
00:00:52Je ne sais pas de quel point on était partis pour arriver là,
00:00:55mais quand j'entrais, on parlait romans.
00:00:58Mais c'est de l'histoire,
00:01:00toujours plus ou moins des faits souvenus, modifiés,
00:01:03arrangés selon l'imagination,
00:01:05mais restant dans la vérité de la nature.
00:01:09Du reste, il fallait qu'on eût déjà beaucoup causé sur ce sujet,
00:01:12car les visages avaient cette intensité de physionomie
00:01:18qui dénote un intérêt pendant longtemps excité.
00:01:29Les plus beaux romans de la vie
00:01:32sont les réalités,
00:01:34les faits,
00:01:36et l'esprit.
00:01:38Les réalités,
00:01:40les faits,
00:01:42et l'esprit.
00:01:44Les réalités,
00:01:46les faits,
00:01:48et l'esprit.
00:01:50Les réalités,
00:01:52les faits,
00:01:54et l'esprit.
00:01:56Les réalités,
00:01:58sont les réalités
00:02:00qu'on a touchées du coude ou même du pied en passant.
00:02:04J'ai vu dans mon adolescence,
00:02:07non, vu ce n'est pas le mot,
00:02:09j'ai deviné,
00:02:12pressenti,
00:02:14un de ces drames cruels,
00:02:16terribles,
00:02:18qui ne se joue pas en public,
00:02:20quoique le public en voit les acteurs tous les jours.
00:02:24Une de ces sanglantes comédies, comme disait Pascal,
00:02:29mais représentée à huit clous,
00:02:33derrière une toile de manœuvre,
00:02:36le rideau de la vie privée et de l'intimité.
00:02:42Ce qui sort de ces drames cachés,
00:02:45étouffés,
00:02:47que j'appellerais presque
00:02:49à transpiration rentrée,
00:02:52est plus sinistre
00:02:54et d'un effet plus poignant sur l'imagination et sur le souvenir
00:02:58que si le drame tout entier s'était déroulé sous vos yeux.
00:03:02Ce qu'on ne sait pas
00:03:04s'entuple l'impression de ce qu'on sait.
00:03:11Me trompe-t-je ?
00:03:13Mais je me figure que l'enfer,
00:03:16vu par un soupirail,
00:03:20devrait être plus effrayant
00:03:22que si d'un seul et planant regard on pouvait l'embrasser tout entier.
00:03:27Empêche-le, maman, de nous dire ces atroces histoires qui font frémir.
00:03:31Je me tairai si vous le voulez, mademoiselle Sybille.
00:03:33Sybille n'a pas la prétention, que je sache, d'imposer silence à mes amis.
00:03:38Si elle a peur, elle a la ressource de ceux qui ont peur.
00:03:42Elle a la fuite.
00:03:44Elle peut s'en aller.
00:03:49Eh bien, contez.
00:03:52Tenez, voyez.
00:03:54Nous écoutons tous.
00:03:59J'ai été élevé en province.
00:04:03Mon père habitait près d'une petite ville,
00:04:05qu'on reconnaîtra quand j'aurai dit qu'elle l'est,
00:04:09ou du moins qu'elle était, dans ce temps,
00:04:12la plus profondément et la plus férocement aristocratique de France.
00:04:16Or, de son sein,
00:04:18cette noblesse pure, comme l'eau des roches,
00:04:21ne voyait personne.
00:04:23Comment voulez-vous, disait-il, que nous voyions tous ces bourgeois
00:04:26dont les pères ont donné des assiettes au nom ?
00:04:31Ils se voyaient donc entre eux et ne voyaient qu'eux
00:04:35et quelques Anglais.
00:04:37Car les Anglais étaient attirés par cette petite ville
00:04:39et qu'il leur appelait certains endroits de leur comté.
00:04:42Il les met pour son silence, pour sa tenue rigide,
00:04:45pour l'élévation froide de ses habitudes.
00:04:49Ici, la démarcation était si profonde,
00:04:53si épaisse, si infranchissable
00:04:56entre ce qui était noble et ce qui ne l'était pas,
00:04:59que toute lutte entre la noblesse et la rupture
00:05:02était impossible.
