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Le feu est entré dans Marseille : les mégafeux à l'américaine menacent-ils désormais les grandes villes françaises ? Regardez Guillaume Faburel, géographe et professeur d'études urbaines à Lyon 2.
Regardez L'invité de RTL Matin avec Stéphane Carpentier du 09 juillet 2025.

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Transcription
00:007h10, RTL Matin, avec Stéphane Carpentier.
00:04Merci de votre fidélité, RTL Matin, il est 8h18, les questions du jour c'est de savoir si nous sommes prêts, nous en France, à faire face au feu.
00:12L'actualité c'est Narbonne, dans l'Aude où ça semble s'améliorer, Marseille dans les Bouches-du-Rhône où l'incendie n'est toujours pas fixé.
00:20Et est-ce que nous allons, nous aussi, vivre des méga-feux comme ça existe sur la planète ?
00:25On a tous en tête les images impressionnantes de Los Angeles, ça arrive régulièrement aux Etats-Unis.
00:31Pour nous éclairer ce matin, notre invité en direct est Guillaume Faburel, bonjour à vous.
00:35Bonjour.
00:36Merci d'être connecté, vous êtes géographe, professeur d'études urbaines à l'université de Lyon 2.
00:42Est-ce qu'on va, nous, la question est toute simple, Guillaume Faburel, vers des méga-feux à l'américaine ?
00:48En fait, c'est une question d'envergure.
00:50Alors, toute proportion gardée, on va vers des feux qui vont devenir de moins en moins à maîtriser, de plus en plus incontrôlables.
01:00Si c'est la définition première du méga-feu, oui, effectivement, nous allons vers ça.
01:04En tout cas, les risques sont largement accrus en comparaison des 20 ou 30 dernières années.
01:09Alors, si on va vers ça, comment on l'explique ? C'est parce qu'on a étalé, trop étalé les villes ?
01:15Ah oui, oui. En fait, il y a un double phénomène. Il y a un dérèglement climatique avec un réchauffement qui est maintenant attesté,
01:22qui ne devrait pas être contesté d'ailleurs. Et de l'autre, on a effectivement une urbanisation qui est croissante.
01:28Les villes ne cessent de grandir, on a une urbanisation, des fronts d'urbanisation qui sont assez galopants.
01:32D'ailleurs, les cas dont on parle dans l'actualité, hélas, des trois ou quatre derniers jours,
01:37que ce soit à Narbonne ou Marseille, ce sont des lieux qui sont sur des fronts d'urbanisation.
01:42C'est là où les agglomérations se sont étendues. Il y a la proximité de grandes infrastructures et même d'aéroports.
01:47Bref, ces univers-là, ces écosystèmes-là ont été largement artificialisés.
01:52Donc, on a une cause première qui est effectivement l'urbanisation, qui a un taux de croissance tout à fait considérable.
01:58Oui, Guillaume Faburel, il faut préciser par exemple à tous ceux qui ne connaissent pas la cité fosséenne,
02:02Marseille, que c'est une ville extrêmement étendue, qui fait deux fois et demie la superficie de Paris.
02:08C'est colossal.
02:09Oui, oui, tout à fait. Et le cas de Penmirabeau en particulier, il est au cœur de la métropole de Aix-Marseille,
02:16avec un réseau autoroutier très dense, avec un aéroport à proximité.
02:19Enfin, il y a, comment dire, effectivement des phénomènes d'étalement, de croissance à la fois interne et externe aux lisières, au front.
02:27On parle de péri-urbanisation.
02:28Mais j'attire l'attention sur le fait que les feux deviennent méga parce que nos villes deviennent méga.
02:34Et que là, il y a un énorme problème de cohabitation entre la ville et les pourtours qui ont encore quelques espaces de nature.
02:41Mais là aussi, il faudra y revenir parce que ces espaces de nature ne sont pas généralement entretenus tel qu'ils devraient l'être,
02:46n'ont pas les fonctions écologiques qu'ils devraient assurer.
02:49Mais c'est bien au contact des deux qu'on a un problème aujourd'hui en matière écologique.
02:54Expliquez-nous ça, justement, le contact des deux là.
02:57Parce qu'on a d'un côté une urbanisation qui est galopante et qui artificialise à outrance.
03:01Pour rappel, en France, on urbanise deux fois plus vite que la croissance démographique.
03:05Et de l'autre, on a des espaces naturels qui ne sont plus entretenus et des espaces agricoles cultivés de manière aussi très artificielle.
03:11Donc, on a des habitats naturels qui ont été altérés et dégradés.
03:15Donc, ça renvoie bien aux deux côtés de la lisière.
03:18D'un côté, on a des brasiers par manque d'entretien, voire abandon.
03:23Ça, c'est pour les espaces les plus accidentés.
03:25Et de l'autre, on a des fournaises urbaines avec des populations tout à fait densifiées et du béton à peu près à tous les étages.
03:33Je rappelle juste pour information que les températures sont annoncées pour les grandes villes françaises à l'horizon 2050 en période caniculaire proche de 50 degrés.
03:43Ça veut donc dire que le risque est maintenant avéré et que jusqu'à aujourd'hui, on a un petit problème d'anticipation.
03:50Les politiques ne sont pas à la hauteur de ce qui est en train de maintenant se généraliser.
03:54Les politiques pas à la hauteur concernant les zones naturelles que vous évoquez justement, Guillaume Faburel, vous qui êtes géographe.
03:59Ça veut dire qu'on entretient, par exemple, très très mal les routes forestières, qu'il faudrait débroussailler les terrains aussi pour limiter les risques ?
04:09Oui, alors il y a à la fois de l'entretien, il y a aussi les forêts et les espaces de nature que l'on cherche à créer.
