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Faut-il avoir peur du déficit commercial ?
France Culture
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09/02/2023
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00:00
7h-9h, les Matins de France Culture, Guillaume Erner.
00:06
La question du jour.
00:07
La France bain un nouveau record, celui de son déficit commercial qui est tombé en
00:11
2022 à 164 milliards d'euros.
00:14
Il faut précider que celui-ci correspond à la différence entre les importations et
00:18
les exportations de biens entre la France et le reste du monde, sur fond de crise énergétique
00:24
et de désindustrialisation.
00:26
Est-elle grave que disent ces chiffres de la place de la France dans le monde, dans
00:31
la mondialisation ?
00:32
Bonjour Sébastien Jean.
00:33
Bonjour.
00:34
Vous êtes professeur titulaire de la chaire d'économie industrielle du CNAM.
00:38
Pour la première fois, ce n'est pas seulement la balance commerciale qui est dans le rouge,
00:42
mais également la balance des transactions courantes qui prend en compte.
00:45
Donc non pas seulement les échanges de biens, mais aussi les échanges de services.
00:49
Alors il faut nous expliquer à quoi correspondent ces différentes balances et ces différents
00:54
déficits.
00:55
Effectivement, elles disent deux choses assez différentes.
00:58
La balance courante qui inclut toutes les transactions avec l'étranger nous renseigne
01:05
sur la capacité de financement de notre économie.
01:08
C'est donc un indicateur macroéconomique qui nous dit si l'économie française dans
01:12
son ensemble a besoin d'emprunter à l'étranger pour se financer pour ses besoins courants,
01:19
ou bien si elle y arrive toute seule globalement.
01:21
Donc l'an dernier, on était légèrement excédentaire sur la balance courante.
01:25
Cette année, il y a un déficit d'un peu plus de 50 milliards d'euros, ce qui est
01:28
quand même assez significatif pour le pourcent du PIB.
01:30
Ça veut dire quoi pour que l'on comprenne bien ? Ça veut dire que les ressortisants,
01:35
les nationaux ne peuvent plus financer la dette ?
01:38
Ça veut dire qu'il s'agit des résidents pour être précis.
01:41
Et ça veut dire qu'ils dépensent plus en termes monétaires que leurs revenus.
01:46
Donc, il a fallu l'emprunter à l'étranger.
01:51
Et si on avait été excédentaire, ça veut dire qu'on aurait eu une capacité à prêter
01:54
à l'étranger de l'argent.
01:55
Donc c'est un indicateur macroéconomique sur notre capacité nette de financement.
01:59
Elle était négative cette année, elle était légèrement positive l'an dernier.
02:01
Quelles conséquences ?
02:02
La conséquence, c'est le problème, c'est si on est dans un déficit structurel, durable,
02:11
parce qu'on se met à devoir emprunter de plus en plus à l'étranger.
02:13
On devient donc dépendant des financements étrangers avec tous les risques que ça comporte.
02:17
Et donc, ça expose.
02:19
Parce qu'on n'arrête pas de dire, par exemple, que le Japon a certes une dette importante,
02:24
mais comme elle est possédée par des résidents, eh bien, ce n'est pas si grave que cela.
02:29
Absolument.
02:30
Le Japon est un exemple d'une économie qui a une dette publique de l'État qui est très
02:35
importante, mais elle est essentiellement détenue par ses résidents.
02:38
Et en revanche, l'économie japonaise dans son ensemble a une position extérieure nette,
02:43
en fait, la somme cumulée, si vous voulez, pour simplifier, de ses excédents courants
02:47
passés, qui elle, est très importante.
02:49
Donc, l'économie dans son ensemble, public plus privé, a une épargne nette placée
02:55
dans le reste du monde, en fait.
02:56
Donc, ça, c'est une chose.
02:59
L'autre chose, c'est un déséquilibre en matière de biens.
03:03
Là, cette fois-ci, ça signifie que les Français achètent plus à l'étranger qu'ils n'exportent.