00:05:04La seule chose qui eut,
00:05:06je ne dirais pas la physionomie d'une passion,
00:05:09mais enfin qui ressembla à du mouvement,
00:05:12à du désir, à de l'intensité de sensations.
00:05:16Dans cette société singulière
00:05:18où les jeunes filles avaient 80 ans d'ennui,
00:05:21dont leurs âmes limpides et introublées,
00:05:25c'était le jeu,
00:05:27la dernière passion des âmes usées.
00:05:32Le ouiste qu'ils avaient jeté pour le combler
00:05:35dans l'abîme sans fond de leurs jours vides.
00:05:38Ainsi, chez Mme de Beaumont,
00:05:40il y avait la partie du marquis de Saint-Alban
00:05:43qui était l'événement de chaque journée.
00:05:55M. Harford est en retard, Mme de Beaumont.
00:05:58Et chez vous ?
00:05:59Quoi d'étonnant, mon cher docteur.
00:06:01Il est anglais.
00:06:02Mais c'est un joueur de la grande espèce.
00:06:04Saint-Alban lui pardonnerait les plus éminentes vertus.
00:06:07Pour un mot qu'il répète sans cesse.
00:06:09Le premier bonheur est de gagner au jeu.
00:06:12Le second est d'y perdre.
00:06:14Ah, c'est avoué.
00:06:16Docteur, c'est un peu inattendu.
00:06:21Mon jeu est assez faible, puis j'entends le Descartes.
00:06:24Votre faiblesse me convient. Jouez ainsi.
00:06:26Je joue au carreau.
00:06:38Herminie du Tremblay de Stasville, vous dormez ?
00:06:41Je m'ennuie, Ernestine.
00:06:43Vous êtes chez ma mère.
00:06:49M. Harford !
00:07:08Je suis en retard.
00:07:10Me permettrez-vous, cependant, de vous présenter un écossais de mes amis.
00:07:14M. Marmor de Carcoel,
00:07:16qui m'est tombé à la manière d'une bombe pendant mon dîner.
00:07:19Oui, oui, oui.
00:07:20Et qui est le meilleur joueur de huiste des Trois-Royaux.
00:07:22Certainement.
00:07:24Comtesse du Tremblay de Stasville.
00:07:26Madame.
00:07:37...
00:07:47...
00:07:57...
00:08:15Honneur !
00:08:17...
00:08:26Honneur !
00:08:31Honneur !
00:08:56...
00:09:25...
00:09:29Slam !
00:09:31Dix fiches.
00:09:46Regardez, Ernestine, comme cet écossais donne.
00:09:56C'est la difficulté vaincue dans le mauvais ton.
00:09:59Le mauvais ton est vainqueur.
00:10:03Dur jugement pour une si jeune demoiselle.
00:10:07Mais avoir bon ton est plus pour cette jolie tête-là
00:10:13que d'avoir l'esprit de Voltaire.
00:10:15Honneur sur honneur !
00:10:17Elle aura manqué sa destinée, mademoiselle de Beaumont.
00:10:20Elle mourra de ne pas avoir été la caméra mailleure de sa vie.
00:10:24La caméra mailleure d'une reine d'Espagne.
00:10:37Slam ! Dix fiches.
00:10:39Plus quatre fiches de robes roses.
00:10:42...
00:10:51Tout à l'heure !
00:10:53Non.
00:10:55Un verre d'eau, je vous prie.
00:11:12...
00:11:27Il se fait tard !
00:11:37Slam ! Dix fiches.
00:11:43Mais c'est le dieu du Slam que se carte-coëlle.
00:11:47Arrangez-vous pour qu'il ne nous quitte pas de si tôt.
00:11:50Je le retiendrai.
00:12:03Quelle beau parti !
00:12:04Des enfants élevés, des yeux admirables, la bouche très belle.
00:12:07Tu es d'une fois la taille, mais peu remarquable.
00:12:10Et qui est beaucoup couverte.
00:12:12Par la vue, j'ai quatre-vingt mille livres de rente.
00:12:15Heureusement.
