Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 16/02/2024

Le vendredi soir, Arthur Meuriot reçoit un invité pour revenir sur l’actualité. Ce soir Nicolas Tenzer, spécialiste de questions géostratégiques.
Retrouvez "Les invités d'Europe Soir week-end" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-invite-europe1-week-end

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00 Europe 1 Soir Week-end. 18h20 Arthur Murillo.
00:04 De retour dans Europe 1 Soir Week-end pour le grand témoin de l'actualité.
00:08 Sur le front de la guerre en Ukraine, la situation est extrêmement complexe, critique même à certains endroits.
00:13 Au Moyen-Orient, le conflit entre Israël et le Hamas continue avec en parallèle le risque d'embrasement dans d'autres pays voisins comme l'Iran.
00:19 Enfin n'oublions pas l'Asie avec d'un côté cette pression que continue d'exercer la Chine sur Taïwan,
00:24 mais également la Corée du Nord qui multiplie les démonstrations de force et les menaces.
00:28 Une déstabilisation globale du monde avec en toile de fond un enjeu majeur.
00:32 Les élections américaines, une campagne électorale nationale aux répercussions mondiales,
00:36 l'ordre du monde comme nous le connaissons depuis la chute du mur de Berlin est-il en train de basculer ?
00:41 Les dix prochaines années seront sûrement décisives mais à quoi faut-il s'attendre ?
00:45 Pour en parler, nous recevons dans Europe 1 Soir Week-end Nicolas Tenzer. Bonsoir.
00:49 Bonsoir.
00:50 Vous êtes enseignant à Sciences Po, expert des questions géostratégiques,
00:54 l'auteur de "Notre guerre, le crime et l'oubli" pour une pensée stratégique aux éditions de l'Observatoire
00:59 et ce soir vous êtes notre grand témoin de l'actualité.
01:02 Dans un instant on va évidemment aborder cette visite de Volodymyr Zelensky à Paris,
01:07 mais avant ça on l'a appris aujourd'hui, la mort en prison d'Alexei Navalny,
01:11 le principal opposant de Vladimir Poutine.
01:15 Nicolas Tenzer, sa mort en prison, est-ce qu'on peut dire qu'elle était prévisible ?
01:20 Non seulement elle était prévisible, mais elle a été forgée par le régime de Poutine.
01:27 Pour dire les choses très clairement, c'est un assassinat.
01:30 On ne sait pas aujourd'hui si c'est un assassinat qui a été accéléré d'une manière ou d'une autre,
01:35 sans doute ne le saura-t-on jamais,
01:37 mais les conditions de détention de Navalny dans une région particulièrement froide,
01:42 proche du cercle arctique, avec des tortures régulières, un manque de sommeil,
01:48 une cellule extrêmement étroite, insalubre, privation de nourriture,
01:53 affaiblissait l'organisme de celui qui avait déjà été empoisonné,
01:58 il faut le rappeler, par Poutine, quelques années avant,
02:02 et avant qu'il ne décide lui-même, après sa convalescence en Allemagne, de retourner en Russie.
02:08 Donc c'est un assassinat.
02:10 Je peux juste rajouter une chose, c'est que ce n'est pas le premier.
02:14 Rappelez-vous quand même Anna Politovskaya, Natalia Estimorova,
02:18 Anastasia Babourova, Stanislas Markelov, Boris Nemtsov,
02:22 et des centaines d'autres qui ont été assassinés par le même régime,
02:26 sans parler des centaines de milliers de civils qui ont été assassinés par la Russie de Poutine,
02:32 en Tchétchénie, en Géorgie, en Syrie, en Ukraine, dans de nombreux pays d'Afrique, ailleurs encore.
02:39 - Il y a quelques années, Alexei Navalny disait, s'il décide de me tuer,
02:42 c'est que nous sommes incroyablement forts, vous lui donnez raison ?
02:47 - Je pense que, bien sûr, il n'y a jamais de raison d'assassiner un homme.
02:51 Tout ce que l'on sait, c'est que Poutine est un être peureux,
02:57 qui vit complètement renfermé dans un bunker, on ne sait même pas très bien toujours où il est,
03:03 puisqu'il a fait reproduire les mêmes salles de conférence dans ses différentes résidences,
03:08 qui avait peur, on l'a vu, pendant la crise de la Covid-19, qui avait peur de la mort,
03:13 qui même lorsqu'il fait 300 mètres dans les rues de Moscou,
03:16 il le fait avec une énorme voiture blindée entourée de services de sécurité.
03:20 Donc on a d'un côté un homme apeuré, qui a peur de quelqu'un qu'il a emprisonné,
03:25 qui n'a même pas le courage d'affronter une opposition, même une opposition modérée.
03:31 On le sait, lors des élections présidentielles passées,
03:35 pour les élections présidentielles futures, qui contrôlent les élections,
03:39 qui pratiquent la faute électorale, et là on avait un homme enfermé en prison,
03:43 qu'il voulait assassiner comme il voulait assassiner les autres dirigeants.
03:48 Sans aucune réaction majeure pour les autres dissidents,
03:51 on va voir si ça change aujourd'hui, de la plupart des dirigeants occidentaux,
03:55 qui ont eu certes les uns et les autres des mots très forts pour condamner,
03:59 mais est-ce que ça va changer véritablement les choses ?
