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Dans « le grand témoin » Télématin reçoit Pierre-Olivier Perl, arrière-petit-fils d'Alfred Dreyfus.
Dans « le grand témoin » Télématin reçoit Pierre-Olivier Perl, arrière-petit-fils d'Alfred Dreyfus.
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00:00Une proposition de loi votée à l'unanimité, c'est assez rare pour être soulignée.
00:04Elle a permis que le capitaine Dreyfus soit élevé au grade de général de brigade
00:08et ses descendants espèrent maintenant le voir entrer au Panthéon.
00:12Bonjour Pierre-Olivier Perle.
00:13Bonjour.
00:14Merci d'être avec nous.
00:15Vous êtes l'arrière-petit-fils de Dreyfus
00:18et c'est la première fois que vous vous exprimez dans les médias.
00:20Donc merci à vous.
00:21Pour les plus jeunes qui nous regardent et qui disent,
00:23mais c'était qui Alfred Dreyfus ?
00:24Qu'est-ce que vous pouvez nous en dire ?
00:26D'accord. D'abord, je veux préciser que je ne suis pas le seul descendant de Dreyfus à ce niveau.
00:31C'est vrai. C'est toute une famille.
00:32Nous sommes effectivement assez nombreux,
00:34descendant à la fois des deux enfants de Dreyfus.
00:37Donc voilà. Moi, c'est par ma mère.
00:40Il y a aussi l'autre branche qui a encore le nom de Dreyfus d'ailleurs,
00:44alors que moi, il a été perdu, descendant de la branche maternelle.
00:49Alors Dreyfus, qui était-il ?
00:51Un polytechnicien.
00:53Oui.
00:53Briant élève, école de guerre,
00:58qui a été un des premiers juifs,
01:01alors pas le premier, mais un des premiers juifs à l'état-major.
01:04Et il a été victime d'une machination
01:07ourdie par l'état-major,
01:10qui était à l'époque très antisémite,
01:12ce qui a conduit à une accusation de traîtrise
01:16en 1894.
01:19Et il a été condamné à la déportation à l'île du Diable
01:22à partir d'un dossier secret à huis clos par un tribunal militaire.
01:27Alors, il a été condamné au bagne.
01:31Il est parti à l'île du Diable,
01:32où il a vécu effectivement dans des conditions extrêmement pénibles,
01:35notamment à partir du moment où il y a un bruit qui a couru sur sa possible évasion.
01:42Et donc, il a eu pendant des années une double boucle.
01:45C'est-à-dire qu'en fait, quand il était couché,
01:47il avait deux bouts qui lui tenaient le pied,
01:49deux bouts en fer qui lui tenaient le pied.
01:51Vous pouvez imaginer les conditions de vie et de sommeil
01:54qui étaient extrêmement pénibles.
01:57Alors, sa famille, son frère Mathieu,
02:00sa femme Lucie, dans un premier temps,
02:02est rejoint ensuite par, au départ, Bernard Lazard
02:06et d'autres intellectuels de l'époque.
02:10Évidemment, on connaît Émile Zola.
02:12Avec son célèbre J'accuse.
02:13Avec son célèbre J'accuse, tout à fait.
02:15On a tenté de le faire réhabiliter déjà.
02:20Il y a eu un second procès.
02:22Innocenté, réhabilité.
02:23Alors, il n'a pas tout de suite été innocenté.
02:25Il a encore été accusé.
02:27Et ce qui est très étonnant,
02:28c'est qu'il a été déclaré traître
02:29avec circonstance atténuante.
02:31On ne peut pas imaginer qu'on puisse être traître
02:34avec une circonstance atténuante.
02:36Et donc, à l'issue, effectivement, du procès de Rennes,
02:40il a été réhabilité en 1906,
02:43mais, et c'est peut-être ce qui concerne la loi,
02:47eh bien, il n'a pas obtenu le grade
02:50qui lui était destiné.
02:53Alors, c'est justement l'actualité.
02:55C'est le vote de la loi mémorielle
02:56à l'initiative de Gabriel Attal
02:58pour l'élévation, 90 ans après sa mort,
03:01de votre arrière-grand-père au grade général,
03:03grade auquel, de toute façon, il aurait accédé
03:04si sa vie n'avait pas été brisée
03:06par ce que l'on appelle l'affaire Dreyfus.
03:09Les débats, ils ont eu lieu à l'Assemblée nationale.
03:11Et vous avez été conviés, vous,
03:13avec des membres de votre famille, c'est ça ?
03:14Tout à fait.
03:15Comment ça s'est passé ?
03:16Vous étiez où ?
03:17Alors, si vous regardez l'image,
03:19on ne nous voit pas parce qu'on était en haut.
03:21Oui.
03:22Bon, en fait, on a été très bien reçus, effectivement.
03:23Ah ben, si, on nous voit en partie.
