Corinne Maier : L'Heure des Livres (Émission du 22/02/2024)

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Anne Fulda reçoit Corinne Maier pour son livre «#Me first !» dans #HDLivres

Transcript

00:00 -Bienvenue à l'heure des livres, Corinne Maillard.

00:02 Vous êtes psychanalyste, économiste.

00:04 Vous avez déjà écrit de nombreux essais,

00:07 dont on a beaucoup parlé, "Bonjour, paresse",

00:09 parmi d'autres.

00:10 Vous venez de publier "Me First",

00:12 manifeste pour un égoïsme féminin,

00:14 un livre qui est paru aux éditions de l'Observatoire,

00:17 un essai revigorant qui enjoint les femmes à penser à elle

00:21 et à sortir du schéma encore dominant

00:23 de la femme qui doit se sacrifier pour les autres.

00:26 C'est un livre qui s'adresse en priorité

00:30 aux femmes hétérosexuelles, d'ailleurs.

00:33 "Réflexion, pamphlet, guide pratique".

00:35 Pourquoi ce livre ?

00:37 Parce que, vraiment, ça reste quelque chose d'ancré

00:40 que l'égoïsme peut se concevoir, mais seulement aux masculins ?

00:44 -Oui, je pense qu'il y a des normes de comportement

00:47 qui sont encore là et qui, souvent, limitent les femmes

00:50 dans leurs ambitions, dans leurs désirs,

00:53 dans leur possibilité de faire des choses amusantes

00:56 dans leur vie.

00:57 Et donc, il m'a semblé qu'effectivement,

00:59 il fallait agir, en fait.

01:01 Il fallait agir, justement, en leur disant d'en faire moins

01:05 et de penser d'abord à elles.

01:07 Je crois qu'effectivement, tous les débats autour du care,

01:11 c'est-à-dire du soin des autres, sont particulièrement importants

01:15 aujourd'hui, puisque, effectivement, la société repose

01:18 sur le fait qu'on s'occupe les uns des autres.

01:21 Mais pourquoi les femmes font-elles, encore et toujours,

01:24 de ce travail de soin et du fait de veiller sur les autres ?

01:29 -Alors, avant tout, qu'entendez-vous par ce mot "égoïsme" ?

01:33 Parce qu'il y a toujours une conception négative,

01:36 même pour les hommes.

01:38 D'ailleurs, vous distinguez trois égoïsmes.

01:40 -Oui. Alors, le mien, enfin, celui que je conseille,

01:43 c'est un égoïsme du vivre pour soi.

01:45 C'est pas un égoïsme de compétition.

01:47 Il s'agit pas de marcher sur les autres

01:50 et d'arriver forcément en premier ou de bousculer tout le monde.

01:54 Il s'agit pas non plus de se replier sur soi-même,

01:57 c'est-à-dire sur une petite vie

01:59 qui peut être très fermée, en fait, à l'extérieur,

02:02 et une petite vie, je dirais, repliée sur ma maison,

02:05 mes enfants, mon mari, etc.

02:07 Donc, en effet, il faut redéfinir l'égoïsme

02:09 et considérer que l'égoïsme peut être une force de libération

02:13 pour certaines d'entre nous.

02:15 -On pourrait croire que l'égoïsme,

02:17 ou en tout cas, une manière de penser à soi,

02:19 c'est une vertu intégrée au XXIe siècle en France.

02:22 Mais non. Vous dites qu'il y a encore des pesanteurs,

02:25 des idées reçues qui survivent.

02:28 -Oui, la meilleure preuve, c'est qu'en effet,

02:31 les femmes font les deux tiers du travail domestique

02:34 et ça ne bouge pas. C'est ça qui est terrible,

02:37 enfin, qui est inquiétant. Il y a quand même un souci.

02:40 Ca devrait évoluer. On devrait mieux partager les tâches

02:43 et les femmes devraient avoir plus de possibilités, en fait,

02:46 de se libérer d'un certain nombre de comportements admis

02:51 vis-à-vis de leurs compagnons, de leurs maris,

02:54 des enfants, vis-à-vis de leurs parents.

02:56 -Vous écrivez que quand les femmes vivent pour elles-mêmes,

03:00 on les soupçonne de trahir leur nature supposée maternante.

03:03 Ca fait partie de ces clichés qui reviennent.

03:06 Une femme qui penserait trop à elle,

03:08 tout de suite, l'opprobre sur elle.

03:11 -Oui, c'est d'ailleurs frappant, la mode des femmes libres,

03:14 ce qu'on appelle maintenant les femmes libres,

03:17 qui a énormément d'occurrence sur Internet.

03:20 Elles sont jugées femmes libres a posteriori,

03:22 mais il y en a un certain nombre qu'on a montré du doigt

03:25 parce qu'on trouvait qu'elles secouaient

03:27 un certain nombre d'évidences dans leurs comportements

03:31 et elles secouaient le joux, parfois, de la famille,

03:34 du couple, etc.

03:35 Donc, il faut essayer d'être les femmes libres maintenant

03:39 et non pas avec le recul.

03:40 -Ce qui est intéressant, c'est qu'à vous lire,

03:43 ce qui empêche la plupart des femmes d'assumer une part d'égoïsme,

03:47 c'est l'amour.

03:48 -Oui, effectivement, je pense qu'il y a encore

03:51 ce sentiment que certaines femmes ont

03:57 de se dire que finalement,

03:59 elles vont se plier aux attentes des autres,

04:01 le compagnon ou les enfants,

04:03 parce qu'au nom de l'amour, en fait,

04:05 je pense que ça peut être une prison pour beaucoup d'entre nous,

04:09 donc il faut essayer de regarder tout ça

04:12 et puis d'étudier les aspects positifs

04:14 mais aussi les aspects négatifs que ça peut avoir

04:17 pour déployer nos ailes de géante.

04:19 -Vous ouvrez le livre par une citation de Benoît de Groult,

04:22 "L'égoïsme, c'est la santé".

04:24 Vous y faites référence à plusieurs reprises.

04:27 C'est quelqu'un qui a beaucoup compté pour vous ?

04:30 -Alors, non, mais à vrai dire,

04:32 c'est une auteur que j'ai lue récemment

04:35 et j'ai trouvé qu'elle avait une sorte de désinvolture

04:38 vis-à-vis d'un certain nombre de choses.

04:40 J'ai trouvé ça tout à fait rafraîchissant.

04:43 -Un peu liberté. -Oui, c'est ça.

04:45 Normalement, on pourrait considérer

04:47 que c'est peut-être une écrivaine un peu poussiéreuse,

04:50 et pas du tout.

04:51 J'ai trouvé ça frais,

04:52 j'ai trouvé qu'elle avait des réflexions sur la vie,

04:55 sur le monde, beaucoup de recul aussi sur sa propre existence.

04:59 Et j'ai trouvé qu'il y avait un message de vérité

05:02 qui touche tout le monde aujourd'hui.

05:04 -En tout cas, je vous conseille de lire ce livre.

05:07 Ça s'appelle "Me first",

05:09 "Manifeste pour un égoïsme au féminin".

05:11 Le message est clair, c'est paru aux éditions de l'Observatoire.

05:15 Merci de m'avoir reçu.

05:17 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA

05:20 [SILENCE]

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