Mathieu Lefèvre, député Renaissance du Val-de-Marne et président du groupe d'amitié France-Israël, était l'invité de franceinfo le 6 juin 2025.
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00:00France Infossoir, l'invité, Aurélie Herbemont.
00:06Bonsoir Mathieu Lefebvre.
00:07Bonsoir.
00:07Vous êtes député Renaissance du Val-de-Marne, vice-président du groupe Ensemble pour la République à l'Assemblée.
00:13Vous êtes aussi président du groupe d'amitié France-Israël.
00:16Une information judiciaire a été ouverte en France contre des franco-israéliens pour complicité de génocide et de crime contre l'humanité.
00:24Des franco-israéliens sont soupçonnés d'avoir participé à des actions de blocage de l'aide humanitaire à Gaza.
00:30Entre janvier et mai 2024, quelle est votre réaction ?
00:33Ce qui se passe à Gaza, c'est un drame humanitaire absolument épouvantable.
00:37Et disons les choses, une réponse militaire d'Israël qui est disproportionnée et qui fait de trop nombreuses victimes civiles.
00:43Et donc tout ce qui contrevient à l'entrée de l'aide humanitaire est évidemment à proscrire, à bannir et à condamner avec la plus grande fermeté.
00:52Depuis des mois, la qualification de génocide fait débat.
00:56Est-ce que le fait que le parquet antiterroriste ouvre une information judiciaire spécifiquement sur des chefs de complicité de génocide vous mène à revoir votre jugement sur ce qui se passe à Gaza justement ?
01:07Non, je ne reprends pas ce terme à mon compte parce que dans le génocide, il y a eu une intention génocidaire.
01:12C'est-à-dire une intention d'éliminer un peuple, tout ou partie d'un peuple.
01:17Et ça n'est pas ce que fait Israël à Gaza.
01:18Et la justice ne l'exclut pas.
01:20C'est la justice et elle est évidemment libre de ces mots mais ce ne sont pas les miens.
01:24Et je voudrais redire ici que si on est profondément humaniste, on doit condamner la dérive militaire de ce que fait Israël à Gaza sans reprendre ces mots.
01:33Et en rappelant aussi cette évidence simple que si...
01:35Amnesty International aussi parle de génocide à Gaza.
01:38Oui, mais moi je vous le redis, il n'y a pas d'intention génocidaire.
01:41Et je redis également dans le même temps que si les terroristes du Hamas rendent les 56 otages, demain il n'y a plus de guerre à Gaza.
01:46Mathieu Lefèvre, en France, à Neuilly, un rabbin a été agressé aujourd'hui.
01:51On lui a jeté une chaise au visage.
01:53Comment est-ce qu'on sort de ce climat pesant avec des agressions antisémites régulières sur notre sol ?
01:58Écoutez, c'est bouleversant, c'est révoltant et c'est écœurant.
02:01L'antisémitisme a explosé dans notre pays depuis le 7 octobre 2023.
02:06Depuis les attaques du Hamas, nourri par des forces politiques qui n'ont qu'une seule envie,
02:11qui est d'exporter le conflit et faire dans le fond des Juifs de France les porte-parole de Benjamin Netanyahou.
02:17Les Juifs de France ne sont pas responsables de ce qui se passe en Israël.
02:21Et alors qu'on aurait dû avoir un mouvement de sympathie pour les Juifs de France après les attentats atroces du 7 octobre,
02:26Vous trouvez qu'il a manqué de solidarité ?
02:29Je pense que, écoutez, quand les actes antisémites augmentent à ce point,
02:33quand la France insoumise nourrit une forme d'antisémitisme d'Etat en pensant qu'il est résiduel,
02:38alors qu'il explose, il manque, oui, une solidarité de nos compatriotes,
02:41en tout cas d'une partie d'entre eux, à l'endroit de nos compatriotes de confession juive.
02:44Vous portez vraiment la responsabilité sur la France insoumise ?
02:47En partie, quand M. Mélenchon dit que l'antisémitisme est résiduel dans notre pays,
02:51alors que des rabbins sont attaqués en pleine rue à coups de chaise.
02:55Ce n'était pas la première agression dont était victime le rabbin qui a été agressé aujourd'hui ?
02:59En plus. Et tous les républicains sincères devraient ériger la lutte contre l'antisémitisme en grande cause nationale,
03:04parce que, vous savez, ce n'est pas seulement la question des Juifs de France,
03:06c'est une question profondément républicaine.
03:08quand l'antisémitisme revit, c'est le symptôme d'une société qui va très mal.
03:12Société qui va très mal, dites-vous, il y a d'autres sujets compliqués en ce moment en France.
03:18Le gouvernement doit trouver 40 milliards d'économies pour le budget 2026.
