Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 20/05/2025
"L'enseignement primaire, une organisation en décalage avec les besoins de l'élève" : voici le titre d'un rapport publié par la Cour des comptes. Il évoque "un niveau des élèves inacceptable" et un "système scolaire aujourd'hui en situation d'échec". Écoutez l'analyse de Guislaine David, co-secrétaire générale et porte-parole du SNUIPP-FSU.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 20 mai 2025.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Yves Calvi et Agnès Bonfillon, RTL Soir.
00:04Il est 18h42, bonsoir Guylaine David.
00:06Bonsoir.
00:07Vous êtes professeur des écoles, co-secrétaire général et porte-parole du SNUIP-FSU,
00:11principal syndicat du primaire.
00:12Merci de nous rejoindre sur RTL.
00:14L'enseignement primaire, une organisation en décalage avec les besoins de l'élève,
00:18c'est le titre d'un rapport publié aujourd'hui par la Cour des comptes.
00:21Elle évoque, je cite, un niveau des élèves inacceptable
00:23et un système éducatif aujourd'hui en situation d'échec.
00:27Quelle est votre réaction et surtout que répondez-vous ?
00:29Alors, c'est un rapport de la Cour des comptes qui est fait par des rapporteurs
00:32qui ont une vision comptable des choses, bien évidemment,
00:36puisque c'est le rapport de la Cour des comptes.
00:39Ça tire un peu boulet rouge sur l'école.
00:41C'est vrai que l'école est en difficulté.
00:43Il y a une vraie difficulté que rencontrent les enseignants actuellement.
00:48Il y a des choses à améliorer dans le système scolaire.
00:52Et il y a quelque chose sur lequel on n'arrive pas à travailler,
00:54c'est le creusement des inégalités scolaires
00:57entre les élèves des milieux populaires et les élèves des milieux favorisés
01:01où cet écart s'accroît d'année en année
01:05et que l'école n'arrive pas à répondre à ça.
01:07Donc, c'est vraiment une préoccupation.
01:09Il faut pouvoir répondre à ça.
01:10On n'est pas tout à fait d'accord sur les préconisations
01:13que fait le rapport, bien évidemment,
01:16puisqu'on a d'autres propositions à faire.
01:17Mais en tout état de cause,
01:20on sait que l'école traverse une grave crise actuellement.
01:22Ça, c'est sûr.
01:23Alors, justement, des inégalités qui s'aggravent,
01:25mais aussi une organisation en décalage avec les besoins de l'enfant,
01:28une dépense mal évaluée,
01:30un système éducatif trop centralisé.
01:33Franchement, le constat est alarmant.
01:35On est d'accord ?
01:36Le constat est alarmant.
01:37C'est pour ça qu'on ne partage pas tout.
01:39C'est-à-dire qu'il y a des choses qui fonctionnent quand même à l'école.
01:41mais on partage l'idée qu'on fait le bilan
01:46depuis plus d'une dizaine d'années maintenant
01:49de politiques éducatives qui se mettent en place
01:52avec une succession de gouvernements.
01:55Et alors, on a vécu ces deux dernières années
01:57une succession de ministres
01:58qui systématiquement mettent en place des réformes,
02:01des dispositifs.
02:02On va dans certaines directions.
02:04On change de cap.
02:04On rechange de cap.
02:06Les enseignants ne savent plus tellement
02:07où on ne sait plus s'y retrouver.
02:09Les parents aussi ont besoin de repères.
02:12L'école traverse une grave crise de confiance.
02:15Il faut pouvoir redonner confiance dans l'école.
02:18Mais dans ces cas-là, il faut donner un cap
02:20et ne pas systématiquement mettre en place des réformes.
02:23C'est ça aussi qui s'est passé.
02:24Je rappelle que vous êtes vous-même professeur des écoles.
02:25C'est important pour ceux qui nous écoutent.
02:27Est-ce qu'il faut, d'une façon ou d'une autre,
02:29repenser le modèle de notre école,
02:30comme le préconise le rapport ?
02:32Et si oui, de quelle façon ?
02:33Ces constats sont d'autant plus paradoxaux
02:35que les élèves français passent en moyenne
02:37plus d'heures à apprendre les fondamentaux
02:39que dans d'autres pays européens affirment le même rapport.
02:41Alors, c'est ce que nous disons depuis 2017.
02:43C'est-à-dire qu'avec l'arrivée de Jean-Michel Blanquer
02:45dans le premier gouvernement Macron,
02:48on a tout misé sur français, mathématiques,
02:50en augmentant les heures passées à faire du français,
02:53des mathématiques.
02:54Et on se rend compte qu'on a des moins bons résultats qu'ailleurs.
02:57C'est-à-dire que quand on systématise
02:59on systématise sur certaines disciplines,
03:01on oublie le reste et on sait que pour apprendre à vivre dans le monde actuel,
03:06pour penser le monde et agir dans le monde,
03:09il faut aussi faire des sciences, de l'histoire, de la géographie,
03:13de l'EPS à l'école et pas systématiquement du français et des mathématiques.