00:12:17L'amant que pourrait avoir madame de Beaumont serait aveugle.
00:12:21Le saviez-vous ?
00:12:23Sur ma parole, c'est bien ce que vous dites, cette comtesse de Stassville.
00:12:29Vous l'avez connue.
00:12:31Vous savez vite compte si je surfais d'un mot la vérité.
00:12:34C'est calqué à la vitre votre portrait.
00:12:37Je l'ai connue à peu près du temps de votre histoire.
00:12:40Elle venait à Paris tous les hivers pour quelques jours.
00:12:44Je la rencontrais chez la princesse de Courtenay, dont elle était un peu parente.
00:12:52C'était de l'esprit servi dans sa glace.
00:12:55Une femme froide à vous faire tousser.
00:12:59Excepté ces quelques jours passés par hiver à Paris,
00:13:04la vie de la comtesse du Tremblay de Stassville était réglée
00:13:07comme le papier de cette ennuyeuse musique
00:13:10qu'on appelle l'existence d'une femme comme il faut en province.
00:13:15Et Marmont de Garcoelle ?
00:13:17Son séjour durera plusieurs années.
00:13:20Pardon de vous avoir interrompu.
00:13:22Je n'y prends pas garde.
00:13:24La comtesse était six mois de l'année au fond de son hôtel.
00:13:27Pendant les six autres mois,
00:13:29elle troquait ce fond d'hôtel pour un fond de château
00:13:32dans une belle terre qu'elle avait à quelques lieux de là.
00:13:35Jamais de spa, de plombières, de pyrénées.
00:13:38On ne la voyait point aux eaux.
00:13:40En province, quand une femme seule va prendre les eaux aussi loin,
00:13:46que ne croit-on pas ?
00:13:49Que ne soupçonne-t-on pas ?
00:14:03Merci, mon bon Marseille.
00:14:05Madame la comtesse est bien souffrante ?
00:14:07Non. Elle est de la race des animaux assemblants.
00:14:10Vous êtes bien discrète, docteur.
00:14:12Je ne la vois pas malade.
00:14:14Dieu vous entarde.
00:14:18Je vous en prie.
00:14:19Je vous en prie.
00:14:21Je vous en prie.
00:14:23Je vous en prie.
00:14:25Je vous en prie.
00:14:27Je vous en prie.
00:14:29Je vous en prie.
00:14:31Je vous en prie.
00:15:01Nous sommes bien bêtes de nous donner un tel tintouin
00:15:04pour savoir ce qu'il y a dans le fond de l'âme de cette femme.
00:15:07Probablement, il n'y a rien.
00:30:59Les amitiés des femmes sont des pelotes dans lesquelles elles piquent leurs aiguilles.
00:31:04Ou encore de ces jolies coupes d'agate ou de bronze que l'on met sur les cheminées
00:31:08et qu'on appelle, je crois, des huit fauches.
00:31:14Renoncer, c'est plus sage.
00:31:16Ces femmes-là sont comme des draperies.
00:31:18Il faut les attacher avec des clous et des marteaux.
00:31:21Après les blessures, ce que les femmes font le mieux, c'est de la charger.
00:31:28C'est bon.
00:31:58Madame.
00:34:58Cette odeur est insupportable.
00:35:00Quelle passion soudaine Madame de Tremblay a-t-elle pour ces fleurs?
00:35:03Je n'en sais rien.
00:35:06Mais dites-moi, je ne vois jamais M. de Carcoel au château de Stainsville.
00:35:10Docteur, dans notre société, où chacun plonge dans la vie de tous,
00:35:16on ne saurait prendre trop de précautions
00:35:18contre les inductions faciles à faire de ce qu'on voit à ce qu'on ne voit pas.
00:35:23La comtesse de Stainsville les prend,
00:35:25en n'invitant jamais Marmor dans son château
00:35:28et en ne le recevant ici à la ville que fort publiquement.
00:35:33Vous avez raison.
00:35:35Enfin, peut-être.
00:35:38Comment peut-être?
00:35:40Vous êtes son docteur. Elle est veuve, Hermine est charmante.
00:35:44Que veut dire ce peut-être?
