As plantas utilizam estratégias sofisticadas para viver e reproduzir-se, e para conquistar novos territórios. Algumas delas são verdadeiramente maquiavélicas. Quando atacadas por pragas, produzem substâncias químicas temíveis que atuam em grande escala, utilizam bactérias, estabelecem ligações com fungos ou manipulam insetos e aves. Na batalha constante entre os que comem e os que são comidos, as plantas são incrivelmente engenhosas e utilizam estratégias surpreendentes que nos mostram que não são o que parecem.
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00:00Dans leur lutte pour la survie, les plantes révèlent des stratégies sophistiquées et parfois même machiavéliques.
00:21Elles sont capables de déployer des armes chimiques à grande échelle en cas d'attaque.
00:26Elles nouent des alliances avec une multitude d'espèces ou en manipulent certaines, comme les insectes et les oiseaux.
00:35Dans la lutte incessante qui oppose ceux qui mangent à ceux qui sont mangés, les plantes ont des ressources incroyablement créatives dont le cinéma s'est inspiré plus d'une fois.
00:45Elles empoisonnent, simulent, elles font peur. Bref, les plantes ne sont pas celles qu'on croit.
00:56Vues de près, et même de très très près, la nature prend une toute autre dimension.
01:09Notre œil se régale de la finesse d'un rameau, la délicatesse d'une fleur nous émerveille, le couvert des arbres nous incite à rêver.
01:17Mais si nous pouvions voir de plus près et pénétrer dans l'intimité des plantes, nous découvririons une complexité déroutante, souvent éblouissante.
01:27Ainsi, ce fouillis vert, hérissé de ce qui ressemble à des yeux d'escargot, est en vérité la surface de la feuille d'un arbuste commun, grossi des centaines de fois grâce au dernier microscope numérique 3D.
01:42L'imagerie scientifique d'aujourd'hui nous permet d'approcher les plantes comme jamais, et nous découvrons, ébahis, que le monde végétal nous est encore largement inconnu.
01:51Notre monde, et donc celui des plantes, est en perpétuel changement, et parfois de manière brutale.
02:21Pour les plantes, répondre correctement aux signaux de l'environnement est une question de vie ou de mort.
02:32Et ce, dès les premiers instants.
02:35Prenez la graine.
02:37Elle doit être capable d'interpréter des variations de température, sinon la plante risque de ne jamais voir le jour.
02:43La nature envoie aux graines une foule de signaux parfois contradictoires.
02:54Ainsi, en plein cœur de l'hiver, quelques journées, exceptionnellement douces et ensoleillées, peuvent laisser croire à l'arrivée du printemps.
03:03Si la graine n'était qu'une mécanique sans aucune souplesse, elle serait abusée par ces beaux jours trompeurs.
03:09Or, on assiste assez rarement à des poussées précoces qui se font cueillir à froid.
03:15Alors, comment la majorité des graines résistent-elles à la tentation de germer lors d'une série de beaux jours sans lendemain, dans le froid de l'hiver ?
03:25A l'université de Birmingham, Georges Bacel étudie comment et dans quelles conditions la graine de l'arabète des dames germe.
03:35Et décide que le moment est venu de pousser sa plantule hors de sa coque protectrice pour tenter l'aventure de la vie.
03:42Pour prendre sa décision, la graine s'apurait-elle sur l'équivalent d'une station météorologique interne qui lui annoncerait les beaux jours avec une probabilité fiable ?
03:59Généralement, dans une plante, les décisions sont prises par l'ensemble de la plante.
04:04Et exceptionnellement pour la graine, il y a ce petit groupe de cellules dans l'extrémité de la racine qui décident de germer ou pas.
04:16Un petit sous-ensemble de cellules que nous appelons le centre de décision.
04:19Durant la période où le temps se réchauffe, le centre de décision de la graine, ici colorée en rouge, est en veille permanente.
04:38Les graines reçoivent de nombreux signaux de l'environnement et elles condensent tous ces signaux pour prendre une seule décision.
04:53Est-ce que je germe ou pas ?
04:56La solution que les graines ont trouvée est de produire deux hormones.
04:59L'une, l'acide abscisique, favorise la dormance, le sommeil.
05:03L'autre hormone, l'acide gibérélique, favorise la germination, l'éveil.
05:09Nous avons donc dans la graine ces deux hormones antagonistes qui luttent pour germer ou pas.
05:15Et c'est la dominante, quelle qu'elle soit, qui décide pour la graine.
05:23Les cellules du centre de décision situées à la périphérie de la graine, ici colorées en bleu, sont sensibles au froid.
05:30Tant que celui-ci risque de geler les jeunes pousses, ces cellules sécrètent des hormones du sommeil et la graine reste en léthargie.
05:39Lorsque la terre se réchauffe, les cellules de la périphérie restent passives alors que des cellules se trouvant au centre produisent des hormones de croissance,
05:47ici colorées en orangé, qui poussent la graine au réveil.
05:51Les signaux contradictoires « je pousse, je ne pousse pas » peuvent se succéder pendant des jours sans que rien ne se passe.
06:05Puis, lorsque l'hormone de croissance prend le dessus durablement, la plantule met le nez dehors.
06:11Pour germer, certaines graines ont besoin que se produisent des événements imprévisibles et cataclysmiques.
06:26On sait aujourd'hui qu'une des molécules produites par la fumée est perçue par les graines.
