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Le main character - La chronique de Manon Mariani
France Inter
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05/12/2023
Ou personnage principal d'une fiction. Mais avec les réseaux, la définition évolue.
Retrouvez la chronique "Veille Sanitaire" de Manon Mariani sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/veille-sanitaire
Catégorie
😹
Amusant
Transcription
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Dans quelques instants, Rosa Bernstein viendra se frotter au sujet a priori assez épineux
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pour l'humour de l'agro-climatologie, mais d'abord je me tourne vers cette authentique
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amoureuse de la nature, fine connaisseuse du monde rural et de ses problématiques,
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puisqu'une fois à 12 ans, elle a visité la mini-ferme du jardin d'acclimatisation.
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Cette jeune femme qui a découvert seulement hier à 32 ans que le crédit agricole avait
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des antennes en ville, y compris à Paris.
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Manon, il est temps, heureusement pour vous, qu'on quitte les champs et l'agriculture
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pour revenir à un domaine que vous connaissez un chouïa mieux, les réseaux sociaux.
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Oui, et aujourd'hui je me suis penchée sur une appellation, le « main character »,
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le « personnage principal » en français.
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Alors c'est pas nouveau, on l'emploie en général dans les films ou dans les séries
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pour définir le « héros Harry Potter » et par exemple le « main character » de
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sa franchise ou « Dexter » de la série du même nom.
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Mais avec les réseaux, sa définition a évolué.
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« Main character » est devenu une expression pour se définir soi-même comme le personnage
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principal de sa vie, comme une forme d'autre nous-mêmes qui prendrait le contrôle de
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nos vies et qui pourrait réaliser nos rêves.
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Je m'explique.
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Sur TikTok, il y a des millions de vidéos avec le hashtag « main character ». On voit
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des jeunes se mettre en scène dans des moments où ils se sentent bien et confiants.
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Ça peut aller d'une femme qui se fait filmer en marchant avec style dans la rue, un homme
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qui va danser en boîte de nuit ou encore une femme en train de lire un livre à la
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bibliothèque.
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Chacun a son énergie de « main character ». L'expression est apparue sur le réseau
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pour la première fois il y a trois ans par l'influenceuse Ashley Ward.
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Elle l'a utilisée dans une vidéo où on la voit sur une plage avec ses amis.
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Et elle dit ça.
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« You have to start romanticizing your life.
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You have to start thinking of yourself as the main character. »
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Vous devez commencer à romantiser votre vie.
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Vous devez vous penser comme le personnage principal.
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Ça fait très série télé pour ados, et c'est d'ailleurs un peu l'idée.
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Mais une caractère est aujourd'hui utilisée comme un mantra qui évoque une puissance
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et une énergie charismatique qu'on dégage quand on se sent en confiance.
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Pour une fois, c'est plutôt sympa comme tendance Manon.
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Oui, ses contenus dégagent un sentiment d'empowerment et montrent une manière de sublimer son quotidien.
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Le vidéaste cherche à montrer qu'un petit moment de vie qui a l'air banal comme ça
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peut aussi compter.
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Télérama a interviewé un chercheur au CNRS qui compare même cette tendance à de la
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littérature.
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Pour lui, c'est un procédé stylistique qui rend intéressant ce qui ne l'est pas
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et qui décrit les choses de manière fine et subtile pour en révéler la complexité.
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Alors, la plupart de ses contenus ne sont pas si complexes que ça, faut pas abuser.
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Mais il y en a aussi qui utilisent ce hashtag pour faire des vidéos plus réalistes.
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Par exemple, une femme va se filmer en train de changer les couches de son enfant, lui
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donner à manger, de le bercer, tout en décrivant ses actions comme celles d'un personnage
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principal.
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C'est une forme de développement personnel en fait ?
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Un peu.
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Alors personnellement, je suis quand même un peu mitigée car d'un côté, j'aime
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bien cette énergie qui émane de ces vidéos, il y a quelque chose de poétique et d'assez
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inspirant mais de l'autre côté, ça montre encore et toujours la perpétuelle mise en
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scène de la vie de la Gen Z et ça commence un peu à être fatigant.
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Car comme je le disais en début de chronique, il ne faut pas oublier que cette expression
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du main character vient des séries et des films.
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Il y a donc tout un aspect scénaristique, voire dramatique qui est mis en place dans
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ces contenus et ils vont même plus loin car ils ont des expressions tirées de cet univers
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pour décrire chaque aspect de leur vie.
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Comme quoi ?
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Il y a par exemple celle du "feeler episode", dans les séries c'est un épisode à part
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qui ne sert pas du tout l'intrigue principale et sur TikTok, ça sert à décrire un moment
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de vie lambda qui n'a pas grand intérêt.
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Par exemple, certains films en train de faire la sieste ou de ranger leur appart et disent
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qu'ils sont en plein "feeler episode".
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Et puis il y a le "crossover episode", dans les productions c'est quand deux séries
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font un épisode ensemble.
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Et bien sur TikTok, c'est quand deux tiktokers de comptes différents font une vidéo ensemble.
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Et puis certains vont même encore plus loin en s'adressant aux scénaristes de leur vie.
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Exemple, une tiktokeuse dit "à ceux qui écrivent ma vie, j'aime le fait que je
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sois une meuf qui n'a besoin de personne, mais pour la prochaine saison, rajoutez-moi
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un love interest, merci".
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Alors dit comme ça, ça fait un peu bipolaire, on est d'accord ? En fait, la Gen Z est
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en train de créer sa propre série télé sur TikTok, la série télé de sa vie.
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A force de tout filmer, elle a forcément du contenu.
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C'est aussi une manière de s'inventer un peu une vie, ou du moins d'en montrer
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une façon idéalisée, ce qu'on fait déjà depuis des années sur les réseaux.
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Ces jeunes deviennent la source de leurs propres divertissements, mais il ne faut pas qu'ils
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en oublient la réalité.
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Celle qui les rattrape une fois que les réseaux sont fermés, celle où être un personnage
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principal semble plus terne et moins euphorisant.
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Car la vie, ce n'est pas Netflix.
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Merci Manon et moi qui pensais que lorsque Cyril faisait la sieste après le déjeuner,
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il pionçait juste bêtement alors qu'il était en plein "feeler épisode".
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C'est tout ce qu'on apprend dans cette émission.
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