- 06/06/2025
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00:00Europe 1, Pascal Crow.
00:02De 11h à 13h sur Europe 1 avec notre invité en studio, le Pascal Wilfried Fonck, secrétaire national du syndicat pénitentiaire UFA Punsa.
00:09Bonjour Wilfried Fonck.
00:11Bonjour Pascal.
00:12C'est vrai que c'est une semaine particulière. Pourquoi ? Parce qu'il y a eu les événements samedi et dimanche.
00:17Et puis il y a eu les premières condamnations.
00:19Il y a eu la prise de parole de Gérald Darmanin qui trouvait que les peines n'étaient pas assez fermes.
00:24Et à ce moment-là, il y a eu la prise de parole de deux procureurs qui sont montés au créneau, et ce n'est évidemment pas un hasard.
00:29Rémi Haït sur France Inter et Laure Becquot ce matin sur BFM qui au fond contredisait la parole du ministre de Garde des Sceaux.
00:40Le message c'était laisser la justice travailler, laisser les juges prendre les décisions qu'ils prennent.
00:46Et M. Haït disait notamment que les sanctions étaient à la hauteur de la gravité des faits.
00:53Alors je ne sais pas comment vous avez vécu cette semaine M. Fonck, avant peut-être d'écouter quelques réactions.
00:59Je vous pose cette question, comment vous sortez de cette semaine particulière où la justice a été au cœur de l'actualité ?
01:06Nous, cette semaine, elle a surtout été marquée par l'annonce déjà de la prochaine extraction judiciaire de Mohamed Amra,
01:14qui, rappelons-le, est un des acteurs de l'évasion sanglante d'Incarville en mai 2024,
01:19qui a coûté la vie à deux des nôtres et qui en a blessé gravement trois autres.
01:24Donc déjà là, nous, on était dans un registre effectivement sur l'émotionnel,
01:28parce que quelque part, on n'a pas oublié nos morts.
01:31Et on considère que cette extraction, si elle peut s'entendre pour les besoins de l'instruction,
01:35il n'en demeure pas moins qu'elle choque profondément les personnels,
01:38parce qu'eux sont toujours à vif par rapport à ce qui s'est passé il y a un peu plus d'un an aujourd'hui.
01:43Ensuite, on a eu cette affaire d'Arles, avec la découverte de six téléphones portables au quartier d'isolement,
01:48sur un détenu du haut du spectre.
01:50Donc c'est vrai que ça fait un peu beaucoup pour une semaine.
01:53Donc derrière, j'ai envie de vous dire, les déclarations du procureur, du ministre,
01:57ou même encore les condamnations qui ont pu être prononcées,
02:00pour nous, ça fait partie du quotidien.
02:03Il est 11h46, vous êtes sur Europe 1, et si vous nous rejoignez à l'instant,
02:06nous sommes donc avec Wilfried Fong, qui est secrétaire national du syndicat pénitentiaire UFAP-UNSA.
02:12C'est intéressant de parler de ce qui se passe dans la prison d'Arles.
02:15Pourquoi ? Parce que CNews diffusait ce matin un reportage
02:20où un des personnels témoignait de manière anonyme en disant de la corruption, il y en a.
02:27Donc j'étais un peu surpris.
02:29Alors c'était un témoignage anonyme, on ne peut pas étayer, vérifier, prouver ce qu'il disait,
02:33mais c'était un personnel pénitentiaire qui dit, la corruption, il y en a.
02:37C'est-à-dire qu'il admettait l'idée que du personnel soit corrompu.
02:41Mais corrompu parfois tout simplement par peur.
02:44Ce n'est pas tant pour toucher beaucoup d'argent, c'est ce qu'il disait d'ailleurs.
02:47Il disait, voilà, vous avez en face de vous quelqu'un qui est un dangereux personnage
02:51et qui vous dit, attention, je sais où vous habitez, je sais où votre famille habite
02:56et je peux intervenir si vous ne m'aidez pas, si vous ne donnez pas un portable, que sais-je.
03:00C'est vrai que la corruption existe, on ne va pas non plus nier les faits.
03:04Pour autant, ça reste un phénomène marginal.
03:06Il suffit de juste regarder les chiffres.
03:09Aujourd'hui, c'est quoi ?
03:10C'est 0,1% des personnels pénitentiaires qui sont concernés par un dossier en cours.
03:17Oui, mais parce que par définition, c'est comme la fraude.
03:19Essayez quelque part d'être sur ce registre.
03:23C'est difficile à prouver.
03:23Et ça tombe bien, Pascal, que vous parliez de ce registre de la corruption.