04:02 J'aimerais à Nicolas Tenzer qu'on retrouve l'envoyé spécial d'Europe 1 en Ukraine,
04:06 Nicolas Tonev, qui a rencontré Alexei Navalny.
04:11 On va parler avec vous Nicolas, évidemment du front ukrainien,
04:15 mais avant ça, peut-être quelques mots, vous l'avez appris vous aussi cet après-midi,
04:19 la mort d'Alexei Navalny.
04:21 Oui, moi ça m'a totalement choqué, bouleversé,
04:24 parce que les souvenirs que j'ai de lui, parce que j'ai pu le rencontrer
04:29 dans les grands meetings qu'il tenait en plein hiver en 2011,
04:34 ces années où il était encore libre, un petit peu plus tard aussi
04:39 pour une interview dans ses locaux où il tenait la porte, très gentleman.
04:46 J'étais très choqué parce qu'en fait, cet homme, quand vous le rencontrez,
04:51 il dégage une telle force en fait, il est grand, il est large,
04:55 il a ce regard bleu clair, il a ses convictions toujours très fortes,
05:01 il a l'air indestructible et finalement le voir disparaître comme cela,
05:06 alors qu'il résistait encore dans sa prison avec cette façon qu'il avait de rire,
05:13 comme pour dire à Poutine "tu vois, tu ne me fais rien".
05:19 Et bien avoir appris cette disparition tout à l'heure, ça a vraiment été un énorme choc.
05:23 Évidemment, comme disait Nikola Tenzer, il était condamné à mort,
05:27 mais le savoir comme ça, parti brutalement, ça a été vraiment très très difficile.
05:33 - Nikola Tenzer, en Russie, quel est l'impact de la mort d'Alexei Navalny ?
05:39 Est-ce qu'il en a un considérable dans la société russe ?
05:43 - Alors dans l'ensemble de la société, certainement pas.
05:45 Parce que tout simplement, vous avez un certain nombre de Russes
05:48 qui vivent dans des provinces complètement isolées,
05:51 qui ne regardent qu'à la télévision d'État.
05:53 Évidemment, on ne parle pas de Navalny ou des dissidents ou des oppositions à la télévision d'État.
05:57 En revanche, ce que l'on peut dire, c'est que malgré tout,
06:00 il avait réussi à structurer une opposition qui vivait dans la clandestinité
06:05 et la peur de la répression.
06:06 Et la répression, malheureusement, qui arrivait quand même sur un certain nombre d'entre eux,
06:09 dans les différents oblastes, les différentes provinces de la Russie.
06:13 Et puis, il faut quand même rappeler que son film, vous savez, sur le palais de Poutine,
06:17 a été vu plus de 50 millions de fois,
06:20 qu'il y a un certain nombre de Russes qui ont accès au VPN.
06:24 Donc, tout ce scandale de corruption organisé par le patron de la coupole,
06:29 c'est-à-dire la mafia, qui est M. Poutine,
06:32 eh bien, tout ça, c'était quand même connu des Russes et ça, il y avait un impact.
06:35 C'était probablement aujourd'hui, par rapport aux autres opposants,
06:39 le plus visible et malgré tout le plus connu.
06:42 - Dans un instant, dans "Repensoir Weekend",
06:44 nous continuons de parler avec Nicolas Tenzer,
06:46 expert dans les questions géostratégiques de la mort de Navalny,
06:50 évidemment, mais aussi la visite de Volodymyr Zelensky à Paris.
06:54 À tout de suite sur Europe 1.
06:55 - À 19h30 sur Europe 1,
07:07 nous continuons d'évoquer la mort d'Alexei Navalny avec Nicolas Tenzer,
07:11 notre grand témoin de l'actualité, enseignant à Sciences Po,
07:14 expert des questions géostratégiques et auteur de "Notre guerre, le crime et l'oubli"
07:18 pour une pensée stratégique aux éditions de l'Observatoire.
07:22 Emmanuel Macron a réagi à la mort d'Alexei Navalny dans la Russie d'aujourd'hui.
07:26 On met les esprits libres au goulag et on les y condamne à mort.
07:31 Le président de la République vise juste en utilisant ces termes,
07:34 notamment celui de goulag, Nicolas Tenzer.
07:36 - Oui, exactement.
07:37 C'est-à-dire qu'il y a un grand nombre d'opposants en Russie
07:40 qui sont enfermés dans des conditions qui sont celles qu'a connues Alexei Navalny.
07:45 Je pense en particulier à l'un d'entre eux, le plus grand vraisemblablement,
07:50 qui est un ami, qui est Vladimir Karamurza, condamné à 25 ans de prison.
07:55 Lui aussi qui a survécu à deux tentatives d'empoisonnement de la part des services secrets russes.
08:01 Qui lui aussi est rentré en Russie, qui a été immédiatement arrêté,
08:07 condamné donc à 25 ans de prison.
08:09 Il vivait dans une prison, le dernier jour on a eu des informations sur lui,
08:14 où il faisait -17 degrés.
08:16 Il ne pouvait pas se tenir debout dans la cellule,
08:18 il ne pouvait à peine se coucher pendant des heures très limitées.
08:21 Et s'il n'avait pas la position réglementaire pour dormir,
08:24 c'est-à-dire qu'il ne dormait pas sur le dos mais il dormait sur un côté,
08:27 on le réveillait de force.
08:29 Donc vous voyez dans quelles conditions on maintient ces gens.
08:33 C'est quelque chose qu'on n'a jamais vu et c'est pour ça que l'expression d'Emmanuel Macron est juste.
