Difficile de ne point trouver le Cameroun étrange, pour un pays qui possède la quasi-totalité de son territoire en situation cultivable – soit, selon les experts, plus de 20 millions d’hectares de terres arables – une population active dont environ 70% est réputée travailler dans le secteur agricole ou proche, un PIB total dont 22% est réalisé dans ledit secteur ainsi que 23% des exportations, mais dont 600 milliards du déficit commercial est occasionné chaque année par l’importation de produits alimentaires. Une situation au comble de l’étrangeté, lorsque l’on apprend que, en plus, une grande partie de ladite population de 30 millions de personnes est mal nourrie, souffrant d’insécurité alimentaire souvent chronique notamment dans ses régions septentrionales, régulièrement menacées de famine. Au comble de ces bizarreries, la constatation d’un budget public qui ne consacre que 171 milliards de Francs en cumul des ministères de l’Agriculture et de l’élevage, soit 2,54% de son effort global. Cela, très loin des engagements de l’Union africaine adoptés en 2014 à Maputo, qui suggéraient une base minimale de 10% des ressources publiques allouées au secteur agricole, annuellement. Dans une telle perspective, ce devrait donc être, non pas 171 milliards de Francs, mais bien 672 milliards de Francs, en 2024 dans la dotation accordée à ces deux ministères. C’est dire le gap ! Le Cameroun n’en serait donc certainement plus aux incantations mille fois entendues dans le vide. C’est dire que le chemin est encore long, pour réellement faire de ce pays le grenier qu’il se vante d’être, ne serait-ce que pour l’Afrique centrale. Une trajectoire dont les éléments de performance sont connus en termes de maitrise des semences, gestion de l’hydraulique, réforme foncière, désenclavement des pistes rurales, organisation paysanne, financements massifs et, bien sûr, industrialisation, entre autres.