00:35:47Rien.
00:35:50Vous souvenez-vous quand M. de Carcoel est arrivé?
00:35:53Il y a quatre ans.
00:35:55Si peu.
00:35:56Madame.
00:36:04Les enfants nous consolent de tous les chagrins,
00:36:07en attendant les épouvantables qu'ils ne manqueront pas de nous donner.
00:36:12Vous croyez-vous vraiment, Madame?
00:36:14De tout mon cœur.
00:36:20Jouerons-nous au whist ce soir?
00:36:22M. de Carcoel, vous ne pensez qu'au jeu.
00:36:24Aimer les petites choses, c'est aimer les petites gens.
00:36:50Fort bien, Madame.
00:36:52Je jouerai donc ailleurs,
00:36:54avec votre permission.
00:36:56Faites comme vous l'entendez.
00:36:59Retournez à vous communs au diable, à votre goût.
00:37:13Madame.
00:37:16Quelle surprise.
00:37:26C'est adorable.
00:37:29Merci.
00:38:15Abonnez-vous !
00:38:46Je n'en crois pas un mot.
00:38:48Je ne voudrais pas vous contredire, Madame.
00:38:50Mais la science, qui est la médecine,
00:38:52exige une grande rigueur.
00:38:54Dans une société comme celle du malheur,
00:38:57il est très difficile de trouver des gens réceptifs.
00:39:01Mon Dieu.
00:39:05Je ne peux pas.
00:39:07Je ne peux pas.
00:39:09Je ne peux pas.
00:39:11Je ne peux pas.
00:39:13Honnêtement, Martin,
00:39:15je pensais que ce serait mieux.
00:39:20Qui sait.
00:39:22Y avait peut-être, en tout cela, du bonheur pour elle.
00:39:26Je tés, docteur, sur la Comtesse de Stasseville,
00:39:29de ces bons regards physiologiques,
00:39:32comme vous en avez, vous autres médecins,
00:39:35et que les moralistes devraient vous empointer.
00:39:38qu'elle ne fût, en femme, une de ces organisations comme on en voit dans tous les règnes de la nature,
00:39:46qui, de préférence ou d'instinct, recherche le fond au lieu de la surface des choses.
00:39:58Un de ces êtres destinés à des cohabitations occultes, aimant le mystère jusqu'au mensonge.
00:40:07Et le mensonge pour le mensonge, comme on aime l'art pour l'art, comme les Polonais aiment les batailles.
00:40:13Vous le croyez, n'est-ce pas ? Et moi aussi.
00:40:16Je suis convaincu que pour certaines âmes, il y a le bonheur de la posture.
00:40:21Il y a une effroyable mais enivrante félicité dans l'idée qu'on ment et qu'on trompe,
00:40:26et dans la pensée qu'on se sait seul, soi-même, et qu'on joue à la société une comédie
00:40:31dont elle est dupe et dont on rembourse les frais de mise en scène par toutes les voluptés du mépris.
00:40:40Mais c'est affreux, ce que vous dites là.
00:40:42Oui, c'est affreux.
00:40:46Mais est-ce vrai ? Les natures, au cœur, sur la main, ne se font pas l'idée des jouissances solitaires de l'hypocrisie.
00:40:55De ceux qui vivent et peuvent respirer la tête placée dans un masque.
00:41:02Mais quand on y pense, ne comprenons-t-on pas que leur sensation est réellement la profondeur enflammée de l'enfer ?
00:41:12Or, l'enfer, c'est le ciel en creux.
00:41:18En creux ?
00:41:22Le mot diabolique, ou divin, appliqué jusqu'à l'intensité des jouissances,
00:41:31exprime la même chose, c'est-à-dire les sensations qui vont jusqu'au surnaturel.
00:41:40Madame de Staseville était-elle de cette race d'âmes ?
00:41:46Je ne l'accuse ni de la justifie.
00:42:09Je ne l'accuse ni de la justification.
00:42:12Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:15Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:18Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:21Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:24Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:27Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:30Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:33Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:36Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:39Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:42Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:45Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:48Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:51Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:54Je ne l'accuse ni de la justice.