08:36 On n'a pas vu cela en Russie depuis les années de Staline.
08:40 Certes vous aviez des opposants après, à l'époque de Khrouchev, à l'époque de Brezhnev,
08:44 mais ces assassinats, cette volonté de détruire systématiquement les vies,
08:49 de faire de ces êtres humains des personnes qui finalement sont condamnées à mort,
08:54 à une mort lente, sous une forme de torture terrible,
08:57 c'est quelque chose qu'on n'avait pas vu depuis effectivement les années de Staline.
09:00 - C'est terrifiant de se dire qu'on a un tel retour à ce type d'emprisonnement.
09:06 Il y avait eu des améliorations dans les centres pénitentiaires en Russie,
09:11 pour les opposants ça n'a jamais été le cas.
09:13 De les emprisonner ainsi c'est inhumain.
09:17 - C'était totalement inhumain et c'est quelque chose qui n'a fait que s'accélérer avec le régime de Poutine.
09:23 J'ai rappelé tout à l'heure tous les assassinats que ce régime avait connu sur des femmes, sur des hommes,
09:29 mais il y en a encore beaucoup d'autres.
09:31 On pourrait penser à Elia Yachin, on pourrait penser aussi aux grands historiens précisément du goulag
09:37 et de la terreur stalinienne, Yuri Dmitrieff,
09:42 qui effectivement lui aussi, uniquement parce qu'il a parlé des crimes de Staline,
09:50 a été mis en prison avec des charges complètement fabriquées.
09:54 Et pourquoi cela ?
09:55 Parce que non seulement vous avez aujourd'hui dans la Russie de Poutine une réhabilitation de Staline,
10:00 mais parce que critiquer les crimes de Staline,
10:04 ça revient dans l'esprit du régime à critiquer ceux de Poutine.
10:08 - On va retrouver aussi Nicolas Tonev, l'envoyé spécial d'Europe 1 en Ukraine.
10:14 Nicolas, quel est l'impact de la mort d'Alexei Navalny en Ukraine ?
10:19 Est-ce qu'on en parle ici ?
10:21 - Alors j'ai pu parler à quelques Ukrainiens dans la rue.
10:27 Beaucoup ne sont pas encore au courant.
10:31 Pour ceux qui sont au courant, c'est un choc.
10:35 Mais c'est aussi une évidence, puisque ici, clairement,
10:42 Poutine est considéré comme ce qu'il est.
10:45 Les Ukrainiens ne le découvrent pas,
10:48 contrairement à beaucoup d'hommes politiques en Europe de l'Ouest.
10:52 Donc la mort d'Alexei Navalny, pour ceux qui sont au courant, est quasiment une évidence.
10:58 - Et en Russie, on le disait, l'impact de la mort de Navalny dans les jours,
11:04 les semaines, les mois qui viennent,
11:06 parce qu'on sait qu'il y a la présidentielle notamment qui arrive,
11:07 si je ne dis pas de bêtises, le 17-18 mars prochain,
11:11 elle aura des conséquences politiques ?
11:13 - Elle ne peut pas malheureusement avoir de conséquences politiques,
11:16 tout simplement parce que Poutine n'a pas d'opposant sérieux
11:20 qui va concourir contre lui.
11:22 Que toute forme de manifestation, même s'il y en a eu aujourd'hui,
11:27 sont totalement réprimées.
11:30 Et puis vous savez, quand un pays a connu 97 années
11:35 de régime dictatorial et totalitaire,
11:39 depuis 1919 jusqu'en 1991 et depuis 2000,
11:43 les gens sont résignés, ils sont apathiques,
11:47 ils n'ont pas l'espoir de changement.
11:49 Et donc même s'ils déplorent cette mort,
11:53 s'ils se rendent compte que le régime devient de plus en plus totalitaire,
11:57 jour après jour, avec de plus en plus de surveillance,
11:59 d'opposition, etc.,
12:01 ils se disent qu'ils ne peuvent rien faire.
12:05 Et c'est ça aussi qui est dramatique,
12:06 c'est que Poutine a supprimé chez le peuple russe
12:11 la catégorie de l'avenir.
12:13 - 19h35 sur Europe, on continue d'évoquer évidemment
12:19 la mort d'Alexei Navalny avec Nicolas Tenzer,
12:22 expert en questions géostratégiques.
12:25 Est-ce que les organisations internationales,
12:29 Nicolas Tenzer, doivent avoir des réactions
12:35 suite à la mort d'Alexei Navalny ?
12:36 Prendre des mesures contraignantes,
12:39 supplémentaires à l'encontre de la Russie ?
12:41 - Alors d'abord, il faut prendre toutes les mesures
12:43 à l'encontre de la Russie possibles et imaginables.
12:46 Aujourd'hui, nous avons développé, à cause effectivement
12:49 de la guerre totale déclarée par Moscou contre l'Ukraine,
12:54 nous avons pris un certain nombre de sanctions.
12:56 On en est au 14ème paquet de sanctions européens,
12:59 il y a aussi les sanctions d'autres pays,
13:01 les Etats-Unis notamment,
13:02 mais malgré tout, ces sanctions ne sont pas encore totales.
13:05 Vous avez encore un certain nombre d'entreprises françaises,
13:07 notamment, mais européennes, américaines aussi,
13:10 qui commercent avec Moscou.
