Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • avant-hier
L'historienne Michelle Perrot était l'invitée de 9h20 sur France Inter, mercredi 18 juin, pour le documentaire “Michelle Perrot, dans l’intimité des chambres” de Teri Wehn-Damisch. Il sera diffusé sur France 5 dimanche 22 juin, à 22h55.

Retrouvez « L'interview de 9h20 par Léa Salamé » L'interview de 9h20 avec Léa Salamé sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Et Léa, ce matin, vous recevez une très grande historienne.
00:03Bonjour Michel Perrault.
00:05Bonjour Léa Salamé.
00:06Mais on est très heureux de vous avoir ce matin, de vous entendre ce matin également,
00:10et de parler de ce documentaire qui va être diffusé dimanche soir sur France 5.
00:14Mais d'abord, je commence par mes questions rituelles.
00:16Si vous étiez un livre, un paysage et un défaut, vous seriez quoi ?
00:22Le livre La Recherche du Temps Perdu,
00:24Le paysage, un paysage de mer au nord du Cotentin, par exemple.
00:31Et la troisième question ?
00:33C'est le défaut.
00:34La paresse.
00:35La paresse ?
00:35Oui.
00:36Vous êtes paresseuse ?
00:37Non.
00:39Mais vous aimeriez l'être.
00:40Mais voilà.
00:42Michel Perrault, vous êtes une très grande historienne, comme disait Nicolas,
00:46la grande historienne de la condition ouvrière,
00:48mais aussi l'une des plus grandes historiennes du féminisme.
00:50Vous vous êtes battue toute votre vie pour qu'on reconnaisse la place des femmes dans l'histoire,
00:54en créant en 1973 le premier cours d'histoire des femmes à l'université.
00:58C'était à Jussieu.
00:59Vous êtes l'autrice d'une remarquable histoire des femmes en Occident,
01:03en cinq tomes qui fait référence.
01:05Virginia Woolf écrivait
01:07« Une femme doit avoir de l'argent et une chambre à soi ».
01:11Pourquoi cette phrase est si importante à vos yeux ?
01:15Pourquoi cette phrase est si importante dans l'émancipation des femmes ?
01:19Avoir de l'argent, chaque femme doit avoir de l'argent et une chambre à soi.
01:24Parce que généralement, ce sont les choses qui lui manquent.
01:28À la fois l'autonomie que donne l'argent dans notre société,
01:32par conséquent c'est très important que les femmes travaillent
01:36et puissent acquérir toutes les professions qu'elles veulent.
01:38Et puis l'espace, parce que l'espace est consubstantiel à notre vie,
01:45à notre réflexion, à l'écriture, à la possibilité de prendre de la distance.
01:52Et quelquefois, ça n'a pas toujours été facile pour les femmes d'avoir un espace à elles.
01:59Voilà, d'avoir un endroit où elles peuvent fermer la porte et dire
02:01« Là, c'est pour moi, ce n'est pas pour mon mari, ce n'est pas pour mes enfants,
02:06ce n'est pas pour mes parents, c'est à moi, c'est chez moi et je ferme la porte. »
02:09C'est très important.
02:10« Le droit au secret. »
02:12« Le droit au secret. »
02:13« Les chambres, la chambre sont au cœur de ce très beau documentaire
02:16où vous vous livrez comme jamais, Michel Perrault.
02:19Ça s'appelle « Michel Perrault dans l'intimité des chambres »
02:21de Théry Vendamich qui sera diffusé ce dimanche sur France 5.
02:25Et vraiment, je conseille à tout le monde de le regarder.
02:27Ça dure 50 minutes.
02:2850 minutes où on traverse votre vie, Michel Perrault.
02:31Et à travers vous, on traverse le siècle.
02:33Parce que vous êtes né en 1928, et oui, ce qui vous fait donc 97 ans.
02:39On le dit, on a le droit de le dire ou pas ?
02:41Écoutez, depuis le temps qu'on le dit, vous pouvez y aller.
