De l’adolescence à la ménopause, la santé des femmes est encore trop souvent pensée comme un sujet secondaire, mal pris en compte dans les politiques publiques.
Dans cet échange, Prisca Thévenot, députée des Hauts-de-Seine et Ancienne ministre chargée du Renouveau démocratique et porte-parole du Gouvernement, plaide pour une approche globale, inclusive et concrète de la santé féminine.
Elle évoque notamment sa proposition de loi pour structurer un véritable parcours de santé à la française, ainsi que son combat pour protéger les femmes et les hommes engagés dans un parcours de PMA.
Une interview filmée dans le cadre de la session "Santé des Femmes & Femmes dans la Santé" du Think & Do Tank Marie Claire le 24 juin 2025 à la Maison de la Chimie.
🔗 Prisca Thévenot : repenser la santé des femmes dans tout le parcours de vie : https://www.marieclaire.fr/prisca-thevenot-repenser-la-sante-des-femmes-dans-tout-le-parcours-de-vie,1497309.asp
00:00Et bien j'ai même envie de vous rajouter et tester sur les hommes, parce qu'il ne faut pas oublier le bout de chaîne.
00:18Déjà c'est de briser les tabous, et c'est exactement ce qui est fait là par le think tank Marie-Claire, c'est de pouvoir en parler.
00:23Pas de pouvoir parler simplement entre nous, entre nous les femmes, mais avec des hommes, j'ai vu qu'il y avait des hommes qui étaient présents, et ça c'est à saluer.
00:30En parler, ça permet aussi de pouvoir se dire les choses.
00:33Par exemple, que les maladies cardiovasculaires, oui, première cause de mortalité chez les femmes.
00:3980% d'entre elles ne connaissent même pas les symptômes, et 42% seulement d'entre elles sont suivies pour ce genre de choses.
00:45Et j'ai même envie de vous dire, si elles sont suivies, c'est parce qu'elles ont déjà eu des signaux d'alerte.
00:49Mais il n'y a pas de prévention en la matière.
00:50Donc l'enjeu que nous avons, c'est de reprendre à plat, de reprendre de zéro le sujet,
00:55et d'aller dans tous les systèmes, dans tout le parcours de vie et de santé, pour pouvoir y mettre.
01:01De l'adolescence jusqu'au moment de la ménopause et de l'après-ménopause.
01:05L'adolescence, c'est quoi ? Déjà mettre en place un parcours de prévention.
01:09Avoir une première consultation au moment de l'adolescence.
01:11La plupart des enfants sont suivis par un pédiatre assez fréquemment, jusqu'au vaccin obligatoire.
01:17Et il y a un truc qui s'appelle le no man's land, on va l'appeler le no woman's land, c'est l'adolescence.
01:21On a la puberté, on a des questions très précises, on a peut-être des sujets de santé mentale, besoin d'accompagnement.
01:28Et bien là, on doit faire quoi ? On se retrouve face à soi-même,
01:30et souvent, on passe un téléphone sur des enjeux qui ne répondent pas à nos problématiques.
01:35Et donc pour ça, j'ai posé une loi là, il y a maintenant quelques jours,
01:38pour parler de cela et mettre une obligation de consultation au moment de l'adolescence.
01:43Alors bien sûr, pour les jeunes filles et pour les garçons qui ont aussi d'autres sujets et d'autres questions.
01:47Et puis au fil du temps, il y a un truc qu'on appelle la médecine au travail, vous voyez ?
01:52Le truc en fait qui est juste un truc qu'on coche pour dire qu'on l'a fait.
01:55Et bien là aussi, il faut la renforcer.
01:56Pouvoir parler de santé des femmes au travail, ça permet peut-être d'avoir des aménagements de poste,
02:01ça permet d'avoir aussi des enjeux d'aménagement du travail ou d'aménagement dans l'emploi du temps.
02:06Et puis tout simplement de parler peut-être pour être redirigée.
02:09Bref, je ne vous donne que deux exemples, mais la loi est bien beaucoup plus importante,
02:12elle est beaucoup plus étoffée et elle permettra aussi à d'autres familles politiques de venir s'y engouffrer
02:18pour aussi donner leur avis au regard des territoires et des familles des hommes
02:21qu'ils ont pu avoir pour avis sur ces sujets-là.
02:25Le chemin est encore long, mais j'ai envie de vous dire que sur les deux prochaines années,
02:28on a la capacité de dresser vraiment un parcours à la française.
02:33Pas simplement pour nous, mais aussi pour donner une valeur d'espoir à beaucoup d'autres pays en ce moment
02:39qui sont en train de sombrer dans l'obscurité.
02:42Tout simplement parce que c'était un non-dit.
02:50Aujourd'hui, on a un couple sur quatre qui a des problèmes d'infertilité
02:53et puis on a un certain nombre de femmes qui cachent leur désir d'enfant
02:58parce qu'elles ont peur d'être jugées et à raison de peut-être perdre leur travail.
03:04Vous vous souvenez, c'est un peu les mêmes sujets qu'on disait à l'époque
03:06quand une femme annonçait sa grossesse au travail.
03:09Aujourd'hui, on a le même phénomène avec le parcours PMA.
03:11Sauf que non seulement ça concerne les femmes, ça concerne aussi les hommes.
03:15Et puis le parcours ne dure pas neuf mois malheureusement.
03:18Il dure souvent beaucoup plus de temps, voire des années.
03:21Et donc jusque-là, dans le code du travail, la protection pour les personnes, les femmes et les hommes en parcours PMA
03:28était calée sur le modèle de la grossesse.
03:31C'est lunaire quand on se dit ça.
03:32C'est complètement dingue.
03:33Donc oui, c'est normal que c'était un tabou.
03:35Oui, c'est normal qu'ils n'en parlaient pas.
03:37Ils avaient raison.
03:38Ils devaient se protéger.
03:39Et donc aujourd'hui, on a créé un code spécifique pour les femmes et les hommes en parcours PMA
03:43pour qu'ils puissent s'absenter pour suivre leurs soins, pour avoir leurs ponctions, etc.
03:48Et puis aussi qu'ils soient protégés de travail.
03:51Parce que quand vous devez tout de suite aller faire une ponction pour votre examen,
03:55souvent vous partez.
03:56Du jour au lendemain, voire de l'heure à l'heure.
03:58Vous devez pouvoir être protégé.
04:00Et puis en étant protégé, ça permet aussi d'en parler plus généralement.
04:03Et sur ça, il y a quand même quelque chose qui est important.
04:05Si c'est un tabou dans la société, encore un tabou, espérons que ça ne soit pas plus,
04:10ça ne l'est pas à l'Assemblée nationale, ni au Sénat.
04:12Puisque sur cette loi, nous avons une unanimité des deux chambres et en vote en moins d'un mois.
04:17Dans le contexte actuel, c'est quand même pas mal.