00:42:57Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:00Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:03Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:06Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:09Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:12Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:15Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:18Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:21Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:24Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:27Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:30Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:33Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:36Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:39Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:42Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:45Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:48Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:51Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:54Je ne l'accuse ni de la justice.
00:43:57Je ne l'accuse ni de la justice.
00:44:00Je ne l'accuse ni de la justice.
00:44:03Je ne l'accuse ni de la justice.
00:44:06Je ne l'accuse ni de la justice.
00:44:09Je ne l'accuse ni de la justice.
00:44:12Je ne l'accuse ni de la justice.
00:44:15Je ne l'accuse ni de la justice.
00:44:17Oui, le roman était à cette vie correcte, irréprochable, réglée, moqueuse, froide
00:44:45jusqu'à la maladie où l'esprit semblait tout et l'âme rien. Il y était et la rongeait
00:44:51sous les apparences et la renommait comme les vers qui seraient au cadavre d'un homme
00:44:56avant qu'il ne fût expiré. Quelle abominable comparaison. Ma pauvre
00:45:00Sybille avait raison tout à l'heure de ne pas vouloir de votre histoire. Va vite te
00:45:05coucher. Bonsoir maman.
00:45:11Décidément, vous avez un vilain genre d'imagination ce soir.
00:45:22Voulez-vous que je m'arrête? Par exemple, est-ce que nous pouvons maintenant
00:45:26rester l'attention en l'air avec une moitié d'histoire?
00:45:29Ça serait trop fatigant. Et désappointant en plus. Ne serait-ce pas
00:45:34comme si un coiffeur, après vous avoir rasé un côté du visage, fermait tranquillement
00:45:39son rasoir et vous signifiait qu'il lui était impossible d'aller plus loin?
00:45:43Je reprends donc. J'étais dans le salon de madame de Staceville et quoique ce fût
00:45:50un jour solennel, la fête du roi, une Saint-Louis, toujours grandement fêtée par ses
00:45:55ultras de l'émigration qui avaient inventé le mot mystique de l'amour pur, vive le roi
00:46:01quand même. On ne faisait dans ce salon rien de plus que ce qu'on y faisait tous les
00:46:07jours. On y jouait. Je vous demande bien, pardon de vous parler de moi, c'est d'assez
00:46:12mauvais goût, mais il le faut. J'étais un jeune homme encore. Cependant, grâce à
00:46:23une éducation exceptionnelle, je soupçonnais plus des passions du monde qu'on en soupçonne
00:46:30d'ordinaire à l'âge que j'avais. J'étais donc chez madame de Staceville.
00:46:38Madame de Givre. Pardon? Enfin, madame de Staceville ne saura jamais quel impériau
00:46:47bouloir elle porte dans son sein de neige pondue et sur lequel, au moral, tout glisse
00:46:53comme sur le plus dur mamelon des glaces polaires. Et qu'est-ce qui brille? Et qu'est-ce
00:47:16qui tousse? C'est mon diamant. Et c'est ma fille. Mon Dieu, comme il est beau votre
00:47:25diamant, madame. Jamais je ne l'avais vu étincelé comme ce soir. Il forcerait les
00:47:30plus miaufles à le remarquer. Voulez-vous me permettre? Tiens, le soleil peut-être.
00:47:44Où avez-vous pris cet affreux stoup, ma chère enfant? Je ne sais pas, M. le Marquis, peut-être
00:48:08à me promener le soir dans les bois de Staceville. Que diables faites-vous là?