13:12 Vous aviez encore une banque l'année dernière,
13:15 une banque autrichienne, Ralf Eisen,
13:17 qui faisait la moitié de ses bénéfices en Russie.
13:21 Vous avez encore des approvisionnements
13:23 de gaz naturel liquéfiés,
13:25 qui proviennent également en Europe,
13:28 même encore parfois un peu de gaz
13:29 pour un certain nombre de pays,
13:31 l'Autriche d'ailleurs toujours,
13:32 pas uniquement, je dirais, sur Ralf Eisen, etc.
13:35 Et puis surtout, nous n'avons pas mis en place en Europe
13:37 un système de sanctions extraterritoriales
13:41 qui visent des pays qui commercent avec la Russie
13:44 et qui lui fournissent des composants
13:46 qu'ils utilisent pour la fabrication d'armement
13:49 dans la guerre en Ukraine.
13:50 Donc nous devons aller plus loin.
13:51 Mais nous devons d'abord aller plus loin
13:53 parce que vous avez cette agression contre la Russie.
13:56 Il faut aller aujourd'hui...
13:58 Je cite juste une chose.
14:00 La femme d'un dissident dont j'ai parlé tout à l'heure,
14:03 Vladimir Karamoza, donc Evgenia Karamoza,
14:05 elle disait "la seule solution un jour
14:08 pour que la Russie soit libre,
14:10 c'est qu'elle soit défaite totalement,
14:14 radicalement en Ukraine".
14:16 Et c'est ça qui doit être notre objectif
14:19 et je dirais même notre but de guerre.
14:21 Nous devons y aller totalement
14:23 et nous sommes encore aujourd'hui malheureusement à mi-chemin.
14:25 - Et c'est ce qui est au cœur des discussions en cours
14:27 entre Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky.
14:30 Dans quelques minutes, une conférence de presse
14:33 se tiendra à l'Elysée, à l'issue de la rencontre
14:35 entre le chef de l'État français et le chef de l'État ukrainien.
14:39 Volodymyr Zelensky qui était ce matin à Berlin,
14:42 il a signé un accord historique selon Olaf Scholz
14:45 avec l'Allemagne.
14:47 Il y a quelques semaines c'était avec la Grande-Bretagne
14:49 qu'il avait signé un accord.
14:50 Et là, on attend donc un accord bilatéral
14:52 entre la France et l'Ukraine.
14:54 Pourquoi il n'y a pas eu d'accord multilatéral ?
14:56 Pourquoi est-ce que Volodymyr Zelensky
14:57 va négocier avec chacune des nations ?
15:00 - Alors, pour une raison très simple,
15:02 c'est qu'aujourd'hui, malheureusement,
15:04 et ça a été la grande faute
15:06 d'un certain nombre de dirigeants occidentaux,
15:08 et concrètement l'Allemagne et les États-Unis,
15:11 de ne pas accorder immédiatement
15:15 une voie d'entrée à l'Ukraine dans l'OTAN.
15:19 À partir du moment où l'Ukraine n'est pas dans l'OTAN
15:21 et n'a pas une voie claire pour y parvenir,
15:24 la seule solution,
15:25 et c'est déjà ce que disait Emmanuel Macron
15:27 le 31 mai à Bratislava,
15:29 qu'il a répété le 11 et 12 juillet à Vilnius,
15:31 la seule solution c'est de bâtir
15:33 une série d'accords bilatéraux.
15:35 Ces accords bilatéraux, d'un côté,
15:37 sont évidemment importants,
15:39 puisqu'ils vont permettre d'avoir une sécurité
15:42 dans les approvisionnements d'armes à l'Ukraine,
15:45 et en même temps,
15:47 ils sont aussi, à mes yeux, insuffisants.
15:50 Donc, saluons ces étapes,
15:52 mais aujourd'hui, par exemple,
15:54 nous ne sommes pas aujourd'hui au point
15:55 où nous devrions être, par exemple,
15:57 envoyons des troupes des pays européens,
15:59 y compris des troupes françaises,
16:00 dans les zones libérées d'Ukraine,
16:03 non pas pour combattre,
16:04 mais pour garantir, en quelque sorte,
16:06 la sécurité de ces zones,
16:08 éviter qu'il y ait des missiles russes
16:09 qui tombent dans ces zones,
16:11 que la Russie essaye de reconquérir ces territoires.
16:13 Je pense qu'il y a des choses très concrètes à faire
16:15 pour dissuader beaucoup plus la Russie,
16:18 et puis surtout,
16:19 et ça dépend de nous, des alliés,
16:21 des États-Unis, des pays européens,
16:23 donnant à l'Ukraine
16:24 l'ensemble des moyens nécessaires.
16:26 Moi, j'espère beaucoup qu'à la suite
16:28 de la rencontre entre les deux présidents,
16:31 Macron et Zelensky,
16:32 par exemple, il y aura une décision ferme
16:35 d'envoyer des Mirage 2000D
16:37 à l'Ukraine,
16:39 c'est ce que demande M. Boudanov,
16:41 le chef des services de renseignement ukrainien,
16:44 encore aujourd'hui,
16:45 et je pense qu'il faut aller dans cette voie.
