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  • 21/05/2025
Karine Jacquemart, directrice générale de Foodwatch France, était l'invitée de France Inter mercredi 21 mai. Une enquête menée par Foodwatch et six autres associations dénonce les promotions dans les supermarchés qui concernent trop souvent des aliments trop gras, trop sucrés ou trop salés.

Retrouvez les invités de 6h20 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter

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Transcription
00:00France Inter
00:01Mathilde Munoz
00:05Le 5-7
00:08Il est 6h20, trop gras, trop sucré, trop salé.
00:11Les promotions qui sont faites dans les supermarchés concernent bien trop souvent des produits qui sont mauvais pour notre santé
00:17alors que les aliments sains restent eux très chers.
00:20C'est ce que montre une enquête réalisée par 7 associations dont la Fédération Française des Diabétiques,
00:25le Collectif National des Associations d'Obèses et Foodwatch.
00:28Je reçois ce matin la directrice générale de Foodwatch France.
00:31Bonjour Karine Jacquemart.
00:32Bonjour.
00:33Vous avez examiné près de 5000 promotions dans différentes enseignes de la grande distribution.
00:38Deux tiers de ces promotions, de ces rabais, portent sur des produits qu'on devrait éviter.
00:42Quoi par exemple ?
00:44Par exemple la charcuterie, des produits trop gras, trop sucrés, trop salés.
00:50Quand vous avez la chance qu'ils aient le Nutri-Score affiché, c'est le Nutri-Score DEE par exemple.
00:55Des produits aussi ultra transformés.
00:57Donc c'est quoi ? Des chips, des gâteaux industriels ?
01:00C'est ça, des chips, des gâteaux industriels et des bonbons.
01:04Alors après, encore une fois, il ne s'agit pas de dire ne mangez jamais de produits gras, sucrés ou salés,
01:09mais tout est une question de dose.
01:10Et en l'occurrence, 66% des promotions qui flèchent vers ces produits-là,
01:15c'est une démonstration de plus du rôle que joue la grande distribution,
01:18qui prétend être alliée des consommateurs et qui en fait brade plus que les prix,
01:22brade un peu votre santé.
01:23Mais vous avez pu le vérifier, les produits qui sont en promo sont les plus achetés ?
01:27Ça marche, les promos c'est efficace justement, ça incite vraiment à acheter,
01:29et donc les gens achètent vraiment des produits de mauvaise qualité ?
01:32Oui, les promos ça marche parce qu'aujourd'hui il y a quand même un vrai problème de pouvoir d'achat dans ce pays.
01:39Rappelons quand même qu'on est face à un système où un Français sur trois n'a pas les moyens
01:44d'accéder à une alimentation saine pour trois repas par jour.
01:47Donc bien sûr que ça marche et le problème c'est que plus votre budget est limité,
01:53plus c'est la double peine parce que vous n'avez finalement pas le choix dans ces supermarchés.
01:57En fait le choix c'est entre le pouvoir d'achat ou la santé, c'est ça pour le consommateur aujourd'hui ?
02:01Oui, ce qu'il faut dénoncer c'est que ces acteurs de la grande distribution,
02:04qui encore une fois prétendent être les alliés des consommateurs,
02:07en fait ils contrôlent une grande partie du marché.
02:09C'est-à-dire ?
02:10Les cinq premières anciennes contrôlent 80% du marché et rappelons que 70% des achats alimentaires en France aujourd'hui
02:17se font encore dans les supermarchés.
02:19Donc du coup il faut un peu la pluie et le beau temps en fait.
02:21C'est eux qui choisissent qu'est-ce qui est disponible dans les rayons et à quel prix.
02:25Et trop souvent on voit qu'ils orchestrent un marché à deux vitesses, comme vous le disiez.
02:29Si vous avez les moyens, vous pouvez accéder à des produits plus sains,
02:32mais si vous avez un budget limité, ce n'est pas le cas.
02:34On l'avait déjà démontré en janvier avec une enquête sur le sucre,
02:38on avait montré dans 12 catégories de produits que les produits les moins chers sont beaucoup trop souvent plus sucrés
02:43que les produits les plus chers de la même catégorie.
02:45Et bien là malheureusement, en regardant plus de 5000 produits en promotion,
02:49on démontre une nouvelle fois qu'ils flèchent, qu'ils incitent à consommer des produits
02:54qui sont contraires aux recommandations de santé publique.
02:57C'est une responsabilité majeure.
02:58Et vous, vous avez choisi comme enseigne Carrefour, Coopérative, U, Leclerc, Intermarché, Lidl.
03:02Elles font toutes la même chose, il n'y a pas de différence là.
03:04Oui c'est ça, c'est-à-dire franchement il n'y en a pas un qui sort du lot.
03:06Et même la pétition que Foodwatch et les autres associations ont lancée,
03:11en fait elle cible l'ensemble des distributeurs, pas que ces 5 là,
03:15parce qu'ils sont vraiment tous concernés et qu'il faut un peu siffler la fin de la récré.
03:19Donc ils jouent ces acteurs sur l'opacité, sur les marges et la construction du prix.
03:24Ça veut dire quoi ? Nous ce qu'on veut c'est simple, c'est une alimentation saine,
