- 05/07/2025
L’ère de conflit dans laquelle on se trouve menace-t-elle l’équilibre nucléaire ? Dans cette vidéo, Libération vous propose de vous plonger dans les rouages géopolitiques de la bombe nucléaire.
Entre les 12 jours de conflits lancés par Israël et justifiés par le risque que l’Iran obtienne la bombe nucléaire, la guerre en Ukraine où Vladimir Poutine brandit la menace de son arme de destruction massive tous les quatre matins, ces dernières années, l’équilibre nucléaire semble plus fragile que jamais.
Entre les 12 jours de conflits lancés par Israël et justifiés par le risque que l’Iran obtienne la bombe nucléaire, la guerre en Ukraine où Vladimir Poutine brandit la menace de son arme de destruction massive tous les quatre matins, ces dernières années, l’équilibre nucléaire semble plus fragile que jamais.
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00:0013 juin 2025, Israël bombarde l'Iran.
00:1012 jours de conflits et selon les derniers bilans, 900 morts iraniens et 28 morts israéliens.
00:17Tout ça justifié par le risque que l'Iran obtienne l'arme nucléaire.
00:21Les Etats-Unis ont frappé dans la nuit de samedi à dimanche trois sites nucléaires iraniens.
00:2624 février 2022, invasion russe en Ukraine.
00:28Depuis, Poutine brandit la menace de sa bombe nucléaire.
00:31Nous accorderons une attention particulière à notre triade nucléaire.
00:35Encore.
00:42Et encore.
00:45Alors aujourd'hui, on va prendre du recul.
00:47Dans cette ère de conflit dans laquelle on se trouve, on va prendre le temps de diagnostiquer la santé de l'équilibre nucléaire mondial.
00:54Est-ce qu'on risque vraiment que demain, une bombe nucléaire embrase le monde ?
00:58Depuis 1968, la quasi-totalité de la communauté internationale s'est engagée à ne pas faire proliférer la bombe nucléaire.
01:10C'est le sens du traité de non-prolifération, aussi appelé TNP.
01:14D'après ce texte, les cinq pays qui ont testé l'arme nucléaire avant le 1er janvier 1967 sont autorisés à la détenir.
01:21Ce sont les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni, la Chine et la Russie.
01:26Tous les autres états non dotés et signataires de ce traité se sont donc engagés à ne pas développer la bombe nucléaire.
01:33Pour faire respecter ses obligations, une institution a été créée.
01:36C'est l'Agence internationale de l'énergie atomique.
01:39Elle s'assure que ces pays n'aient pas un programme nucléaire militaire.
01:42Et puis il y a trois états qui n'ont pas signé le traité et qui ont développé une arme nucléaire sans contrevenir aux droits internationaux.
01:49C'est l'Inde, le Pakistan et Israël qui, lui, petite particularité, n'a jamais affirmé publiquement avoir la bombe.
01:56Et enfin la Corée du Nord qui est sortie du traité en 2003 et a réalisé son premier essai nucléaire en 2006.
02:03On a donc neuf états qui ont un pouvoir de destruction immense.
02:07Et pour nous protéger d'une escalade, il respecte un équilibre géopolitique assez subtil.
02:12C'est le principe de dissuasion nucléaire.
02:13En gros, si on le simplifie, c'est ça.
02:15Si tu m'attaques, je suis capable de te détruire avec une arme atomique.
02:19Donc tu n'as aucun intérêt à le faire.
02:21C'est ce principe qui évite que les grandes puissances de ce monde s'engagent dans un conflit direct.
02:27Mais pour que la dissuasion nucléaire fonctionne, il ne suffit pas d'avoir la bombe.
02:30On va aller voir Héloïse Fayet.
02:32Elle est chercheuse et spécialiste de la dissuasion nucléaire et elle va nous éclairer.
02:36La dissuasion nucléaire, elle repose sur trois types de crédibilité.
02:40Déjà une crédibilité technique.
02:41Pour que votre adversaire soit dissuadé par vos armes nucléaires, il faut qu'elle fonctionne.
02:45C'est pour ça notamment que les états font des tirs réguliers de leurs missiles balistiques sans tête nucléaire, évidemment.
02:52Ensuite, il y a une capacité opérationnelle.
02:55C'est-à-dire que votre adversaire doit être certain que si jamais le chef d'état appuie sur le bouton, l'arme nucléaire va partir.
03:02Et après, le troisième pilier qui est le plus important, je pense, c'est la crédibilité politique.
03:08C'est-à-dire que le chef d'état, celui qui a la responsabilité du feu nucléaire, il doit pouvoir être sérieux et crédible sur le fait que oui, peut-être un jour, il prendra la responsabilité de dizaines de millions de morts,
03:19de plusieurs millions de morts pour sauver, en fait, pour assurer la survie de son état.
