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  • il y a 4 jours
La filière du tri des vêtements ne va pas bien. Les conteneurs de vêtements dans la rue pourraient même disparaître. Si le secteur est en crise, c'est pour plein de raisons : exportations plus difficiles vers l'Afrique, guerre en Ukraine ou encore... crise du secteur automobile.

Bienvenue dans notre nouveau business drama.

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Transcription
00:00Adios ma petite jupe !
00:03Ce geste vous est peut-être familier, celui de déposer des vêtements usagés dans une borne de collecte ?
00:08Bientôt, ce ne sera peut-être plus possible.
00:09Et vous risquez de ne plus savoir quoi faire des vêtements que vous ne mettez plus,
00:12car la filière de tri est en train de craquer.
00:15La question d'aujourd'hui, c'est la survie du relais.
00:17Persister à subventionner un modèle à bout de souffle, ça n'est plus viable.
00:21Pourquoi le recyclage des vêtements en France par en lambeaux ?
00:33Mi-juillet, le relais, l'un des principaux collecteurs de vêtements usagés,
00:36a volontairement cessé de vider ses quelques 22 000 bornes en France pendant plusieurs jours.
00:41Et pour marquer le coup, il a aussi versé des kilos de vêtements devant des magasins Decathlon, Kiabi et Okaidi.
00:46L'objectif pour son directeur Emmanuel Pillois, dénoncer les difficultés financières des acteurs du secteur.
00:51C'était mourir dans le silence ou faire un peu de bruit et espérer.
00:57Depuis l'été 2024, la situation se dégrade sérieusement à cause de plein de problèmes qui se sont déclarés en même temps
01:03et qui touchent tous les acteurs comme Emmaüs, le relais, le secours catholique, le secours populaire, etc.
01:08Pour comprendre ce qui se passe, il faut suivre le parcours d'un vêtement qu'on dépose dans une bande de tri.
01:12Prenons l'exemple du relais.
01:15Chaque année, l'entreprise collecte 120 000 tonnes de vêtements et en tri 85 000.
01:20Elle revend les tonnes qu'elle ne peut pas trier.
01:22La moitié est exportée en seconde main, principalement vers des pays africains ou en Europe de l'Est.
01:26On ne sait pas toujours où finir ses vêtements, mais on ne va pas détailler ce sujet aujourd'hui.
01:30Un quart est exporté pour être recyclé.
01:32Les autres habits deviennent des chiffons, de l'isolant thermique et acoustique
01:35ou du combustible pour faire de l'énergie pour l'industrie.
01:37Finalement, une très petite proportion est revendue dans leur boutique solidaire d'un fringue.
01:42Le problème, c'est que ces débouchés se tarissent les uns après les autres.
01:45Il y a d'abord l'export vers l'Afrique qui devient compliqué.
01:48La Chine inonde le marché avec de la seconde main.
01:51Certains experts soupçonnent aussi du neuf, moins cher que la seconde main européenne.
01:55Les prix chutent et le relais doit brader ses balles de textile,
01:57ses paquets compressés de vêtements usagés, pour continuer à les écouler.
02:01Il y a aussi la morosité du secteur automobile.
02:03Or, la filière utilise des fibres de textiles recyclées comme isolants pour les portières de voitures, par exemple.
02:09Un autre maillon important a été cassé par la guerre en Ukraine.
02:11Avant, beaucoup de textiles blancs y étaient découpés puis transformés en chiffons.
02:15Le conflit a sérieusement ralenti cette activité, ce qui bloque la chaîne de production.
02:19Et la Chine en profite aussi pour vendre ses propres tissus.
02:22Et puis, il y a la logistique.
02:23Le transport maritime mondial est très perturbé,
02:26entre autres à cause des attaques de rebelles yéménites en mer Rouge.
02:29Les navires se détournent du canal de Suez.
02:31Résultat, les coûts de transport augmentent,
02:32les livraisons prennent du retard
02:34et les balles de vêtements s'entassent dans des centres de tri qui ne sont pas extensibles.
02:37Et ce n'est pas tout.
02:38Oui, désolé, ça fait beaucoup.
02:39En amont, la filière est aussi sous tension.
02:41Chaque année, il y a de plus en plus de vêtements en circulation.
02:44En 2024 en France, 3,5 milliards de pièces de vêtements, de linge, de chaussures
02:49ont été mises sur le marché, soit presque 50% de plus qu'en 2020.
02:53Et les dépôts de vêtements sont aussi en augmentation.
02:55Près de 289 000 tonnes ont été collectées en 2024 dans les presque 48 000 lieux de collecte,