16:47 Il faudra aussi avoir plus de F-16,
16:49 certains devraient arriver au printemps,
16:51 parce que si nous n'avons pas
16:53 ces avions de chasse,
16:54 si nous n'avons pas plus d'armes à longue portée
16:57 qui permettent de frapper
16:58 directement l'arrière des positions russes,
17:01 y compris sur le territoire russe lui-même,
17:03 ce qui est parfaitement légal
17:05 en vertu de l'article 51 de la Charte des Nations Unies,
17:08 eh bien dans ce cas-là, comment véritablement
17:10 assurer à l'Ukraine
17:12 une capacité de reconquérir
17:15 tous les territoires qui ont été envahis ?
17:17 - Nicolas Tunzer, vous attendez un accord assez vaste
17:20 à l'issue de cette rencontre,
17:22 ou est-ce que vous craignez que ce soit encore
17:24 un petit accord et qu'il ne soit pas suffisant
17:26 pour assurer la défense de l'Ukraine ?
17:28 - Alors, je pense que ce sera un accord
17:30 effectivement plus substantiel
17:33 que ce qui a été signé jusqu'à présent.
17:36 Il est possible aussi d'ailleurs qu'il y ait des clauses secrètes
17:38 dans cet accord,
17:39 possible que tout ne soit pas public,
17:40 et ça on le comprend évidemment parfaitement
17:42 compte tenu de la sensibilité des sujets.
17:44 Moi ce que j'attends effectivement
17:46 c'est qu'aujourd'hui,
17:47 la France aille vraiment jusqu'au bout
17:50 et prenne véritablement le leadership européen
17:54 dans la résolution,
17:56 non pas seulement de défendre l'Ukraine,
17:58 mais de faire que l'Ukraine gagne
18:00 et que la Russie soit défaite.
18:02 C'est-à-dire qu'il ne suffit pas de dire
18:04 aujourd'hui il faut empêcher que la Russie gagne,
18:06 c'est une formulation négative,
18:08 il faut dire il faut que la Russie soit défaite.
18:10 Soyons parfaitement clairs,
18:12 d'abord c'est possible,
18:13 il faut arrêter d'avoir peur de Poutine,
18:15 les forces en présence, les forces de l'OTAN
18:17 sont nettement supérieures aux forces conventionnelles russes,
18:20 il faut arrêter d'acheter tout le discours
18:23 sur la peur d'une troisième guerre mondiale,
18:25 d'une guerre nucléaire,
18:26 d'une guerre entre la Russie et l'OTAN,
18:28 c'était encore les paroles du conseiller national de sécurité américain
18:31 à Vilnius le 11 et 12 juillet.
18:33 Il faut arrêter tout cela,
18:34 il faut aujourd'hui que nous ayons cette résolution,
18:36 nous pouvons gagner,
18:38 et c'est la meilleure assurance contre les menaces.
18:40 Ne pensons pas que si aujourd'hui nous agissons directement,
18:44 ce qui est ma préconisation depuis le début,
18:46 contre l'Ukraine, nous soyons menacés.
18:48 C'est au contraire, si nous n'agissons pas,
18:50 que nous le serons.
18:52 - Et on va retrouver Nicolas Tonev,
18:53 l'envoyé spécial d'Europe 1 en Ukraine.
18:55 Nicolas, le manque d'armes, le manque de soutien
18:59 se fait sentir sur le front en Ukraine ?
19:01 - Alors, il se fait sentir,
19:04 j'ai envie de dire, tout d'abord dans la population,
19:08 où il y a une réelle souffrance morale en quelque sorte,
19:12 à se sentir aussi peu soutenu aujourd'hui par les Occidentaux.
19:17 Et puis évidemment, au niveau du front,
19:20 c'est totalement dramatique,
19:22 puisqu'il y a un manque de munitions,
19:25 en plus de tout ce qui est longue portée évidemment,
19:28 mais si l'on considère les soldats qui sont quasiment face aux Russes,
19:33 aujourd'hui dans les tranchées,
19:36 il faut savoir que lorsque le soldat russe peut tirer 10 obus,
19:41 le soldat ukrainien ne peut en tirer qu'un seul.
19:43 Alors forcément, quand il s'agit de défendre une position,
19:46 on ne parle même pas d'attaquer,
19:48 mais seulement de se défendre, c'est très compliqué.
19:51 Et le moral des soldats ukrainiens est au plus bas à cause de cela,
19:55 parce qu'eux, directement en manque de munitions,
19:58 mais ils se disent derrière, en plus,
20:00 si l'on ne nous soutient plus, que va-t-il se passer ?
20:04 - 19h43 sur Europe 1,
20:06 on continue dans un instant d'évoquer avec Nicolas Tenzer,
20:11 expert en questions géostratégiques,
20:14 de cette rencontre en cours entre Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky.
20:20 On va parler également de la situation au Moyen-Orient,
20:24 et on essaiera aussi d'évoquer l'impact futur
20:28 de l'élection présidentielle américaine,
20:30 qui aura pour sûr des conséquences sur les relations internationales.
20:34 A tout de suite sur Europe 1.
20:36 - De retour dans Europe 1, soir ou week-end,
20:44 avec notre grand témoin de l'actualité,
20:46 Nicolas Tenzer, enseignant à Sciences Po,
20:48 expert des questions géostratégiques et auteur de "Notre guerre, le crime et l'oubli",
20:52 pour une pensée stratégique aux éditions de l'Observatoire.
20:56 On va parler évidemment de cette rencontre en cours
20:58 entre Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky, le président ukrainien.
21:01 Mais avant ça, on va prendre la direction de l'Ukraine
21:03 pour retrouver de nouveau Nicolas Tonev,
21:05 l'envoyé spécial d'Europe 1 en Ukraine.