03:27Parce qu'aujourd'hui, on est en train de pousser le délire
03:31jusqu'à parler de corruption des personnels pénitentiaires
03:35dans des épreuves de recrutement du concours de surveillants.
03:38Moi, là-dessus, je suis absolument scandalisé.
03:41Parce qu'on est en train de jeter l'opprobre,
03:43de jeter la suspicion sur des personnels, des hommes, des femmes
03:47qui aujourd'hui tiennent à bout de bras un système pénitentiaire qui s'effondre.
03:50Alors aujourd'hui, oui, de la corruption, il y en a.
03:53Mais faire des personnels pénitentiaires
03:55entre des fascistes, des racistes, des brutaux,
03:58maintenant des corrompus jusqu'à l'os, ça suffit.
04:01Alors je rappelle effectivement que l'affaire dont nous parlons,
04:04et peut-être tout le monde ne la connaît pas,
04:06c'est le syndicat UFA-UNSA qui lance un cri d'alerte
04:08dans la cellule d'un prisonnier très dangereux,
04:10une des têtes de la DZ mafia incarcérée à Arles.
04:13Six téléphones portables ont été saisis en sept mois
04:16et cet homme est pourtant à l'isolement.
04:17Gabriel O est suspecté d'être l'un des chefs de file de cette organisation.
04:23Il a donc été trouvé en possession de son sixième portable en détention.
04:26Des téléphones derniers cris, il est pourtant sous surveillance,
04:29il est arrivé au centre pénitentiaire en fin d'année, il a 29 ans.
04:32Mais alors qui lui transmet ? Qui lui donne ?
04:35Ça aujourd'hui on n'a toujours pas la réponse, j'ai envie de vous dire Pascal.
04:38Ça vient forcément du personnel pénitentiaire, puisqu'il est à l'isolement.
04:43Est-ce qu'il est fouillé ?
04:45J'ai envie de vous dire, ça peut venir de toutes les personnes
04:48avec lesquelles il peut rentrer lui en contact.
04:50Et avec qui il est en contact ?
04:51Maintenant, je n'ai pas les tenants et les aboutissants de tout ça.
04:54Alors sur l'isolement d'Arles notamment, c'est une équipe dédiée,
04:58donc ce qui signifierait que cet individu est en capacité non pas de corrompre un agent,
05:03mais une équipe qui peut monter jusqu'à 9 voire 10 agents,
05:07ça me paraît totalement ubuesque.
05:09Il aurait émis un contrat de 120 000 euros sur la tête d'un chef adjoint
05:12de la détention des Beaumet fin 2024.
05:15Il a passé 12 ans de sa vie en prison.
05:17Il y est depuis l'âge de 17 ans.
05:19Il a 5 mandats de dépôt criminel en cours, mais ce qui n'est quand même pas rien.
05:25C'est pas rien, mais aujourd'hui la vraie question,
05:27enfin il y a deux questions par rapport à ce sujet-là.
05:29Un, que faisait-il à Arles, dont on sait très bien que ce n'est pas un établissement
05:32qui est suffisamment sécurisé et sécuritaire pour accueillir ce type de profil.
05:37Et deux, la seconde question...
05:39Ça vous le savez parce que vous êtes un professionnel,
05:41mais nous on ne le sait pas, on ne sait pas qu'à Arles,
05:43la prison n'est pas suffisamment sécurisée.
05:46Et la deuxième question, c'est pourquoi 7 mois ?
05:48C'est-à-dire que dès le premier téléphone qui avait été saisi,
05:52l'UFAP a attiré l'attention de la direction interrégionale
05:55des services pénitentiaires de PAC à Corse,
05:58jusqu'à ce qu'on en découvre un sixième,
06:01c'est-à-dire qu'il s'est coulé 7 mois.
06:02Pendant 7 mois, la seule réponse qu'on nous a envoyée,
06:04c'est du silence.
06:05Moi, je considère ce silence comme du mépris.
06:08Bon, j'entends évidemment ce que vous dites,
06:10il est 11h50.
06:11Willy Wilfried Fonck, secrétaire national du syndicat pénitentiaire,
06:15UFAP, UNSA, vous êtes sur Europe 1.
06:18Je vous propose d'écouter quelques témoignages
06:19qui donnent le ton un peu de ce que pensent certains,
06:23en tout cas de la justice en France.
06:25Dominique Simonneau, elle est contrôleur général
06:28des lieux de privation de liberté.
06:30Elle était hier sur Public Sénat,
06:31et je rappelle que c'est Emmanuel Macron qui l'a nommé.
06:34Elle, elle souhaite vider les prisons.
06:36Si la société veut se venger, c'est réussi.
