Changer de vie : de journaliste à agricultrice

Brut

Florence a quitté son métier de journaliste dans un magazine féminin pour devenir agricultrice. Elle raconte ce qui l'a poussée à faire ce choix inattendu.   Premier épisode de "Changer de vie", la nouvelle série Brut.

Transcript

00:00J'avais lu un article qui disait que les premières personnes qui avaient testé le métro, c'était à Londres.

00:04Et il s'était dit que même les rats ne supporteraient pas de vivre un truc pareil.

00:08C'était des journalistes à Londres.

00:10Et moi, ça là, je trouve ça horrible.

00:14En fait, c'est un quotidien atroce.

00:17Avec la fleur qui est rose comme ça, je trouve ça magnifique.

00:21Quand j'ai découvert ça, je ne connaissais pas.

00:30Tu m'as prise un peu pour une touriste quand je suis arrivée.

00:41Non, pas du tout.

00:42Merde, pardon.

00:43C'est la fleur, ça.

00:44Excuse-moi.

00:45Je t'ai fait une bêtise.

00:51C'est une élève un petit peu tête en l'air, mais après autrement.

01:01C'est une très bonne élève.

01:05Elle est surtout du milieu d'où elle vient, citadine.

01:11C'est-à-dire que tu n'es pas sensibilisé dès tout jeune à la nature.

01:15Je trouve qu'elle a l'oreille très attentive.

01:18Je ne suis pas du tout d'un milieu agricole.

01:20Pas du tout du tout, mais je suis totalement hors sol.

01:23Je suis du Pays Basque, mais j'habite à Paris depuis que j'ai deux ans.

01:27Et en fait, c'est très drôle.

01:28C'est bizarre, la vie, parce que j'ai genre quelques tout petits souvenirs

01:31d'avoir été dans la nature, comme ça, plongée à fond en classe verte

01:35ou avec ma grande tante qui me faisait faire des herbiers.

01:38Et je ne sais pas pourquoi, mais ça m'a toujours marquée infiniment.

01:41Je me suis toujours dit que c'était ces moments tellement rares

01:44où je m'étais sentie le plus heureuse et que du coup,

01:46à un moment, on a 40 ans passé, on se dit qu'on a autre chose à faire

01:49que suivre un peu les injonctions sociétales qui nous obligent à cocher plein de cases

01:54et que moi, j'ai plus envie de retrouver...

01:58Enfin, j'ai l'âge maintenant de courir vers mes rêves d'enfant.

02:01Parce qu'ici, t'es obligé de tout regarder.

02:04Mais oui, mais parce que c'est ça qui manque, tu vois, c'est de regarder,

02:07d'apprendre en fait, tu vois, de pas être dans une espèce de truc un peu bateau.

02:11Et du coup, qu'est-ce qu'ils ont dit, vos collègues, ici ?

02:13Mes collègues, au début, je leur en ai pas parlé parce que j'avais peur

02:16qu'ils m'empêchent de partir.

02:17Et puis après, ils ont dit que ça faisait très très longtemps

02:21qu'ils avaient cette aspiration.

02:23Et ils se sont dit que finalement, ça me ressemblait.

02:25Mais ils sont encore à se moquer de moi, quand même.

02:27Ils charrient pas mal, mais c'est sympa, c'est bien.

02:31Elles sont ramassées directement sur le pied, les tomates empanées.

02:35Et directement, à 9h, à l'ouverture du magasin,

02:38les gens arrivent et viennent chercher comme ça leur petit panier de légumes frais.

02:42Et tu vois comme c'est doré ? On voit que c'est doré.

02:45Pourquoi c'est doré ?

02:47C'est la plante qui est comme ça.

02:48En fait, c'est des petits poils absorbants, on appelle ça.

02:50C'est ce qui sert à absorber l'humidité.

02:52Ça fait comme de l'or. Après, sur les bras, t'es tout doré.

02:54En fait, je me suis retrouvée au lycée agricole du Robillard,

02:57qui est le seul où on peut faire ça par correspondance.

03:00Et on a 2 mois de stage obligatoire.

03:04Et moi, j'ai fait à peu près 6 stages,

03:06donc dans les Alpes, en Normandie, en maraîchage.

03:09Et j'avais des cours.