02:44J'y vais, j'y vais.
02:45Bon, sachant que quand on vous entend ce matin,
02:47vous semblez plus jeunes que Nicolas et moi, réunis.
02:51Et c'est vrai que né en 1928, votre vie est une véritable traversée du siècle.
02:56Une épopée, vous avez connu le front populaire, vous avez connu la guerre,
02:59vous avez connu la guerre éclate, vous avez 11 ans,
03:01vous avez connu le front populaire, mai 68, les batailles pour l'avortement du MLF,
03:06jusqu'à mi-tour récemment.
03:08Et ce documentaire est passionnant, il y a des archives incroyables.
03:11Mais je me suis dit, pourquoi elle a accepté Michel Perrault,
03:14qui toujours avait dit, j'aime pas parler de moi.
03:17Vous disiez même, je suis historienne pour ne pas parler de moi,
03:20voire pour ne pas y penser, parce que je trouvais que le moi,
03:23mon moi, n'avait rien d'extraordinaire.
03:25Alors pourquoi avoir accepté aujourd'hui de parler face caméra dans ce documentaire,
03:29pour laisser une trace ?
03:31Je crois que Théry Damichet et Fabienne Servan-Schreiber,
03:35qui sont à l'origine de ce film,
03:39m'ont un petit peu...
03:40Pendant longtemps, elles m'ont demandé, j'ai dit non.
03:43Et en introduisant les chambres,
03:45pourquoi vous ne parlez pas des chambres ?
03:47Parce que j'ai écrit là-dessus.
03:49J'ai dit oui, si vous voulez, ça c'est bien.
03:51Et autrement dit...
03:52Elles vous ont eu ?
03:53Elles vous ont eu par les chambres.
03:55Elles vous ont eu par les chambres.
03:56Parce que ce qui est intéressant, c'est effectivement qu'elles utilisent les chambres,
03:59puisque le documentaire est tourné dans différentes chambres d'un endroit,
04:04d'un lieu symbolique pour vous,
04:06qui est la maison de Georges Sand.
04:07Vous racontez donc votre vie, vous racontez le siècle,
04:10de chambre en chambre,
04:11vous passez dans cette maison qui existe toujours,
04:14qui est à Nohans, dans le Berry.
04:16Pourquoi vous avez eu besoin des chambres et de Georges Sand
04:19pour pouvoir vous livrer ?
04:21Comme d'autres ont besoin d'un divan,
04:22vous avez eu besoin des chambres de Georges Sand.
04:24Alors, les chambres en général, ça me paraît un lieu très intéressant à tout point de vue,
04:34une espèce de condensée de la vie, d'intrigue de la vie.
04:38Bon, j'ai fait un livre là-dessus.
04:41Georges Sand, oui, je l'aime bien.
04:44Je l'ai découverte il y a déjà des années.
04:47Et je connaissais bien sa maison.
04:51Par conséquent, l'idée de retourner chez elle
04:54et de pouvoir évoquer sa vie,
04:57oui, ça m'intéressait.
04:58Parce que vous savez, c'est vrai que je n'aime pas parler de moi.
05:01Et là, j'ai l'impression que je me suis laissé un petit peu posséder.
05:04Oui, mais franchement, ça vaut le coup.
05:06Ça vaut le coup.
05:07Elles ont bien fait de vous avoir.
05:09L'importance des chambres.
05:10Oui, vous avez fait un livre il y a 15 ans sur l'histoire des chambres.
05:14Et c'est vrai que vous racontez l'importance de la chambre dans nos vies.
05:17Lieu du sommeil, de la méditation, des rêves, des insomnies,
05:20de la toilette, de la lecture, de l'amour, du sexe.
05:23Lieu parfois aussi des disputes et des séparations.
05:27C'est dans notre chambre qu'on passe la moitié de notre vie.
05:29Eh oui.
05:32On lit aussi.
05:33On lit aussi la lecture, bien sûr.
