Pas de souveraineté économique sans souveraineté managériale [Ibrahima Fall]

Xerfi Canal

04/02/2025

Il est illusoire de vouloir rester un pays « libre » ou en tout cas le moins dépendant possible sans souveraineté économique. Il s’agit ainsi pour un pays de contrôler la production et la gestion de besoins essentiels à son bon fonctionnement en dépendant le moins possible de partenaires extérieurs. Sans une telle souveraineté, la maladie économique guette. Le Covid nous a ainsi montré l’intérêt d’une telle souveraineté même s’il est difficile d’abandonner les vieilles habitudes d’optimisation financière de la production, le marché étant libre dans bon nombre de cas. [...]

Catégorie

🗞

News

Transcription

Afficher la transcription complète de la vidéo

00:00Il est illusoire de vouloir rester un pays libre, ou en tout cas le moins dépendant

00:13possible, sans souveraineté économique.

00:16Il s'agit ainsi pour un pays de contrôler la production et la gestion de besoins essentiels

00:23à son bon fonctionnement en dépendant le moins possible de ses partenaires extérieurs.

00:28Sans une telle souveraineté, la maladie économique guette.

00:33Le Covid nous a ainsi montré l'intérêt d'une telle souveraineté, même s'il

00:39est difficile d'abandonner les vieilles habitudes d'optimisation financière de

00:43la production, le marché étant libre dans bon nombre de cas.

00:47Néanmoins, une telle souveraineté économique, si elle venait à exister, n'aurait aucun

00:53sens en ce qu'on pourrait appeler la souveraineté manageriale.

00:58La souveraineté manageriale peut être appréhendée à deux niveaux.

01:02La souveraineté manageriale primaire.

01:05Il s'agit de la capacité des entreprises à mobiliser des ressources manageriales en

01:11résonance avec l'ancrage culturel du pays.

01:15Comme le montraient les travaux de Philippe Diry-Barnes aux États-Unis, l'image idéale

01:21du contrat entre des individus égaux est parfaitement adaptée à la culture locale,

01:27le fameux win-win.

01:28Ainsi, le management par objectif est à un théo adéquat, nonobstant le caractère

01:34purement instrumental qu'il peut revêtir.

01:37Comme le notait aussi Jacques Lemoyel, pour un Américain, l'appréciation de l'atteinte

01:44des objectifs n'est ni objective ni subjective, il ne se pose pas ce type de question, elle

01:51est juste contractuelle.

01:53En France, il ne suffit pas de travailler pour être quitte avec le contrat, il y a

01:58aussi la manière de l'exécuter dans une relation au travail spécifique avec la fameuse

02:04logique de l'honneur.

02:05Cette logique de l'honneur, ou la nécessité d'être traité avec égard, se heurte à

02:11la dimension uniquement instrumentale du management par objectif tel qu'il est souvent

02:16mis en œuvre, entraînant un conflit avec le rapport singulier du français au travail

02:22et sa vision du vivre-ensemble.

02:24C'est pourquoi, savoir ce qui anime les gens dans une culture donnée permet de mieux

02:32penser le management et les transformations, c'est-à-dire les conditions pour préserver

02:37la santé des travailleurs et les conditions d'une performance durable.

02:41La souveraineté managériale secondaire Il s'agit de la nécessité de rompre au

02:48sein de chaque entreprise avec les fameuses bonnes pratiques, qui n'ont rien de pratique

02:53car elles font fi du contexte d'utilisation.

02:55Dans un autre registre, on pourrait dire que l'aspirine qui soigne, c'est aussi l'aspirine

03:01qui tue.

03:02Trop de sponsors du changement et de la transformation, séduits par l'apparente facilité d'utilisation

03:09de bonnes pratiques livrées sur étagère et par des promesses technologiques simplistes,

03:15négligent la première condition de toute transformation réussie, la connaissance du

03:19réel.

03:20C'est en prenant appui sur la réalité du fonctionnement interne de l'entreprise

03:25et non sur ses seules apparences visibles, manifestées dans les organigrammes, les procédures

03:30officielles et les ressentis des acteurs, que l'on peut déterminer que changer et

03:35comment le faire.

03:37Ici encore, la souveraineté managériale se heurte à l'abstraction et au formalisme

03:42excessif qui entrave le nécessaire commerce avec le réel.

03:47Face aux grandes forces normalisatrices, les discours évangélistes des nouveaux penseurs

03:53des temps modernes, à l'instar d'un Elon Musk érigé par une partie de l'opinion

03:59publique comme « professeur, est-ce efficacité ? », la puissance technologique des outils

04:05d'IA qui ne reconnaissent ni les frontières ni les particularités sociales et sociétales

04:11pour une nation, exister, c'est aussi être souverain dans son management.

04:16Contrairement à la souveraineté économique, qui nécessite souvent que l'État agisse

04:22directement dans divers champs, la souveraineté managériale passe par une meilleure éducation

04:28des managers et des travailleurs en général, avec en ligne de mire une performance soutenable

04:34et productrice de santé.

04:35Le conseil en management des universités et les écoles de commerce en seront les

04:40grands vecteurs ou les bourreaux.

Recommandations