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«Résister aux fake news» : Thomas Huchon est l'invité de Culture médias
Europe 1
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08/05/2025
Catégorie
🗞
News
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00:00
Vous écoutez Culture Média sur Europe 1, 9h31h avec Thomas Hill et votre invité ce matin Thomas.
00:05
Elvis n'est pas mort, les Illuminati dirigent le monde, la Terre est plate ou plane, comme vous voulez.
00:10
Voilà quelques-unes des fausses informations qui prospèrent sur les réseaux
00:13
et que vous nous aidez, Thomas Huchon, à déconstruire dans votre livre « Résister aux fake news ».
00:19
Alors d'abord, expliquez-nous en quoi est-ce que c'est grave que les gens pensent qu'on n'est jamais allé sur la Lune par exemple ?
00:25
En réalité, toutes les théories du complot nous amènent à une espèce de double croyance.
00:31
La première, c'est l'idée que défend la théorie du complot.
00:34
On ne serait pas allé sur la Lune, la Terre serait plate, les reptiliens gouverneraient le monde en secret, quoi que ce soit.
00:41
En fait, à chaque fois que vous croyez à l'une de ces choses-là, vous croyez systématiquement à une deuxième chose
00:47
qui est qu'il y a une organisation pour vous mentir sur ce sujet.
00:51
Qu'on nous ment.
00:51
Voilà, et que cette organisation, eh bien, elle dépasse tout ce que vous pourriez faire pour lutter contre elle.
00:59
C'est-à-dire qu'il y a une espèce de vision paranoïaque qui commence par...
01:04
Bah oui, on me ment sur l'actualité, mais si on vous ment sur l'actualité,
01:08
si on vous ment sur les choses très importantes qui sont discutées dans les radios, dans les télévisions,
01:13
eh bien, ça veut dire qu'on peut vous mentir sur tout.
01:14
Et en réalité, c'est là qu'il y a une forme de bascule entre un problème qui est individuel,
01:19
je crois quelque chose qui n'est pas vrai, et qui devient là quelque chose de collectif,
01:23
je crois qu'il y a une organisation dans la société pour me manipuler.
01:27
Et c'est cette deuxième partie-là qui, en réalité, nous pose un vrai problème,
01:30
parce qu'elle implique une vision du monde dans laquelle, bien souvent, la seule solution, elle est très radicale.
01:37
C'est-à-dire ?
01:37
Bah, c'est-à-dire que si vous pensez qu'il y a des choses absolument horribles qui sont faites,
01:41
qu'on ne vous le dit jamais, qu'on vous le cache et qu'il y a une organisation pour faire tout cela,
01:45
eh bien, ça provoque chez vous une volonté, peut-être, de solutionner ce problème.
01:50
Pour le solutionner, il n'y a que la violence.
01:52
En tout cas, il n'y a que quelque chose qui va renverser la table, d'une certaine manière.
01:57
Et donc, c'est là-dessus que ces théories-là, qui nous apparaissent parfois comme anodines,
02:02
parfois rigolotes, parfois fumeuses ou dingues,
02:06
eh bien, en réalité, elles peuvent avoir des conséquences très graves,
02:10
parce que la vision du monde que ça implique amène à des comportements individuels
02:15
qui peuvent sortir de ce que la société peut accepter.
02:18
C'est notre rapport au monde, c'est notre rapport aux faits,
02:21
à ce qui est un fait, à ce qui n'en est pas un.
02:24
Parce que le problème, c'est que quand on n'est pas d'accord sur les faits,
02:27
en fait, ça devient très compliqué de débattre.
02:29
On s'en est tous déjà rendu compte de ça.
02:30
Je crois qu'en fait, on a un petit peu, comment dirais-je,
02:35
on a un petit peu vécu avec l'illusion que la vérité était quelque chose qui s'imposait à nous.
02:41
Alors qu'en réalité, la vérité ne s'impose pas à nous.
02:44
Il y a des faits, et chacun d'entre nous construit sa vérité.
02:47
On construit notre vision du monde, vous l'avez dit, en fonction justement de notre vision du monde,
02:52
de nos idéologies, de nos croyances, de notre culture,
02:57
peut-être de nos émotions aussi un petit peu.