05:35Qu'est-ce qu'elle dit de nous, notre chambre ?
05:37Elle ne dit peut-être pas grand-chose,
05:40mais elle nous permet de penser à nous.
05:43Voilà, c'est ça.
05:44C'est ça qui est intéressant.
05:47Mais je voudrais juste une seconde revenir.
05:50Vous avez évoqué l'histoire des femmes en Occident,
05:52l'attribuant.
05:53C'est un ouvrage collectif que j'ai co-dirigé il y a des années
05:57avec Georges Duby.
05:58Mais je voudrais vraiment rendre hommage aux directrices de volumes
06:03qui ont été tellement importantes.
06:05Ça a été vraiment un ouvrage collectif.
06:06C'est tout vous, cette petite remarque.
06:10Ce qui est fou, c'est que vous vivez aujourd'hui
06:13toujours dans l'appartement de vos parents
06:16où vous avez vécu avec votre mari.
06:18Vous n'avez jamais changé de chambre, Michel Perrault.
06:20Quasiment.
06:21Vous avez un peu changé au début.
06:22On va revenir sur votre vie parce que c'est passionnant.
06:25Mais j'ai appris que ça fait 70 ans
06:28que vous vivez dans le même appartement
06:30que vous dormez dans la même chambre.
06:31Oui, mais c'est peut-être à la limite le seul endroit
06:36où je me sens vraiment bien.
06:38Et où j'ai l'impression d'être avec les gens que j'ai aimés beaucoup.
06:45C'est une espèce de condensé où je me sens bien.
06:49Voilà.
06:49Alors, autant y rester.
06:51Vous racontez dans cette vie,
06:55vous racontez cette vie dans ce documentaire
06:58« Fille unique de parents aimants » à Paris
07:00entre le quartier des Halles et votre école Bossuet
07:02qui était dans le 10e arrondissement de Paris.
07:04Née en 1928, les 10 premières années de votre vie,
07:07dites-vous, avant le début de la guerre,
07:08ont été très heureuses.
07:10J'étais ?
07:11Heureuse.
07:12J'ai eu une enfance enchantée.
07:14Voilà, c'est ce que vous dites.
07:15Une enfance absolument enchantée
07:17avec des parents amoureux.
07:21C'est très important.
07:23En même temps, très attentif à moi,
07:26mais drôle aussi.
07:29Véritablement, oui, c'est...
07:32Je n'ai pas envie de les quitter finalement, au fond.
07:36Vous avez 11 ans quand la guerre éclate.
07:38Une image capitale dans votre vie,
07:40c'est d'avoir vu les femmes tondues en 1945 après la guerre.
07:44Les femmes tondues parce qu'elles ont couché avec des Allemands.
07:47Pourquoi cette image vous a profondément marquée ?
07:50C'était bouleversant.
07:51C'était absolument bouleversant.
07:52Parce qu'on était dans l'ambiance de la libération
07:55qui était quand même formidable.
07:57Et sur la place, une petite place de Montmorency,
08:01faisant mes courses,
08:03je vois ça.
08:05Des femmes tondues par des hommes hilares.
08:08Et peut-être que cette scène,
08:11je l'ai par ailleurs remaniée par la suite,
08:14parce qu'on en a vu aussi beaucoup.
08:16D'ailleurs, c'est toujours un problème, ça.
08:19C'est de savoir, est-ce qu'on se souvient vraiment
08:21des choses qu'on a vues ?
08:23Est-ce qu'on les remanie pas ?
08:24Ou est-ce qu'on les réécrit pas ?
08:25Mais oui, ça m'a beaucoup, beaucoup marquée.
08:29Et d'autant plus qu'on disait,
08:32mais c'est une telle, elle habitait à tel endroit,
08:35puis elle faisait la noce avec les Fridolin, etc.
08:39Oui, oui, j'ai trouvé ça très violent.
08:41Et je me suis sentie solidaire de ces femmes.
08:45Oui, et ce sera le début d'un long compagnonnage
08:50de sororité avec les femmes.