06:38Vous savez, moi je visite, là je sors d'une prison
06:40où il y avait justement une jeune femme qui hurlait,
06:44H24, maman, sors-moi de là, maman.
06:48Mais c'est qu'au détenu devenait folle.
06:50Il y en a une autre qui embrasse les poteaux de la prison
06:53en relevant ses jupes.
06:55Il y a des gens qui n'ont pas leur place là.
06:57Ça veut dire que pour certains, aujourd'hui,
06:59la prison, elle est plus néfaste qu'elle n'est bénéfique ?
07:01Je pense qu'elle est pour tout le monde, en ce moment,
07:03plus néfaste que bénéfique.
07:05Et je trouve qu'on devrait vider les prisons,
07:08au lieu de construire des prisons,
07:10vous savez, je trouve qu'on devrait faire
07:12comme au temps du Covid, vider les prisons.
07:15Tous les jours, il y a des détenus qui sortent,
07:17on est d'accord.
07:18Eh bien, ils pourraient sortir encadrés
07:19par les services pénitentiaires
07:21ou sous bracelet électronique
07:23en leur enlevant un mois, un mois et demi
07:25de leur fin de peine.
07:26Je ne parle pas des normes criminels.
07:28Je parle de ceux qui remplissent les prisons,
07:30qui sont l'immense majorité,
07:32qui sont des petits délinquants.
07:33Bon, quand j'entends ça, Wilfried Fonck,
07:36évidemment, quand j'entends cette dame
07:38expliquer que la prison n'est pas bénéfique.
07:41Elle est surtout bénéfique pour ceux
07:42qui ne sont pas agressés
07:43pendant que ces agresseurs
07:44sont précisément en prison.
07:46Je trouve ça invraisemblable.
07:47Ce qu'on vient d'entendre est invraisemblable.
07:49Alors évidemment,
07:50ceux qui sont en prison,
07:53aujourd'hui,
07:53ils méritent sans doute d'y être.
07:56Ah, c'est sûr qu'ils ne sont pas là
07:57pour avoir filé 10 balles à un pauvre dans la rue.
07:58Ça, c'est une certitude.
08:00Par contre,
08:01il faut reprendre, je pense,
08:03les propos de Dominique Simono.
08:04Et je voudrais rappeler d'ailleurs
08:05que Dominique Simono
08:06connaît très bien le milieu carcéral
08:08et connaît très bien le public
08:09qui s'y trouve.
08:10Donc, c'est vraiment un avantage
08:11quand on a un CGLPL comme ça
08:13parce que c'est la première fois que ça arrive.
08:14CGLPL, contrôleur général
08:16des lieux privatifs de liberté.
08:17Exactement.
08:18Alors ça, c'est un poste
08:19qui est nommé par Emmanuel Macron.
08:20Oui, qui est à la main
08:21du président de la République.
08:23Bon, voilà.
08:23Mais au-delà de la personnalité
08:25et au-delà de qui l'a nommé.
08:26Qui a de l'influence d'ailleurs ?
08:28L'influence, elle envoie surtout
08:30des recommandations
08:30au ministre de la Justice.
08:32Elle charge à lui derrière
08:33de les suivre ou de ne pas les suivre.
08:35Là, moi, ce que je constate...
08:36Ça, c'est des postes
08:36qui ne servent pas à grand-chose,
08:37disons-le d'ailleurs.
08:38Parce qu'il y a un ministre de la Justice
08:39qui devrait être là.
08:40En fait, ça fait partie de ces postes.
08:42On se demande pourquoi ils existent.
08:43Ils existaient sans doute pas
08:44il y a 50 ans.
08:45Je ne suis pas là pour juger
08:46du bien fondé ou non.
08:47C'est une autorité
08:48de contrôle administrative.
08:50Exactement.
08:50Mais ces autorités
08:51de contrôle administrative,
08:52je trouve qu'elles ont peu
08:54de légitimité, pour tout vous dire.
08:56c'est des gens qui ne sont pas élus,
08:57qui sont nommés par le pouvoir.
08:58Il y a un ministre de la Justice
08:59qui doit faire fonctionner
09:00son administration.
09:01Je le vois plus comme ça.
09:02Mais je vous ai coupé.
09:03Ensuite, dans les propos
09:05de Dominique Simonneau,
09:06la prison n'est pas bénéfique.
09:07Moi, je ne l'aurais pas dit comme ça.
09:09Moi, je l'aurais dit aujourd'hui
09:09le temps de l'incarcération
09:11n'est pas un temps utile.
09:13Voilà.
09:13Il est là, le vrai problème.
09:14C'est-à-dire qu'on se retrouve...