03:00
Et donc, tout ça, ça participe à une fabrication de ce qu'on appelait la vérité.
03:06
Mais en réalité, ce n'était pas la vérité.
03:09
Il y avait les faits qui étaient posés dans les grands médias,
03:12
et on en discutait tous.
03:13
On savait bien que tout n'était pas...
03:15
On avait tous un peu le sentiment que tout n'était pas vrai.
03:17
D'ailleurs, on avait peut-être le sentiment que quelque chose n'était pas vrai,
03:19
mais que n'était pas la même chose, en fonction de nos orientations.
03:22
Quand on regardait le JT, ou quand on écoutait une matinale,
03:25
et puis quand on lit un quotidien, c'est pareil.
03:28
Il y a différentes opinions qui s'expriment.
03:30
Mais il y a quand même deux choses qui différencient fondamentalement
03:34
les grands médias du reste de la production d'informations.
03:37
C'est un, une forme de déontologie, de rapport aux faits,
03:41
dans le traitement de l'information.
03:42
Et un deuxième truc qui est quand même très important,
03:45
qui est la responsabilité de la parole tenue.
03:47
Et c'est ça qui change profondément sur les réseaux sociaux.
03:50
On doit rendre des comptes.
03:51
Ben oui.
03:52
En tant que journaliste.
03:53
Si vous enfreignez les règles à votre micro sur Opin,
03:57
ou que vos invités le font,
03:59
vous aurez à rendre des comptes, déjà, à votre direction,
04:01
et ensuite, potentiellement, à des autorités, aux auditeurs,
04:05
et à des autorités de régulation.
04:06
Donc, il y a un système qui permet d'éviter que ça soit la foire d'empoigne en permanence.
04:12
Et ce système, il a sauté avec les réseaux sociaux.
04:14
Et avec, notamment, un événement dont vous parlez beaucoup dans votre livre,
04:18
Thomas Huchon, c'est le Covid.
04:20
Pour vous, c'est vraiment un cas d'école,
04:22
parce que tout était réuni, là, pour faire, en fait,
04:24
exploser les fausses infos, exploser les théories complotistes, aussi.
04:28
En fait, il y a plein de choses qui vont se retrouver dans une espèce de carrefour.
04:34
On sort, on est au début de l'année 2020,
04:37
on sort d'une période politique assez mouvementée,
04:39
il y a eu la crise des gilets jaunes,
04:41
il y a eu les réformes des retraites qui sont très mal passées,
04:44
il y a un mouvement social très important qui s'est développé,
04:47
qui est d'ailleurs assez différent entre les gilets jaunes et le mouvement des retraites.
04:50
Il y a une situation qui va être totalement nouvelle pour tous les Français.
04:54
On va être enfermés chez nous,
04:55
on va être coupés de nos relations sociales.
04:57
Donc, tout ce qui était peut-être une forme de modération dans nos opinions,
05:02
dans ce que nous croyons dans la discussion,
05:04
parce que la discussion avec les autres,
05:06
c'est aussi ce qui nous permet de forger nos opinions.
05:08
Là, on ne peut plus.
05:09
Et il y a un autre truc qui se fait,
05:11
c'est que tout est numérique.
05:13
Puisqu'on est enfermés chez nous,
05:15
et que notre seule manière d'accéder à l'information,
05:17
c'est bien souvent de passer par Internet et par les réseaux sociaux.
05:20
Et là, on va se rendre compte que,
05:23
finalement, quand on commence à toucher du doigt des choses qui ne sont pas vraies,
05:27
la machine va vous montrer des choses qui vont de plus en plus aller dans les fake news,
05:33
dans les théories du complot.
05:34
Et donc, on utilise souvent cette image,
05:37
vous voyez le film Alice au Pays des Merveilles ?
05:39
Il y a le trou du lapin.
05:42
Quand on rentre dans le trou du lapin, on n'arrive plus à en sortir.
05:44
Il y a un petit peu cette idée-là, c'est le rabbit hole,
05:47
comme disent les chercheurs américains.
05:49
Et bien, quand on rentre dans les théories du complot,
05:52
en passant par la mécanique d'Internet,
05:55
et la mécanique des algorithmes et de la recommandation des contenus,
05:58
et bien, en réalité, c'est très difficile d'en sortir.
