Voilà 80 ans que les pays vainqueurs de l’Allemagne nazie commémorent la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Dès 1945, ils s’engagent dans une confrontation opposant les pays de l’Alliance atlantique et ceux du bloc soviétique ; c’est la Guerre froide.
Retrouvez « En toute subjectivité » avec Dominique Reynié sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/dominique-reynie-en-toute-subjectivite
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00:00Et en toute subjectivité avec le directeur de la Fondation pour l'innovation politique, Dominique Reynier.
00:06Dominique, vous nous parlez des commémorations de la Deuxième Guerre mondiale.
00:10Voilà 80 ans, Nicolas, que les pays vainqueurs de l'Allemagne nazie commémorent la fin de la guerre.
00:15Dès le début, en 1945, les vainqueurs s'engagent dans une confrontation mémorielle,
00:21opposant les pays de l'Alliance Atlantique, derrière les Etats-Unis, au bloc soviétique.
00:26C'est la guerre froide.
00:27Les commémorations ont lieu séparément jusqu'au début des années 1990.
00:32La chute de l'URSS permet le rapprochement des commémorations.
00:36Le 9 mai 1995, pour le 50e anniversaire de la fin de la guerre,
00:40Boris Yeltsin invite à Moscou de nombreux chefs d'Etat,
00:43dont le président des Etats-Unis, Billy Clinton,
00:45les Européens, dont François Mitterrand, ou encore le président chinois.
00:49En 2004, pour le 60e anniversaire du débarquement, cette fois-ci,
00:53c'est Poutine qui a été invité en France.
00:55Il sera présent aux côtés du président Chirac et de George W. Bush.
00:59En 2005, pour le 60e anniversaire de la fin de la guerre,
01:03c'est Poutine qui invite les mêmes chefs d'Etat à Moscou.
01:06Mais l'orientation politique du président russe interrompt la poursuite de ce rapprochement mémoriel.
01:13En 2014, pour le 70e anniversaire du débarquement,
01:16Poutine est encore invité aux côtés de François Hollande et de Barack Obama,
01:20alors même qu'il vient d'annexer la Crimée.
01:22Donc, Dominique, ces commémorations n'ont plus de rapport avec les valeurs de paix et de liberté ?
01:27C'était le risque, Nicolas.
01:29D'un autre côté, c'est parce que Poutine a bafoué les valeurs en agressant l'Ukraine
01:33qu'il ne pourra pas être invité au 80e anniversaire du débarquement en 2024.
01:39Quel sens y aurait-il à célébrer la paix aux côtés de celui qui a déclenché cinq conflits
01:44et provoqué la mort de centaines de milliers de personnes depuis qu'il est au pouvoir ?
01:48Quel sens y aurait-il à commémorer ensemble la défaite du nazisme
01:52alors que le président russe prétend engager en Ukraine une opération de dénazification ?
01:58Avoir Poutine à ses côtés pour commémorer la défaite du nazisme n'a décidément aucun sens.
02:03Mais Poutine lui-même se saisit de cette évidence pour fragiliser ces commémorations
02:07dans lesquelles il voit une dangereuse propagande en faveur de la liberté.
02:11Ce 9 mai 2025, défiant le sens de ces commémorations
02:15et l'isolement que lui vaut l'invasion de l'Ukraine,
02:18le chef du Kremlin a réuni à Moscou 29 pays dont 25 sont des dictatures.
02:24Et le défilé militaire organisé à cette occasion a mêlé aux soldats russes
02:28des troupes venues de dictatures.
02:29La Chine qui était l'invité d'honneur, le Vietnam, Myanmar, c'est la Birmanie,
02:34l'Egypte, le Laos, la Biélorussie, l'Azerbaïdjan, le Kazakhstan, le Kyrgyzstan,
02:38le Tadjikistan, le Turministan et l'Ouzbékistan étaient présents.
02:42L'Iran et la Corée du Nord, absents de ces cérémonies,
02:45n'en fournissent pas moins armes et soldats pour aider la Russie à écraser les Ukrainiens.
02:50Il est évident que commémorer la défaite du nazisme,
02:53c'est exprimer le refus des régimes tyranniques.
02:55C'est une promesse pour le monde, c'est une promesse pour les Russes.
02:58Poutine ne peut y voir qu'une menace pour lui-même.