L'invité de RTL : Claude Blanchemaison, ancien ambassadeur de France en Russie

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Regardez L'invité de RTL avec Antoine Cavaillé-Roux du 10 août 2025.

Transcript

00:00RTL Matin, avec Antoine Cavallero.

00:02RTL, il est 8h49, l'invité de RTL Matin, week-end.

00:06Bonjour, Claude Blanche-Maison.

00:07Bonjour.

00:08Vous êtes ancien ambassadeur de France en Russie,

00:10auteur de « Fragments d'un parcours aventureux »,

00:13c'est aux éditions Temporis.

00:15Vous êtes avec nous pour analyser ce sommet Trump-Poutine à venir.

00:18Vendredi prochain en Alaska, rencontre au sommet pour aborder le conflit ukrainien,

00:23oui, mais sans Volodymyr Zelensky,

00:25qui rejette déjà toute cession de territoire en échange de la paix,

00:28et sans les Européens.

00:30Sommes-nous hors-jeu ?

00:32Monsieur Blanche-Maison.

00:33Écoutez, déjà, on sait que ce sommet va avoir lieu.

00:36Il y a beaucoup de difficultés, beaucoup d'obstacles,

00:38mais il va avoir lieu parce que les deux protagonistes

00:42veulent qu'il ait lieu et veulent se rencontrer,

00:44pour des raisons différentes.

00:46Trump, depuis des mois, demande à Poutine de consentir

00:50un cessez-le-feu d'un mois.

00:52Cessez-le-feu sans condition, sans préparation militaire,

00:55sans force d'interposition.

00:57Un cessez-le-feu politique, en quelque sorte,

00:59qui est très difficile à mettre en oeuvre,

01:01mais ça, c'est une autre histoire,

01:02puisqu'il y a environ 1200 kilomètres de front à surveiller.

01:05Mais, en l'occurrence, ça serait une décision purement politique.

01:09Poutine refusait, en disant, moi, je veux discuter du fond.

01:12Là-dessus, Vitkov, l'envoyé spécial de Trump,

01:14est allé mercredi dernier au Kremlin.

01:17Il est bien traité par Poutine.

01:18C'est la cinquième fois qu'il est reçu pendant plusieurs heures par Poutine.

01:22Et ils ont discuté de plusieurs choses.

01:25Des relations entre les Etats-Unis et la Russie.

01:27Bien sûr, les Américains sont demandeurs d'une reprise des relations économiques

01:32entre les deux pays.

01:34Les Etats-Unis souhaiteraient que les grandes compagnies pétrolières américaines

01:39puissent avoir accès aux recherches pétrolières d'hydrocarbures dans le Grand Nord.

01:44Et, effectivement, Poutine sent bien qu'il a là une carte à jouer.

01:49Et là, on ne parle plus de cesser le feu.

01:50Maintenant, on parle d'échanges de territoire.

01:52Alors, effectivement, la deuxième chose, c'est que, probablement, Vitkov a dit

01:57« Poutine va se fâcher si vous n'acceptez pas le cesser le feu ».

02:00Il est déjà très irrité.

02:01Et Poutine a dit « Oui, moi, je veux bien parler de cesser le feu,

02:03parler de cesser le feu, mais je veux aussi parler des questions de fond. »

02:07Et c'est là qu'on ne sait pas exactement jusqu'où M. Vitkov est allé.

02:10Il semble qu'il ait fait une proposition globale.

02:13Des ballons d'essai sont sortis dans la presse, notamment polonaise,

02:19quelques jours après, sur ce que pouvait contenir la proposition Vitkov.

02:24Et dedans, il y avait plusieurs éléments.

02:26Par exemple, évidemment, par souci de réalisme,

02:32le fait que la Russie continuerait à administrer les territoires qu'elle occupe en Ukraine,

02:37mais que ce n'est pas pour autant qu'on reconnaîtrait que ces territoires lui appartiennent.

02:41Alors, on peut imaginer des tas de choses.

