Le 3 avril dernier, B SMART 4Change a remis le prix de l’Audace des Quartiers à trois entrepreneurs venus de milieux défavorisés, lors de La Nuit des Audacieux. Marie-Adeline Peix, directrice exécutive des partenariats régionaux, de la création et de l’action territorial de Bpifrance nous explique quels peuvent être leurs besoins particuliers et comment la banque d’investissement les accompagne.
00:08Vous êtes la directrice exécutive des partenariats régionaux de la création et de l'action territoriale chez BPI France
00:15et vous étiez à nos côtés lors de cette nuit des audacieux, c'était début avril,
00:19l'événement organisé par Bismarck for Change au Carousel du Louvre.
00:23La BPI était partenaire de cette soirée.
00:25Je vais commencer par une question très générale sur ce mot audace qui nous réunit.
00:29Et qu'est-ce qu'il signifie pour vous ?
00:31Alors l'audace pour moi c'est écouter la petite voix qui est en vous et qui vous dit que rien n'est impossible.
00:37En fait c'est accepter de se lancer, c'est se dire pourquoi pas moi.
00:43C'est pas de la témérité, c'est pas se lancer tout seul, c'est aussi accepter de se faire accompagner,
00:50mais c'est vraiment, voilà, oser ses rêves.
00:55Et dans le milieu des affaires, est-ce que vous dites c'est une qualité indispensable ?
00:59On ne peut pas se lancer dans un business si on n'est pas audacieux ou audacieuse.
01:03Alors Nicolas Dufour quand il parle des entrepreneurs, il dit c'est un grain de folie et un tableur Excel dans la tête.
01:10Donc je suppose que le grain de folie c'est vraiment ce qui caractérise les entrepreneurs,
01:16parce que des gens qui ont des tableurs Excel dans la tête, il y en a beaucoup.
01:18Mais ce petit grain de folie et cette capacité à faire la connexion entre les deux, c'est ça qui caractérise les entrepreneurs et c'est sans doute ça qui constitue un peu l'audace.
01:30Oui, moi je reçois souvent des jeunes créateurs, créatrices d'entreprises, ou des moins jeunes d'ailleurs, un peu plus longtemps après la date de création.
01:39Ils disent, on a eu la bonne idée, puis après, bon, il y a quand même un petit parcours du combattant.
01:43D'ailleurs la BPI est souvent là pour les accompagner. Alors vous avez remis lors de la nuit des audacieux les prix de l'audace des quartiers.
01:50On va recevoir les trois lauréats.
01:52Ils sont super.
01:53Oui, ils sont top. Et déjà, sur ce soutien de la BPI, depuis quand, comment la BPI soutient l'entrepreneuriat dans les quartiers prioritaires de la ville ?
02:03Alors, d'abord BPI, c'est BPI toute la France.
02:07Donc on soutient les entrepreneurs, qui qu'ils soient et où qu'ils soient, quel que soit leur parcours, quel que soit leur genre, quel que soit leur territoire d'origine.
02:16Pour autant, on a effectivement développé depuis maintenant 2019 un programme renforcé pour soutenir les entrepreneurs des quartiers.
02:25Ce sont des entrepreneurs comme les autres, mais ils ont parfois plus de difficultés à avoir accès à l'information, au réseau, à tout ce qui contribue à la réussite entrepreneuriale,
02:39l'ensemble des choses qui vont vous permettre de réussir parce que vous allez être aidé, parce que vous allez trouver au bon moment les bonnes connexions.
02:46Et pour ça, on a développé depuis 2019 et de façon très renforcée, depuis l'année dernière, avec un programme qui s'appelle Entrepreneuriat Quartier 2030,
02:56des actions de soutien qui ont trois dimensions très importantes.
03:00D'abord, la dimension d'aller vers. Il faut, pour générer l'audace, pour permettre aux porteurs de projets, aux jeunes et moins jeunes dans les quartiers de se lancer,
03:11il faut aller les chercher et il faut leur montrer qu'on peut réussir.
03:14Exactement. Et d'une certaine manière, ce que vous faites aujourd'hui en mettant en avant les entrepreneurs et des entrepreneuses issus de ces territoires
03:22qui se sont lancés et qui ont réussi, c'est une forme de rôle modèle, de mise en avant et de démonstration du « c'est possible ».