03:28de qualité, durable, qui permette en fait d'avoir des prix justes pour les agriculteurs,
03:32agricultrices et des prix abordables pour les consommateurs, les consommatrices.
03:37Il faut réconcilier cela et avec ces politiques de promotion qui en fait attirent les gens
03:43vers des produits qui ne sont pas bons pour la santé,
03:45tous ces distributeurs sont en fait la cause aussi d'un coût social et d'un coût économique phénoménal de santé publique.
03:52Vous l'avez évalué ça le coût en termes de santé publique ?
03:55Alors ça a été évalué effectivement, il y a une étude récente d'autres associations
03:59qui s'appelle l'injuste prix de l'alimentation qui est gratuit en ligne
04:03et qui évalue par exemple à 48 milliards d'euros par an les subventions et l'argent par niche fiscale
04:09qui est donné, déjà l'argent public qui est donné par l'Etat à ce système
04:13et à 19 milliards d'euros par an le coût de réparation de ce système alimentaire sur la santé et l'environnement.
04:20Mais c'est beaucoup plus, la FAO par exemple des Nations Unies estime à 120 milliards d'euros par an
04:26le coût de santé publique en France de ce système alimentaire, de cette alimentation pas équilibrée.
04:33Mais quel intérêt pour les enseignes de faire des promos sur ces produits-là justement en particulier ?
04:37Parce que ce sont les moins chers et donc les ristounes qui leur coûtent le moins ?
04:40Oui, ce marché a deux vitesses qu'on voit, on le voit aussi avec par exemple les additifs à base de nitrite
04:45ou dans la charcuterie toujours, vous savez c'est ces additifs dangereux pour la santé.
04:49Et on voit que le lobby de la charcuterie, Fleury-Michon, Madrange, Erta par exemple,
04:54ils ont un marché qui les arrange avec une niche plus chère de produits sans ces additifs
04:58mais ils ont bloqué une loi pour les interdire alors qu'ils sont dangereux pour la santé
05:03parce que ça leur permet de garder sur le marché des produits moins chers,
05:06ce jambon rose par ce conservateur nitrite.
05:10moins chers et donc ça leur permet de toucher plus de gens.
05:14Et en fait, les supermarchés, ils font vraiment des produits d'appel pour faire venir un maximum de gens
05:19et ensuite c'est sur le volume d'achat global qu'ils vont y gagner.
05:23Mais on a bien vu aussi en 2021, parce que les chiffres ne sont pas assez à jour,
05:26c'est pour ça qu'on veut de la transparence pour comprendre comment ils font.
05:30Mais en 2021, on avait vu qu'ils avaient fait des milliards de bénéfices sur les fruits et légumes.
05:33Or, les fruits et légumes, aujourd'hui, il faut que les gens en consomment davantage et ils ont du mal à y accéder.
05:38Dans votre enquête, on voit qu'ils ne sont quasiment jamais en promo.
05:40Justement, ces promos, on est d'accord que les supermarchés sont libres de choisir les promotions qu'ils veulent faire.
05:46Il n'y a rien d'illégal dans ce qu'ils font, ils ont le droit.
05:49C'est ça, en fait, les seules réglementations qu'il y a depuis les lois EGALIM de 2018,
05:53c'est sur le pourcentage de promotion sur un produit et finalement le volume.
05:58Mais il n'y a aucun critère qualitatif.
06:00C'est pour ça que la pétition, elle cible les distributeurs pour leur dire...
06:03La pétition que vous venez de lancer ce matin sur le site foodwatch.fr.
06:06Absolument, pour dire inverser la tendance.
06:07Vraiment, on exige de vous, les distributeurs, les supermarchés, d'arrêter de faire ça
06:10et mettez des promotions beaucoup plus sur les produits bio, les produits fruits et légumes,
06:14les produits sains pour la santé, légumineuses, etc.
06:17Vous pensez vraiment que les supermarchés en ont quelque chose à faire, qu'une pétition va leur faire peur ?
06:21Écoutez, la pétition derrière, c'est des citoyens, des citoyennes, c'est des consommateurs, consommatrices
06:25et les gens en ont marre, c'est ce qu'on voit tous les jours avec les associations de santé publique,
06:29de consommateurs et même environnementales.
06:32Donc je pense qu'ils ont tout intérêt, ces marques, à comprendre qu'ils ne sont pas au-dessus des lois,
06:36à comprendre qu'ils ne sont pas non plus au-dessus de leur responsabilité,
06:39que c'est un droit fondamental d'accéder à une alimentation saine et durable et qu'ils ont un rôle à jouer.
06:44Mais surtout, on ne peut pas leur faire confiance, malheureusement, c'est ce que l'enquête démontre.
06:47Donc c'est aussi à l'État d'être transparent sur les marges et de mettre des règles de qualité
06:52pour cette alimentation saine enfin.
06:54Donc plus de règles, une transparence sur les marges et cette pétition sur foodwatch.fr
06:59et j'ajoute à tout cela votre livre qui vient de paraître « Les dangers de notre alimentation ».
07:03Merci Karine Jacquemarin. Dans ce livre, vous dénoncez justement les aberrations de notre système agroalimentaire.
07:08Vous êtes la directrice générale de Foodwatch France.

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