03:16Et quand on voit comment on enseigne le français et les mathématiques actuellement,
03:21on est sur des compétences systématiques.
03:24Je vais prendre un exemple, actuellement les programmes vont centrer sur
03:30comment on fait des opérations, on va systématiser,
03:34en conjugaison on va faire plein d'exercices pour systématiser
03:36et on ne va pas apprendre à l'élève à quoi ça sert.
03:39C'est-à-dire qu'il faut trouver le sens, c'est quoi le sens d'une opération ?
03:42Si ce n'est pour répondre à un problème, un problème de la vie quotidienne.
03:45Donc il faut accentuer sur la résolution de problèmes en mathématiques
03:49et notamment la compréhension.
03:51Et en lecture et notamment en français,
03:52on a accès depuis la période de Jean-Michel Blanquer
03:55sur le déchiffrage, le décodage de la lecture.
03:58Alors qu'à notre sens, c'est plutôt le sens de la lecture.
04:01Pourquoi on lit ?
04:02C'est pour communiquer, c'est pour comprendre,
04:04c'est pour structurer sa pensée qu'on va écrire,
04:07qu'on va apprendre à lire.
04:08Et donc il faut recentrer sur le sens de la lecture.
04:11Donc il y a des orientations différentes à prendre.
04:14On est aussi soumis depuis un certain temps
04:16à des injonctions qui nous tombent du ministère
04:19sur les programmes, sur un certain nombre de méthodes.
04:21On appelle ça les bonnes pratiques.
04:23C'est le boulot du ministère, non, quand même ?
04:25Comment ?
04:25C'est le boulot du ministère, non ?
04:27C'est le boulot du ministère, mais c'est pas tellement...
04:31Enfin, c'est pas en prise avec le terrain, avec le réel.
04:33C'est-à-dire qu'on peut changer le modèle éducatif
04:37actuellement en France et le système scolaire,
04:39mais en donnant les moyens.
04:40Alors, on demande toujours plus de moyens,
04:43mais c'est vrai aussi que quand on réfléchit
04:44par rapport aux autres pays européens,
04:46ceux qui réussissent le mieux actuellement,
04:48ce sont les pays de l'OCDE qui ont misé
04:50et qui ont plus investi,
04:52parce que l'éducation, c'est pas un coût,
04:54c'est un investissement,
04:54qui ont plus investi sur les premières années de l'école,
04:57c'est-à-dire la maternelle.
04:59Alors que là, en France,
05:00on n'investit pas suffisamment dès la maternelle.
05:03Et puis, il y a aussi la question des effectifs par classe.
05:05On est quand même le pays européen.
05:07Si on sort de l'éducation prioritaire,
05:09où on a eu des dédoublements,
05:10mais si on regarde les effectifs hors éducation prioritaire,
05:12c'est la majeure partie des classes.
05:14On a 23 élèves par classe,
05:15alors que la moyenne de l'OCDE, c'est 19.
05:17En Grèce, en Pologne, en Lettonie, c'est 17.
05:21Et là, c'est un truc très très simple.
05:23Et vous imaginez bien que quand on a 25,
05:25ou 26, ou 27 élèves par classe,
05:27qu'on est dans des situations aussi
05:29où on inclut des élèves dans des situations fragiles,
05:32eh bien, on ne peut pas faire classe
05:34de la même façon que quand on en a 17.
05:35C'est évident.
05:36J'aimerais que nous parlions maintenant
05:38de la fameuse semaine de 4 jours.
05:39Elle aussi est très critiquée,
05:41jugée néfaste en raison de la désynchronisation
05:44liée au week-end prolongé.
05:46Vous en pensez quoi ?
05:47Ça fonctionne ou pas, la semaine de 4 jours ?
05:49C'est-à-dire que le rapport de la Cour des comptes,
05:51et c'est là où on ne trouve pas ça très rigoureux
05:54dans la façon dont ça a été fait,
05:55c'est-à-dire qu'il se base sur un rapport de 2010.
05:582010, l'Académie de médecine
05:59qui sort un rapport sur le rythme de l'enfant.
06:02Ensuite, on a 2013, la réforme payant,
06:05où toutes les écoles passent à 4 jours et demi,
06:06vous vous souvenez de cette période où ça a été problématique
06:08parce que ça a été très conflictuel
06:10dans le système éducatif,
06:13avec les parents, avec les collectivités,
06:14avec les enseignants.
06:15Ça a été difficile à mettre en place.
06:172017, Jean-Michel Blanquer revient
06:19sur la réforme des 4 jours et demi.
06:20Il a fait trois fois que vous le citez.
06:21Oui, c'est vrai.
06:22Il se comprend rien un tout petit peu dans le pif,
06:24si je puis me permettre.
06:25C'est vrai, mais on fait le bilan
06:26de ce qui s'est passé,
06:27et c'est vrai qu'il a été à l'origine
06:28de lois et de réformes
06:30qui ont modifié le système.