00:48:37Ne m'approchez pas. Restez où vous êtes. Vous me feriez trembler la main. Ce que je
00:48:48fais est plus difficile et plus dangereux que de tirer avec un pistolet qui pourrait
00:48:53crever. Depuis quand vous occupez-vous de chimie et sans des ressources contre les
00:49:20pertes ouïstes que vous composez? Je ne compose rien. Ce qui est là-dedans est une
00:49:31ressource contre tout. C'est le jeu de cartes biseauté avec lequel on est sûr de gagner
00:49:40la dernière partie contre le destin. Quelle espèce de poison? Ah, c'est le plus admirable
00:49:53des poisons indiens. Le respirer peut être mortel. Et de quelque manière qu'on l'absorbe,
00:50:08s'il ne tue pas immédiatement, vous ne perdez rien pour attendre. Son effet est aussi sûr
00:50:19qu'il est caché. Il attaque lentement, presque languissamment, mais infailliblement la vie
00:50:35dans ses sources, en les pénétrant et en développant au fond des organes sur lesquels
00:50:44il se jette. De ces maladies connues de tous et dont les symptômes familiers à la science
00:50:56dépayseraient le soupçon et répondraient à l'accusation d'empoisonnement, si une telle
00:51:12accusation pouvait exister. On dit aux Indes que les fakirs mendiants le composent avec des
00:51:23substances extrêmement rares qu'eux seuls connaissent et qu'on ne trouve que sur les
00:51:28plateaux du Tibet. Il dissout les liens de la vie, plus qu'il ne les rompt. Si vous saviez
00:51:45ce que j'ai risqué pour obtenir ce flacon d'une femme qui disait m'aimer. J'ai un ami,
00:51:54comme moi, officier dans l'armée anglaise et revenu comme moi des Indes où il a passé sept
00:51:59ans. Il a cherché ce poison avec le désir furieux d'une fantaisie anglaise. Et plus tard,
00:52:07quand vous aurez vécu davantage, vous comprendrez ce que c'est. Il n'a jamais pu en trouver. De
00:52:15désespoir, il m'a écrit d'Angleterre et il m'a envoyé une de ses bagues en me suppliant d'y
00:52:23verser quelques gouttes de ce nectar de la mort. Voilà ce que je faisais quand vous êtes entrés.
00:53:45J'espère que vous avez apprécié cette vidéo, si c'est le cas, n'hésitez pas à vous abonner à la chaîne,
00:53:54à la partager avec vos amis, à vous abonner à la chaîne, à vous abonner à la chaîne et à vous abonner à
00:54:01la chaîne pour ne manquer aucune de mes vidéos. Merci et à bientôt.
00:55:01En fin de compte, qu'y avait-il dans tout cela qui fût de nature à m'émouvoir si fort et à se graver dans ma mémoire
00:55:28comme une eau forte, car le temps n'a pas effacé un seul délignement de cette scène. Tout cela m'est resté et vous allez comprendre pourquoi.
00:55:43Je quittais mon pays et ce fut par les lettres de mes parents que j'appris la mort de Mademoiselle Herminie de Stasville.
00:55:54Victime d'une maladie de langueur dont personne ne s'était douté qu'à la dernière extrémité et quand la maladie avait été incurable.
00:56:07Je n'osais pas faire une seule question sur la perte soudaine de cette jeune fille, j'y pensais d'une manière trop tragique pour en parler à qui que ce fût.
00:56:18Après quelques années d'absence, mon premier soin fut de demander ce qu'était devenu M. Marmor de Carcoel.
00:56:27On me dit qu'il était retourné dans son pays, aux Indes, sur un ordre de son gouvernement.
00:56:39La personne qui me dit cela était le chevalier de Tarsis.
00:56:50Et Madame du Tremblay de Stasville?
00:56:58Vous saviez donc quelque chose?
00:57:03Mais non, non, je ne savais rien.
00:57:10Elle est morte de la poitrine comme sa fille, un mois après le départ de ce diable de Marmor de Carcoel.
00:57:25Pourquoi cette date? Pourquoi me parlez-vous de Marmor de Carcoel?
00:57:34C'est dans la vérité que vous ne savez rien.
00:57:40Eh bien, mon cher, il paraît qu'elle était sa maîtresse.
00:57:45Du moins, elle l'a-t-on fait entendre ici quand on en parlait à voix basse.
00:57:49À présent, on n'ose plus en parler.
00:57:57C'était une hypocrite de premier ordre que cette comtesse.
00:58:01Elle était comme monnée blonde ou brune, elle était nice là, nice là.
00:58:09Aussi pratiquait-elle le mensonge au point d'en faire une vérité,
00:58:13tant elle était simple et naturelle, sans effort et sans affectation en tout.
