Annexion du Groënland : Trump menace-t-il d’attaquer l’UE ?

Sud Radio

09/01/2025

Avec Christophe Weissberg, ancien député des Français des Etats-Unis et du Canada

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00:00Le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Jean-Jacques Bourdin.

00:04Il est 7h40, nous sommes avec Christopher Weisberg, ancien député des Français des Etats-Unis et du Canada.

00:11Bonjour, vous êtes franco-américain, vous connaissez bien évidemment les Etats-Unis.

00:16Donald Trump veut redessiner la carte du monde.

00:20Le voilà qui s'intéresse au Groenland, qui s'intéresse à Panama, qui s'intéresse au Canada.

00:25Je vais simplement lire la dernière déclaration de Trump sur le Groenland.

00:30Nous avons besoin du Groenland pour des raisons de sécurité nationale.

00:34Il y a environ 45 000 habitants au Groenland. En fait, il y en a 60 000.

00:38Et on ne sait même pas si le Danemark a un droit légal sur ce territoire.

00:42Mais si c'est le cas, il devrait y renoncer pour protéger le monde libre.

00:46Il suffit de regarder, il y a des navires chinois partout, il y a des navires russes partout.

00:51Nous ne laissons pas cela se produire.

00:53Si le Danemark veut arriver à un accord, les habitants vont probablement voter pour l'indépendance

00:58ou pour rejoindre les Etats-Unis.

01:00Sinon, j'infligerai des taxes douanières très élevées au Danemark pour qu'il accepte cette acquisition.

01:07Comment réagissez-vous ?

01:09— Écoutez, c'est compliqué, parce que vous avez commencé par le Groenland,

01:13qui est un pays qui est rattaché, dont le souverain est le roi du Danemark,

01:19mais qui a une autonomie et une indépendance gouvernementales très fortes.

01:23Ils ont quitté l'espace européen il y a une vingtaine d'années.

01:27Et pour autant, ils sont rattachés quand même à notre espace politique, puisque...

01:30— Ils sont rattachés à l'Union européenne.

01:32— D'une manière ou d'une autre. Sans y être explicitement rattachés, ils le sont un peu.

01:37Et donc les propos de Trump, qui ne sont pas nouveaux, parce qu'il avait déjà évoqué le sujet

01:42il y a une vingtaine d'années, sont plus inquiétants parce qu'aujourd'hui...

01:46Et c'est ça, la grande différence entre le Trump 2016 et le Trump version 2025.

01:51Il a aujourd'hui aucun contre-pouvoir contre lui aux États-Unis.

01:55Et ça change fondamentalement la donne.

01:57Il a le Sénat, il a le Congrès et il a la Cour suprême.

02:02Et aujourd'hui, il a tout ce que les contre-pouvoirs américains avaient réussi à éviter il y a dix ans,

02:08sont avec lui, et notamment la Silicon Valley, avec Musk et d'autres qui se sont rattachés à lui.

02:14Ces projets qui étaient des projets un peu délirants il y a dix ans, deviennent assez sérieux aujourd'hui.

02:21Et donc vous avez parlé du Groenland, mais il suffit de voir aussi le rapport avec le Canada,

02:26qui est le voisin privilégié des États-Unis, pour se rendre compte qu'on est dans une nouvelle ère,

02:31et une nouvelle ère qui prédit un rapport au monde complètement différent de celui de dix ans.

02:38— Il y a une volonté... Alors je ne vais pas m'intéresser que au Groenland,

02:42parce que c'est vrai pour Panama aussi, cette volonté de un peu redessiner la carte,

02:46et cette volonté de déréguler, une dérégulation mondiale.

02:51C'est un peu... C'est ce que veut Musk. C'est ce que veut Trump.

02:55Peut-être moins que Musk, je ne sais pas. Mais c'est ce qu'ils veulent.

02:59Pourquoi cette dérégulation ? Parce que ce sont des libertariens.

03:03Enfin du moins, Elon Musk est un libertarien.

03:05Et donc plus de règles sociales, plus de règles environnementales, plus de règles commerciales.

03:12Je dis bien commerciales, qui régissent le monde. Ils n'en veulent plus.

03:18— En fait, ils choisissent uniquement leur propre intérêt.

03:20Vous avez dit... Vous les avez définis comme des libertariens.

03:23Mais Musk, tout en étant libertarien, c'est son courant de pensée,

03:26il a profité massivement des subventions de l'État américain pour développer ses projets économiques,

03:33et notamment son projet Tesla. Et donc ce sont surtout des opportunistes.

03:37Et ce qui est assez fou, c'est que cette dérégulation, vous l'avez dit dans votre éditorial au début,

03:41c'est à plus ou moins grande échelle selon leurs propres intérêts.

03:45Et donc ça demande de la part de l'Europe un changement fondamental.

03:49Parce que vous savez, moi, j'ai toujours été pro-américain.

03:52J'ai toujours considéré que les brouilles qu'on pouvait avoir sur des contrats comme AUKUS,

03:57il fallait quand même les relativiser.

03:59Mais aujourd'hui, parce que c'est notre premier partenaire, c'était notre premier partenaire,

04:03aujourd'hui, il y a une question fondamentale, stratégique, identitaire de l'Europe

04:07par rapport aux États-Unis comme jamais auparavant.

04:10Que peut faire l'Europe, Christopher Weisberg ?

04:13L'Europe, elle doit avoir un modèle fort et elle doit se préserver de toutes ses attaques.

04:18Ça va être extrêmement difficile parce qu'elle est divisée.

04:20Vous avez vu que Musk est en train de parier, non pas sur des conservateurs,

04:24mais sur des groupes et des mouvements politiques d'extrême droite.