03:11Je savais même pas que c'était si compliqué.

03:13En fait, c'est extrêmement compliqué d'être agriculteur.

03:16Donc, t'as des cours de droit,

03:19des cours de droit rural,

03:22des cours de comptabilité.

03:23J'ai des cours de fertilisation des sols

03:25où on apprend que ça, par exemple, c'est un sol très, très sableux.

03:28Alors, comment est-ce que tu fais pour qu'il y ait les oligo-éléments

03:31qui puissent s'accrocher ?

03:32Tu vois, là, par exemple, on est en train de couper les gourmands.

03:34Et c'est vrai qu'un gourmand,

03:36on peut l'apprendre à l'école,

03:40mais c'est que quand vraiment on le voit en vrai,

03:42qu'on arrive à trouver le gourmand.

03:43On comprend ce que c'est, oui.

03:44Là, par exemple, là, c'est ce que c'est.

03:46Oui, là, c'est très bien.

03:47C'est très, très bien.

03:48Et je pense que c'est là aussi

03:49où tu auras beaucoup de mal un petit peu

03:51et où ta formation est indispensable à faire des stages.

03:55C'est qu'en faisant une école pédagogique,

03:57tu vas être obligé d'expliquer les choses en montrant.

04:00Oui, t'as raison.

04:01Mais c'est ça que je veux faire

04:02parce qu'on comprend mieux avec les mains.

04:03En fait, on n'utilise plus nos mains.

04:06Il paraît que scientifiquement, c'est prouvé.

04:09Ça nous rend même un peu idiots.

04:10On n'utilise plus nos mains

04:11que pour taper comme ça sur des touches.

04:12Alors que là, t'apprends à regarder,

04:14t'apprends à t'étonner, t'apprends à azut

04:16parce que c'est tellement fragile.

04:17Là, j'ai coupé une petite fleur.

04:19Mais c'est que t'es obligé de faire hyper attention

04:22et de t'interroger avec tes doigts.

04:24Ça, je trouve ça passionnant.

04:25Ton impact, tu le sens tout de suite en fait.

04:28Alors que nous, justement, c'est ça le burn out.

04:30C'est plus sentir les conséquences de nos actes.

04:34Et en fait, ici, tu reviens tout de suite.

04:36Toi, ce que je trouve génial, c'est que tu t'es lancé tout seul.

04:38Tu te dis, là, je vais mettre des fraises.

04:41Et en fait, c'est comme si c'était un retour à l'humanité vraie.

04:45C'est-à-dire, tu crées ton propre monde.

04:55Ce qui est dur, en revanche,

04:56et c'est pour ça que je suis au milieu du gai,

04:58c'est que ça coûte très, très, très cher de monter une ferme.

05:02Moi, je vais monter une ferme pédagogique.

05:04Là, par exemple, Thomas, mon directeur de stage,

05:06il me raconte que pour sa prochaine soeur,

05:08ça va lui coûter 120 000 euros.

05:09Pour 3000 mètres carrés.

05:11Donc, il faut les trouver.

05:13Et ensuite, il y a le côté,

05:15là, on est sous la serre, ça ne se voit pas à l'image,

05:17mais il fait 850 degrés.

05:19C'est un métier très difficile.

05:21Moi, j'ai le dos complètement coincé.

05:24Et donc, je ne vais pas y arriver toute seule.

05:26Je sais qu'il faut que je m'associe avec quelqu'un.

05:28Donc, en fait, c'est du pas à pas.

05:30C'est-à-dire que je me suis dit,

05:32voilà mon projet, maintenant,

05:33il faut que j'arrive à faire en sorte qu'il soit viable.

05:35D'où la compta,

05:37d'où je me suis inscrite en même temps

05:39à des cours de business plan, etc.

05:40Pour arriver à faire quelque chose qui est viable.

05:42Je ne pars pas, comme dans les années 70,

05:44élever trois chèvres dans l'arzac.

05:46Et j'ai énormément de respect pour ça.

05:48Mais je pense qu'on ne peut plus faire les choses comme ça.

05:50Tu prends.

05:52Hop !

05:53Et puis, tu la manges direct.

05:55C'est quand même génial.

05:57C'est ça, le plus chouette.

05:59Non ?

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