08:52On va y venir.
08:53Mais puisqu'on est sur la guerre,
08:55là aussi, moi j'ai découvert des choses,
08:57beaucoup de choses sur vous dans ce documentaire.
08:59Vous faites l'épreuve de l'anorexie.
09:01Vous faites une déprime, vous refusez de manger.
09:04Oui, oui, oui.
09:05La guerre a été quelque chose, évidemment,
09:09de très brutal dans une vie qui était heureuse.
09:13Et le problème, il y avait le problème des prisonniers.
09:19Au cours Bossuet où j'étais, au cours religieux,
09:21il y avait un discours de la culpabilité terrible.
09:26Ça nous tombait sur les épaules
09:28et on avait surtout l'impression que nos parents étaient coupables
09:32et que, par ailleurs, on avait des privilèges.
09:35Manger, c'était un problème.
09:37Les prisonniers, est-ce qu'ils mangeaient, eux ?
09:39Alors, du coup, la nourriture, pour moi,
09:42est devenue quelque chose de...
09:45Oui, un péché.
09:46Alors que mes parents faisaient tout ce qu'ils pouvaient, bien entendu,
09:50pour qu'on ait quelque chose.
09:52On avait des cousins à la campagne.
09:54Et justement, le fait d'avoir quelque chose
09:57me paraissait coupable.
10:00Et donc, vous avez refusé de manger ?
10:01Ma défense, c'était de ne pas manger.
10:04Voilà.
10:04Ne pas manger.
10:05Alors, tout ça, vous savez, c'est compliqué.
10:08Parce que, quand on est adolescente,
10:10on ne supporte pas toujours bien son adolescence.
10:13Et il y a beaucoup d'adolescentes qui font de l'anorexie
10:16à ce moment-là.
10:18Surtout, ne pas grossir, etc.
10:20Je ne suis pas sûre que tout ça ne se soit pas mélangé dans ma tête
10:25et que j'ai trouvé toutes sortes de raisons
10:28d'être anorexique.
10:30De ne pas manger à ce moment-là.
10:31Et de ne pas manger.
10:32Et de ne pas manger à ce moment-là.
10:34Puis, après la guerre,
10:36il y a 1949,
10:39la lecture du deuxième sexe de Beauvoir
10:40qui sera un choc pour vous.
10:42Et puis, quelques années plus tard,
10:44un film que vous allez aller voir avec votre copine,
10:46Mona Ouzouf,
10:47puisque vous étiez enseignante toutes les deux à Caen
10:49et grande copine de Mona Ouzouf.
10:52Vous allez avec Mona Ouzouf et vos maris respectifs
10:55voir un film avec une femme belle, affranchie, libre.
11:00Le film s'appelle « Et Dieu créa la femme »
11:03et on écoute la jeune Brigitte Bardot,
11:06orpheline farouche et rebelle,
11:07qui couche avec des hommes.
11:08On est en 1956 et c'est scandaleux
11:10qui se fait tanser par sa tutrice.
11:12« Dévergondée, mal élevée et aussi paresseuse.
11:18J'espérais vous trouver des excuses,
11:19mais je ne peux qu'approuver, Madame Morin.
11:21Des excuses à quoi ?
11:22À votre conduite.
11:24Ça vous regarde ?
11:25Certainement.
11:26Je fais une enquête à votre sujet pour l'évêcher.
11:28Mon petit, je vais leur dire que vous compromettez
11:29la réputation de notre orphelinat.
11:31Je ne peux pas mettre en doute
11:32les témoignages que j'ai recueillis.
11:35Écoutez, mon petit,
11:36si je ne me trompe,
11:36il y a un moyen de vous justifier.
11:38Passez une visite médicale
11:39et faites-vous délivrer un certificat.
11:42Un certificat de quoi ?
11:43Si vous êtes une vraie jeune fille,
11:45je vous donnerai une chance de vous rattraper.