03:25Et donc, paradoxalement, s'exposer, lui aussi, à une riposte nucléaire.
03:30Alors quand vous voyez la Russie mettre en état d'alerte ses forces nucléaires...
03:33Nos forces nucléaires sont toujours en alerte.
03:36En fait, c'est comme quand la France simule un raid nucléaire aérien ou qu'Emmanuel Macron plonge dans un sous-marin nucléaire lanceur d'engins.
03:43C'est une technique qu'on appelle le signalement stratégique et qui permet aux états de rappeler la crédibilité de leurs forces nucléaires.
03:49La France, les Etats-Unis et la Russie le font assez régulièrement.
03:52Mais bon, il y a quand même une particularité avec la Russie, parce que depuis le début de la guerre en Ukraine,
03:57Poutine brandit quand même très souvent cette menace nucléaire.
04:00Et ça, c'est quand même un déstabilisateur, ça peut créer de l'incompréhension.
04:03On sait pas ce qui est vrai, on sait pas ce qui n'est pas vrai, on sait pas ce qui est de la menace, ce qui est sérieux ou pas.
04:08Mais il y a aussi le développement de nouvelles armes qui peuvent venir brouiller ce jeu subtil.
04:13Vous avez probablement entendu parler de l'Oreshnik.
04:15Il a notamment été utilisé en Ukraine, sur la ville de Dnipro, en novembre 2024.
04:19Et il fait partie de cette catégorie de missiles qui sont capables de porter à la fois une charge conventionnelle, classique, et une charge nucléaire.
04:27Je vous en parle parce que ce missile, il est la source de beaucoup d'inquiétudes.
04:31Genre, à tout moment, la Russie lance l'Oreshnik avec une charge nucléaire,
04:34et nous, on n'est pas au courant parce qu'on s'imagine qu'il porte une charge classique.
04:37Il est improbable, voire impossible, que la Russie décide, out of the blue, on va dire, d'utiliser une arme nucléaire.
04:46S'ils en sont là, c'est qu'il y aura eu forcément une escalade extrêmement forte avant,
04:53et qu'il y aura eu d'autres signaux, pour le coup, conventionnels, mais aussi des discours,
04:57des communications directes entre les chefs d'État, pour que là, ça soit extrêmement clair,
05:04la prochaine étape, c'est potentiellement l'utilisation d'une arme nucléaire.
05:07Donc, sur l'utilisation de l'Oreshnik, à aucun moment, on s'est dit que les Russes allaient utiliser une arme nucléaire contre l'Ukraine.
05:15Mais c'est certain que la prolifération, en fait, de ces missiles à double capacité,
05:22c'est quand même assez dangereux pour la stabilité stratégique.
05:25Le signalement stratégique, des fois, ça peut être très compliqué de faire en sorte que le destinataire du message,
05:31il comprenne bien ce que vous vouliez dire.
05:33Et donc, c'est pour ça qu'il est très important, en parallèle, de maintenir des dialogues ouverts.
05:38Et justement, entre les cinq États qui ont testé leur arme nucléaire avant 1967,
05:43les dialogues ouverts, ils sont quand même très ancrés.
05:45Si jamais il y a une incompréhension, ils peuvent la clarifier lors de réunions.
05:48Mais s'il commence à y avoir plus de pays disposant de l'arme atomique, ça peut complexifier la donne.
05:54On va partir à la rencontre d'Emmanuel Maître.
05:56Elle est chercheuse à la Fondation pour la Recherche Stratégique.
06:00Et elle va nous apporter quelques éclairages.
06:01Quand les États-Unis, notamment, et l'Union Soviétique ont négocié le traité de non-prolifération dans les années 60,
06:09il y avait une idée principale qui était de dire
06:11la dissuasion nucléaire apporte une forme de stabilité.
06:15Mais si on commence à être une dizaine, une vingtaine, une trentaine à être dans ce jeu-là,
06:21ça va être absolument impossible de comprendre les dynamiques, de maîtriser les dynamiques.
06:26Et forcément, à un moment, ça va augmenter le risque d'utilisation d'armes nucléaires.
06:30Alors quand de nouveaux acteurs ont voulu profiter du pouvoir de dissuasion de la bombe nucléaire,
06:34il y a eu beaucoup de questionnements.
06:35Est-ce qu'un chef d'État comme Kim Jong-un est suffisamment rationnel pour ne pas lancer une bombe nucléaire ?
06:40Est-ce qu'un gouvernement comme le Pakistan est capable de conserver ses armes nucléaires à l'abri
06:45face aux groupes insurrectionnels terroristes ?
06:47Et est-ce que les chaînes de commandement sont suffisamment fiables ?
06:49Et aujourd'hui, je crois que...