09:16Mais il est utile pour ceux,
09:17pardonnez-moi,
09:17qui ne sont pas agressés.
09:18Qui, avec 83 000 détenus,
09:2162 500 places,
09:224 000 vacances de poste
09:24dans l'administration pénitentiaire.
09:25C'est-à-dire qu'il nous manque
09:264 000 agents pour pouvoir fonctionner.
09:29Donc, les missions de réinsertion,
09:31les missions de garde et de sécurité,
09:34aujourd'hui, pour les assumer
09:35au niveau des personnels pénitentiaires,
09:36c'est complètement extravagant.
09:39Impossible.
09:40On est dans une situation
09:41qui, aujourd'hui, est intenable.
09:42Donc, oui, la prison n'est pas
09:44un temps, aujourd'hui, utile
09:45parce qu'on n'a pas le temps
09:46de pouvoir travailler sur les détenus.
09:48Et surtout, on n'a pas non plus
09:49la capacité législative.
09:50Il faut quand même se souvenir
09:51que la prison,
09:52c'est une peine privative de liberté.
09:55Il n'y a pas derrière
09:56d'obligation particulière
09:57pour un détenu
09:58d'avoir une activité,
09:59d'exercer un travail
10:00au sein de la prison,
10:01de suivre une formation
10:02au sein de la prison.
10:03C'est-à-dire que s'il décide
10:04de rester oisif
10:05pendant tout le temps
10:05de sa détention,
10:06on n'y peut rien.
10:07Mais je vous répète,
10:08c'est utile pour ceux
10:09qui ne seront pas agressés
10:10pendant ce temps-là.
10:11Alors, écoutez Laure Bécou,
10:13parce qu'elle est donc
10:13procureure de la République de Paris.
10:15Et on a passé également
10:17hier Rémi Hetz,
10:18qui est un autre procureur
10:19et tous les deux ont pris
10:20la parole derrière
10:21les paroles de Gérald Darmanin
10:23au fond pour s'opposer
10:24au ministre de la Justice
10:25et pour dire
10:26laissez-nous travailler
10:27et d'ailleurs
10:29les procureurs défendent
10:30des juges
10:30ce qui est assez étonnant.
10:32Mais on sent
10:33une sorte de corporatisme
10:35peut-être
10:35qui est mis en place
10:36de la Justice
10:37qui ne souhaite pas
10:39avoir des injonctions
10:40du politique.
10:41En tout cas,
10:42je l'ai interprété
10:42comme cela.
10:43Laure Bécou,
10:44ce matin sur BFM.
10:46Eh bien, il y a
10:46différents types de peines.
10:47Et quand je dis
10:47qu'il ne faut pas penser
10:48l'emprisonnement
10:49comme la peine de référence,
10:51ce que je veux dire par là,
10:52c'est prenons un exemple
10:53tout à fait concret.
10:55Un pompier
10:56est outragé
10:57lorsqu'il est en intervention.
10:58Moi, je trouve ça scandaleux.
11:00Ça fait partie
11:01de mes priorités
11:01de politique pénale
11:02que de protéger
11:03les services publics,
11:04les policiers,
11:05les pompiers,
11:06les enseignants.
11:07Je vais donc le poursuivre.
11:08C'est ma principe.
11:09Est-ce que je dois envoyer
11:11celui qui est outragé
11:12de pompier
11:13tout de suite en prison
11:14s'il a un travail,
11:16si c'est la première fois ?
11:18Ne dois-je pas plutôt choisir
11:19ce qu'on appelle
11:19une peine de travail
11:20d'intérêt général
11:21ou un stage de citoyenneté ?
11:23Ce travail d'intérêt général,
11:24il le fera dans un centre hospitalier
11:26et il verra
11:27quelles sont les difficultés
11:29des services hospitaliers,
11:31quelles sont les difficultés
11:32des pompiers.
11:32J'ai été très étonné
11:33de l'exemple
11:35qu'a donné Laure Bécou.
11:36Parce qu'évidemment,
11:37elle a raison.
11:37Il ne s'agit pas
11:38de mettre en prison
11:38quelqu'un qui outrage
11:40verbalement un pompier.
11:43S'il tape dessus
11:44ou s'il frappe,
11:44c'est autre chose.
11:46Mais là aussi,
11:47je suis très surpris
11:47de l'exemple qu'elle donne.
11:48On ne met pas les gens
11:49en prison pour des petits faits.
11:52Avant d'arriver en prison,
11:53déjà, vous avez tout
11:53un parcours délinquantiel
11:54qui est quand même
11:55généralement particulièrement
11:56important.