03:27Donc, voilà, vous avez les...
03:28Les membres de la famille.
03:29Plutôt du côté Dreyfus,
03:31et de l'autre côté, il y avait plutôt
03:32les côtés Lévis avec ma grand-mère.
03:35Qu'est-ce que vous avez ressenti ?
03:35En fait, on a été très bien reçus
03:36à l'Assemblée nationale, effectivement.
03:37On a même pu assister au décorum républicain
03:39avec l'entrée de la présidente,
03:43avec la garde républicaine, tambour battant.
03:45Et c'est tout le combat d'une famille aussi
03:47qui se retrouve là,
03:49parce que vous, vous avez grandi
03:50avec ce drame de l'affaire Dreyfus.
03:53Tout à fait.
03:54Vous avez l'indignation chevillée au corps,
03:56j'imagine, dans cette famille.
03:57Oui, alors l'indignation, au départ,
03:58c'est celle d'Alfred Dreyfus lui-même.
04:00Bien sûr, bien sûr.
04:01Parce que dès 1906,
04:03il va effectivement réclamer justice
04:06et réhabilitation pour pouvoir obtenir
04:10le grade auquel il était destiné.
04:11Et pour suivre sa carrière militaire.
04:13Après, général de brigade,
04:14c'est le grade minimal
04:16auquel il aurait pu être destiné,
04:19sachant quand même qu'il est reparti se battre.
04:21Il a démissionné de l'armée,
04:21mais il est reparti se battre,
04:22y compris au chemin des dames.
04:23En dépit.
04:24Pendant la Première Guerre mondiale.
04:26En dépit de tout ça.
04:27Et donc, oui,
04:28c'est le combat d'une famille.
04:31C'est aussi,
04:32jusqu'aux années 1994,
04:35avant le centenaire,
04:37c'est vrai qu'on en entendait assez peu parler.
04:39Oui.
04:40Mais depuis cette période,
04:41on en parlait beaucoup en famille,
04:43d'accord ?
04:44Mais depuis cette période,
04:45il y a deux historiens,
04:47Vincent Duclair et Philippe Auriol,
04:49qui ont fortement milité
04:52pour la réhabilitation de Dreyfus.
04:54Donc, voici donc Alfred Dreyfus,
04:56désormais, parce que ça a été un vote
04:58à l'unanimité,
04:59donc au grade de général de brigade.
05:03Et puis, alors,
05:04le président de la République, là,
05:05a ouvert un peu les débats,
05:07la porte vers la panthéonisation.
05:09Ça, c'est votre but ultime ?
05:10Alors, je ne sais pas
05:11si c'est notre but familial.
05:13Finalement, c'est plutôt
05:14au président de la République
05:15et au peuple français
05:17de l'accepter.
05:18Mais avant la panthéonisation,
05:20si elle a lieu,
05:21il faut d'abord que le Sénat
05:22vote aussi dans les mêmes termes
05:25la loi qui a été mise en place
05:27par les députés.
05:29La panthéonisation,
05:30elle serait une véritable reconnaissance
05:33du combat de Dreyfus
05:34pour la vérité et pour la justice.
05:37C'est d'ailleurs le titre
05:38d'une exposition à l'heure actuelle
05:40au Musée d'art et d'histoire du judaïsme
05:42qui est une superbe exposition
05:44qui réhabilite Dreyfus
05:46et qui présente
05:47un certain nombre de photographies,
05:48de textes, d'objets
05:49et aussi énormément d'œuvres artistiques.
05:55Exposition que l'on peut retrouver
05:56jusqu'au 31 août.
05:57Merci infiniment d'avoir répondu
05:59à nos questions.
06:00Vous êtes venu d'ailleurs vous-même
06:01avec un objet.
06:03Un objet parce qu'en fait
06:04on a vécu en permanence
06:07avec effectivement l'histoire
06:09de l'affaire Dreyfus.
06:10Quand on allait chez ma grand-mère,
06:11il y avait une photo de Dreyfus
06:13et de Zola dans l'entrée.
06:14Et hommage par exemple,
06:16il y a aussi une photo de Dreyfus
06:17qui tient une pipe.
06:18Et donc on a vécu...
06:20Ça c'est le cendrier.
06:20Ça c'est le cendrier
06:21sur lequel était reposée la pipe.
06:23Et donc...
06:24Il ne faut pas le perdre celui-là.
06:25Non, on ne va pas le perdre.
06:26Il n'est pas dans un musée.
06:28Mais voilà.
06:28Donc c'était un petit symbole aussi
06:32du fait qu'en famille
06:33nous avons vécu dans un environnement
06:34entre guillemets historique.
06:36Évidemment.
06:36Et qui nous a effectivement construits.
06:38Merci infiniment d'être venu ce matin.
06:40Je vous en prie.
06:40Merci de votre invitation.
06:41Merci.