02:43Comme ce sont des hommes d'affaires, M. Vitkov notamment,

02:47auraient parlé d'un éventuel bail amphithéotique pour 99 ans,

02:52au terme duquel l'Ukraine consentirait que ce territoire soit administré

02:58pendant une période de temps limitée,

03:00de façon à préserver le droit international

03:04et la thèse juridique de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.

03:08Mais évidemment, de ça, Zelensky ne veut pas,

03:12puisqu'il a fait inscrire dans la Constitution

03:14qu'on ne touche pas au territoire.

03:16Le territoire, c'est sacré.

03:17En tout cas, on ne peut pas discuter de ces sujets hors de sa présence.

03:21Alors effectivement, comme vous le suggérez,

03:22hier, il y a eu une réunion en Grande-Bretagne.

03:25Tout à fait.

03:25Avec le vice-président américain, J.D. Evans,

03:27qui a organisé la réunion hier soir avec plusieurs émissaires européens.

03:32C'est quoi ? C'est pour passer un peu de la pommade ?

03:34C'est pour leur faire croire qu'ils sont consultés, les Européens ?

03:37Les deux.

03:39Ils sont consultés et la pommade.

03:41Et peut-être un troisième élément, la menace.

03:43Parce qu'effectivement,

03:45Trump ne veut pas que ce sommet soit un échec.

03:48Et il a donc envoyé son vice-président

03:50pour masser les Européens.

03:53Les Zelensky et les Ukrainiens, par la même occasion,

03:56qui sont des Européens d'ailleurs.

03:58Et effectivement, les Européens ont mis en garde les Américains.

04:03Les contacts sont permanents, de toute façon,

04:06par Skype, par téléphone,

04:07entre les Européens qui comptent,

04:11c'est-à-dire les Britanniques.

04:13Les Britanniques qui essaient de jouer les go-between.

04:16Les Français, les Allemands, les Italiens,

04:19et puis quelques autres.

04:20Tous ces dirigeants d'ailleurs, Emmanuel Macron,

04:22Georgia Meloni, Friedrich Merz, Keir Starmer,

04:24qui appellent à maintenir la pression sur la Russie.

04:27Absolument.

04:28Et maintenir la pression, ça veut dire maintenir la menace de sanctions

04:30s'il n'y a pas de cesser le feu.

04:32Par conséquent, on reste dans le schéma initial,

04:34cesser le feu, sinon sanctions.

04:36Et effectivement, Trump avait articulé des sanctions

04:40considérables avec ce qu'il connaît,

04:43c'est-à-dire des sanctions en termes de droits de douane,

04:45des droits de douane qui pourraient aller jusqu'à 100%

04:47ou même beaucoup plus vis-à-vis de la Russie.

04:50Alors ça, ce n'est pas extrêmement grave

04:51parce que la Russie exporte peu de choses aux Etats-Unis,

04:54mais vis-à-vis de la Chine et de l'Inde

04:58et de la Turquie,

05:00qui achètent des hydrocarbures, du pétrole à la Russie.

05:03Et là, évidemment, quand Poutine a fait son tour de piste

05:06de ses amis ou de ses soi-disant amis,

05:10le Chinois Xi Jinping lui a répondu

05:12que ça suffit.

05:13Cette guerre, bon, on n'a pas condamné l'agression russe

05:17parce qu'on ne peut pas parler d'agression,

05:18nous sommes amis, bien sûr,

05:19mais on en a assez de cette guerre

05:21qui perturbe les circuits économiques.

05:23Il faut arrêter cette guerre.

05:24Donc il faut accepter un cessez-le-feu.

05:26Je caricature un peu,

05:27mais c'est ça la position chinoise

05:29et c'est ça aussi la position indienne.

05:30Et que se passe-t-il si, vendredi prochain,

05:33en Alaska, il y a un accord entre Trump et Poutine

05:35que nous, Européens, nous ne sommes pas associés ?

05:38Que se passe-t-il ?

05:38Il faut tout de même préparer la riposte.

05:41Est-ce qu'on va maintenir les sanctions ?

05:42Est-ce qu'on peut, nous, seulement les Européens,

05:45maintenir les sanctions ?