04:29Il va les financer, il va influencer.

04:32Et c'est à nous, Européens, de prendre toute la mesure de cela pour être fort sur notre modèle.

04:38Alors j'allais parler de l'ingérence de Musk, ingérence importante,

04:43quand on pense qu'il fait la promotion sur son réseau X de son débat avec Alice Weidel,

04:51qui, rappelons-le, est le leader de l'AFD, le parti d'extrême droite allemand,

04:57à un mois et demi des élections en Allemagne, moins d'un mois et demi.

05:01Il fait la promotion d'Alice Weidel.

05:05C'est pour ça que je dis, vous savez, moi j'ai supprimé mon compte Twitter il y a deux jours.

05:10Alors vos auditeurs se fichent pertinemment de savoir si Christophe Rosberg est ou pas sur Twitter.

05:15Mais je veux alerter chacun de nos concitoyens sur le risque et sur la menace que représente cela.

05:22Et à quel point nous avons nous-mêmes tous le pouvoir en tant que consommateurs

05:26d'éviter ce scénario délirant qui est en train d'être proposé.

05:31Il faut que chacun, dans notre âme et conscience, on se rende compte du risque que cela représente

05:36et à quel point aujourd'hui ce monsieur, Elon Musk, est dans notre téléphone et qu'on peut lutter contre ça.

05:41— Mais certains vont vous répondre, mais à son époque, Soros était un danger pour l'Europe,

05:46enfin un danger, ou du moins essayé de conduire la politique européenne.

05:53Aujourd'hui, est-ce que Musk est un danger pour les démocraties européennes ?

05:59— Musk est un immense danger. Vous savez, Soros, c'est le bouc émissaire permanent

06:03des libertariens réactionnaires américains qui le détestent sous couvert d'antisémitisme.

06:07C'est fort parce qu'en général, les MAGA, les « Make America Great Again »,

06:11ils considèrent que Soros, c'est la mondialisation du juif qui est partout.

06:17C'est ça, le spectre de Soros. Et Soros, il a en effet financé des organisations démocratiques en Europe.

06:25Musk, ça n'a rien à voir. Musk, c'est un dessin pour lui-même,

06:31pour essayer d'influencer tout le monde, pour influencer son projet économique.

06:35C'est beaucoup plus grave, c'est beaucoup plus présent.

06:38Et pour moi, ça n'a rien à voir avec Soros.

06:40C'est une interférence et une ingérence permanente dans nos affaires.

06:44— Merci, Christopher Weisberg, d'être venu nous voir ce matin.

06:47Je rappelle, vous étiez député des Français d'Amérique et du Canada, de toute l'Amérique du Nord.

06:55C'est cela. — Et qui sont, je pense, assez perturbés par cela.

06:58— Alors vous avez des contacts avec... — Oui, bien sûr.

07:00— Vous êtes franco-américain. — Le pays a énormément changé.

07:05Énormément changé. Je l'ai vu les deux dernières années, quand j'ai sillonné le pays.

07:09Il y a toute une partie des États-Unis qui sont devenus trumpistes.

07:16Et je peux vous dire que cet été, quand je suis allé en Ohio

07:18et que j'ai vu sur chaque maison un drapeau MAGA,

07:21ça ressemble quand même très très fortement à la montée du fascisme en Europe il y a 80 ans.

07:26— Vous dites ça. Ça ressemble. — Je le dis véritablement,

07:29tout en ayant conscience qu'aux États-Unis, l'Amérique est un pays très grand, très divers,

07:34avec énormément d'opposants à Trump.

07:36Cela dit, cette montée, ce brainwashing permanent est très effrayant.

07:41— Très effrayant. Un mot sur le Canada. On n'entend pas beaucoup de réaction canadienne, je trouve.

07:47— Parce que c'est la stratégie de Trump qui est un bully.

07:51Vous savez, un bully, c'est quelqu'un qui met une pression sur vous permanente.

07:54Et c'est exactement ce qui se passe. Les Canadiens... Je voudrais finir là-dessus.

07:57Et pour dire aux Français à quel point c'est une prise de conscience qui doit se prendre

08:00par rapport même au CETA. Le CETA, on l'a présenté comme un accord commercial.

08:04Pour les Canadiens, c'est un moment de survie.

08:09Leur principal partenaire commercial, c'est les États-Unis.

08:12Quand Trump est en train de les menacer de façon permanente en augmentant les droits de douane,

08:17ils sont menacés de façon essentielle sur leur modèle.

08:22C'est aux Européens, maintenant, de ne pas se dire on va protéger simplement notre marché

08:26alors que le traité nous est favorable, mais de se dire que c'est notre partenaire

08:30et qu'on doit sauver notre partenaire canadien.

08:32C'est une vraie manière de lutter contre l'impérialisme de Trump

08:37et de renforcer notre partenariat avec les Canadiens qui en ont bien besoin.

08:41– Merci Christian Ferwaisberg d'être venu nous voir.

08:43– C'est passionnant de voir Emmanuel Macron reçoit aujourd'hui

08:47le Premier ministre britannique, Starmer, qui est très attaqué évidemment par Musk.

08:51On a vu Macron qui a déjà réagi personnellement.

08:54On va voir la réaction des chefs d'État européens. Je pense qu'elle sera très forte.

08:58– Bien sûr, et je recevrai tout à l'heure Laurent Saint-Martin

09:00qui est ministre du Commerce extérieur et ministre des Français de l'étranger.

09:04Alors évidemment ça tombe bien, ça tombe bien. Merci beaucoup.

09:06– J'avais un sens quand même de la tête.

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