03:23Est-ce que ça va être possible quand vous voyez les contestations dès qu'on parle d'économies,
03:26comme les taxis qui menacent de bloquer le pays à cause des économies envisagées sur le transport de patients ?
03:32En tout cas, c'est indispensable.
03:33On vit dans un pays l'an prochain où le premier budget,
03:36ce sera le paiement des intérêts de notre dette devant l'éducation nationale,
03:39devant la transition écologique.
03:41On peut se satisfaire de cet état de fait et se dire qu'il vaut mieux payer nos créanciers
03:44plutôt que d'investir pour l'avenir de nos enfants.
03:46Mais quand on ne s'y résout pas, on doit faire des choix,
03:49et des choix clairs qui commencent par réduire les dépenses publiques dans notre pays.
03:52Et donc, il faut tenir bon face au taxi, notamment ?
03:54Bien sûr qu'il faut tenir bon face au taxi.
03:56Si vous commencez à caler dans la plaine et dans la vallée,
03:58vous ne commencez pas à grimper l'Himalaya.
04:00De quoi parle-t-on ?
04:01Une dépense qui a augmenté de près de 45% depuis trois ans.
04:04Et on demande de faire 300 millions d'euros d'économies sur 3 milliards d'euros de dépenses
04:08sur plusieurs années.
04:10C'est réalisable, nécessaire et souhaitable.
04:12Il y a un autre secteur qui est en colère, c'est le secteur du bâtiment,
04:15à cause de la suspension de MaPrimeRénov'.
04:18Ils envisagent de rejoindre les taxis qui veulent se mobiliser la semaine prochaine à nouveau.
04:22Vous craignez une convergence des colères sur fond de soucis budgétaires ?
04:26Je ne sais pas.
04:26En tout cas, il y a eu manifestement un manque d'anticipation sur ce dispositif,
04:30conjugué à de nombreuses fraudes et un manque de simplicité.
04:33Nous, on a adopté une loi.
04:34Et un succès des particuliers aussi qui ont voulu faire rénover leur habitation.
04:38A raison, et on leur a dit que c'était possible avant de dire aujourd'hui que l'aide est suspendue.
04:42Je pense qu'il faut clarifier le dispositif, évidemment lutter contre les fraudes.
04:46Mon collègue Thomas Cazenave a fait voter une proposition de loi en ce sens.
04:49Il est urgent qu'elle soit promulguée.
04:50Vous, pour faire des économies dans le prochain budget, vous proposez une année blanche fiscale.
04:55Mathieu Lefebvre, en quoi ça consiste une année blanche fiscale ?
04:57Une année blanche budgétaire qui a pour conséquence une année blanche fiscale.
05:01Une année blanche budgétaire, ça consiste à dire qu'on ne dépensera pas plus en 2026 qu'on a dépensé en 2025.
05:06Et comme mécaniquement les dépenses de ce pays augmentent naturellement, ça fait des économies.
05:11Maintenant, pour faire cela...
05:12Combien vous pouvez escompter d'économies si on faisait une année blanche fiscale ?
05:16Plus de 20 milliards d'euros.
05:17Plus de 20 milliards d'euros.
05:18Plus de 20 milliards d'euros.
05:18Mais est-ce que ça veut dire qu'on ne revalorise pas les pensions de retraite, les prestations sociales sur l'inflation ?
05:24Ça veut dire que tout le monde est mis à contribution et qu'en tout état de cause, l'effort est trop important pour qu'on ne le livre qu'à une seule catégorie de la population.
05:30Si demain, on dit qu'il y a uniquement les retraités qui sont mis à contribution ou uniquement les chefs d'entreprise, ça ne va pas fonctionner.
05:36Il faut que chacun fasse un effort.
05:37Et moi, j'assume de dire que cet effort doit être totalement partagé.
05:41Sinon, on n'y arrivera pas.
05:42Sinon, on n'y arrivera pas.
05:44C'est assumable, politiquement, de faire une année blanche fiscale, de ne pas dépenser plus que ce qu'on a dépensé l'année dernière ?
05:51En tout cas, c'est la seule façon de réaliser...
05:53Parce que 20 milliards, ça doit se sentir pour beaucoup de Français.
05:55Bien sûr, ça doit se sentir pour de nombreux Français.
05:57Mais vous savez, la dépense publique, elle a plus que doublé depuis le début des années 2000.
06:01Elle était à 800 milliards d'euros.
06:03Elle est aujourd'hui à plus de 1600 milliards d'euros.
06:04Je n'ai pas le sentiment qu'on ait un service public qui soit de deux fois meilleure qualité et que nous soyons deux fois plus heureux.
06:10On peut dépenser moins tout en ayant un service public qui soit aussi bon.