05:45Alors, si c'est un cessez-le-feu,

05:47ça sera une bonne chose,

05:48ça sera positif,

05:49puisque les Européens et Zelensky

05:51avaient accepté l'idée d'un cessez-le-feu

05:53sans condition,

05:55sans condition,

05:56et sans présupposer résolu

05:59les questions de fond,

05:59les questions de territoire.

06:01S'il y a simplement un cessez-le-feu,

06:04effectivement, je pense que les Européens,

06:06à ce moment-là, approuveront

06:07et seront appelés par les Américains,

06:10dans les conditions qui restent à déterminer,

06:12à lever les sanctions,

06:13puisque la contrepartie,

06:14c'est que les Américains, évidemment,

06:15lèveront leurs sanctions.

06:16Les Européens sont libres,

06:17ils ont, comme vous le savez,

06:18ils en sont à l'ordre.

06:1918e train de sanctions,

06:21et à chaque fois, c'est plus serré, évidemment.

06:22Maintenant, on s'attaque à la flotte fantôme

06:25qui exporte les hydrocarbures russes,

06:28et ça finit par être efficace,

06:29parce que ces bateaux fantômes,

06:31ils ne peuvent plus entrer dans les ports européens,

06:32maintenant.

06:32Donc, il faut qu'ils aillent se réapprovisionner ailleurs.

06:35Ailleurs et où, d'ailleurs ?

06:37Et on pourrait aussi les prendre en charge

06:39avec nos marines nationales,

06:41c'est-à-dire être encore plus,

06:43augmenter la pression.

06:44Oui, mais en fait, ma question,

06:45c'est est-ce qu'on peut vraiment,

06:46nous, les Européens, maintenir la pression

06:48alors que Donald Trump signe un accord

06:50avec Vladimir Poutine ?

06:51Est-ce que, lui, il pourrait prendre des sanctions

06:54contre nous, les Européens ?

06:55Non, ce que je veux dire,

06:57c'est que si l'accord ne porte que sur

06:59la mise en place d'un cessez-le-feu,

07:01et si M. Zelensky est d'accord,

07:03il était d'accord sur le cessez-le-feu,

07:04à ce moment-là, les Européens sont également d'accord.

07:07Et à ce moment-là, il y aura une discussion,

07:08naturellement, sur les conditions d'allègement

07:11ou de levée progressive des sanctions.

07:13Parce que ça voudrait dire qu'une négociation

07:15s'engagera à ce moment-là,

07:16dans un cadre à déterminer,

07:18mais évidemment, avec la présence des Européens

07:20et de Zelensky, sur les sujets de fond.

07:24Le cessez-le-feu, c'est une chose,

07:25mais il faudra bien discuter des sujets de fond,

07:27donc le territoire dont vous avez parlé,

07:29mais aussi les garanties de sécurité pour l'Ukraine.

07:32Claude Blanche-Maison, une dernière question,

07:34assez rapidement, aux Etats-Unis,

07:35selon la chaîne NBC,

07:36Volodymyr Zelensky pourrait finalement être invité

07:39en Alaska, ce serait grâce aux Européens, ça ?

07:41Bien sûr, comme en effet,

07:44M. Trump ne veut pas que son sommet échoue,

07:47il peut imaginer que M. Zelensky

07:51soit quelque part dans les environs d'Anchorage,

07:54en Alaska,

07:55de manière à être consulté en permanence

07:58par l'équipe des conseillers du président Trump

08:02et par le président Trump lui-même.

08:03Je doute que M. Trump parvienne à faire asseoir

08:10en fin de circuit Zelensky à la table de négociation.

08:13Mais après tout, un miracle est peut-être possible.

08:15Il peut être dans les parages.

08:16Merci Claude Blanche-Maison,

08:18ancien ambassadeur de France en Russie,

08:19auteur de fragments d'un parcours aventureux.

08:22C'est aux éditions Temporis.

08:23Merci à vous.

08:24Dans un instant, le journal de 9h,

08:26avec à la une la canicule qui s'étend,

08:29la moitié sud suffoque,

08:31le point complet avec Anthony Kazmarek.

08:32A tout de suite.

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