00:58:21À travers une habileté si profonde qu'on a su que depuis bien peu de temps que c'en était une,
00:58:31il a transpiré des bruits,
00:58:33bientôt étouffés par la terreur qui les transmettait.
00:58:38À les entendre, cet Écossais qui n'aimait que les cartes,
00:58:45n'a pas été seulement l'amant de la comtesse,
00:58:56laquelle ne le recevait jamais chez elle à la campagne comme tout le monde.
00:59:00Et mauvaise comme le démon, lui,
00:59:02campait son épigramme comme à pas un de nous quand l'occasion s'en présentait.
00:59:08Mon Dieu, ceci ne serait rien s'il n'y avait que cela.
00:59:12Et le billet dit-on que le dieu du slam avait fait slam toute la famille.
00:59:21Cette pauvre Herminie l'adorait en silence.
00:59:25Cette pauvre Herminie l'adorait en silence.
00:59:30Mademoiselle Ernestine de Beaumont vous le dira si vous voulez,
00:59:34c'était comme une fatalité.
00:59:37Lui, l'aimait-il, aimait-il la mère ?
00:59:45Les aimait-il toutes les deux ?
00:59:48Ne les aimait-il ni l'une ni l'autre ?
00:59:51T'aurait-il seulement la mère bonne pour entretenir sa mise au jeu ?
00:59:56Qui sait ? Ici, l'histoire est fort obscure.
01:00:02Tout ce qu'on certifie, c'est que la mère,
01:00:06dont l'âme était aussi sèche que le corps,
01:00:11s'était prise d'une haine pour sa fille,
01:00:15qui n'a pas peu contribué à la faire mourir.
01:00:20On dit cela, mais qui peut le savoir ?
01:00:24Carcole n'était pas un fan.
01:00:26Ce n'est pas lui qui se serait permis des confidences.
01:00:29On n'a jamais rien pu savoir de sa vie.
01:00:31Il n'aurait pas commencé d'être confiant ou indiscret
01:00:35à propos de la comtesse de Stasville.
01:00:39Non.
01:00:42Les deux hypocrites faisaient la paire.
01:00:46Il est parti comme il est venu.
01:00:48Sans qu'aucun de nous ait pu dire qu'il était autre chose qu'un joueur.
01:00:57Mais si parfaite de taule et de tenue
01:01:00que fût dans le monde l'irréprochable comtesse,
01:01:04les femmes de chambre pour lesquelles il n'est pas d'héroïne,
01:01:08ont raconté qu'elles s'enfermaient avec sa fille
01:01:11et qu'après de longues heures de tête à tête,
01:01:14elles en sortaient plus pâles l'une que l'autre.
01:01:19La fille toujours davantage
01:01:22et les yeux abîmés de pleurs.
01:01:28Et vous n'avez pas d'autres détails et d'autres certitudes, chevalier.
01:01:33Et vous n'ignorez pas que ce sont des propos de femmes de chambre.
01:01:39On en saurait probablement davantage par Mlle de Beaumont.
01:01:45Mlle de Beaumont détestait la comtesse.
01:01:49Ou si la survivante ne parle-t-elle de la morte qu'avec des yeux imprécatoires
01:01:54et des réticences perfides.
01:01:57Il est sûr qu'elle veut faire croire les choses les plus atroces.
01:02:07Et qu'elle n'en sait qu'une, qui ne l'est pas.
01:02:12L'amour d'Herminie pour Carcoyel.
01:02:19Hein ?
01:02:30Ce n'est pas savoir grand chose, chevalier.
01:02:34Si l'on savait toutes les confidences que se font les jeunes filles entre elles,
01:02:39on mettrait sur le compte de l'amour la première réverie venue.
01:02:42On vous avouerait qu'un homme comme ce Carquoise avait bien tout ce qui fait rêver.
01:02:49C'est vrai. Mais on a plus que les confidences de jeunes filles.
01:02:58On a assez remarqué dans notre société que Mme de Stetsville, qui n'avait jamais rien aimé, pas plus les fleurs que tout le reste, car je n'ai fi de pouvoir dire qu'elle faisait les goûts de cette femme-là,
01:03:11portait toujours vers la fin de sa vie un bouquet de Réséda à sa ceinture.