03:31Une fois qu'on a fait ça, et ça marche, parce qu'on constate que de plus en plus de gens dans les quartiers se disent
03:38« L'entrepreneuriat, pourquoi pas moi ? » et on le compte.
03:41Oui, il ne se serait peut-être pas lancé sans cette action de détection d'informations.
03:46Oui, et puis même, il ne se serait même peut-être pas dit que peut-être un jour, ça peut être pour moi, même sans se lancer.
03:54Et ça, c'est le deuxième axe important, c'est les aider à se lancer.
04:00Parce qu'il y a de plus en plus d'intentionnistes, mais de passage à l'acte, il y en a moins dans les quartiers qu'ailleurs en France.
04:06Et pour ça, il faut les accompagner, il faut les financer.
04:09Et c'est ce qu'on fait avec le programme « Entrepreneuriat quartier 2030 ».
04:12On a des actions qui sont portées par nos réseaux partenaires.
04:16Oui, je voyais 456 millions d'euros de budget 2024-2028.
04:21C'est comme un service public à la création d'entreprises ?
04:24Oui, c'est exactement ça.
04:26Et ça, c'est un message qui est très important.
04:28Je pense qu'il faut faire savoir que sans doute le pays au monde où c'est le plus facile de se lancer dans l'entrepreneuriat, c'est la France.
04:37Il existe d'abord des acteurs comme France Travail,
04:40qui sont les acteurs qui soutiennent l'entrepreneuriat de façon indirecte en facilitant pour les entrepreneurs en devenir le lancement du projet.
04:51Et puis surtout, il y a des réseaux d'accompagnement,
04:54notamment les réseaux partenaires de BPI France qui sont réunis au sein d'un collectif qu'on appelle le collectif CapCrea,
05:00qui sont 27, qui sont partout dans les territoires, qui ont 3000 implantations
05:04et qui accompagnent gratuitement les porteurs de projets pour leur permettre de favoriser la réussite entrepreneuriale.
05:12Et si c'est gratuit, c'est bien parce que c'est payé par les pouvoirs publics,
05:17par BPI France via les soutiens qu'on a de la part de l'État et de la Caisse des dépôts.
05:22Et ce service public de l'entrepreneuriat,
05:24ce n'est même pas que ce serait un manque d'audace que de ne pas aller vers eux.
05:30Surtout, ce serait une bêtise parce que c'est vraiment un gage de réussite.
05:36Ça facilite la réussite entrepreneuriale.
05:38De quel financement on parle là, en l'occurrence ?
05:41Ça prend quelle forme ?
05:42Parce que ça peut prendre différentes formes.
05:43Ça peut prendre différentes formes.
05:45Donc il y a deux leviers majeurs de la réussite entrepreneuriale.
05:51Se faire accompagner et bien financer son projet.
05:54Donc l'accompagnement, c'est de l'accompagnement humain.
05:56Ça peut être du mentorat, ça peut être de l'accompagnement individuel, de l'accompagnement collectif.
06:01Et quand on parle de financement, il y a plusieurs types de choses.
06:05On garantit votre banque.
06:07Quand vous souhaitez vous lancer dans l'entrepreneuriat,
06:09que vous allez voir votre banque pour emprunter,
06:12elle peut être garantie jusqu'à 80% par BPI France.
06:15En général, ça aide un peu à l'attribution du financement.
06:18Et par ailleurs, on a d'autres dispositifs qui sont extrêmement utiles,
06:23et notamment ce qu'on appelle les prêts d'honneur.
06:25Un prêt d'honneur, c'est ce qui va constituer pour ceux qui n'en ont pas les fonds propres de leur entreprise.
06:31On prête à vous qui vous lancez.
06:34Donc vous allez mettre cet argent dans les fonds propres de votre entreprise.
06:38On vous prête sans garantie, à taux zéro,
06:41et avec un différé de remboursement qui vous permet de commencer à gagner du chiffre d'affaires avant de rembourser votre entreprise.
06:46Et ça, c'est vrai pour toute la France ?
06:49Ce n'est pas spécifique à l'entrepreneuriat quartier 2030 ?
