A Paris, le centre Pompidou va fermer ses portes pour au moins cinq ans de rénovations. Les commerçants et les riverains sont inquiets... comme en 1977, lors de l'inauguration du musée.
Retrouvez « En toute subjectivité » avec Dov Alfon sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/dov-alfon-en-toute-subjectivite
00:00En toute subjectivité, Dove à le fond du quotidien Libération, Dove à Paris, le centre Pompidou va fermer ses portes pour au moins 5 ans de rénovation.
00:09Les commerçants et les riverains sont inquiets et ça vous a rappelé quelque chose ?
00:14Oui Nicolas, c'est le quatrième monument le plus visité de la capitale, 3 200 000 visiteurs par an, bien au-dessus de l'arc de triomphe par exemple.
00:24Et donc forcément, ça va laisser un vide. Beaubourg, comme bien des parisiens continuent d'appeler le musée d'art contemporain, va fermer pour des travaux qui pourraient durer bien plus que les 5 ans annoncés.
00:36Les voisins ne sont pas contents et on les comprend. Dans Libération, mais aussi dans Le Parisien, dans Le Monde, on a pu lire des citations qui démontrent bien l'anxiété des commerçants et le déboussolement des habitants.
00:48Seulement voilà, pour ceux qui aiment les archives de ces journaux, tout ceci n'est pas très nouveau, car c'est la même anxiété et le même déboussolement que reflétaient les riverains à la veille de l'ouverture, le 2 février 1977.
01:01« C'est pas super et puis ça ne va pas avec le quartier », disaient les uns. « Ça va devenir un éléphant blanc, ça va faire fuir les touristes », disaient les autres.
01:10On remarquera que ce qu'on appelait encore « les garçons de café » sont les plus remontés, il y a 50 ans comme aujourd'hui.
01:18« Qui voudrait s'installer en terrasse face à cette horreur », demandait un serveur du Café Beaubourg, tandis que dans le restaurant voisin, on s'inquiétait du départ des ouvriers qui remplissaient les tables à midi.
01:28Et maintenant, va savoir. Comme des centaines d'ouvriers, Nicolas, vont maintenant revenir sur les lieux du crime, on aura enfin la réponse à cette question.
01:37Mais les cafetiers dubitatifs ne sont rien par rapport aux intellectuels furieux, qui étaient bien plus nombreux.
01:43Dans le Figaro, Jean Dormeson dénonce, je cite, « une usine », « un paquebot », « une raffinerie », « un espèce d'écorché monstrueux et multicolore ».
01:53Tandis que dans le monde, l'universitaire Jean-Paris fustige, je cite, « l'anthologie même de la hideur », que les bonnes gens vont prendre pour des échafaudages.
02:02Ah, les bonnes gens, Nicolas, il n'y a que ça de vrai ! »
02:04Et les touristes, Dov, que feront-ils, à votre avis, pendant la fermeture ?
02:08Eh bien, les fameux tuyaux multicolores de Beaubourg sont irrésistibles pour un selfie, Nicolas, et les touristes continueront donc de venir, je pense, même face à un musée fermé.
02:18On l'a échappé belle, d'ailleurs, puisque le président Pompidou avait demandé aux architectes de songer à remplacer ces couleurs criardes en pastels.
02:26Et son successeur, Valéry Giscard d'Estaing, songea à annuler le projet si on ne trouvait pas moyen de faire entrer toutes ces tuyauteries à l'intérieur du bâtiment.
02:36Nous avons l'exemple de la fermeture de Notre-Dame, où on a continué à photographier pour Instagram le chantier de Notre-Dame, avec la même ferveur que la cathédrale même.
02:46Car ce n'est pas à Beaubourg ou Notre-Dame que nous cherchons à éterniser, mais notre existence bien trop fugace avec tuyaux ou non.
