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00:007h-9h, Europe 1 matin.
00:02L'édito politique sur Europe 1 avec Le Figaro.
00:04Bonjour Vincent Trémolet de Villers.
00:06Bonjour Dimitri, bonjour Anissa, bonjour à tous.
00:08Véronique Verdun vient de nous le dire à l'instant,
00:10François Bayrou veut donner un petit peu de temps
00:12aux organisations syndicales pour
00:13trouver le compromis sur les retraites
00:15qu'elles ne sont pas parvenues à atteindre lors de ce fameux
00:18conclave, ce qui au passage
00:19lui permettrait, lui, de gagner quelques semaines
00:22de sursis. A priori, François Bayrou
00:24ne sera pas censuré mardi prochain.
00:26Malgré une impopularité record,
00:28il devrait donc passer l'été à Matignon,
00:29ce qui, apparemment, impatiente Emmanuel
00:32Macron. Pourtant, un Premier ministre
00:33s'est fait pour être usé jusqu'à l'accord, non Vincent ?
00:36En temps normal, évidemment Dimitri,
00:38mais le problème avec François Bayrou, c'est qu'il
00:40atomise ce qu'il reste de fiction
00:42jupitérienne. Comme Alain Juppé
00:44incarnait physiquement l'impôt,
00:45Bayrou incarne magistralement la
00:48fin de règne, il est le miroir déformant
00:50dans lequel le jeune président voit son présent
00:52et son avenir, la forme vivante
00:54de sa puissance révolue. Quand
00:55Emmanuel Macron le reçoit, il se trouve
00:57face à un Premier ministre qu'il ne voulait pas nommer,
00:59et qui est pourtant depuis plus de six mois à Matignon,
01:02et il est aussi devant un Premier ministre qu'il ne
01:03peut pas limoger. Alors, au-delà même
01:06de cette impuissance dans la nomination et l'éviction,
01:08François Bayrou donne aux heures finissantes
01:10du macronisme une vérité cruelle.
01:12Pourquoi ? Parce que le Premier ministre
01:13ne fait pas semblant. Macron
01:15lui vole d'avion en avion, fait des points prêts sur
01:17tous les continents, promets monts et merveilles
01:19et s'aimante au micro et aux caméras
01:21dès qu'il le peut. Il s'acharne
01:23à cacher le vide ou à le remplir.
01:25François Bayrou, lui, ne prend jamais l'avion,
01:28sauf quand il va à Pau.
01:30Il pousse les jours les uns après les autres
01:31en disant presque publiquement qu'il ne
01:33peut pas faire grand-chose et que tout cela ne va
01:35plus durer très longtemps. Ce n'est pas la politique
01:38de la chaise vide, c'est la politique du
01:39vide, mais bien installé sur sa chaise.
01:42On peut comprendre, Vincent, que
01:43les formes, disons, plus lentes
01:45du Premier ministre crispent un président,
01:47lui qui est encore très actif ou désireux de l'être.
01:49Vous savez, Dimitri, à l'Elysée,
01:51ça en devient parfois irrationnel.
01:53Ça a commencé au début avec quelques
01:54férocités entre les murs, puis des
01:56confidences aux journalistes sur un Premier
01:58ministre qui arriverait aux réunions sans aucun
01:59dossier et sans aucune note, un chef du
02:01gouvernement qui serait plus soucieux de
02:03garnir sa table que son agenda.
02:05Mais là, nous sommes maintenant passés à une
02:06phase beaucoup plus active, puisqu'apparemment
02:09quelques émissaires bienveillants se chargent
02:11de plaider pour la censure auprès des
02:13groupes parlementaires d'opposition, ce qui est
02:15sans doute contre-productif. En censurant
02:17fois sans François Bayrou, Marine Le Pen offrirait
02:19alors un beau cadeau à Emmanuel Macron.
02:22Et c'est peut-être aussi pour cela que la
02:23patronne des députés RN ne se presse pas.
02:25Entre déplaire à Macron en épargnant Bayrou et
02:27plaire à ses électeurs en censurant le
02:29Premier ministre, le cœur de la patronne du
02:30RN balance.
02:31Ce que vous décrivez, Vincent, ça ressemble
02:33à une cohabitation. On n'en somme pas là,
02:35mais les deux hommes sont dans le même camp.
02:37Oui, mais ce sont deux caractères, deux
02:38générations, deux trajectoires étrangères
02:41l'une à l'autre qui cohabitent.
02:42Macron est un young leader qui ne veut pas
02:43vieillir. Bayrou est un vieux briscard
02:46qui ne veut pas partir. Le premier voit la
02:48France comme une start-up au logo dessiné
02:49par Thomas Jolie. Le second comme un
02:51paysage montagneux avec un clocher, des
02:53vaches et l'ombre de Charles Péguy.
02:55Le paradoxe, c'est que sur le fond, il y a
02:57peu de motifs d'affrontement. Le Premier
02:58ministre se désintéresse absolument de la
03:00diplomatie, le domaine réservé du
03:02président. Et il n'y a que sur les budgets
03:04militaires finalement que ça coince. Le
03:06président veut les augmenter. Le Premier
03:08ministre veut faire des économies et
03:09accessoirement ne pas donner une rallonge à
03:11son rival, le ministre de la Défense,
03:12Sébastien Lecornu. La chose devrait être
03:14tranchée avant le 14 juillet.
03:15Pour le reste, le mode de fonctionnement
03:17est maintenant bien huilé. Le président
03:19n'est jamais à Paris. Mais quand il
03:21rentre, François Bayrou est toujours à
03:23Matignon. Vous avez sans doute vu,
03:25Dimitri, la vidéo du Premier ministre
03:26qui, lors du salon du Bourget, peine à
03:29sortir du cockpit d'un rafale. Et bien
03:31à Matignon, c'est pareil, il y est entré
03:33facilement. Mais maintenant que François
03:34Bayrou est installé, Emmanuel Macron ne
03:36sait pas comment l'en sortir.
03:37L'édito politique sur Europe 1. Merci
03:39Vincent Trémolet de Villers.

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