11:56C'est-à-dire qu'on n'arrive
11:57pas non plus en prison
11:58comme ça du jour au lendemain.
11:59C'est-à-dire qu'il y a eu
12:00tout un passage de vie
12:03et j'ai envie de dire
12:04ça démarre déjà dans la famille
12:05parce que quelque part,
12:06on va demander à la pénitentiaire
12:07de travailler,
12:08de réussir,
12:09surtout là où la famille
12:10a échoué,
12:10l'école a échoué,
12:11les services sociaux ont échoué,
12:12les services sociaux judiciaires
12:13ont échoué.
12:14C'est-à-dire que nous,
12:14on arrive au bout
12:15de la chaîne pénale
12:16et au bout du champ social
12:17et sociétal.
12:19Donc, après l'exemple
12:20qu'elle prend,
12:21ok, d'accord,
12:21mais le vrai sujet
12:22au CIDerrière,
12:23c'est quelle politique pénale
12:25on veut ?
12:25Est-ce qu'on veut
12:26une politique pénale
12:28où on se dit
12:28c'est la prison pour tout
12:30et pour tous
12:30et en ce cas-là,
12:31il ne nous faut pas
12:3115 000 places de prison
12:32mais il nous en faut
12:33150 000 ?
12:35Voilà.
12:35Et ensuite,
12:36derrière,
12:37c'est qu'est-ce qu'on fait
12:38du temps de la détention ?
12:39Vous restez avec nous
12:39après-midi
12:40et on va continuer
12:40la discussion.
12:41A tout de suite.
12:41Et si vous voulez échanger
12:42avec notre invité
12:44Wilfried Frank,
12:44n'hésitez pas.
12:45Vous nous appelez
12:45au 01 80 20 39 21 11h56.
12:49Vous écoutez Pascal Praud
12:50sur Europe 1.
12:51Europe 1.
12:54Europe 1.
12:5511h, 13h.
12:57Pascal Praud
12:58et vous.
12:59Nous sommes toujours
13:00avec Wilfried Fonck,
13:02secrétaire nationale
13:02du syndicat pénitentiaire
13:04UFAP-UNSA
13:05pour évoquer
13:06évidemment
13:06l'actualité judiciaire.
13:09L'actualité également
13:10plus précisément
13:11pénitentiaire.
13:13La difficulté
13:13que vous avez
13:14à recruter.
13:15Combien de prisons
13:16en France ?
13:17187.
13:18Combien
13:18de personnels pénitentiaires ?
13:20Alors,
13:21personnels pénitentiaires,
13:22on est à 45 000
13:23dont 30 000
13:24personnels de surveillance
13:25avec aujourd'hui
13:264 000 vacances de poste.
13:28Bon,
13:28difficulté de recrutement ?
13:29Difficulté de recrutement,
13:31non,
13:31parce qu'on amplit
13:32quand même
13:32les schémas d'emploi.
13:34Après,
13:34la vraie difficulté,
13:35c'est surtout
13:35la fidélisation
13:36des personnels,
13:37c'est-à-dire
13:37ne pas avoir
13:38de déperdition
13:39dans le courant
13:40de la formation
13:41et surtout
13:42dans les premières
13:42années
13:43d'affectation.
13:44Bon,
13:45ce qui est certain,
13:46c'est que c'est un métier
13:46particulièrement difficile.
13:48Alors,
13:48c'est un métier éprouvant
13:49parce qu'au quotidien,
13:52j'imagine
13:52qu'être avec des jeunes gens
13:53quand même
13:54qui sont extrêmement
13:54dangereux,
13:56toujours et tout le temps.
13:58Je vais résumer
13:58la situation
13:59de manière très simple
14:00et de manière
14:00un peu rigolote.
14:02Moi,
14:02quand j'ai commencé
14:03il y a 25 ans,
14:03je suis tombé
14:04sur un vieux
14:05surveillant-chef
14:06qui m'a dit,
14:08là-haut dans le nord
14:09avec son accent ch'ti,
14:11pour faire le boulot
14:12qu'on fait,
14:12il faut avoir
14:12un sacré pète au casque.
14:14Et en fait,
14:14finalement,
14:15avec le temps,
14:15on se dit,
14:16ouais,
14:16quelque part,
14:17il faut quand même
14:17être un petit peu
14:18particulier
14:19parce qu'il faut supporter
14:21l'enfermement,
14:22déjà au départ,
14:23il faut supporter
14:24de vivre
14:24à la lumière artificielle
14:26de quasiment
14:27toute la sainte journée.
14:28Oui,
14:28mais ça,
14:28c'est une entreprise.
14:29C'est une entreprise.