04:16Ils sont très très artificialisés parce qu'ils sont monofonctionnels.
04:20En fait, on a un petit souci, soyons clairs, mais ça ne renvoie pas à aujourd'hui, bien évidemment,
04:26qui est notre propre culture du vivant et culture des espaces de nature.
04:30Il faudrait, il conviendrait de diversifier les pratiques agricoles, les pratiques forestières,
04:37de telle manière à faire de ces espaces, non pas des espaces tampons pour protéger les humains
04:42qui seraient du coup confinés, comme on l'a vu à Marseille, dans les espaces urbains,
04:47mais pour en faire des lieux d'humidité, de rafraîchissement, de verdissement.
04:53Vraiment, on a, comment dire, laissé un peu à l'abandon ces espaces de nature à proximité,
04:58à l'exception de quelques parcs naturels, c'est le cas à Narbonne notamment,
05:02mais on a laissé un peu à l'abandon et ce sont en fait des brasiers.
05:05Le maquis qui prend feu dans les agglomérations marseillaises notamment ou à proximité
05:09atteste bien d'espaces qui sont en fait en friche, qui ont été délaissés.
05:14Donc, il y a bien quelque chose qui est du ressort du délaissement de ces espaces-là.
05:19J'attire quand même l'attention sur le fait que c'est bien parce que le front d'urbanisation avance
05:23que le risque s'amplifie.
05:24C'est bien parce qu'on artificialise par du béton que quelque chose est en train de se réaliser aujourd'hui
05:29et dont on est en train de perdre le contrôle avec les services de sécurité
05:34et les systèmes qui sont censés intervenir.
05:35Voilà, si je comprends bien ce que vous nous expliquez ce matin et aux auditeurs de RTL,
05:38c'est que parmi les solutions, il faudra un urbanisme plus végétalisé, c'est ça ?
05:43Dans ces espaces de contact-là, oui, ça indéniablement.
05:49Il y a, je vous dis, un verdir, humidifier, rafraîchir, revégétaliser.
05:52Il faut renaturer, ça indéniablement et particulièrement à ces endroits-là.
05:56Et alors, du coup, j'attire aussi attention sur le fait qu'on dit assez fréquemment
06:01que ces espaces-là d'extension ou d'étalement qui ont été urbanisés sur les ventes en 30 dernières années
06:06seraient de mauvais conseils pour l'environnement, sauf qu'ils sont d'orgée déjà installés.
06:10On ne va pas déloger les gens.
06:12Donc, en fait, il y a un réel potentiel néanmoins.
06:14C'est-à-dire qu'il conviendrait effectivement d'avoir d'autres usages, des jardins.
06:20Il y a un article du Monde qui remonte à deux années sur l'Île-de-France notamment
06:24qui disait que finalement, la ceinture maraîchère francilienne continue à exister
06:28dans les jardins de pavillons de banlieue.
06:31Et bien là, il y a un réel potentiel à condition que ça ne soit pas des constructions
06:35qui soient trop bétonnées, trop minéralisées, etc.
06:39Et j'attire aussi l'attention sur le fait que c'est plutôt à moyenne ou longue échéance.
06:45Mais néanmoins, on est embarqué dans cette réalité-là.
06:47C'est-à-dire qu'il faut se projeter à 20 ou 30 ans.
06:49Quand je parle des 50 degrés en période caniculaire, c'est bien 2050.
06:52On a un problème avec la taille des villes, en fait.
06:54C'est-à-dire qu'il faudrait plus de petites villes, de villes moyennes, c'est ça ?
06:58Oui, oui, tout à fait.
06:59C'est-à-dire qu'on a un maillage aujourd'hui en France qui permettrait d'accueillir dans des petites villes ou des villes moyennes.
07:03Il faut mettre le paquet sur ces habités-là, sur ces formes urbaines-là, sur ces tailles de villes-là.
07:10Il y a une démesure dans les grandes agglomérations, ces phénomènes de métropolisation,
07:14qui fait que les phénomènes nous ont un peu échappés.
07:17Et c'est ce qui nous mène tranquillement par ce que l'on dénomme mégapolisation,
07:21ce qui nous mène aux méga-feux ou aux grandes inondations telles que Valence en Espagne a pu connaître il y a moins d'un an.
07:26On a là quelque chose qui est du ressort un peu de la démesure.
07:30Alors, la solution, elle est claire, il n'y a qu'un faucon, je suis mal placé parce que je ne suis pas en décision.
07:36Mais néanmoins, il y a une culture du vivant qu'il faut réapprendre, qu'on a eue par le passé.
07:43L'artificialisation urbaine a conduit à une artificialisation de la nature.
07:46Ça se tend au point de contact que sont les lisières.
07:50Et bien évidemment, il y a des risques humains qui sont avérés.
07:54Il y a maintenant effectivement une question de proximité avec l'environnement.
07:59Et la taille joue énormément.
08:00Si on vit dans des environnements qui sont moins artificialisés, moins bétonnés, moins densément peuplés,
08:05on peut faire le pari que le rapport à l'environnement sera un peu plus responsable, humble et décent.
08:11J'insiste sur le fait que dedans, dans ce cheminement-là, il va nous falloir replanter des arbres.
08:17La question des arbres pour la stabilité des sols, pour l'humidité de l'air, pour la qualité de vie des gens qui peuvent aussi s'y épanouir, s'y divertir, s'y rafraîchir.
08:32Il y a quelque chose qui est du ressort de nos rapports à la nature.
08:36Et la ville, l'urbanisation, n'est pas bonne conseillère en la matière.
08:39On comprend bien avec vos propos et vos explications du matin qu'il y a plein de choses à faire.
08:43Merci de nous avoir éclairé.

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