06:51Par exemple, pour la Corée du Nord, on s'aperçoit qu'il y a sans doute finalement une forme de rationalité,
06:54parce que ça fait maintenant plusieurs années qu'ils ont l'arme nucléaire,
06:57et de manière plus ou moins spontanée, il y a quand même une forme de dissuasion qui s'opère avec la Corée du Nord.
07:05Et aussi, je pense qu'on a vu le duopole Inde-Pakistan être stabilisé par la possession d'armes nucléaires.
07:21C'est ce qu'on appelle le paradoxe d'instabilité-stabilité.
07:25C'est que si deux pays qui sont déjà en conflit obtiennent l'arme nucléaire dans des dimensions similaires,
07:33ça peut favoriser le risque de conflits de basse intensité,
07:39mais ça réduit le risque de conflits de très haute intensité.
07:43Bon, au final, on se retrouve avec neuf pays qui ont l'arme nucléaire,
07:46et l'équilibre semble tenir bon.
07:48Mais en parallèle, il y a le cas de l'Iran.
07:49Cette nation ne se rendra jamais.
07:55On va en discuter avec Amdam Mostafavi.
07:58Elle est directrice adjointe de Libération, et aussi spécialiste du Moyen-Orient.
08:01On sait depuis une vingtaine d'années à peu près que l'Iran développe un programme nucléaire
08:06qui n'est pas seulement civil, mais qui est aussi militaire.
08:10Pourquoi ? Parce que c'est le seul pays qui fait de l'enrichissement de l'uranium
08:13sans avoir, a priori, d'arme atomique.
08:17Grâce à des inspections de l'AIEA, on a découvert que l'Iran enrichissait l'uranium jusqu'à 60%,
08:22sachant que pour faire une bombe atomique, en gros, il faut enrichir l'uranium jusqu'à 90%.
08:28Et qu'en gros, une fois que tu as la technologie pour enrichir l'uranium à 60%,
08:34c'est une question de jour pour enrichir à 90%.
08:37Après, une fois que tu as ton uranium enrichi, il faut le mettre sur une arme.
08:42Donc ça, c'est un processus aussi technique.
08:44On ne sait pas à quel point les Iraniens ont la connaissance pour militariser cela,
08:49mais on peut imaginer qu'ils ont acquis quand même en vingt ans une certaine connaissance dans le domaine.
08:53Comme je vous l'expliquais, pour maintenir un bon équilibre nucléaire,
08:58il faut des relations, des liens de communication qui soient solides.
09:01L'objectif, c'est d'éviter une incompréhension autour de la bombe nucléaire
09:05qui pourrait mener à une catastrophe.
09:07Et par rapport à ça, le cas de l'Iran est quand même un petit peu particulier.
09:10De fait, le régime qui est en place en ce moment en Iran, celui de la République islamique,
09:14est assez isolé.
09:15En tout cas, ils sont dans une tension très forte avec les pays occidentaux,
09:20notamment avec les Etats-Unis.
09:23Les dirigeants iraniens qualifient ouvertement les Etats-Unis de « grand Satan »,
09:28Israël de « petit Satan ».
09:30Il faut aussi rappeler que l'Iran a comme fondement idéologique la destruction d'Israël.
09:35C'est l'inverse des doctrines nucléaires des puissances traditionnelles.
09:38L'objectif de la bombe atomique n'est pas de détruire son voisin,
09:42elle a une finalité défensive.
09:43Et puis finalement, le 13 juin.
09:52Résultat, de nombreux échanges de missiles, des bombardements américains,
09:55un programme nucléaire iranien retardé de 1 à 2 ans selon le Pentagone,
09:59900 morts iraniens et 28 morts israéliens.
10:04Les Iraniens, ces dernières années, étaient plutôt repartis dans un cycle de négociations.
10:10Il faut quand même rappeler qu'il y a eu un accord important en 2015,
10:14un accord par lequel les Iraniens acceptaient de faire réguler leur programme nucléaire,
10:18d'avoir les inspections de la IEA et d'avoir une transparence sur leurs activités.
10:24C'est Donald Trump lui-même qui a mis fin à cet accord.
10:27Et c'est vrai que par contre, depuis que cet accord s'est achevé,
10:30on a beaucoup moins de visibilité sur leurs activités nucléaires.
10:34Par contre, depuis plusieurs semaines, depuis le retour de Donald Trump au pouvoir,
10:38les Iraniens étaient rentrés dans un cycle de négociations.
10:40C'est aussi pour ça qu'ils ne s'attendaient pas du tout à ce que leurs installations soient attaquées.
10:45Depuis les attaques israéliennes, beaucoup d'experts soulignent qu'en fait,
10:48l'Iran jouait déjà sur le tableau de la dissuasion.
10:51Il semblait utiliser la stratégie de la latence nucléaire.
10:54C'est une technique de certains États candidats à la prolifération, comme le Japon par exemple.