14:30Dans chaque entreprise,
14:31il y a de l'enfermement,
14:32il y a de la lumière artificielle.
14:33Vous vivez dans un monde
14:34où, en fait,
14:35il y a de la violence
14:37tout le temps.
14:37Oui.
14:38Vous êtes confronté
14:39à des gens
14:39qui sont totalement
14:40déstructurés socialement,
14:42qui n'ont pas les mêmes repères
14:43que vous aimons.
14:44C'était vrai
14:44il y a 25 ans ou pas ?
14:45C'était vrai
14:45il y a 25 ans.
14:46Aujourd'hui,
14:46c'est encore plus visible
14:49parce que la société,
14:51quelque part,
14:51a encore plus évolué
14:53vers le négatif
14:54que vers le positif.
14:55Mais oui,
14:56ça existait déjà
14:57il y a 25 ans,
14:58tout ça.
14:59C'est toujours intéressant
15:00de savoir précisément
15:01l'univers de la prison.
15:03Combien de personnes
15:04dans chaque cellule ?
15:05Alors,
15:05tout dépend
15:06où vous allez vous trouver.
15:07C'est-à-dire que si vous êtes
15:07dans un établissement pour peine,
15:08la règle,
15:09c'est l'encellulement individuel.
15:10C'est-à-dire que les gens
15:11qui sont condamnés,
15:12définitivement.
15:13Par contre,
15:13ceux qui sont en maison d'arrêt
15:15et en attente de jugement,
15:16les prévenus,
15:17ou ceux qui vont écoper
15:18de courtes peines
15:18ou avec des reliquats de peine
15:20trop courts
15:20pour partir en établissement
15:21pour peine,
15:22eux vont se retrouver
15:23dans des cellules
15:23qui font 9 mètres carrés
15:24entre eux en étant
15:25un peu chanceux,
15:26ils seront 3
15:27et s'ils n'ont vraiment
15:28pas de bol,
15:28ils seront 4 ou 5
15:29avec des matelas par terre.
15:30Dans 9 mètres carrés ?
15:31Oui.
15:31Ce qui est évidemment indigne.
15:32Combien d'heures ?
15:33En gros,
15:34s'ils restent sans activité,
15:37c'est 22 heures sur 24.
15:38Mais comment 5 personnes,
15:405 jeunes personnes,
15:42violentes,
15:43parfois,
15:43peuvent cohabiter
15:44dans 9 mètres carrés ?
15:46C'est tout le savoir-faire
15:48et toute la psychologie
15:49des personnels pénitentiaires
15:51et c'est en cela
15:52que je dis souvent
15:52que c'est un métier
15:53profondément humain
15:54parce qu'il faut savoir
15:55réussir en fait
15:56à faire cohabiter
15:58ces gens
15:58dans 9 mètres carrés
15:59où c'est très compliqué.
16:01Il faut imaginer aussi
16:02qu'ils ont une porte
16:02devant eux
16:03et il n'y a pas
16:03la poignée
16:05pour ouvrir
16:06et fermer la porte.
16:07La seule manière
16:07d'ouvrir la porte,
16:08c'est la clé du surveillant.
16:10Donc ça aussi,
16:11psychologiquement,
16:12c'est particulier.
16:13Donc nous,
16:13on est là
16:14pour essayer de faire en sorte
16:15qu'il n'y ait pas de vagues.
16:16C'est tout ce qu'on nous demande.
16:17Et aujourd'hui,
16:17la vraie question
16:18des personnels pénitentiaires,
16:20c'est
16:20quels sont le sens
16:21de nos missions
16:21quand on voit aujourd'hui
16:23les conditions
16:23dans lesquelles on exerce ?
16:24Effectivement,
16:25on se demande tous les matins
16:26quel est le sens
16:27de notre mission.
16:30Il y a beaucoup de questions
16:31parce que c'est un univers
16:32si particulier.
16:34J'entends parfois
16:35que les portes sont ouvertes.
16:37Ça, c'est dans les maisons
16:39de longue peine
16:40où on ouvre
16:41toutes les portes
16:42de telle sorte
16:43que les condamnés,
16:46les prisonniers
16:46puissent avoir
16:47une sorte d'accès
16:48à la coursive
16:49ou est-ce que c'est
16:50dans les maisons d'arrêt ?
16:52Alors dans les maisons d'arrêt,
16:53non,
16:53c'est régime porte fermée.
16:54Ensuite,
16:55dans des établissements
16:55pour peine,
16:57vous avez normalement
16:57le régime doit être fermé
16:59quoi qu'il en soit.
17:00La règle,
17:00c'est celle-là.