06:52C'est vrai pour toute la France, mais dans les quartiers, on a un prêt d'honneur quartier,
06:57qui est un prêt d'honneur un petit peu particulier,
07:00parce que là où on a une exigence de cofinancement bancaire pour les prêts d'honneur,
07:06l'exigence est moindre pour les prêts d'honneur quartier.
07:10On n'est pas sur du 1 pour 1,
07:12mais on va mettre 2 euros de prêts d'honneur pour 1 euro de financement bancaire,
07:16ce qui facilite en fait l'accès aux prêts d'honneur.
07:19Et par ailleurs, ce cofinancement bancaire, ça peut être un micro-crédit de l'ADI.
07:23Et troisième élément qui est différenciant pour le prêt d'honneur quartier,
07:26alors on rentre un peu dans la technique, mais c'est ça qui permet de réussir.
07:31Les prêts d'honneur, normalement, ils vont jusqu'à 3 ans, aux 3 ans de l'entreprise.
07:35Dans les quartiers, on continue à faire des prêts d'honneur après 3 ans.
07:39Pourquoi vous avez modulé finalement l'offre pour les quartiers prioritaires de la ville ?
07:44J'imagine que c'est un retour d'expérience.
07:46Alors, à la fois parce qu'effectivement, on constate qu'il peut être parfois plus compliqué
07:52d'accéder au financement bancaire classique quand on est un entrepreneur des quartiers,
07:57et puis parce qu'on a vraiment la volonté très forte, c'est aussi du marketing, entre guillemets,
08:03de faire savoir que financer son entreprise, et financer son entreprise au moment où on la lance,
08:11c'est indispensable pour permettre de réussir.
08:14Et ça, c'est de l'audace.
08:16Souvent, les entrepreneurs et souvent les entrepreneuses se lancent dans le projet en disant,
08:21non mais j'emprunterai plus tard, je vais aller chercher l'argent de la famille,
08:26l'argent de mes voisins, je vais faire ce qu'on appelle du love money.
08:30On veut marquer haut et fort le fait que c'est plus facile de se lancer et de réussir son projet
08:37quand on le finance bien au départ.
08:39Il y a le troisième pilier, l'accélération, le développement.
08:44Alors là, c'est quoi ? C'est des entreprises un peu plus installées qu'on aide à passer à l'échelle ?
08:47Non, c'est surtout des entreprises plus ambitieuses ou plus audacieuses.
08:50D'accord.
08:50Et il n'y a pas de jugement de valeur.
08:52En réalité, dans l'entrepreneuriat, dans les quartiers comme ailleurs, il y a plein de formes d'entrepreneuriat.
08:57Il y a des gens qui se lancent dans l'entrepreneuriat parce qu'ils ont envie d'être leur propre patron.
09:00En général, dans ce cas-là, ils n'ont pas trop envie non plus de s'embêter avec des salariés.
09:06Ce sont des entrepreneurs, ce ne sont pas des futurs chefs d'entreprise.
09:09Et une fois encore, il n'y a aucun jugement de valeur.
09:13Mais exactement comme vous n'accompagnez pas un sportif de haut niveau comme un sportif du dimanche,
09:21les sportifs de haut niveau de l'entrepreneuriat, on a mis en place pour eux, dans les quartiers, des accélérateurs
09:29qui vont leur permettre d'avoir, en plus d'un accompagnement individuel, de l'accompagnement collectif et de la mise en réseau,
09:35c'est des promotions qui durent plusieurs mois.
09:38Et du coup, les entrepreneurs s'aident aussi entre eux.
09:43Et ça fonctionne extrêmement bien.
09:44C'est des accélérateurs qui sont portés par différents réseaux, comme les déterminés, comme les premières, comme BGE.
09:53Et ces accélérateurs-là sont véritablement le moyen d'aller plus vite, plus haut et plus fort.
09:59Même si on n'est plus dans une année olympique, le concept reste parfaitement perdu.
10:03Oui, la devise de Coubertin est toujours « Val à merci ».
10:07Restez avec moi puisqu'on va recevoir, ils vont venir juste entre nous deux,
10:10les lauréats de ces prix de l'audace des quartiers qui ont été remis.