06:32Et donc, de fait,
06:33on arrive à revenir sur la semaine des 4 jours et demi,
06:36à voir la semaine des 4 jours,
06:37et maintenant,
06:38on n'en a jamais tiré le bilan
06:39et on n'en a jamais fait de suivi de ces réformes.
06:42C'est ça aussi le problème en France,
06:43c'est qu'on fait des réformes,
06:45on les modifie,
06:45mais on n'évalue pas les choses,
06:47on n'évalue pas ce qui s'est passé.
06:49On a encore des écoles quand même à 4 jours et demi,
06:50puisque Paris fonctionne sur 4 jours et demi,
06:52il y a des grandes villes en France,
06:53Toulouse, Rennes, Brest,
06:55et puis on a des communes
06:57qui fonctionnent à 4 jours.
06:58Mais on n'a jamais comparé.
06:59Est-ce que ça fonctionne mieux
07:00pour les élèves à 4 jours et demi
07:01ou à 4 jours ?
07:01On ne sait pas.
07:02Et ce qu'il faut aussi envisager,
07:04il faut y penser,
07:05c'est qu'on ne peut pas déconnecter
07:07le rythme scolaire des enfants
07:08si on n'interroge pas
07:09le rythme de la société
07:10et le rythme des parents.
07:12Parce qu'un enfant qui arrive
07:13à 7h30 à l'école le matin,
07:15qui repart à 19h,
07:16il passe un temps conséquent,
07:18alors certes pas forcément à l'école
07:19parce qu'il y a le temps périscolaire,
07:21mais dans le collectif
07:22et dans quelque chose
07:24qui peut être fatigant.
07:25Selon l'Académie nationale de médecine,
07:26le temps scolaire en France
07:27n'est pas en cohérence
07:28avec les connaissances
07:29de la chronobiologie de l'enfant.
07:31Ce sont des questions
07:32que vous vous posez aussi ?
07:33Oui, c'est des questions
07:33qu'on peut se poser,
07:34mais on peut imaginer
07:35effectivement un certain nombre de choses.
07:37Alors la convention citoyenne
07:39qui va être mise en place
07:41par le CESE
07:42va certainement en discuter.
07:43Mais il faut tout convoquer
07:44quand on regarde ça.
07:45C'est-à-dire qu'on ne peut pas
07:46envisager les choses,
07:48modifier le rythme scolaire
07:50et revenir sur le rythme scolaire
07:52à 4 jours et demi
07:52sans faire le bilan
07:53de ce qui s'est déjà fait.
07:54Ça, c'est évident.
07:55Ce que l'on comprend,
07:56c'est que si on enchaîne
07:58les réformes
07:59sans effectivement s'arrêter
08:00sur leurs conséquences,
08:02ce que cela entraîne
08:03pour l'enfant,
08:05dans 10 ans,
08:05on vous réinvite
08:06et vous nous dites pareil ?
08:07C'est possible.
08:08Je ne sais pas
08:08si je serai encore là
08:09dans 10 ans
08:09pour vous en reparler.
08:10Mais en tout cas,
08:11ce qui est sûr,
08:12c'est qu'il faut à un moment donné
08:14avoir des réformes
08:15qu'on laisse autant
08:16aux réformes de s'installer.
08:17Et les pays nordiques,
08:18notamment,
08:19qui réussissent le mieux,
08:20ont des réformes,
08:21notamment sur les programmes,
08:22où on laisse le temps
08:23plus stable,
08:2315 ans,
08:24pour pouvoir voir les effets.
08:27Je vais vous perturber encore
08:28parce qu'Emmanuel Macron
08:29a annoncé une convention citoyenne
08:30sur les temps de l'enfant
08:31qui débute donc le 20 juin
08:33tout prochainement.
08:34Est-ce que c'est quand même
08:34une bonne chose ?
08:36Elle devrait aborder les sujets
08:36du périscolaire,
08:37du poste scolaire,
08:38du temps familial,
08:39de l'école.
08:40D'ailleurs,
08:40vous serez présente,
08:40vous êtes invitée ?
08:41Alors, pour le moment,
08:42nous ne sommes pas invités.
08:43C'est une convention citoyenne.
08:45Ce sont les citoyens
08:45qui sont convoqués,
08:47enfin, réunis,
08:48en tout cas choisies.
08:49C'est pas mal d'avoir
08:49les professionnels quand même.
08:50C'est possible qu'on soit
08:51effectivement sollicité
08:52pour qu'on nous demande
08:53notre avis.
08:54Ce serait pas mal,
08:54effectivement.
08:55Merci beaucoup,
08:56Guylaine David,
08:57co-secrétaire générale
08:58et porte-parole du SNIP,
08:59FSU,
09:00principal syndicat
09:01du primaire dans notre pays.
09:02Dans un instant,
09:03un homme très bien éduqué,
09:04même si parfois,
09:05on peut le trouver
09:06un peu mal dégrossi.
09:07Alors là,
09:07je vous laisse la responsabilité
09:08de vos propos, Yvan.
09:09C'est ce qui fait son charme.
09:10Marc-Antoine Lebray
09:11sera avec nous.

Recommandations