11:47Je ne veux pas que l'amour,
11:48c'était une maladie.
11:50En tout cas, vous ne vous risquez rien.
11:52Vous vous êtes fait vacciner.
11:53Vous dites que ce film a été libérateur pour vous.
11:58Pourquoi ?
11:59Et pourquoi les hommes, vos maris,
12:01vous vous étiez fascinés par Bardot
12:03et les hommes à côté de vous, un peu moins, dites-vous.
12:06Oui, mais on n'a jamais bien compris pourquoi.
12:09En vérité, nous, on était trois copines.
12:13Mona Ouzouf, Nicole Le Douarin,
12:16qui nous écoutent peut-être en ce moment,
12:18et moi.
12:20Et nous, on était ravis.
12:23Elle était belle, elle était libre,
12:26elle était absolument rayonnante.
12:29Et nous, on était des femmes très sérieuses.
12:33On était professeurs, etc.
12:36Là, on se défoulait complètement.
12:39Et c'était comme s'il y avait un nouveau rapport au corps.
12:43Un nouveau rapport très libre au corps.
12:45Cette manière qu'elle a de danser
12:46quand son mari lui dit arrête,
12:47et elle ne s'arrête pas,
12:48et elle danse sur la table.
12:50Et en même temps, d'être avec les hommes.
12:54À la fois, parce que c'est une séductrice,
12:56pas tant que ça.
12:56Tous les hommes lui font la cour,
12:58elle n'a pas besoin de ça.
12:59Mais elle les trouve,
13:02elle les laisse,
13:03et elle est libre.
13:03Oui, c'était un très beau modèle.
13:06Alors, on peut comprendre d'ailleurs
13:08que nos maris, au fond,
13:10ils trouvaient bizarre
13:10que nous, jeunes femmes sérieuses,
13:13nous soyons comme ça,
13:15toqués de...
13:17De Bardot.
13:18Vous racontez d'ailleurs
13:19que Simone de Beauvoir,
13:21elle-même, était très fascinée par Bardot,
13:23qui a accompagné la figure de Bardot des années 50,
13:25accompagne la libération des femmes.
13:27Il y a de très bons textes de Simone de Beauvoir
13:29sur Brigitte Bardot.
13:30Oui, absolument.
13:31Vous racontez le jour,
13:32étudiante à la Sorbonne,
13:34vous dites à votre professeur Ernest Labrousse,
13:36je travaillerai bien sur le féminisme,
13:37et là, il vous regarde et vous répond,
13:40mademoiselle, vous ne ferez pas carrière avec ça.
13:42Oui, oui, oui.
13:43C'est amusant,
13:44parce que Labrousse était un homme formidable.
13:48J'ai eu beaucoup de chance
13:49avec les hommes que j'ai rencontrés.
13:51Et il me disait,
13:53qu'est-ce que vous voulez faire ?
13:54Mais en même temps,
13:56il trouvait que ce n'était pas un sujet,
13:58tout de même,
13:59et qu'on était dans les années 49-50,
14:04et donc le social auquel j'accordais
14:07énormément d'importance,
14:09vraiment fondamentale,
14:10qu'est-ce que j'allais faire là ?
14:12Ce n'était pas...
14:12Pourquoi les femmes ?
14:13Sérieux.
14:14Pourquoi les femmes ?
14:15Et donc, il vous a poussé à faire
14:17votre mémoire ou votre recherche...
14:19Sur les grèves.
14:20Sur les grèves,
14:20pendant la monarchie de juillet.
14:22Vous allez vous raconter aussi
14:24votre engagement politique,
14:25le parti communiste d'abord,
14:26puis vous rendez votre carte en 1956
14:29quand il y a la révolution hongroise.
14:32Les révolutions du MLF,
14:33on est en 1970,
14:34et puis ce moment très important
14:36pour toutes les femmes
14:37et pour toutes les féministes
14:38quand vous décidez de créer
14:39pour la première fois
14:40un cours sur l'histoire des femmes,
14:42sur l'histoire du féminisme.