06:37Et que cette molécule conduit à la stimulation de l'acide gibérélique, l'hormone qui provoque le réveil des graines.
06:45De nombreux peuples autochtones connaissent la dynamique du feu depuis des millénaires.
06:56Ils pratiquent le brûli maîtrisé qui donne un coup de pouce à la nature.
07:05Les aborigènes d'Australie incendient périodiquement certaines parcelles.
07:09Le feu nettoie le terrain et les graines d'une trentaine d'espèces de plantes, qui avaient besoin de ce signal, germent aussitôt.
07:17Un autre avantage est que la matière végétale étant brûlée, il y aura plus de nutriments dans le sol pour que la plante puisse ensuite pousser.
07:47Sous certains climats, l'événement favorable à la germination peut se faire attendre longtemps, et même très longtemps.
08:04La capacité d'une graine à rester en dormance et à ne pas germer dépend de la durée pendant laquelle elle peut rester en vie.
08:10Une graine peut ainsi rester au repos pendant un an, cinq ans, voire cinq mille ans, c'est possible.
08:16Récemment, nous avons eu l'exemple d'une graine vieille de 32 000 ans revenant à la vie.
08:21Le seul facteur limitatif est la capacité de la graine à rester en vie.
08:25Ainsi, dans le sol, la graine est bien vivante, elle respire encore, faiblement, comme si elle était en hibernation.
08:31Coriace, capable d'attendre des siècles un moment fugace, de démêler le vrai du faux, les graines seraient-elles intelligentes ?
08:46Je ne crois pas que les graines soient des génies.
08:49Elles reçoivent des signaux de l'environnement et effectuent des calculs similaires à ceux d'un ordinateur.
08:53Des opérations logiques pour prendre leurs décisions.
08:57Donc, je regarde une plante davantage comme un ordinateur que comme un génie.
09:09Si les graines ne sont pas, à proprement parler, intelligentes, elles obéissent à une logique.
09:14L'évolution les a dotés de dispositifs extraordinairement ingénieux pour étendre leur domaine, voire coloniser de nouveaux territoires.
09:31Pour que les plantes produisent des graines, il faut qu'elles aient été préalablement fertilisées par des pollens.
09:37L'évolution a trouvé des solutions étonnantes.
09:40Ces capsules rouges sont des pollens de fougères très fortement agrandies au microscope électronique.
09:47Les pollens sont des semences mâles équivalentes aux spermatozoïdes des mammifères.
09:53Comme les fougères sont immobiles, de minuscules bras catapultent leurs pollens dans les airs.
09:59Ils planent au gré du vent et vont fertiliser d'autres fougères qui se trouvent parfois très loin.
10:10Pour ne pas se déshydrater rapidement et mourir au cours de leur voyage vers la plante qu'ils fertiliseront,
10:20ces organismes pourtant microscopiques se replient sur eux-mêmes à la manière d'un origami.
10:31Les plis et replis forment une sorte de coque étanche qui retient l'eau dont ils ont besoin pour arriver en vie à destination.
10:38Lors des floraisons de printemps, les pollens forment de véritables nuages qui portent la vie et la dispersent.
10:48La sédentarité est une contrainte qui n'a pas empêché les plantes d'envahir toutes les terres émergées où la vie est possible.
11:08Comment peuvent-elles se reproduire et croiser leurs gènes pour éviter la dégénérescence alors qu'elles sont fixées au sol par leurs racines ?
11:17Beaucoup utilisent les services de prestataires qui, eux, se déplacent librement, comme les insectes, les oiseaux, les mammifères.
11:25Bref, la foule de ce qu'on appelle les pollinisateurs.
11:30Mais pour qu'un pollinisateur se promène d'une fleur à une autre, il faut qu'il y trouve un intérêt.
11:36Pour attirer ceux qui possèdent les clés de leur vie, les plantes déploient des ressources d'une extraordinaire diversité.
11:43Certaines fleurs arborent des couleurs flamboyantes, exhalent des parfums enivrants ou encore excrètent des nectar succulents.
11:52Et ça marche.
11:54Dès que les fleurs éclosent, les pollinisateurs accourent en masse chargés des pollens fertilisateurs qu'ils ont récoltés sur d'autres fleurs de la même espèce.
12:02Les orchidées ne prennent pas le risque d'envoyer leur pollen dans l'espace.
12:28L'offris affiche les couleurs, les formes et même l'odeur des abeilles femelles.
12:37Elle est si convaincante dans son travestissement que les abeilles mâles n'y voient que du feu et copulent avec elles en croyant féconder des femelles de leur espèce.
12:46Comme ils sont couverts du pollen d'autres offrisses visitées peu avant, les mâles abeilles fertilisent bel et bien.
12:56Mais une fleur et non pas un insecte.
12:58Pour résoudre des problématiques complexes, certaines plantes comme le tabac sauvage ont recours non pas à une espèce de pollinisateur, mais à deux espèces qui se succèdent selon l'état de la plante.
13:14Les rebondissements spectaculaires et inattendus de la pollinisation du tabac sauvage ont attiré l'attention des chercheurs de l'Institut Max Planck en Allemagne.
13:32Pour ses recherches, Jan Baldwin cultive des plants originaires des régions tropicales américaines.
13:37Le tabac sauvage est pollinisé par un pollinisateur spécifique.
13:43Ce papillon visite les fleurs la nuit et se nourrit de leur nectar.