10:58En gros, on fait savoir qu'on a toutes les capacités techniques pour développer la bombe atomique.
11:02Comme ça, on bénéficie de la protection qu'apporte le principe de dissuasion,
11:06sans avoir besoin de détenir une arme nucléaire.
11:10Mais l'attaque d'Israël et les bombardements américains ont fait voler en éclat cette stratégie.
11:14L'épisode qu'on vient de voir entre Israël, États-Unis et Iran,
11:19effectivement, je pense qu'il y a deux leçons très opposées
11:22qui peuvent être tirées par les États candidats à la prolifération.
11:25Donc il y a des États d'un côté qui peuvent se dire « ça ne vaut pas la peine de se lancer dans la course à l'arme nucléaire »
11:31ou de maintenir en fait cette ambiguïté et cette stratégie de latence nucléaire.
11:36Du coup, les États peuvent se dire « soit on abandonne tout et on investit dans des forces conventionnelles »
11:43et « on se joint par exemple à une alliance nucléaire »
11:46ou alors d'autres États peuvent se dire « comme cette stratégie de latence nucléaire ne fonctionne pas,
11:52autant aller très vite vers la construction d'une arme nucléaire ».
11:57Ce 2 juillet, l'Iran a validé une loi qui suspend la coopération avec l'Agence internationale de l'énergie atomique.
12:04Il y a donc une possibilité que l'Iran décide de sortir du traité de non-prolifération
12:08et de continuer à développer son programme nucléaire militaire,
12:13mais cette fois-ci de manière beaucoup plus souterraine et beaucoup plus clandestine.
12:17Bon, ça ne veut pas dire qu'il y a une nouvelle course à l'armement nucléaire qui se profile,
12:21qu'on va voir des bombes nucléaires popper dans tous les pays du monde,
12:24mais d'un côté les pays qui l'ont déjà commencent à moderniser leur arsenal,
12:29et de l'autre on observe que la Chine accroît son stock d'armes nucléaires.
12:32Elle est encore en dessous de ce que possèdent les Etats-Unis et la Russie,
12:36mais ça crée une pression aussi du côté américain pour se demander s'il leur faut à nouveau accroître l'arsenal
12:43pour répondre à la menace russe et potentiellement chinoise conjuguée.
12:47Mais aujourd'hui, les Etats-Unis ne sont pas nécessairement une menace
12:50parce qu'ils pourraient augmenter le nombre de leurs armes atomiques.
12:53Non, c'est plutôt parce qu'ils ont à leur tête un homme qui sème les graines du chaos
12:58dans cet équilibre nucléaire pourtant fragile.
13:00La dissuasion nucléaire et le signalement stratégique nucléaire,
13:03ce n'est pas quelque chose qu'il faut être pris à la légère.
13:06Ça se fait à l'aide de discours qui sont censés être très calibrés.
13:11Et cette diplomatie par tweet de Donald Trump, il est en roue libre.
13:16Quand il réagit par exemple au propos de Dmitri Medvedev,
13:19l'ancien Premier ministre et ancien président de la Fédération de Russie,
13:23s'est exprimé sur les réseaux sociaux par rapport au fait que la Russie avait des armes nucléaires
13:29et que potentiellement ils pouvaient aider l'Iran à en construire.
13:33Ce qui n'est pas du tout l'intérêt stratégique de la Russie et ce n'est pas ce qui se fait actuellement.
13:38Et Donald Trump, au lieu de laisser couler, parce que vraiment plus personne n'écoute Dmitri Medvedev,
13:44il a réagi à ses propos sur Truth Social en expliquant qu'il était absolument intolérable de dire ça,
13:51mais en parallèle, en rappelant que de toute façon, c'était l'arsenal nucléaire américain
13:56qui était le plus puissant et puis qu'ils avaient une vingtaine de sous-marins nucléaires lanceurs d'engins
14:01qui, le sous-entendu était très clair, qui était prêt à les utiliser contre la Russie
14:06si jamais la Russie voulait aider l'Iran à avoir des armes nucléaires.
14:09Donc on est vraiment sur un niveau, ce que je disais, de désinhibition autour de la parole nucléaire
14:15qui est à mon avis extrêmement grave parce que je pense qu'in fine, ça risque de la transformer un peu
14:22en une sorte de super-arme conventionnelle, ne serait-ce aussi parce qu'on s'éloigne de plus en plus d'Hiroshima et Nagasaki,
14:30ça fait quand même 80 ans cette année, et donc je pense qu'on a de moins en moins en tête
14:35les conséquences humanitaires de l'utilisation d'une arme nucléaire, son potentiel destructeur
14:40et que ça devient en fait un peu une arme comme les autres, alors qu'en fait, ça ne l'est pas du tout.
14:44Sous-titrage Société Radio-Canada
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