01:03:17Et qu'en jouant au huiste, elle en rompait les tiges pour les mâchonner.
01:03:24Si bien qu'un jour, Mlle de Beaumont demanda à Herminie depuis quand sa mère était herbivore.
01:03:31Je m'en souviens.
01:03:32Et bien, comme vous le savez, ces Réséda venaient du magnifique jardinière que Mme de Stetsville avait dans son salon.
01:03:39Oh, le temps n'était plus où les odeurs lui faisaient mal.
01:03:46On avait failli la tuer avec un bouquet de tubereuses dont Herminie est née, nous contait-elle amboureusement.
01:03:54A présent, elle les aimait, les recherchait avec fureur.
01:03:59Son salon asphyxiait comme une serre dont on n'a pas encore soulevé les litrages à midi.
01:04:05A cause de cela, deux ou trois femmes n'allaient plus chez elle.
01:04:08C'était là des changements, mais on ne les expliquait pas, la maladie, par les nerfs.
01:04:16Une fois morte, il a fallu fermer son salon, on a voulu mettre ces beaux Réséda en pleine terre.
01:04:23Et on a trouvé dans la caisse, devinez quoi.
01:04:39Le cadavre d'un enfant qui avait vécu.
01:04:55D'où venait cet enfant, de qui était-il ?
01:05:02Était-il mort de mort naturelle ? L'avait-on tué ?
01:05:08Qui l'avait tué ?
01:05:11Voilà ce qu'il était impossible de savoir.
01:05:15Et ce qui fait fermer bien bas des suppositions épouvantables.
01:05:21Vous avez raison, chevalier.
01:05:24Ce sera toujours un mystère.
01:05:27Et même qu'il sera bon d'épaissir, jusqu'au jour où l'on n'en soufflera plus un seul mot.
01:05:38En effet.
01:05:44Il n'y a que deux êtres au monde qui savent réellement ce qu'il en est.
01:05:49Et il n'est pas probable qu'ils le publient.
01:05:54Et il n'est pas probable qu'ils le publient.
01:05:58L'un est ce marmor de Carcoyel parti pour les grandes Indes.
01:06:02La malle pleine de l'or qu'il nous a gagné.
01:06:06On ne le reverra jamais.
01:06:09L'autre.
01:06:11L'autre ?
01:06:14L'autre.
01:06:17Il y a encore moins de danger pour l'autre.
01:06:21C'est le confesseur de la Comtesse.
01:06:24Vous savez, ce gros abbé de Trudène.
01:06:27Ils ont par parenthèse nommé dernièrement au siège de Bailleux.
01:06:31Chevalier, vous êtes trompé.
01:06:35Cette femme naturellement cachée.
01:06:39Que vous appelez hypocrite.
01:06:41Parce qu'elle a mis une énergique volonté par-dessus ses passions.
01:06:46Peut-être pour en redoubler l'orage de bonheur.
01:06:51Cette femme est morte comme elle a vécu.
01:06:54La voix du prêtre s'est brisée contre cette nature impénétrable.
01:07:00Qui a emporté son secret.
01:07:03Si le repentir le lui fait verser dans le cœur du ministre,
01:07:08la miséricorde éternelle,
01:07:11on n'aurait rien trouvé dans la jardinière du salon.
01:07:16Quel aimable dessous de carte ont vos parties de Ouist.
01:07:20C'est très vrai ce que vous disiez.
01:07:24A moitié montré, il fait plus d'impression
01:07:30que si l'on avait retourné toutes les cartes
01:07:34et que l'on eût vu tout ce qu'il y avait dans le jeu.
01:07:39C'est le fantastique de la réalité.
01:07:43Il en est également de la musique et de la vie.
01:07:47Ce qui fait l'expression de l'une et de l'autre,
01:07:50ce sont les silences, bien plus que les accords.
01:07:58Vous m'avez gratté des fleurs que j'aimais.
01:08:13Voilà qui est fini. Je ne porterai plus de réséda.
01:11:14Autant de questions sans réponse absolument sûre
01:11:18comme dans l'existence.
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