13:47Mais quand il butine le nectar, il pond également un œuf.
13:52Et cet œuf se transforme en une chenille vorace qui dévore la plante.
13:56Nos recherches se sont concentrées sur la compréhension de la manière dont la plante résout ce dilemme difficile, avoir un partenaire à la fois utile et dangereux.
14:07Les fleurs du tabac sauvage s'ouvrent en fin de journée.
14:15Elles orientent leur corolle très odorante vers le ciel pour attirer les papillons de nuit appelés sphinx du tabac ou morosphynx.
14:22L'orientation précise de la corolle permet à la longue trompe des pollinisateurs d'accéder facilement aux pistils sucrés.
14:44Au cours de l'opération, la trompe du sphinx se charge de pollen.
14:48Ah, Danny, regarde !
14:53Ils sont prêts pour une bonne nuit de pollinisation.
15:00Magnifique !
15:01Yann et Danny élèvent des morosphynxes.
15:06Dès le début du coucher du soleil, ils observent le comportement des papillons dans une serre où des plants de tabac sont en fleurs.
15:13Lorsque la trompe du sphinx s'insinue dans la corolle pour siphonner le nectar,
15:23elle dépose des grains de pollen récoltés en visitant d'autres fleurs de tabac.
15:28La fleur est fécondée, mais au lieu de s'en aller, le sphinx se pose sur une des feuilles de la plante de tabac, épont.
15:35Yann a compté une dizaine d'œufs sur chaque feuille de certains des plants offerts au sphinx de son élevage.
15:50Avec le sphinx, le tabac sauvage dispose d'un pollinisateur efficace.
15:54Malheureusement, les œufs se transforment en chenilles d'une voracité sans frein,
16:00qui entreprennent aussitôt de dévorer la plante qui a nourri leurs géniteurs.
16:10L'excroissance noire qui pousse sur leur dos leur vaut le surnom de chenilles à cornes.
16:15Étrangement, les chenilles semblent ne pas souffrir du poison qu'est la nicotine imprégnant les feuilles de tabac.
16:29Elles doublent de poids en une journée.
16:32Tout y passe, même les fleurs.
16:33Les scientifiques considèrent que la plante est mise en danger après une semaine d'attaque constante des chenilles
16:50et lorsque 20% de la surface des feuilles sont endommagées.
16:54Si le danger s'avère, le tabac sauvage est alors l'auteur d'un incroyable coup de théâtre.
17:00Les fleurs s'ouvrent le jour au lieu de s'ouvrir la nuit.
17:12Lorsque le morosphinx fait sa promenade nocturne, les fleurs sont fermées.
17:17Le papillon s'en va sans avoir butiné de nectar et sans avoir pondu.
17:22On assiste alors à un second coup de théâtre tout aussi surprenant que le premier.
17:34Le tabac sauvage trouve un remplaçant au papillon indélicat et ce remplaçant est l'élégant colibri.
17:40Si la plante peut collaborer avec le colibri, pourquoi ne le ferait-elle pas tout le temps ?
17:48Parce que le colibri ne dépose pas d'œufs de chenille, il pond des œufs de colibri.
17:52Et les œufs de colibri n'éclosent pas en chenille qui mange la plante.
17:55Si le tabac sauvage se hasarde à un jeu dangereux avec le morosphinx,
18:05c'est parce que le papillon lui apporte quelque chose de précieux que l'inoffensif colibri ne lui apporte pas.
18:13Les colibris volent sur de courtes distances et n'apportent que le pollen d'un petit nombre de plantes du voisinage.
18:19Le morosphinx, lui, est un grand voyageur.
18:22Il peut voler 500 kilomètres dans une nuit.
18:25Il peut ramasser du pollen de tout l'ouest des États-Unis et apporter des mélanges de pollen variés.
18:32Le tabac sauvage risque de se faire dévorer à mort pour bénéficier d'un brassage génétique qui assure sa résilience.
18:39Cette évaluation risque-bénéfice prouve que certaines plantes prennent en compte le long terme.
18:49Les plantes sont un festin pour d'innombrables espèces.
18:58Du microscopique puceron à l'interminable girafe.
19:02Comment se défendre de ces hordes de mandibules, de dents, de becs, qui cherchent inlassablement à les dévorer ?
19:10L'évolution a équipé les plantes de toutes sortes d'armes de défense, des plus élémentaires aux plus sophistiquées.
19:19Ces fines excroissances, qui poussent sur les différentes parties de la plante et qui ressemblent à des poils, s'appellent des trichomes.
19:33Certains forment des herces infranchissables.
19:41Ils tissent un rideau si dense qu'ils barrent l'accès des parties vulnérables de la plante aux micro-organismes pathogènes.
19:48D'autres trichomes, comme ceux qui couvrent les feuilles de haricots, sont de véritables planches à clous sur lesquelles viennent s'embrocher les agresseurs aventureux.
20:07Ceux du cannabis possèdent une tête en forme de ballon qui contient une substance répulsive pour les ravageurs.
20:13Les épines de l'acacia découragent les brouteurs de grande taille en leur infligeant de douloureuses blessures aux lèvres et à la bouche.
20:28Pour l'acacia, le problème vient du fait que les girafes et les coudous se fichent pas mal des épines acérées.
20:46Lorsqu'un coudou ou une girafe commence à le brouter, l'acacia développe une défense en profondeur bien plus surprenante et efficace que les épines.