03:09
Voilà, et donc là, on est spécifiquement dans nos échanges de marchandises, donc industrie,
03:15
agriculture, énergie.
03:17
Et on est dans une situation très différente de ce point de vue là, qui est marquée par
03:21
une dégradation forte, jusque au début des années 2000, enfin, en tout cas, en 2003
03:27
encore, on était légèrement excédentaire sur le commerce de marchandises.
03:32
Il y a une dégradation très forte du solde.
03:35
On est arrivé à un déficit très significatif au début des années 2010.
03:38
C'est notamment le constat qui avait la préoccupation qui avait donné lieu au rapport
03:42
gallois en 2012.
03:43
Et au fond, ce qu'on constate depuis, c'est qu'on n'a pas réussi à redresser la barre.
03:50
Ça, c'est plutôt un peu aggravé.
03:51
Première chose, c'est assez structurel.
03:53
Et deuxième chose, je ne sais pas s'il faut dire conjoncturel, parce qu'on ne sait pas
03:57
combien de temps ça va durer, justement, mais nouvelle en tout cas, la crise de l'énergie
04:01
qui a énormément augmenté notre facture énergétique.
04:04
Donc, justement, si on isole cela parce qu'évidemment, il y a une augmentation du déficit commercial
04:11
en valeur, mais pas forcément en volume.
04:13
On peut même imaginer qu'en volume, sur le plan énergétique, ce déficit n'augmente
04:18
pas.
04:19
Sébastien Jean, donc, j'ai presque envie de dire que ce n'est pas juste.
04:22
Si on isole ça, qu'est ce qui se passe pour le reste ?
04:25
Or, énergie, la compétitivité de l'économie française en 2022 ne s'est pas dégradée.
04:34
D'autant qu'en fait, quand on peut focaliser sur l'énergie, mais il y a aussi des secteurs,
04:39
en particulier la chimie, la métallurgie, qui sont très intensifs en énergie, qui
04:43
eux sont indirectement touchés par l'énergie.
04:45
Sur le reste, il y a eu une légère amélioration.
04:47
On peut regarder, par exemple, la part de marché de la France dans les exportations
04:51
de la zone euro.
04:52
Elle s'est légèrement améliorée en 2022 après une dégradation les années précédentes.
04:57
Donc, on a du chemin à rattraper aussi.
04:58
Donc, voilà, ça, c'est un indicateur légèrement positif.
05:01
Autre indicateur positif, l'emploi dans l'industrie a un peu progressé.
05:04
Il y a un certain nombre d'annonces d'ouverture de sites.
05:08
Donc, il y a des petits signes d'amélioration, paradoxalement, hors énergie.
05:11
Ce n'est pas si paradoxal que ça, parce que pour la première fois, on évoque, on
05:16
évoquait cela déjà pendant la crise du Covid, pendant le premier confinement.
05:20
On évoque la question de la souveraineté industrielle.
05:23
Donc, j'imagine quand même que, même si le discours ne fait pas tout, on a déjà
05:28
commencé à relocaliser certaines activités, je me trompe Sébastien Jean ?
05:32
Donc, il y a une volonté politique très affirmée, je crois assez largement partagée.
05:39
D'ailleurs, je pense que c'est un constat assez frappant, dont les signes de concrétisation
05:44
économique existent, mais sont relativement limités pour l'instant.
05:48
Alors, de toute façon, ce ne sont pas des indicateurs que l'on peut espérer retourner
05:52
du jour au lendemain.
05:53
Tout ça est lent.
05:54
Donc, il y a effectivement quelques signes d'amélioration que je viens de nommer.
05:59
On le voit aussi dans les projets qui sont annoncés en France.
06:02
Donc, oui, le choc énergétique vient contrarier ça potentiellement parce qu'il faut bien
06:10
souligner aussi qu'il y a des interactions très fortes entre le prix de l'énergie
06:14
et la compétitivité industrielle.