06:13Mais surtout, c'est une façon aussi de préserver les Français des hausses d'impôts.
06:17Parce que l'alternative, c'est quoi ?
06:18Ça, pour vous, c'est une ligne rouge, pas de hausse d'impôts ?
06:20Non, mais moi, je ne suis pas là pour donner des lignes rouges, vous dire ce qu'il faut faire ou pas faire.
06:23Je dis simplement que dans un pays qui a le plus fort taux de prélèvement obligatoire au monde,
06:27où les Français sont asphyxiés malgré les baisses d'impôts inédites réalisées par Emmanuel Macron,
06:31augmenter les impôts demain, c'est détruire de l'activité économique.
06:34Dans les sujets budgétaires, il y a les retraites.
06:36Ce soir, le Conseil d'orientation des retraites parle d'un déficit potentiellement
06:40qui pourrait monter à horizon 2030 à 6,6 milliards d'euros.
06:45Comment on fait ?
06:46Il ne faut d'abord ne pas détricoter ce qu'on a fait.
06:48Il ne faut d'abord ne pas détricoter la réforme courageuse de 2023 d'Elisabeth Borne.
06:52Il ne faut pas que le conclave des partenaires sociaux sur les retraites touche aux 64 ans.
06:57Il n'y a pas d'aménagement possible.
06:58Il a de toute façon un cadrage qui est un cadrage financier,
07:00qui est d'équilibrer le système d'assurance vieillesse à horizon 2030.
07:04On voit que même la réforme de 2023 n'est pas suffisante.
07:07Pour une raison très simple, c'est qu'on a une démographie qui est exponentielle.
07:12Enfin, plutôt, on a de moins en moins d'actifs pour financer les retraités.
07:15De plus en plus de retraités.
07:17Et ça va aller de mal en pire.
07:18Donc, si on ne traite pas le sujet à la racine,
07:21ou pire, si on revient sur les réformes courageuses qui ont été effectuées,
07:24on n'y arrivera pas.
07:24Et c'est mentir aux Français que de dire qu'on peut aller en deçà de 64 ans.
07:28Et c'est mentir aux Français.
07:29Il faudrait même aller plus loin ?
07:30Je pense qu'il faut aller plus loin.
07:31Mais moi, je suis pour un système...
07:32Je ne sais pas, en tout cas, je pense qu'il faut un système
07:35dans lequel il y ait beaucoup plus de fluidité et de souplesse.
07:3765, 66 ans, 67 comme proposait à un moment Édouard Philippe ?
07:41Ça doit être concerté.
07:42Mais en tout état de cause, on doit travailler plus longtemps
07:44et aussi être plus nombreux à travailler.
07:46Si on avait le même taux d'emploi des seniors
07:48que, par exemple, aux Pays-Bas...
07:50Et des jeunes.
07:50Et des jeunes, bien sûr.
07:51On serait aujourd'hui à déficit public zéro.
07:54Donc, il faut encourager le travail des jeunes et des seniors.
07:56Il y a une petite musique qu'on entend aussi beaucoup ces dernières semaines.
08:00Gérald Darmanin, dont vous êtes proche, organise d'ailleurs un colloque sur le sujet la semaine prochaine.
08:04Et si on parlait de la retraite par capitalisation, est-ce que ça peut être ça, la solution ?
08:08Gérald Darmanin, comme Édouard Philippe, on mérite de réfléchir à des solutions pour l'avenir.
08:13On voit bien que le système...
08:14Eric Ciotti aussi plaide pour une part de capitalisation dans les retraites.
08:18Mais Gérald Darmanin et Édouard Philippe le font avec sérieux.
08:21Et ils le font, pourquoi ?
08:23Parce que le système actuel, on pourra bouger des paramètres, l'âge, la durée de cotisation.
08:27Mais on voit bien que tout cela ne tiendra pas.
08:30Et que, pire, pour des générations qui arrivent aujourd'hui sur le marché du travail,
08:33elles doutent, elles se disent que peut-être demain, elles n'auront même pas de retraite.
08:36Donc, pour rassurer les Français et rendre le sujet viable,
08:39il faut diversifier nos sources de financement de la protection sociale.
08:43Évidemment, en introduisant une dose de capitalisation.
08:46Mais certains économistes mettent en garde contre le risque de voir des générations de cotisants y perdre.
08:52Car ils devraient cotiser pour la retraite des retraités actuels,
08:55mais aussi pour leur propre retraite.
08:57Comment est-ce qu'on évite cet écueil dans la capitalisation ?
09:01Oui, je veux rassurer tous vos auditeurs, il n'y aura pas des gens qui vont cotiser
09:04et pour eux-mêmes et pour les retraités d'aujourd'hui.