20:54Son feuillage libère de l'éthylène, un gaz volatile qui déclenche aussitôt la production de tannins, non seulement par l'acacia agressée, mais également par les acacias très proches.
21:10Le tannin est un composé chimique qui éloigne les microbes pathogènes et incommode fortement les herbivores.
21:17Coudou et girafes ne le supportent pas et s'en vont brouter ailleurs.
21:20Comment l'acacia sait-il qu'une girafe ou un coudou s'attaque à son feuillage ?
21:29Des travaux scientifiques récents révèlent que toute blessure déclenche chez la plante un signal électrique.
21:35Comme on le voit dans cette séquence exceptionnelle, filmée en vitesse très accélérée.
21:39La vitesse réelle de propagation du signal est d'environ 6 cm par minute,
21:51très au-dessous de la vitesse de transmission d'un signal électrique chez l'homme, qui peut atteindre 80 mètres par seconde.
21:57Ça peut nous paraître surprenant, mais les plantes et nous partageons un neurotransmetteur, le glutamate.
22:12Les plantes sont différentes de nous.
22:14Elles n'ont pas de système nerveux, elles n'ont pas de nerfs, mais comme nous, elles produisent le glutamate.
22:19Les plantes produisent cette molécule et d'autres lorsqu'elles sont mordues par des chenilles et d'autres insectes.
22:25Le glutamate et d'autres molécules activent des signaux électriques qui circulent dans les nervures de la feuille d'une feuille à l'autre.
22:34Plus étonnant encore, la plante identifie le type d'agresseur qui l'attaque.
22:40La réaction d'alerte est beaucoup plus intense si les feuilles sont dévorées par des chenilles
22:44que si elles sont coupées par une lame ou trouées par un outil.
22:48Le secret de cette stupéfiante distinction est que les plantes réagissent à la salive des mandibules.
22:56Si l'alerte est plus intense, c'est parce que l'évolution a enseigné aux plantes que les ravageurs sont nombreux et insatiables.
23:03Edward Farmer étudie la fonction des signaux électriques émis par les plantes agressées par un prédateur.
23:17Il place des électrodes sur les feuilles d'arabette des dames, dont le nom scientifique est Arabidopsis thaliana.
23:24Nous utilisons l'arabette des dames dans notre laboratoire parce qu'elle pousse très rapidement
23:35et nous pouvons partager ce que nous apprenons avec des centaines d'autres laboratoires dans le monde.
23:46Lorsqu'elles sont attaquées, les arabettes des dames subissent un stress qui déclenche leur système de défense.
23:54Connaître dans le détail l'activité électrique d'un plant d'arabette victime d'une blessure aiderait à comprendre ce système de défense.
24:05Edward Farmer a besoin d'un agent qui mesurera l'activité électrique dans les cellules des plantes.
24:12Et cet agent sera un puceron commun.
24:15Le chercheur va transformer le puceron en électrode vivant et mobile.
24:19Pour cela, il l'équipe d'un très mince fil de cuivre fixé à son dos.
24:24Mets l'électrode dessus.
24:26Très bien.
24:27Redresse un peu.
24:28Voilà le puceron devenu cobaye.
24:31Oui, déplace un peu plus haut sur l'insecte.
24:35Au-dessus ?
24:36Oui, oui, c'est bien.
24:48On enfonce maintenant une prise de terre dans le pot.
24:50Lorsque le puceron, désormais branché, perfore les cellules de la feuille, il transmet les signaux électriques de la plante.
25:01Ceux-ci sont captés par le fil de cuivre fixé au puceron.
25:04L'activité électrique ordinaire de la plante apparaît clairement.
25:10Ok, Jen, le puceron qui se nourrit sur la plante numéro 1 a l'air très bien.
25:14On peut y aller et infliger la blessure à la plante.
25:16C'est là que l'expérience commence vraiment.
25:23La plante réagit à la blessure en envoyant un signal électrique.
25:27Le pic, ici, sur l'enregistrement.
25:29Ce signal se propage aux autres feuilles de la plante et déclenche la sécrétion d'une hormone appelée jasmonate.
25:41Quand un insecte mord une feuille, le glutamate s'active et des signaux électriques se déplacent vers d'autres feuilles qui produisent une hormone appelée jasmonate.
25:50L'hormone est active, la plante est défendue car ses feuilles deviennent indigestes.
25:55Les insectes ne peuvent pas les manger et s'en vont.
25:59La jasmonate est plus concentrée au centre de la plante, là où se forment les feuilles nouvelles, plus tendres, et donc plus attractives pour les insectes.
26:13Mais aussi celles qui doivent être protégées en priorité, parce que ce sont elles qui assurent la croissance de la plante.
26:21Le taux de jasmonate diminue au fur et à mesure qu'on s'éloigne du cœur, car les feuilles plus anciennes sont moins cruciales pour la plante.
26:29La confrontation de deux groupes d'arabettes des dames confirme le rôle clé de la jasmonate dans le système de défense des plantes.
26:45Ces plantes ici sont normales, sauvages, et sont parfaitement capables de se défendre.
26:51Elles produisent de la jasmonate, elles ont été attaquées par des insectes, mais elles n'ont pas été mangées rapidement.
26:57Ces autres plantes, par mutation, ne peuvent pas fournir de la jasmonate, et elles sont gravement dévorées.
27:03La jasmonate sécrétée en conséquence d'une attaque déclenche la production de composés amers et d'odeurs dérangeantes pour les ravageurs.
