Des patrons interviewés comme des patronnes

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François-Henri Pinault, Xavier Niel… Voici ce que donneraient les interviews si on leur posait les mêmes questions qu’aux femmes.

Transcript

00:00Votre premier jour, en tant que numéro 1,

00:02donc c'est un jour très important parce que tous les regards sont sur vous.

00:06Qu'est-ce que vous portiez ?

00:07Qu'est-ce que je portais ?

00:10Ma sacoche, ressemblablement.

00:12On ne s'attendait pas du tout à ce que ça marche autant.

00:14On espérait pouvoir interpeller, c'était vraiment le but de la vidéo.

00:19Bravo pour votre parcours exceptionnel.

00:21C'est très rare d'occuper de telles fonctions pour un homme de votre âge.

00:23On n'est pas habitué.

00:24Vous avez droit à quel genre de commentaires ?

00:26Parce que ça a dû en étonner plus d'un.

00:29Non, en fait, je ne me pose pas cette question-là.

00:32On a réalisé l'étude avec Mowclay, qui est une agence de communication digitale.

00:38L'idée, c'était d'analyser à la fois des portraits de dirigeantes,

00:41des interviews d'hommes et de femmes,

00:43et de croiser les questions qui étaient posées sur le même type d'interview.

00:47Et on a constaté que les questions qui étaient posées aux femmes et aux hommes

00:51n'étaient pas forcément les mêmes,

00:52et que surtout, il y avait des questions récurrentes qui étaient posées aux femmes

00:56qu'on ne posait jamais aux hommes.

00:58Et on dit que vous, vous savez vous fixer des objectifs.

01:02C'est quoi votre point idéal ?

01:04C'est le mien actuellement.

01:05Génial.

01:06Ça se voit, vous êtes très beau, vous êtes très élégant.

01:09Une femme, il faut qu'elle reste jeune éternellement,

01:11même quand elle a déjà 20 ans de carrière derrière elle.

01:14C'est-à-dire qu'il faut à la fois être crédible

01:16dans son rôle de chef d'entreprise et de dirigeante,

01:20mais en même temps, il faut aussi savoir garder sa part de féminité,

01:23émotionnelle, de séduction.

01:26Et ça renvoie à une des tendances fortes de l'étude,

01:29qui est aussi que finalement, les hommes sont des experts

01:31et les femmes sont des femmes.

01:32Pour les hommes, on utilise essentiellement des verbes d'action.

01:36Les hommes vont lancer, vont prendre,

01:39et puis les femmes vont plutôt être du côté de la médiation.

01:42Elles vont raconter, elles vont expliquer.

01:44Et donc ça, on voit en fait que dans l'utilisation des verbes

01:47qui sont mis en avant de manière différenciée,

01:51ça a un impact aussi sur la manière dont on perçoit les femmes.

01:53Cédric O, bonsoir.

01:55Bonsoir.

01:55Vous êtes le secrétaire de qui, du coup ?

02:00Je suis le secrétaire de Béaury-Dolomère.

02:02On a toujours cette tendance de la jeunesse, de la femme,

02:05qui est toujours amenée à un mentor.

02:07Qui a été son mentor pour en arriver ici ?

02:10Quel homme vous a inspiré ? Quel homme vous a accompagné ?

02:13Donc, c'est un peu ça aussi qu'on a voulu démontrer.

02:15En fait, finalement, on est la secrétaire de qui ?

02:18On est la secrétaire d'un ministre ?

02:19Vous êtes plutôt combatif et doux,

02:23créatif et doux,

02:24ou carrément agressif et doux ?

02:26Et doux ?

02:26Bah oui, tous les hommes sont doux.

02:28On est tous doux, bah oui.

02:29Le mot doux ne doit pas être celui qui me caractérise le plus.

02:33La fin de l'interview,

02:35où effectivement il y a un certain nombre d'hommes qui étaient étonnés,

02:38qui ne croyaient pas forcément que ces questions étaient vraiment posées à des femmes,

02:41parce qu'eux-mêmes se disent

02:42« mais en fait, j'accepterais pas qu'on me pose ces questions à moi ».

02:45Certains nous ont fait des retours en nous disant

02:47que c'était une des interviews les plus difficiles à laquelle ils avaient dû répondre,

02:51parce qu'on sentait justement un certain malaise

02:54et une difficulté pour eux à répondre aux questions qui leur étaient posées.

02:57Vous avez un poste dans lequel vous doutez certainement tous les jours.

03:02Comment vous gérez le syndrome de l'imposteur ?

03:07Je doute.

03:08Pourquoi ?

03:09Non, je doute pas.

03:10Quand on nous pose des questions sur comment est-ce qu'on gère notre vie personnelle,

03:13notre vie professionnelle avec les enfants,

03:16est-ce qu'on ne doute pas parfois ce fameux syndrome de l'imposteur,

03:20finalement on voit qu'il est posé à beaucoup de femmes.

03:22Et la réalité des choses, c'est que même si on est surprise de ces questions,

03:27on y répond.

03:28Et c'est là aussi où on voit qu'il y a ces biens inconscients qui jouent,

03:32c'est que les hommes qui sont interviewés dans la vidéo,

03:35ils ne comprennent pas qu'on leur pose la question.

03:38L'enjeu était presque triple,

03:39parce que le point de départ c'était d'interpeller les journalistes et les médias

03:42pour qu'ils prennent conscience de leur rôle aussi en tant que médias

03:47dans les questions qu'ils posent de manière différenciée aux femmes et aux hommes,

03:51mais aussi de faire prendre conscience aux hommes

03:54de ce que c'est d'être à la place des femmes,

03:55et de faire prendre conscience aussi aux femmes

03:57que finalement on n'a pas à répondre à ces questions,

04:00on peut aussi refuser d'y répondre.

04:02Faire carrière dans le shopping c'est un rêve de petit garçon ?

04:04Non.

04:05C'était quoi votre rêve de petit garçon ?

04:07Mon rêve de petit garçon c'était d'être militaire.

04:09Ah oui, d'accord, exceptionnel quand même.

04:11L'idée globale de la campagne, de l'étude et de la vidéo,

04:15c'était aussi de démontrer que ces biais

04:18dans le traitement médiatique des femmes dirigeantes

04:22ont un impact aussi sur la parité,

04:25sur l'égalité hommes-femmes dans le milieu entrepreneurial,

04:27ont un impact aussi sur l'accès au financement.

04:29Ça induit en fait une perception globale de la société

04:32qui fait que les femmes vont être plus illégitimes,

04:37moins crédibles, plus fragiles, moins conquérantes que les hommes,

04:41et donc forcément une femme qui est dirigeante entrepreneur

04:44et qui va devant un panel d'investisseurs pour lever des fonds,

04:48même si son projet, son argumentaire est tout aussi bon

04:53que celui qui serait développé par un homme,

04:55finalement on voit quand même que ça a un impact au bout du compte

04:58puisqu'elles ont 30% de moins de chances que les hommes de trouver des financements.

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