21:09 Très concrètement, Nicolas,
21:11 qu'attendent les Ukrainiens, l'armée ukrainienne,
21:15 de cette rencontre entre le chef de l'État français et ukrainien ?
21:18 - Alors je suis allé faire un petit tour dans les rues tout à l'heure.
21:23 Les Ukrainiens attendent aujourd'hui de l'aide, quelle qu'elle soit.
21:27 Avec la défaillance américaine, si on peut l'appeler comme ça,
21:32 aujourd'hui les gens se disent que ce soit 3 avions,
21:38 que ce soit 3 canons, que ce soit un petit peu d'argent.
21:41 On est preneur de tout, c'est ce qui m'a sauté aux yeux tout à l'heure
21:47 dans les rues de Kiev.
21:49 Et quant aux personnes qui sont sur le front, quant aux soldats,
21:54 j'échange régulièrement avec un officier qui est dans la région de Barmout,
22:00 avec lequel j'ai fait connaissance il y a 2 ans,
22:04 et depuis on se suit régulièrement,
22:06 on raconte toujours ce qui se passe et les évolutions de l'endroit où il est.
22:11 Et là, clairement, c'est le besoin d'armement, le besoin de munitions,
22:15 surtout puisque c'est ce que je disais tout à l'heure,
22:18 quand les Russes tirent 10 fois, les Ukrainiens ne tirent qu'une fois.
22:22 Or la meilleure façon de se protéger, c'est de pouvoir envoyer
22:27 au moins autant d'obus que l'adversaire, sinon plus.
22:31 Et donc réellement, la priorité absolue, ce sont les munitions vides et nombreuses.
22:37 - Merci Nicolas Tonev, envoyé spécial d'Europe 1 en Ukraine,
22:41 et les auditeurs d'Europe 1 pourront suivre vos reportages en direct
22:45 du front ukrainien tout au long des jours qui viennent.
22:49 Nicolas Tenzer, on l'a vu, je l'ai dit, Volodymyr Zelensky,
22:54 qui est à Paris, qui est passé par Berlin, qui est passé par Londres,
22:57 il se tourne que vers les Européens,
22:59 il ne peut plus compter sur les Américains, Volodymyr Zelensky,
23:02 pour le moment, sur le soutien à l'Ukraine ?
23:06 - Écoutez, quand on voit les paroles du président de la Chambre
23:11 des représentants américaines, qui est un trumpiste farouche,
23:15 qui a, semble-t-il, d'ailleurs un certain nombre de compromissions,
23:19 soyons clairs, avec la Russie, et qui est décidé à bloquer
23:23 complètement l'aide à l'Ukraine, même s'il y a eu un vote favorable du Sénat,
23:27 eh bien, on se dit effectivement que ça va être extraordinairement difficile.
23:30 Cela dit, il faut aussi rappeler que l'administration Biden
23:35 n'est pas allée jusqu'au bout. Certes, elle a fourni quand même
23:38 des aides déterminantes à l'Ukraine, bien sûr,
23:40 mais l'administration Biden, par exemple, n'a fourni que 20 ATCMS,
23:45 c'est-à-dire des missiles à longue portée, très importants à l'Ukraine,
23:48 alors que sans aucun problème, sans dégarnir ses stocks,
23:51 elle pouvait en fournir 300, que l'administration Biden
23:54 n'a jamais fourni de F-16, c'est une partie des autres pays
23:58 qui en ont, qui les livreront, et d'ailleurs l'accord
24:02 de l'administration américaine, qui est obligatoire dans ces cas-là,
24:05 a quand même, je dirais, tardé, et on n'a pas eu l'impression
24:10 d'une mobilisation totale de cette administration.
24:13 Donc c'est aussi ça, la réalité, ou rappelez-vous quand même
24:16 la livraison d'armes au Congo, de pas toutes les armes,
24:19 il y avait encore un certain moment, la peur de l'escalade,
24:22 la peur de fantasmes, on avait vraiment l'impression
24:26 que des esprits d'un certain nombre de conseillers du président Biden,
24:30 je pèse mes mots, étaient influencés, involontairement,
24:35 par un certain nombre de récits de la Russie.
24:38 C'est une des choses que j'analyse dans ce livre,
24:41 de voir comment la propagande douce a gagné l'esprit
24:44 d'un certain nombre de dirigeants, même absolument pas favorables
24:47 à la Russie, je ne parle pas du tout dans ces cas-là
24:50 de complicité active ou de corruption, ce qui est le cas
24:53 pour une autre partie des élites en Europe et aux États-Unis,
24:56 là oui, mais dans ce cas-là c'est vraiment de la propagande douce
24:59 qui a marqué véritablement leurs esprits.
25:01 - Donc cette petite propagande, la propagande douce,
25:03 c'est de dire que l'Ukraine doit négocier avec la Russie,
25:07 c'est cette petite musique qui s'insuffle aussi dans le monde médiatique,
25:11 comment est-ce qu'il faut faire pour lutter face à ça,
25:15 nous en tant que journalistes, mais aussi nos élites politiques
25:18 qui peuvent parfois la partager, comment lutter contre
25:20 cette petite propagande, cette propagande douce ?