27:30Ce flot d'odeurs rappelle celles qui exhalent une pelouse, qu'on est en train de tomber.
27:36Qui se serait douté, avant que les recherches récentes de Ted Turling ne le révèlent,
27:50que le bon vieux maïs de nos campagnes a recours, lui aussi, à des défenses chimiques, mais pas pour rebuter ses assaillants.
27:57Lorsqu'il est menacé, notre maïs familier se révèle d'un machiavélisme qui fait froid dans le dos,
28:02et dont se sont inspirés les scénaristes de films d'horreur et d'anticipation.
28:09Le maïs est régulièrement attaqué par la Spodoptera, la chenille d'un papillon de nuit, une dévoreuse redoutable et envahissante.
28:19Spodoptera a pour prédateur une petite guêpe nommée Eoplectrus, dont l'aspect fragile cache un tueur aux méthodes horrifiantes.
28:26Le maïs le sait, et lorsque Spodoptera s'attaque à lui, il appelle la tueuse.
28:32En un clin d'œil, la guêpe injecte un chapelet d'œufs dans le corps de la chenille.
28:51Les œufs éclosent très vite et donnent naissance à des larves qui se développent en dévorant les entrailles de Spodoptera.
28:56« Dans l'espace, personne ne vous entend crier », lance un des personnages du film Alien, le huitième passager.
29:13Pourtant, la guêpe répond à l'appel du maïs.
29:16« Quand nous avons commencé cette recherche, nous pensions que c'étaient les excréments des chenilles qui attiraient ces guêpes parasites.
29:25Nous avons commencé à examiner cela plus en détail, et nous avons constaté qu'en fait, les plantes produisent un ensemble de composés volatiles qui forment une odeur très attractive pour les guêpes. »
29:38Il faut plusieurs heures au maïs attaqué pour élaborer et libérer dans l'air ambiant les substances odorantes qui attirent les guêpes.
29:50Les voisins des plants attaqués perçoivent le signal d'alerte.
29:54Ils le répliquent, et ce signal se propage jusqu'aux guêpes qui sont en embuscade.
30:00Ces signaux olfactifs désignent les chenilles cibles avec la précision d'un GPS.
30:04Les jeunes plants sont les plus vulnérables aux chenilles.
30:21Une seule chenille peut complètement détruire et tuer un plant.
30:25C'est pourquoi les jeunes plants bénéficieront le plus de ces signaux.
30:28Les jeunes plants émettent beaucoup plus de composés, en plus grande quantité que les plants adultes.
30:33Pour tester l'efficacité de ce système de défense, des plants de maïs ont été modifiés génétiquement pour rester inertes face aux attaques de chenilles.
30:49Le résultat est spectaculaire.
30:51Les champs de maïs incapables d'appeler les guêpes à leur secours ont été dévorés jusqu'aux racines.
30:56Les plantes envoient des composés volatiles spécifiques aux ravageurs qui les attaquent.
31:05Et plus étonnant encore, ces composés volatiles s'adressent aux prédateurs spécifiques du ravageur.
31:10Les plantes peuvent compter sur les guêpes, mais aussi sur les coccinelles et sur les punaises qui engloutissent pucerons et acariens en grande quantité.
31:21Nous commençons à comprendre de mieux en mieux le langage des plantes.
31:45Chaque insecte induit une réponse différente en termes de substances volatiles, de bouquets odorants.
31:51C'est comme des empreintes digitales odorantes que nous pouvons exploiter.
31:56Nous allons être en mesure de développer des capteurs capables de percevoir ces odeurs qui nous diront ce qui se passe avec les plantes.
32:03L'équipe de Ted Turlings a mis au point un nez artificiel qui identifie les principales matières volatiles émises par les plantes en cas d'attaque.
32:23Ce prototype va être amélioré et compacté pour une exploitation sur le terrain.
32:27Nous espérons pouvoir placer ces capteurs sur des robots qui traverseront les champs,
32:51humeront les plantes et diront à un fermier quelle plante est attaquée par une chenille.
32:57La lutte entre les plantes et leurs ravageurs est un feuilleton qui n'est pas près de finir.
33:04Dans le jeu de « si tu m'attaques, j'appelle ton ennemi qui te réglera ton compte »,
33:08certains insectes trouvent des parades inouïes.
33:12Ainsi, Ted Turlings et une équipe chinoise ont récemment découvert que de petites mouches blanches,
33:17les alleroles, détournent les messages d'alerte émis par les plantes qu'elles attaquent.
33:21C'est l'une de ces étonnantes adaptations des insectes
33:32qui leur ont permis de contourner les défenses des plantes
33:35en leur faisant croire qu'elles sont attaquées par autre chose.
33:39Le message d'alerte que les plantes envoient suggère une attaque par un agent pathogène et non par un insecte.
33:45Et ainsi, la plante voisine commencera à se défendre contre l'agent pathogène et non contre les mouches blanches.
34:02Les mouches blanches, qui à première vue paraissaient insignifiantes,
34:07attaquent plus de 600 espèces de plantes et les mettent à mal.
34:09C'est ce qu'on appelle une course co-évolutive aux armements entre plantes et insectes.
34:18Et évidemment, dans ce cas particulier, les insectes ont un coup d'avance.
34:22Mais nous pouvons nous attendre à ce que certaines plantes soient déjà adaptées pour se défendre,
34:29sans que nous ayons découvert comment.