03:01contre 268 000 l'année précédente, soit 7% de plus.
03:05On pourrait croire que c'est une bonne nouvelle pour les acteurs de la filière.
03:07Mais cette hausse cache un déséquilibre.
03:10Car les acteurs du tri recherchent avant tout ce qu'ils appellent la crème.
03:13Des vêtements de bonne qualité, parfois de marques, qui se vendent à bon prix en seconde main.
03:17Ce sont les plus rentables et c'est grâce à eux que la filière tient.
03:20Sauf que cette crème finit de moins en moins dans les collectes.
03:23Elle est revendue sur Vinted ou reprise par des marques contre des bons d'achat en magasin par exemple.
03:28Alors les centres de tri perdent une part de leurs recettes.
03:30Et pour ne rien arranger, les vêtements de fast fashion sont de plus en plus nombreux.
03:34Ils se revendent mal, s'abîment vite et sont très difficiles à recycler.
03:38Bref, on trie davantage mais on récupère moins d'argent et ça déséquilibre tout le modèle.
03:42Face à cette crise, les acteurs du tri demandent un coup de pouce.
03:45Concrètement, ils veulent que l'aide versée pour chaque tonne triée soit augmentée.
03:48Cette aide provient d'un acteur que vous ne connaissez peut-être pas, Re-Fashion.
03:51C'est ce qu'on appelle un éco-organisme.
03:54Une structure agréée par l'État pour gérer la fin de vie des produits pour le compte des entreprises.
03:58Il y en a une vingtaine en France pour différents secteurs et celui du textile, c'est Re-Fashion.
04:03Logique.
04:03Pour se financer, Re-Fashion collecte une éco-participation payée à chaque achat de vêtements.
04:08En moyenne, elle coûte 4 centimes par pièce.
04:10Ce n'est pas énorme à l'échelle individuelle mais sur l'année 2024, ça a rapporté 139 millions d'euros.
04:16L'éco-organisme Re-Fashion nous verse en effet une contribution à chaque fois qu'on trie une tonne de linge.
04:21À 156 euros la tonne, notre activité n'est pas viable, rentable et on va dans le mur.
04:26Ils reversent 33 millions d'euros aux recycleurs que nous sommes, aux gens qui font le boulot d'aller collecter et trier les vêtements.
04:33Ils ont disponible en banque 80 millions.
04:36Ils avaient déjà des réserves sur les exercices précédents.
04:39Donc aujourd'hui, on demande simplement que cet argent disponible, il aille en effet sauver les emplois qui font le boulot aujourd'hui.
04:45Après le coup de pression de mi-juillet, Re-Fashion, sur demande de la ministre de la Transition écologique Agnès Pagny-Runacher,
04:51a revu cette contribution à la hausse à 223 euros par tonne en 2025 et 228 euros pour 2026.
04:58Mais pour les collecteurs, ce n'est pas assez.
05:00Le relais demande 304 euros la tonne au risque de devoir fermer et mettre ses 3000 salariés sur le carreau.
05:05C'est pour dénoncer ce blocage que le relais a ciblé Decathlon, Kyabi ou Okahedi, des entreprises à la gouvernance de Re-Fashion.
05:11Re-Fashion, de son côté, se défend.
05:13Nous sommes une entreprise à but non lucratif.
05:16L'ensemble des contributions qui sont appelées servent à financer l'ensemble des obligations du cahier des charges.
05:22Et affirment qu'il ne suffit pas d'augmenter les aides.
05:24En fait, il faut un changement de modèle complet.
05:26Aujourd'hui, l'exportation massive de vêtements usagés en Afrique n'est ni écologiquement ni économiquement viable.
05:33Donc à terme, il va falloir rapidement développer des solutions alternatives.
05:36La transformation de la filière aura pour objectif d'arrêter d'exporter massivement nos vêtements.
05:41Et ça passe par le développement de machines pour mieux recycler nos textiles en France et en Europe.
05:45Donc on parle de polyester, on parle de coton, on parle de polyamide.
05:48Ce sont des matières qui ont des enjeux critiques sur lesquelles on doit développer du tri industriel,
05:54être capable de séparer du coton du polyester pour pouvoir refaire en boucle fermée un nouveau coton, un nouveau fil ou en boucle ouverte, notamment de l'isolation.
06:04Et ces changements doivent se lancer à partir de 2026.
06:07Mais attention, acheter des machines ne garantit pas que la filière sera viable, il faut surtout des débouchés.
06:11En France, pour l'instant, on ne collecte qu'un tiers des déchets textiles.
06:15Et le risque, c'est qu'on n'arrive jamais à recycler aussi vite que la production frénétique de Temu ou Chine.

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