25:22 - D'abord il faut la connaître, là aussi j'essaie de donner
25:25 un certain nombre de clés pour respecter et de mieux l'apercevoir,
25:28 je ne vais pas rentrer là dans les détails,
25:30 ils figurent effectivement dans ce livre,
25:32 mais je pense qu'il faut être très attentif à tout cela.
25:36 D'abord effectivement, vous le voyez sur les réseaux sociaux,
25:38 et vous le voyez même chez un certain nombre de personnes,
25:41 sur les plateaux de télévision, des gens qui disent
25:44 "Vous savez, l'Ukraine a déjà perdu, on ne peut rien
25:47 contre une puissance atomique", ce qui est totalement faux
25:49 sur le plan historique, parce qu'aussi bien les Etats-Unis
25:51 ont été défaits au Vietnam que l'URSS en Afghanistan,
25:54 ou bien il faut négocier. Mais qu'est-ce que ça veut dire
25:57 la négociation ? Ça voudrait dire que nous sommes prêts
25:59 à violer nos engagements. Quand le président de la République
26:02 et l'ensemble des dirigeants ont parlé, par exemple,
26:05 de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, de sa souveraineté,
26:08 il n'est pas question d'accepter cela, sinon on accepterait,
26:11 à peu près comme Hitler l'avait fait avec les Sudètes,
26:15 en 1938-39, je dirais, de céder une partie de cela.
26:20 Et ça voudrait dire un encouragement pour Poutine
26:22 à aller plus loin. Est-ce qu'on peut accepter que dans ces territoires,
26:25 détenus par les Russes, on continue, parce que c'est ce qui se passe
26:29 aujourd'hui, d'avoir des chambres de torture,
26:32 des exécutions de personnes, des disparitions forcées,
26:35 des déportations d'enfants qui sont un crime de génocide
26:39 en vertu de la Convention du 9 décembre 1948 ?
26:41 Non, on ne peut pas l'accepter. Est-ce qu'après tout
26:44 ce que nous avons dit sur la nécessaire punition
26:47 des crimes de Vladimir Poutine, crime de guerre, crime contre
26:50 l'humanité, crime de génocide, crime d'agression, ces quatre catégories,
26:53 on puisse accepter de laisser Poutine et, en quelque sorte,
26:58 ses sbires ou ses exécutants, échapper à la justice ? Non.
27:02 Encore une fois, ce serait une menace, et ce n'est pas une question
27:05 de morale, soyons parfaitement clairs là-dessus.
27:07 C'est une question tout simplement d'attention aux menaces existantes
27:12 et de préoccupations de sécurité. Donc il faut contrer, et puis
27:15 surtout il faut essayer d'arrêter de dire "attention, la Russie
27:18 est très dangereuse". Oui, elle est dangereuse, parce que, tout simplement,
27:20 on la laisse faire. Mais sinon, on a plutôt envie de répéter
27:23 la fameuse parole du pape "n'ayez pas peur".
27:25 À 19h52 sur Europe 1, Nicolas Tenzer, je voulais évoquer avec vous,
27:29 on en a un petit peu parlé, mais cette élection présidentielle
27:33 américaine, il y a un duel qui se dessine, qui sera sûrement
27:38 le duel Joe Biden-Donald Trump. Si Donald Trump accède au pouvoir,
27:44 est-ce qu'il y a un réel risque pour l'Ukraine que Donald Trump
27:50 se rapproche de Vladimir Poutine, ou alors laisse tomber
27:54 peu à peu le soutien financier et militaire à l'Ukraine ?
27:57 Oui, le risque est réel. D'ailleurs, Donald Trump n'en a pas fait mystère
28:00 encore récemment, mais depuis assez longtemps. Quand il disait,
28:04 par exemple, "moi, en un jour, je vais régler le problème",
28:08 alors c'est de la vantardise habituelle du personnage, mais ça veut dire
28:11 aussi que je vais pousser à des négociations, et peu importe
28:16 les vies humaines, peu importe l'affaiblissement de l'Occident,
28:18 peu importe notre affaiblissement de sécurité, Trump est aussi
28:21 un homme qui a été largement compromis depuis des décennies
28:25 avec le système russe. Un certain nombre de son entourage,
28:28 on le sait aussi, tout ceci est parfaitement connu et documenté.
28:31 Donc oui, on peut avoir peur, et ça veut dire effectivement
28:34 que nous, Européens, de l'Union Européenne, mais aussi du Royaume-Uni,
28:39 mais aussi de Norvège, mais aussi d'autres pays asiatiques,
28:42 je pense au Japon, la Corée du Sud, ou à l'Australie, etc.,
28:45 nous devons nous mettre en mesure de fabriquer toutes les armes
28:50 possibles à l'Ukraine.
28:51 Et le ministre des Affaires étrangères français, Stéphane Séjournay,
28:55 a dit cette semaine que l'Europe a besoin d'une deuxième assurance-vie
28:58 en plus de l'OTAN, en réaction à ces petites phrases de Donald Trump.
29:05 L'OTAN est en danger, il faut qu'on passe par une autre organisation
29:09 pour nous défendre, nous, Européens ?
29:12 Alors, la question, encore une fois, on ne va pas dupliquer
29:14 les organisations, ce serait absurde. En revanche, si d'une manière
29:17 ou d'une autre, Trump soit quitte l'OTAN, soit refuse de l'armer
29:22 davantage, et que les garanties de sécurité que donnent les États-Unis,
29:28 pas seulement nucléaires, mais aussi conventionnelles, s'effilogent,
29:32 ça veut dire qu'au sein de l'OTAN, ou également au sein de l'Union
29:36 Européenne, en tout cas les pays de l'Union Européenne, plus
29:39 Royaume-Uni, Norvège, etc., membres de l'OTAN, doivent se mettre
29:43 en mesure d'agir, si les États-Unis ne le font plus.