34:32Ou qu'à l'avenir, dans la nature, les plantes qui sont encore dupes
34:35développeront différents mécanismes pour trouver la parade contre les mouches blanches.
34:44C'est une partie d'échecs intenses qui se jouent entre plantes et insectes.
34:49L'enjeu, qui n'est ni plus ni moins que la survie de l'espèce,
34:52oblige les partenaires à évoluer pour s'adapter en permanence,
34:55en diversifiant et améliorant leurs capacités.
34:58Tout le monde sait que les oiseaux se servent des arbres.
35:08Ils sont leurs gardes-mangés, leurs chambres d'amour, leurs nichoirs,
35:13mais on sait moins que les arbres se servent des oiseaux.
35:19Comme le maïs appelle des guêpes tueuses à son secours,
35:22les arbres infestés par des colonies de chenilles appellent des oiseaux à la rescousse.
35:28Lorsque la feuille est complètement développée
35:33et qu'elle est attaquée par des chenilles qui ont déjà une taille importante,
35:37les oiseaux sont attirés dans un contexte de recherche alimentaire.
35:40À ce moment-là, les chenilles sont grosses
35:42et du coup, elles représentent une ressource de nourriture assez importante.
35:47Nous, on se place dans un contexte un peu différent.
35:49On va étudier un stade qui est beaucoup plus précoce dans le temps,
35:53un stade où les chenilles viennent seulement d'éclore.
35:55Elles commencent déjà à manger le bourgeon à l'intérieur.
36:04Les chenilles fraîchement écloses sont longues de moins d'un millimètre.
36:08Il faut donc que l'arbre dispose de censeurs extrêmement performants
36:12pour déceler leur présence et lancer un message d'alerte.
36:15Samuel Caro a construit une volière en forme de Y.
36:33À l'extrémité de l'une des branches, il place un jeune chen-saint.
36:36À celle de l'autre branche, il place un jeune chen-saint
36:50sur lequel il dépose 20 chenilles tout juste écloses.
36:55Les deux arbres sont masqués par un cache blanc,
36:58si bien qu'on ne peut les voir.
36:59Samuel place une mésange dans le nichoir
37:17qui se trouve sur la troisième branche de la volière,
37:20puis il met en route les ventilateurs
37:22qui envoient vers la mésange
37:23les composés volatiles émis par les deux chaînes.
37:26L'oiseau s'envole et choisit l'un des deux bras de la volière.
37:32Samuel Caro répétera l'expérience une centaine de fois
37:35et presque toutes les mésanges se dirigeront à l'aveugle
37:38vers le chêne infesté par les chenilles.
37:45Ce choix n'est pas un hasard.
37:47L'arbre infesté sécrète des composés chimiques volatiles
37:50signalant aux mésanges qu'il est porteur de nourriture.
37:53Ces micro-éflux vont permettre d'attirer les oiseaux
37:57dans les zones où il y a une future abondance de chenilles.
38:02Et donc ça va les attirer.
38:03Ils vont construire potentiellement leur nid dans ces zones-là
38:06et s'investir plus dans la reproduction,
38:08se reproduire plus tôt, pondre plus d'oeufs.
38:11Et de cette façon, ils vont agir comme une pression
38:14sur les chenilles et débarrasser la plante de ces prédateurs.
38:17En incitant les mésanges à s'installer dans le voisinage,
38:24les chênes s'assurent une protection de longue durée.
38:28À chaque invasion, leurs bourgeons enverront une bouffée odorante
38:32et les mésanges arriveront à tir d'elle.
38:34Samuel Caro a synthétisé les composés volatiles
38:43qui émettent les bourgeons d'un chêne infesté.
38:45Ce bouquet artificiel, on l'a ensuite utilisé dans la nature.
38:59On l'a dispersé autour des nichoirs
39:01où se reproduisent potentiellement les oiseaux.
39:04Et on a constaté qu'au total, on avait plus d'oeufs
39:07qui étaient pondus dans ces zones avec odeur
39:09parce qu'ils pensent sans doute
39:11qu'il va y avoir une quantité de nourriture importante
39:14deux, trois ou quatre semaines plus tard.
39:21La science a longtemps ignoré les liens et signaux complexes
39:24que les plantes tissent entre elles,
39:26mais aussi avec les insectes, les oiseaux
39:29et peut-être avec des mammifères.
39:33Les pesticides produits par l'industrie chimique
39:36étaient une solution simple, efficace et rentable
39:39pour se débarrasser des ravageurs.
39:42Aujourd'hui, la dégradation continue des sols
39:44amène l'agriculture à chercher d'autres solutions.
39:46On peut imaginer dans le futur
39:48que l'on combine la présence de ces nichoirs
39:51avec ces odeurs d'alarme émises par les arbres
39:55pour attirer, pour exercer un pouvoir d'attraction
39:58encore plus fort sur les oiseaux insectivores
40:00et ainsi agir comme une lutte biologique intégrée
40:03et éviter l'emploi massif de pesticides.
40:10Si les parties aériennes des plantes ont recours
40:13à des stratégies plus étonnantes l'une que l'autre
40:15pour se défendre, qu'en est-il des parties souterraines ?
40:19Autrement dit, des racines.
40:21Le sol grouille de vie.
40:33Vers de terre, acariens, colamboles, myriapodes,
40:38bactéries et tant d'autres espèces
40:40qu'il reste à découvrir.