14:43C'est en 1973,
14:44et c'est à Jussieu.
14:45Et là aussi, vous dites,
14:46les garçons nous regardaient,
14:47ils étaient sceptiques.
14:48Les garçons qui faisaient
14:49la révolution avec vous,
14:50on est dans les années 70,
14:51ils disaient,
14:52oui, oui, c'est très bien les femmes,
14:53mais c'est secondaire.
14:54Là, on est en train de faire
14:55la révolution, Michel.
14:56Oui, oui, oui.
14:57C'est sérieux.
14:58Oui.
14:59Et ceci dit,
15:00il faut quand même dire
15:01qu'on a toujours eu
15:02des alliés masculins.
15:04On en a toujours eu.
15:05en histoire,
15:06en histoire,
15:06en histoire notamment,
15:08très important.
15:10Mais c'est vrai
15:10que créer un cours
15:12à Jussieu,
15:12qui était une université
15:14très contestataire,
15:16très gauchiste,
15:17sur les femmes,
15:19ça paraissait bizarre.
15:21Et ça paraissait américain.
15:24Parce que les Américaines
15:26avaient quand même
15:27ouvert la voie.
15:28Et dans la gauche
15:31de cette époque,
15:33l'Amérique,
15:34il faut se méfier.
15:34Les Etats-Unis,
15:35surtout pas.
15:37Donc,
15:37il y avait cette idée
15:38que c'était quand même bizarre.
15:41On désertait le terrain
15:43essentiel
15:44des luttes sociales
15:46qui paraissaient prioritaires.
15:49Mais ceci dit...
15:50Et vous l'avez fait.
15:51Et vous l'avez fait,
15:53ce cours.
15:54Oui,
15:54puis ça a marché.
15:55Et ça a marché, surtout.
15:56Et ça a marché.
15:57Et ensuite,
15:58il y a eu ces 50 dernières années
16:00avec toutes les vagues
16:01du féminisme
16:02qui ont arrivé jusqu'à MeToo.
16:05Cette révolution d'IA.
16:06Je dis révolution.
16:07Est-ce que c'est une révolution
16:08à vos yeux,
16:08MeToo,
16:09Michel Perrault ?
16:10Elle a 7 ans à peu près.
16:11Le mouvement a 7 ans.
16:13Je pense que c'est une étape importante
16:15dans une révolution.
16:17Pas une révolution en soi.
16:19Parce que ça me paraît,
16:22c'est cette volonté d'intimité
16:24pour les femmes,
16:26pour leur corps.
16:27se situe quand même
16:29dans un enfant
16:30si je veux,
16:32quand je veux,
16:32comme je veux.
16:33Là, c'est mon corps,
16:35l'amour,
16:37si je veux,
16:38comme je veux.
16:39L'importance extrême
16:40du consentement.
16:42On est véritablement
16:44un individu
16:45que si on accepte
16:47ou pas.
16:48Et quand vous voyez
16:49le backlash aujourd'hui,
16:51les hommes qui se rebiffent aussi
16:53en disant
16:53ça suffit maintenant ?
16:55Je prends ça très au sérieux.
16:58Je pense que tout ce qu'on dit
17:00sur les masculinismes
17:02qui se développent,
17:03notamment aux Etats-Unis,
17:06il faut le prendre en compte.
17:08Il faut le prendre en compte.
17:09ça montre un malaise
17:12du côté des hommes,
17:15de certains hommes du moins,
17:17mais peut-être pour beaucoup,
17:19beaucoup plus que quelques-uns.
17:21Comment être un homme ?
17:22Voilà,
17:23devant ces femmes
17:24qui récusent un peu
17:26les rôles habituels.
17:28Donc...
17:29Vous écrivez d'ailleurs,
17:30ça devient difficile
17:31d'être un homme aujourd'hui.
17:32Oui,
17:33je pense que c'est pas simple.
17:34Je pense que c'est pas plus...