06:15
Et finalement, les deux sont très liés.
06:18
Donc, aujourd'hui, la grande question qui se pose, c'est est-ce que ce renchérissement
06:22
de l'énergie va être durable ? Est-ce qu'on va arriver à trouver une solution
06:26
pour ramener le prix de l'énergie à un niveau plus acceptable ?
06:29
Il faut quand même savoir que sur l'an dernier, les prix du gaz, qui est une énergie très
06:33
utilisée dans l'industrie, étaient en Europe, en France en particulier, 5 à 7 fois plus
06:38
élevés qu'aux Etats-Unis.
06:39
Donc, ça, ça veut dire qu'il y a un certain nombre d'activités industrielles sur lesquelles
06:42
les arbitrages sont très modifiés par rapport à précédemment.
06:46
Avec une question, évidemment, de compétitivité.
06:49
Ensuite, il y a les services, les exportations de services.
06:52
Là, c'est plus étonnant.
06:53
Qu'en est-il, Sébastien Jean ?
06:55
Alors, sur les services, la France est structurellement excédentaire, en particulier du fait de ses
07:01
bonnes performances dans le tourisme, naturellement, et puis dans les services aux entreprises
07:05
banques, mais aussi services autres, banques, assurances et services aux entreprises.
07:11
On a aussi, j'allais dire, un nouveau, un point fort un peu nouveau qui est arrivé,
07:16
c'est le transforme maritime, avec les résultats de CMA, CGM en particulier, qui sont spectaculaires.
07:22
C'est particulièrement énorme, parce que c'est 25 milliards d'excédent pour une entreprise.
07:28
Pour une entreprise.
07:29
Donc, ça veut dire là, vraiment, qu'une entreprise pèse, entre guillemets, dans la
07:33
balance française.
07:34
Oui, ça veut dire qu'elle pèse même fortement, puisqu'on parlait tout à l'heure d'un déficit
07:39
de 50 milliards pour une part de cette balance.
07:43
Donc, 25 milliards d'euros d'excédent, ça donne un ordre de grandeur.
07:47
Ça signifie aussi, finalement, que la compétitivité française, notamment en matière de salaire,
07:53
parce qu'on ne cesse de dire que le coût des salaires en France pèse particulièrement
07:59
lourd, mais il ne freine pas la compétitivité en matière de services, Sébastien Jean.
08:04
Alors, il faut voir que, quand on parle de CMA, de CGM, par exemple, les salaires, et
08:10
notamment les salaires en France, dans le bilan d'une entreprise comme ça, sont quand
08:14
même une part relativement modérée.
08:16
Mais, en tout cas, on a une position excédentaire dans les services, de façon structurelle,
08:23
depuis des années, et elle est très significative.
08:26
Voilà, donc, souvent de l'ordre, effectivement, de 40 à 50 milliards d'euros pour les années
08:31
récentes.
08:32
En conclusion, le thème de la réindustrialisation, est-ce que là, il faut passer des paroles
08:39
aux actes ? Est-ce qu'on a déjà débuté avec la relocalisation, si vous deviez conclure
08:44
à ce sujet ?
08:45
On est déjà passé aux actes, dans le sens où il y a eu un certain nombre de mesures
08:52
annoncées, de plans de financement, je pense par exemple à France 2030 récemment.
08:56
Il y a eu beaucoup de décisions et même d'argent déjà pour essayer de favoriser
09:05
cette relocalisation.
09:06
Maintenant, c'est quelque chose de compliqué, il y a beaucoup de facteurs en jeu.
09:10
Donc, il y a quelques facteurs, on voit quelques signes positifs de résultats, et il y a encore
09:18
beaucoup de chemin à faire, et l'interrogation liée au prix de l'énergie est importante,
09:22
disons.
09:23
Merci Sébastien Jean.
09:24
professeur titulaire de la chaire d'économie industrielle du CNAM.
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