17:00Ensuite,
17:01dans la pénitentiaire,
17:02il faut savoir
17:03que quand on a des règles,
17:05on ne peut pas les appliquer
17:05qu'avec des œillères.
17:07Et à un moment donné,
17:08le choix qui a été fait
17:10par l'administration pénitentiaire
17:12était d'ouvrir les portes.
17:14Petit à petit,
17:14on revient là-dessus
17:15et on essaye de refermer.
17:16Mais une fois qu'on a ouvert,
17:17qu'on a donné quelque chose,
17:18pour le reprendre,
17:19c'est très compliqué.
17:20Mais ça veut dire quoi
17:21lorsqu'on ouvre la porte ?
17:22Ça veut dire que le prisonnier
17:23a le droit de sortir ?
17:24De sortir de sa cellule
17:25et de pouvoir un peu
17:26déambuler dans les coursives
17:28et aller voir
17:28ses autres co-détenus
17:29dans les autres cellules.
17:31Et donc là,
17:32il est à l'hôtel.
17:34On ne va pas dire ça,
17:34on ne va pas dire
17:35que c'est l'hôtel quand même.
17:36Ce n'est pas vraiment l'hôtel,
17:39le milieu carcéral.
17:42Pierre est armé.
17:44Alors, il est armé
17:45sur certaines missions
17:46et notamment
17:46les missions extérieures,
17:48tout ce qui va être
17:48mission d'extraction judiciaire,
17:50extraction médicale
17:51ou par exemple
17:52nos équipes régionales
17:53d'intervention et de sécurité.
17:54Par contre,
17:54à l'intérieur de la détention,
17:56ils ne possèdent pas d'armes.
17:57La seule arme qu'ils aient,
17:59c'est leur courage.
18:01Vous, vous êtes donc
18:02dans ces établissements
18:05depuis combien de temps ?
18:06Depuis 99,
18:07je connais la pénitention.
18:08Donc ça fait 26 ans,
18:09vous avez une formation particulière
18:11parce que vous avez,
18:11je crois,
18:13une licence d'histoire.
18:14Vous avez fait des études.
18:15Je n'ai rien de prédestiné
18:16à rentrer dans cette administration
18:18mais c'est une administration
18:19où une fois qu'on y est,
18:20si on s'en donne la peine,
18:21on peut faire une belle carrière.
18:23Ce qui est intéressant,
18:23c'est que vous êtes arrivé
18:24au bas de l'échelle
18:25et puis que vous êtes aujourd'hui
18:26commandant.
18:27Donc il y a aussi
18:27possibilité d'évolution
18:29et c'est ça que je peux retenir.
18:31Vous, vous êtes resté 25 ans
18:32mais est-ce qu'il y a
18:33beaucoup de gens
18:34qui partent au bout d'un an,
18:35deux ans, trois ans ?
18:36Est-ce qu'il y a des chiffres là-dessus ?
18:36On n'a pas de chiffres hexa
18:38nous au niveau
18:38des organisations syndicales.
18:40Tout ce qu'on peut voir passer,
18:41c'est notamment
18:42les demandes de ce qu'on appelle
18:43nous les demandes de détachement
18:44ou les demandes de mise à disposition.
18:46C'est-à-dire des gens
18:46qui vont soit partir
18:47vers d'autres administrations
18:48en détachement
18:48ou soit une mise à disposition
18:50pour aller exercer
18:50dans le privé
18:52ou monter leur propre entreprise.
18:54Et aujourd'hui,
18:55on sent une volonté
18:56de l'administration pénitentiaire
18:57de verrouiller
18:58tout ce système-là
18:59pour éviter justement
19:00d'avoir une trop grande déperdition.
19:03Wilfried Fonck
19:04et les secrétaires nationales
19:05du syndicat pénitentiaire
19:06UFAP-UNSA
19:07il est avec nous
19:08pour évoquer l'actualité judiciaire
19:09et puis également
19:10on l'écoute
19:11moi je trouve ça passionnant
19:12de vous écouter
19:12sur le fonctionnement
19:13de votre métier
19:16comment fonctionne une prison.
19:18On est d'accord que vous
19:19vous n'avez toujours surveillé
19:20que des hommes.
19:21Les hommes surveillent les hommes
19:22et ce sont des surveillants
19:24femmes
19:24qui surveillent des femmes.
19:25Alors les hommes
19:26surveillent des hommes
19:26et on a aussi des surveillantes
19:28qui travaillent en milieu homme.
19:30Par contre,
19:31pour les détenus femmes
19:32ce sont effectivement
19:33des surveillantes
19:34avec parfois
19:35peut-être des responsables
19:36de quartier
19:37c'est-à-dire des officiers
19:39qui peuvent être des hommes
19:40mais c'est très rare.