05:59
Et c'était facile d'y plonger, parce qu'il y avait beaucoup de mystères aussi.
06:02
On ne savait pas tout, et d'ailleurs, on ne sait toujours pas tout.
06:06
Et c'est les théories qui étaient même jugées,
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peut-être complotistes,
06:10
comme l'idée que le virus du Covid viendrait d'une fuite de labos.
06:14
On revient dessus aujourd'hui.
06:15
Vous avez vu que la CIA ou les services secrets allemands
06:18
jugent que c'est probable.
06:19
Et ça, c'est assez ravageur,
06:20
parce que ça donne vraiment du grain à moudre aux complotistes.
06:22
Mais justement, je crois que le vrai problème,
06:24
c'est notre manière de communiquer sur les choses.
06:28
Quand il y a une forme d'incertitude,
06:29
il faut dire qu'il y a une forme d'incertitude.
06:32
Le problème auquel on a été confronté avec le Covid,
06:34
c'est que,
06:35
on pensait tous,
06:36
on parlait de la vérité en début de cette discussion,
06:39
là, on pensait tous que la science était établie.
06:41
En fait, c'est quelque chose qui, pour nous, était acquis.
06:44
La science, ça ne bouge pas.
06:46
C'est figé.
06:47
Et on sait comment on va faire.
06:48
Il y a une maladie,
06:49
et bien, on va trouver une solution.
06:51
En réalité, la science, ça ne fonctionne pas comme ça.
06:53
Et la science, c'est quelque chose qui fonctionne
06:55
de manière évolutive.
06:57
Et ce que l'on pensait il y a 20 ans sur telle maladie,
06:59
ça a peut-être évolué.
07:00
Ce qui nous pose problème,
07:02
c'est qu'il y a des discours souvent très péremptoires.
07:05
Qui ne sont pas souvent tenus par les gens
07:07
qui ont la meilleure connaissance du sujet.
07:10
Et qui vont derrière,
07:12
et bien, donner l'illusion
07:13
qu'il y a un changement de position.
07:15
Alors qu'en réalité,
07:16
il y avait des gens qui ont parlé très fort
07:18
de choses qu'ils ne maîtrisaient peut-être pas suffisamment.
07:21
Mais là, on touche à un autre truc.
07:22
C'est que le cerveau humain,
07:23
c'est une machine un peu bizarre.
07:25
Le cerveau humain,
07:26
et c'est, on est dans le studio Coluche,
07:28
donc je vais me permettre de le citer,
07:29
Coluche paraphrasait Descartes
07:31
et il disait que l'esprit,
07:32
l'intelligence,
07:33
c'est la chose la mieux répartie chez les hommes.
07:35
Pourquoi ?
07:36
Parce que,
07:36
quoi qu'on en soit pourvu,
07:38
on a toujours l'impression d'en avoir assez,
07:39
vu que c'est avec cela que l'on juge.
07:42
Qu'est-ce que ça veut dire ?
07:43
Ça veut dire que quand on s'intéresse à un sujet,
07:45
on a très vite
07:46
l'illusion de le maîtriser.
07:48
C'est le premier paragraphe
07:50
de l'affiche Wikipédia
07:51
sur la physique quantique.
07:52
Une fois que vous avez lu ce paragraphe,
07:53
vous êtes sûr
07:54
de maîtriser la physique quantique.
07:55
Et ça peut nous faire dire absolument
07:57
n'importe quoi.
07:59
Et le problème derrière,
07:59
c'est que la confiance dans les médias,
08:01
c'est rôde,
08:01
la confiance dans la science,
08:02
c'est rôde aussi
08:03
et qu'on a du mal à résister à tout ça.
08:05
Et vous allez nous dire justement,
08:06
Thomas Huchon,
08:07
dans un instant,
08:07
parce que votre livre se veut aussi
08:09
un manuel de résistance
08:10
face aux fake news.
08:11
Comment faut-il faire ?
08:13
Comment faut-il résister ?
08:14
On en parle tout à l'heure,
08:16
mais d'abord,
08:16
c'est le journal des médias qui arrive.
08:17
Oui,
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