40:41Tout ce monde affairé se faufile inlassablement
40:48entre les racines des plantes
40:49et le mycélium des champignons
40:51qui tissent sous nos pieds un réseau dense
40:53et étroitement imbriqué.
40:56Les champignons sont apparus il y a 450 millions d'années
41:00et ont colonisé tous les milieux terrestres et aquatiques.
41:04On pense que sans eux,
41:05les premières plantes terrestres
41:06n'auraient pas pu conquérir les terres émergées.
41:09Plantes et champignons sont donc des complices de longue date.
41:19On a une incroyable diversité de décomposeurs.
41:24Ce sont ces champignons dégradeurs.
41:27Ils représentent 40% de la biodiversité dans la forêt.
41:32Ils vont dégrader les troncs, les branches, les feuilles mortes.
41:36Et grâce à cette activité de décomposition, de dégradation,
41:40ils alimentent la tisane du sol
41:41dans laquelle les champignons mycorhiziens
41:44vont aller puiser les éléments nutritifs
41:46indispensables à la croissance des arbres.
41:48Cepes, amanites-tumouches, chanterelles, rusules, giroles, lactères, bollets
41:55et bien d'autres, car ils sont nombreux,
41:58sont de la famille des champignons mycorhiziens.
42:01Ils sont les fruits d'organismes souterrains appelés mycéliums,
42:05un ensemble de filaments dont les ramifications explorent
42:08de vastes surfaces du sol à la recherche de nourriture.
42:11Microbiologiste à l'INRAE,
42:24Francis Martin étudie comment les végétaux utilisent à leur profit
42:28la microflore des écosystèmes souterrains.
42:30Là, on a un très beau cèpe.
42:37Il est probablement connecté par le biais d'un réseau mycélien souterrain
42:42à ce jeune chêne.
42:50Et là, c'est spectaculaire.
42:52On voit bien la racine mycorhizée, légèrement colorée en rougeâtre.
42:56Et puis, on en a une ici, là, orange,
42:57probablement un autre champignon mycorhizien
43:00qui s'est installé sur le système racinaire.
43:03Donc, ce chêne, il a l'interaction avec des dizaines
43:05de champignons symbiotiques différents,
43:07formant des structures, des mycorhizes
43:10de formes et de couleurs différentes,
43:12et probablement avec des fonctions différentes.
43:16L'une des fonctions essentielles de ces structures
43:19en forme de manchon est de protéger les racines des plantes,
43:22des colamboles, nématodes et autres bestioles léliputiennes
43:26qui cherchent à les dévorer.
43:27L'autre fonction est de tisser un réseau filamentaire dense
43:38unissant mycélium de champignons et racines de plantes.
43:43Ce réseau permet d'exploiter la tisane du sol
43:46qui contient des nutriments nécessaires aux plantes et aux champignons.
43:49Ce qui est vraiment étonnant, c'est que la bonne santé de la forêt
43:55qui nous entoure dépend complètement de ces petites structures
43:59qu'on appelle la mycorhize, la symbiose entre l'arbre et le champignon.
44:02Grâce à la mycorhize, les champignons fournissent aux racines
44:11des minéraux rares, comme le phosphore et l'azote
44:14qu'ils captent dans le sol, et d'autres nutriments.
44:18En échange, les champignons reçoivent des sucres
44:20issus de la photosynthèse des plantes
44:22que, faute de chlorophylle, ils sont incapables
44:25de produire eux-mêmes.
44:30L'observation en laboratoire au microscope confocal
44:33permet de bien comprendre la fusion symbiotique
44:36des filaments de mycélium et des racines des plantes.
44:41Là, on est dans le sol.
44:42Le réseau de champignons mycorhiziens,
44:45tous ces filaments en vert, colonisent la totalité
44:48de la surface de la racine en rouge,
44:51et finit par s'agréger pour former un capuchon,
44:53la mycorhize, ici en vert.
45:02Là, on voit bien les filaments du champignons mycorhizien
45:05qui entourent la racine, qui forment comme une chaussette,
45:09et puis ce réseau de filaments pénètre dans la racine
45:13en s'immisçant entre les cellules jusqu'au cœur de la racine.
45:18Grâce à la connexion fusionnelle de la mycorhize,
45:26les plantes nouent des liens étroits et fertiles
45:28avec de nombreux mycéliums de champignons
45:30et avec des colonies de bactéries très nombreuses
45:33et très variées.
45:34Là, en vert, on a les bactéries qui sautillent,
45:50qui très sautent, qui courent, qui nagent
45:52le long des autoroutes de filaments de champignons mycorhiziens.
45:55Ça permet à ces bactéries de se déplacer à très grande distance
45:57qu'elles ne sauraient pas faire en l'absence du champignon.
45:59Les populations bactériennes qui prolifèrent dans les sols
46:06sont aux plantes ce que le microbiote intestinal est aux humains.
46:16Les plantes entretiendraient-elles des rapports similaires aux nôtres
46:19avec les bactéries qui les entourent ?
46:22Le sol, c'est vraiment comme un tube digestif.
46:25Il y a une flore dans ce sol faite de micro-organismes
46:27et la plante, au niveau du sol, va être capable d'aller chercher,
46:30d'aller sélectionner les bactéries qui sont utiles pour elle.