17:36Au fond,
17:37c'est jamais simple
17:38d'être un individu.
17:39Voilà.
17:40Et le sexe
17:42fait partie
17:43des données
17:45en question.
17:47Pas plus pour les femmes
17:48que pour les hommes.
17:49Oui.
17:50C'est pas simple
17:50d'être un homme,
17:51mais c'est aussi passionnant
17:52ce qui est en train de se faire,
17:53les reconstructions,
17:54ce qui est en train
17:55de se passer
17:55en ce moment.
17:56avec tout ce qu'on peut dire
17:58sur ce mouvement
18:00MeToo,
18:01les apports,
18:02les excès.
18:03Mais tout ça,
18:03ça fait bouger, non ?
18:05Oui.
18:05C'est très compliqué.
18:07Les réseaux sociaux,
18:08par exemple,
18:08dont vous parlez.
18:10Et ça complique encore...
18:11Ça enrichit probablement,
18:14mais ça complique beaucoup
18:15l'information
18:16et la position
18:17qu'on a à prendre.
18:19Michel Perrault,
18:19je vous ai demandé
18:20une chanson
18:20qui vous fait du bien.
18:21Une chanson
18:21que vous aimez particulièrement.
18:23Je crois que vous aviez...
18:24Je sais plus.
18:25elle s'est traînée,
18:27Charles Traînay.
18:29Quel âge vous aviez
18:29quand elle est sortie ?
18:30Peut-être 8 ans ?
18:328 ou 10 ans.
18:34On écoute.
18:35Le soleil est rendez-vous
18:36avec la lune,
18:37mais la lune n'est pas là
18:38et le soleil y attend.
18:40Ici, pas souvent,
18:40chacun pour sa chacune,
18:42chacun doit en faire autant.
18:44La lune est là,
18:45la lune est là,
18:46la lune est là,
18:47mais le soleil ne la voit pas.
18:48Pour la trouver,
18:49il faut la nuit,
18:50il faut la nuit,
18:51mais le soleil ne le sait pas
18:52et toujours lui.
18:53Le soleil est rendez-vous
18:54avec la lune.
18:55Mais la lune n'est pas là
18:56et le soleil y attend.
18:57Papa dit qu'il a vu sa vie.
18:59Des savants a l'air
19:00par la pluie et le vent
19:01annoncés d'un jour
19:02la fin.
19:03J'avais juste envie
19:03de l'écouter avec vous,
19:05Charles Traînet.
19:06C'est une chanson épatante.
19:07Elle est géniale.
19:08Elle met en joie.
19:09Elle met en joie.
19:10Je ne suis pas mécontente
19:12de ma vie,
19:13disiez-vous,
19:13il y a deux ans au monde.
19:14Je dirais peut-être plus ça
19:17aujourd'hui.
19:17Pourquoi ?
19:19Parce qu'en réfléchissant,
19:21je pense que j'ai raté
19:21beaucoup de choses.
19:23Qu'est-ce que vous avez raté ?
19:24C'est trop compliqué.
19:26Les choix intellectuels,
19:28peut-être.
19:29J'aurais dû faire
19:30d'autres choses,
19:31d'autres métiers peut-être.
19:32Quel métier ?
19:33Courir le monde,
19:34davantage.
19:35Ah oui ?
19:35Oui, ah oui.
19:36Donc vous avez des regrets finalement ?
19:38De ce point de vue-là, oui.
19:39Mais tout de même,
19:40quand vous regardez cette vie,
19:41cette longue vie passionnante,
19:43bof ?
19:44Non.
19:44Bof.
19:44Non.
19:46Non, vous n'avez pas le droit
19:47de dire ça,
19:48pas devant Charline,
19:49pas devant moi.
19:50Non, non, non.
19:52Est-ce que vous montez toujours
19:53les escaliers à 97 ans ?
19:56Si je monte les escaliers ?
19:57Oui.
19:58Ah ben oui, oui,
19:59je les monte.
20:01Oui, oui.