09:06C'est pour ça qu'il faut que l'entrée dans le système de capitalisation soit extrêmement progressive.
09:10Gérald Darmanin avait proposé, à un moment donné, de céder des participations de l'État
09:15pour amorcer un fonds qui serait un fonds souverain,
09:18qui serait peut-être géré par les partenaires sociaux
09:19et qui permettrait de monter en charge...
09:21Un fonds de retraite qui pourrait être géré par les partenaires sociaux.
09:23Qui pourrait être géré par les partenaires sociaux avec des sessions de participation
09:26pour qu'on amorce la transition du système.
09:28Il ne s'agit pas de remplacer le système de répartition ou de le supplanter,
09:31mais il s'agit de le compléter par une dose de capitalisation.
09:34La capitalisation, il faudrait selon vous ?
09:36On est à 2% quand d'autres pays sont...
09:38Edouard Philippe disait 10, peut-être 15%.
09:39Je pense que c'est le bon quantum en effet.
09:41C'est le bon étiage.
09:42Mathieu Lefebvre, il y a un an, Emmanuel Macron décidait de dissoudre l'Assemblée.
09:46Quel bilan en tant que député macroniste vous tirez de cette dissolution un an après ?
09:50D'abord, moi je ne fais pas partie de ceux qui jugent que c'est un mauvais choix
09:52parce que je pense que ce n'est jamais un mauvais choix que de consulter les Français.
09:56Ils se sont d'ailleurs rendus massivement aux urnes.
09:58Mais ce que je constate, c'est qu'on a une classe politique qui n'a pas été à la hauteur du moment.
10:01On est incapable, et je me mets dans le lot, de nouer des accords et des compromis les uns avec les autres.
10:07Je mets de côté les extrêmes.
10:08Donc si c'était à refaire, il faudrait refaire la dissolution ?
10:10C'est une prérogative du Président.
10:12Mais encore une fois, je pense que ça n'est jamais une mauvaise solution que de consulter les Français.
10:16Et ils sont libres de s'exprimer.
10:18Et vous dites que la classe politique n'est pas à la hauteur finalement de...
10:21Mais ça peut tenir comme ça du coup jusqu'en 2027 ou il faudra une nouvelle dissolution ?
10:25En tout cas, il le faut.
10:25Il faut que ce gouvernement tienne.
10:27Il faut de la stabilité dans le pays.
10:28Tous les autres grands pays autour de nous sont en train de se réformer.
10:31L'Allemagne fait un plan sans précédent pour améliorer son économie, sa compétitivité, son innovation.
10:37Il y a des opportunités incroyables avec ce qui se passe aux Etats-Unis.
10:40Allons chercher des chercheurs américains.
10:42Ramenons-les sur le sol français.
10:43Ça suppose de la stabilité.
10:45Vous êtes en coalition avec LR.
10:47C'est plus ou moins compliqué.
10:48Il y a des hauts et des bas.
10:49Cette semaine encore, Bruno Retailleau a mis sa démission dans la balance.
10:53Quasiment si jamais François Bayrou poursuit sur la proportionnelle.
10:56Ça peut tenir longtemps comme ça ?
10:58Ça doit tenir.
10:58Je pense que la droite ne peut pas faire sans le centre et le centre ne peut pas faire sans la droite.
11:02Aujourd'hui comme demain, Bruno Retailleau est un ministre de l'Intérieur qui obtient des résultats.
11:07On doit le conforter dans son action.
11:08Aujourd'hui comme demain, ça veut dire qu'il vous faudra un candidat commun pour 2027 ?
11:12Moi, j'en suis intimement convaincu.
11:14Je pense que la division, c'est prendre le risque d'avoir les extrêmes au pouvoir.
11:18Et c'est prendre le risque d'avoir un pays qui ne soit à la fin plus gouverné et plus utile aux Français.
11:22Sur le dernier sujet de crispation avec LR, c'est la proportionnelle.
11:26Est-ce que vous, vous êtes favorable à l'élection des députés à la proportionnelle ?
11:30Moi, j'y suis très opposé pour une raison simple.
11:32Vous êtes d'accord avec les LR ?
11:33Tout à fait, avec les LR, avec Édouard Philippe, avec des gens de ma formation politique.
11:36Pour une raison très simple, on ne va pas poursuivre une assemblée aussi fragmentée
11:40où il ne se passe pas grand-chose.
11:41Réformons-nous.
11:42Et pour se réformer, on a besoin d'une majorité stable en 2027.
11:45Si quelqu'un arrive à avoir une majorité stable en 2027.
11:48Merci Mathieu Lefebvre.
11:49Aurélie Herbemont, l'invité politique à réécouter sur franceinfo.fr.