19:41Et sur les 183 prisons
19:43il n'y a pas des prisons mixtes ?
19:45Non, il n'y a pas de prisons mixtes.
19:46La mixité n'existe pas en prison.
19:48Donc il y a des prisons de femmes.
19:49Il y a combien de prisons de femmes ?
19:50Alors là je ne pourrais plus
19:51vous dire de mémoire
19:52mais c'est très limité.
19:53C'est-à-dire qu'on a plus souvent
19:53des quartiers
19:54à l'intérieur de certains établissements.
19:57Le gros établissement pour femmes
19:59c'est surtout la maison d'arrêt
20:01de Rennes
20:02en fait
20:02où on a là effectivement
20:03une maison exclusivement
20:04d'arrêt pour femmes.
20:04C'est plus facile
20:05quand même pour un surveillant
20:06d'être avec des femmes ?
20:08Pas forcément.
20:09Non, non, pas forcément.
20:10Parfois on se plaint beaucoup
20:11de la violence
20:12en milieu masculin
20:13mais je vous garantis
20:14qu'en milieu femme
20:15quand ça part, ça part.
20:17Et ça part fort.
20:18Bon, écoutez
20:18c'était passionnant
20:19je ne sais pas ce que vous en pensez
20:20et on a eu
20:21moi en tout cas
20:22ça m'intéressait
20:23d'écouter
20:24évidemment
20:25ce travail
20:26qui est méconnu
20:27qui est essentiel
20:28il y a peut-être des...
20:30Je sais qu'on a un supporter
20:31du Paris Saint-Germain
20:32qui est de la pénitentiaire
20:33qui nous appelle régulièrement
20:34Julien.
20:35Voilà, Julien
20:36qui est un...
20:37Je ne sais pas
20:38vous le connaissez peut-être
20:39d'ailleurs.
20:39Non, non, enfin peut-être
20:40mais...
20:41Il nous appelle régulièrement
20:44il est très sympa
20:44d'ailleurs Julien
20:45mais c'est un métier essentiel
20:47qui n'est pas forcément valorisé
20:48un pet au casque
20:50disait cet ancien
20:51pour vouloir faire ce métier
20:53mais en même temps
20:54il y a quelque chose d'humain
20:55et j'imagine
20:56qu'il y a une passion aussi
20:57à vivre intensément
20:59et ce rapport-là
21:00j'aurais aimé encore prolonger
21:02sans doute la discussion
21:03en vous demandant
21:04les rencontres
21:04que vous avez faites
21:05et j'imagine
21:05qu'il y a aussi des rencontres
21:07qui vous ont marquées
21:08et des gens
21:08où vous vous êtes dit
21:09pourquoi est-ce qu'il est là ?
21:10Pourquoi est-ce qu'il est là ?
21:11C'est vrai qu'on a un panel aussi
21:12à la fois en termes de collègues
21:14déjà on a quand même
21:15un panel de collègues
21:16qui est très très large
21:16et c'est vrai qu'aussi
21:18il faut garder en tête
21:19que quand on est personnel
21:20de surveillance notamment
21:22on est aussi au contact
21:23des détenus
21:23c'est-à-dire qu'entre guillemets
21:24on vit avec eux
21:25mais c'est pour ça que je dis ça
21:26donc il y a aussi
21:27des relations interpersonnelles
21:30qui parfois peuvent
21:31se mettre en place
21:33et ouais on rencontre aussi
21:34parfois des...
21:35Moi je me souviens
21:36d'un détenu notamment
21:37qui était en fin de peine
21:38et qui appartenait
21:40ce qu'on appelait à l'époque
21:41le gant des postiches
21:42donc voilà
21:43et c'est vrai que
21:44quand on prend le temps
21:44parfois de discuter
21:45avec certains d'entre eux
21:46on se rend compte
21:47qu'ils ont aussi
21:48parfois des parcours de vie
21:49assez particuliers
21:50Il est 12h12
21:52merci beaucoup
21:53Wilfried Fonck
21:55secrétaire nationale
21:56je le rappelle
21:56du syndicat pénitentiaire
21:57UFAP
21:58UNSA
21:58c'était passionnant
21:59et il faut que vous veniez
22:00nous...
22:01ce serait bien qu'on fasse
22:02avec les auditeurs
22:03un échange
22:03il y a peut-être des gens
22:04qui ont envie de faire ce métier
22:05vraiment
22:05vous nous avez donné envie
22:06de davantage connaître
22:08votre métier
22:08merci beaucoup
22:09merci beaucoup
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À suivre
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