20:01Je vous pose la question
20:02parce que votre nouveau projet,
20:04c'est de faire une philosophie,
20:05une histoire des escaliers.
20:07Plus une histoire
20:07qu'une philosophie.
20:09Qu'est-ce qu'ils racontent,
20:10les escaliers ?
20:10Les escaliers racontent
20:11beaucoup de choses.
20:12Ils racontent
20:13les rapports au corps,
20:15vous m'avez posé au fond la question,
20:17les rapports au pouvoir.
20:19Si vous réfléchissez
20:20à la manière
20:20dont Louis XIV
20:22accueille les ambassadeurs
20:24sur le grand escalier
20:25de Versailles,
20:26si vous voyez
20:27comment à Cannes,
20:29la montée des marches
20:31est un moment
20:32très important,
20:33comment à l'Élysée,
20:35le président Macron
20:37ou autre
20:37accueille
20:38les hôtes
20:40qui viennent
20:41monter
20:42les quelques marches
20:43avant...
20:44Etc, etc.
20:45On peut...
20:45Si vous réfléchissez
20:46aux immeubles parisiens
20:48où il y a
20:49l'escalier principal,
20:50l'escalier de service
20:51dans la bourgeoisie
20:53haussmannienne,
20:55tous les immeubles
20:56sont construits comme ça,
20:57etc.
20:57Et bien,
20:58on les attend.
20:59On l'attend,
21:00cette histoire
21:00des escaliers.
21:01Je termine par les impromptus.
21:02Vous répondez rapidement
21:03sans trop réfléchir.
21:05Olympe de Gouges
21:05ou Louise Michel ?
21:08Olympe de Gouges ?
21:08J'adore l'Olympe de Gouges.
21:11Simone de Beauvoir
21:11ou Simone Signoret ?
21:14Simone Signoret.
21:15La psychanalyse,
21:17vous avez déjà essayé ?
21:19Non.
21:19Pas vraiment.
21:21Votre quartier préféré
21:22de Paris ?
21:23Mon quartier préféré
21:25est Léal.
21:27Il n'existe plus,
21:28mais enfin,
21:28ça ne fait rien.
21:29Est-ce que vous êtes
21:30une bonne arrière-grand-mère ?
21:32Pas assez.
21:34Les réseaux sociaux
21:35dont vous dites,
21:35c'est que vous n'y êtes pas ?
21:36Non, pas du tout.
21:38Comment on fait
21:39pour que l'amour
21:40dure toute une vie,
21:41Michel Perrault ?
21:42C'est une aventure.
21:43Donc, il y a toujours,
21:45toujours quelque chose
21:46de nouveau.
21:47Non, ça,
21:47ce n'est pas un problème.
21:48Ça peut durer toute la vie ?
21:49Ce qui est très important,
21:50c'est le partenaire.
21:53Voilà.
21:53Il faut bien tomber.
21:55Si on trouve un bon partenaire,
21:56on peut y aller.
21:58Liberté, égalité, fraternité,
21:59vous choisissez quoi ?
22:00Liberté.
22:01Et Dieu dans tout ça ?
22:04Non, il a disparu
22:04de mon horizon
22:05depuis longtemps.
22:06Alors que vous étiez
22:07très croyante,
22:08enfant, jeune.
22:10Oui.
22:10Disparu.
22:12Il y a des ruptures
22:13dans la vie.
22:14Michel Perrault,
22:15le documentaire
22:16où vous vous livrez,
22:17le documentaire
22:18Dans l'intimité des chambres
22:20de Théry Venn Damisch.
22:21Ce sera diffusé ce dimanche
22:22sur France 5.
22:24C'est déjà sur France.tv
22:25et sur la plateforme.
22:27Regardez-le, vraiment.
22:28Merci infiniment
22:29d'avoir été avec nous ce matin.
22:31Merci à vous beaucoup.
22:32Merci.
22:33Merci.
22:33Merci.
22:36C'est sûr.

Recommandations