29:47 Et ça peut être le cas, soyons parfaitement clairs, d'abord,
29:50 évidemment, en Europe, parce qu'il faut créer une sorte de défense
29:54 territoriale européenne, mais également au Moyen-Orient.
29:58 Vous savez, c'est quelque chose que la France a expérimenté
30:01 déjà en 2013 avec François Hollande. François Hollande était prêt,
30:04 après les attaques chimiques de la Gouta du régime Assad,
30:07 contre son propre peuple, était prêt à y aller. Et à l'époque, Obama,
30:10 et aussi la Chambre des communes britannique, avaient refusé d'y aller.
30:14 Donc, du coup, la France toute seule ne pouvait pas faire.
30:16 Donc, imaginons-nous en Europe, où nous avons, soit au Moyen-Orient,
30:20 mais soit au sein même de l'Europe, une nouvelle guerre à mener,
30:24 tout simplement pour défendre un pays agressé, ou également
30:29 riposter à des attaques d'un État terroriste contre son propre peuple,
30:32 ce qui est le cas du régime Assad, ou à lancer des coalitions
30:35 contre d'autres groupes terroristes, etc., et bien nous devons
30:38 nous mettre en mesure. Alors, ça suppose de nous renforcer,
30:41 sur le plan militaire, ça suppose d'expliquer aussi tout cela
30:44 aux personnes, parce que je pense que les citoyens sont prêts
30:47 à comprendre cela. Il n'y a pas de fatigue des opinions,
30:50 il y a plutôt un risque de fatigue des dirigeants.
30:52 - Vous parlez d'ailleurs de ça, de cet effort que nous devrions
30:56 fournir, nous, en tant que citoyens, et Olaf Scholz a parlé
30:59 cette semaine d'économie de guerre, qu'il faudrait peut-être réfléchir
31:03 à nous, Européens, adopter cette économie de guerre.
31:06 Qu'est-ce que cela implique, concrètement, pour les Français,
31:09 les Allemands, les Espagnols, d'entrer en économie de guerre ?
31:12 - Déjà, rappelons-nous, Emmanuel Macron en avait parlé le 13 juin 2022
31:16 au salon Eurosatory. Or, nous n'y sommes pas entrés.
31:20 Qu'est-ce que ça implique ? Ça suppose tout simplement de reconvertir
31:23 un certain nombre de nos entreprises civiles en entreprises militaires,
31:27 ça suppose qu'une partie de la main-d'oeuvre de ces entreprises
31:30 soit prête à fabriquer des armements dans ces entreprises
31:34 réquisitionnées, ça suppose une action de formation,
31:37 c'est ça que ça suppose. Et ça suppose aussi une défense
31:41 active par rapport aux manipulations de l'information.
31:45 Encore aujourd'hui, la France, avec l'Allemagne et la Pologne, d'ailleurs,
31:48 ont mis à jour tout un réseau, je dirais, de désinformation.
31:53 Je trouve qu'aujourd'hui, là aussi j'y consacre un long chapitre
31:56 dans mon livre, nous ne sommes pas du tout sérieux, encore,
31:59 dans la plupart des pays européens, contre un certain nombre
32:03 de relais du Kremlin dans l'information.
32:06 Nous ne laissons faire, nous ne sévissons pas, nous n'avons pas
32:09 mis à jour notre appareil également de loi qui permette
32:13 de punir ceux qui servent d'un État étranger, offensif,
32:18 qui vise à détruire notre démocratie. Donc c'est ça aussi que ça suppose,
32:21 c'est-à-dire renforcer notre capacité de production d'armes,
32:24 c'est le point lourd, mais aussi être sérieux contre ceux
32:28 qui diffusent des propos qui sont ceux de l'ennemi.
32:32 - Merci Nicolas Tenzer d'avoir été le grand témoin de l'actualité d'Europe 1.
32:36 Je le rappelle, vous êtes enseignant à Sciences Po,
32:39 expert des questions géostratégiques et auteur de "Notre guerre,
32:43 le crime et l'oubli" pour une pensée stratégique aux éditions
32:47 de l'Observatoire. Dans un instant sur Europe 1,
32:52 vous retrouvez Jacques Vendroux pour le studio des légendes.
32:55 Bonsoir Jacques. - Bonsoir à tous, on va évoquer,
32:58 je ne sais pas si vous êtes au courant, Kylian Mbappé quitte
33:01 le Paris Saint-Germain. Donc on va l'évoquer bien sûr,
33:04 en long, en large et en travers avec nos spécialistes.
33:07 On va parler du top 14 de rugby et on va parler bien sûr
33:10 de la Ligue 1 avec un match passionnant qui commence
33:13 dans moins de 45 minutes. L'Olympique Lyonnais qui reçoit
33:16 l'OGC Nice. A tout de suite. - Le studio des légendes
33:19 avec Jacques Vendroux, c'est dans un instant sur Europe 1.
33:21 Nous on se retrouve demain dans Europe 1.
33:23 Soir, week-end, bonne soirée sur Europe 1.
33:25 Sous-titrage Société Radio-Canada

Recommandations