46:33Utiles notamment pour améliorer la fertilité du sol,
46:36mais aussi utiles des fois pour les aider à mieux résister
46:38à des maladies ou à des aléas climatiques.
46:43Pour apprécier l'influence des bactéries
46:45sur le développement des légumineuses,
46:47comme par exemple le maïs ou les haricots,
46:50l'INRAE a construit une plateforme expérimentale
46:53entièrement automatisée.
46:57Le développement des végétaux y est mesuré
47:05dans des conditions très contrôlées.
47:10Lionel Rangard et son équipe font pousser des plants de maïs
47:13dans des pots remplis d'un sol
47:14dont le nombre et la diversité des bactéries
47:17sont précisément dosés.
47:19Grâce à des caméras de très haute définition,
47:22les poches à bactéries sont très faciles à quantifier
47:25et à qualifier sur les clichés.
47:45Alors là, on découvre vraiment la racine de la plante.
47:47Et sur cette racine, si on regarde un peu plus précisément,
47:49on voit des petites boules qu'on appelle des nodosités.
47:51Dans ces nodosités se trouvent des millions de bactéries
47:54qui sont élevées par la plante,
47:56elles sont nourries par la plante.
47:57Et en retour, ces bactéries vont aussi nourrir la plante
47:59parce qu'elles vont être capables de capter
48:01l'azote atmosphérique, l'azote qu'il y a dans l'air,
48:03et de le transformer et de le rendre assimilable par la plante.
48:05Donc c'est vraiment une relation partenariale,
48:08gagnant-gagnant, entre la plante qui nourrit la bactérie
48:10et la bactérie qui nourrit la plante.
48:11Plus les bactéries sont nombreuses et variées,
48:19plus les plantes sont prospères.
48:23La forme et les dimensions des poches varient selon le type de plante.
48:29De même que les mycorhizes sécrètent des hormones
48:32pour attirer les filaments de mycélium de champignons,
48:35les nodosités des racines sécrètent des hormones
48:38pour attirer les bactéries.
48:41Une fois les bactéries enfermées dans les nodosités des racines,
48:49la plante les modifie.
48:52Les bactéries changent de forme,
48:54elles s'allongent et leur métabolisme change.
48:58Au lieu de se nourrir de substances diverses,
49:01les bactéries encapsulées ne se nourrissent plus que d'azote atmosphérique
49:05qu'elles transforment en azote assimilable par la plante,
49:09donc en engrais.
49:11D'un point de vue expérimental, à l'INRA,
49:13on a démontré que si on baissait la biodiversité microbienne d'un sol,
49:17on baissait le développement des plantes.
49:19Et de plus, on a démontré aussi que même si on rajoutait des engrais
49:22dans ce sol où il y avait moins de biodiversité,
49:24la plante se développait aussi moins bien
49:26que quand il y avait beaucoup de biodiversité.
49:28Donc si on fait un pendant relatif entre l'engrais et la biodiversité,
49:31il vaut mieux un sol qui soit plus biodiversifié
49:33que plutôt de rajouter des engrais.
49:34Ces relations partenariales gagnant-gagnant entre plantes et bactéries
49:49sont déjà utilisées en agriculture,
49:51notamment pour les cultures de légumineuses
49:52ou pour mettre des engrais verts au niveau des rotations de grandes cultures.
49:56Et donc ça, ça permet d'amener de l'azote de façon naturelle
49:59et donc de limiter l'engrais chimique.
50:00Sur des systèmes agricoles qui sont un peu plus pauvres,
50:04un peu moins fertiles, comme on peut en trouver notamment en Afrique,
50:07ça permet de faire de l'agriculture
50:08ou de faire développer des plantes là où on ne pouvait pas en faire
50:11parce que les sols étaient trop peu fertiles.
50:12Et une des applications premières,
50:14c'est la constitution de la grande muraille verte au sud de Sahel
50:17qui permet de faire reboiser toute une zone
50:20pour limiter l'avancée du désert.
50:22Au cœur de la forêt,
50:42on a des milliers d'espèces de champignons
50:43qui interagissent avec les arbres.
50:45C'est un dialogue permanent extrêmement riche.
50:47Malheureusement, dans l'exploitation agricole juste à côté,
50:51l'utilisation massive des phytosanitaires
50:53a éliminé toute cette vie microbienne.
50:55Les plantes sont seules,
50:58elles ne parlent plus, c'est le grand silence.
51:01Pour la première fois dans l'histoire de l'agriculture industrielle,
51:05les rendements des plantes cultivées ont cessé de progresser.
51:07Confrontées aux contraintes environnementales
51:10et aux limites de la sélection,
51:12notre agriculture est dans une impasse.
51:15Une approche biologique nouvelle offre des perspectives de progrès
51:19dont on est loin d'avoir fait le tour.
51:22On peut souhaiter qu'à l'avenir,
51:23la symbiose mycorhiziane
51:24et puis la symbiose fixatrice d'azote
51:27soient exploitées, utilisées
51:29pour permettre aux plantes de s'adapter au changement climatique.
51:31Les découvertes de ces dernières années
51:37enrichissent considérablement notre vision du monde végétal.
51:41Plus nous les observons,
51:43plus les plantes nous deviennent familières.
51:46Il est souhaitable que nous cessions de les considérer
51:48comme des sujets transformables et exploitables à merci,
51:52pour les prendre enfin pour ce qu'elles sont.
51:55Des alliés précieux sans lesquels nous serions perdus.