Elisabeth Lévy - "Liens entre le RN et la Russie : c'est un procès politique !"

Sud Radio

06/06/2023

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##LEVY_SANS_INTERDIT-2023-06-06##

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00:00 - Lévy sans interdit, bonjour Elisabeth Lévy.

00:03 - Bonjour Benjamin, bonjour à tous.

00:05 - Et ce matin vous revenez sur le rapport parlementaire qui dénonce des liens entre la Russie et le Rassemblement National.

00:12 - Oui alors le pré-rapport, le rapport devrait sortir cette semaine.

00:16 Donc tout ça par d'accusations donc récurrentes, vous les connaissez, contre le RN de collusion avec la Russie.

00:22 Alors par exemple, il y avait eu ces propos d'un ancien diplomate qui disait

00:26 "Quand j'étais ambassadeur de France en Russie, personne n'ignorait qu'un certain nombre d'hommes et de femmes politiques français d'un certain bord

00:34 venaient et ne repartaient pas les mains vides."

00:36 Bon bah diplomate ou pas pardon mais on en est un peu au stade de la rumeur.

00:40 Des noms, des faits, des insinuations, on accuse et on n'a pas à répondre de ces accusations.

00:45 Pour couper court, le RN a donc demandé la création de cette commission sur les ingérences russes dans les partis français

00:52 qui a d'ailleurs auditionné Marine Le Pen et la semaine dernière donc le pré-rapport a fui été dans Mediapart.

00:58 Il est rédigé par la députée Renaissance Constance Le Grip et il fait du RN la principale courroie de transmission efficace

01:06 ou une courroie de transmission efficace pardon, de la propagande russe.

01:11 "Cet alignement total", écrit Madame Le Grip, "laisse songeurs."

01:15 Et bien les songes de Madame Le Grip sont devenus des vérités incontestables.

01:20 Tous les médias ont ironisé sur l'arroseur arrosé et curieusement personne n'a fait crédit au RN d'avoir réellement demandé

01:27 cette commission d'enquête qu'il ne pouvait pas non plus contrôler.

01:31 Non non, tout le monde ricane et évidemment le garde des Sceaux qui lui dit "Quelles questions poseriez-vous à Marine Le Pen ?

01:39 Et que disait-il ? Vous préférez Pétain ou Poutine ?"

01:42 Bien sûr il s'offre un succès de traiteau facile sur le plateau de "Quelle époque, quelle audace !"

01:48 - Bon pour revenir à ce rapport, il y a quand même des éléments, Elisabeth ?

01:52 - Alors, je répète qu'il s'agit du pré-rapport et il y a beaucoup d'éléments, oui, sur la stratégie d'influence russe en France,

02:00 qui est un peu multiforme, mais la méthode qui a présidé, disons, à ce rapport et qui le conduit à accuser le RN

02:09 est intellectuellement tout à fait contestable.

02:12 Alors par exemple, on part de généralité pour étayer des accusations ciblées.

02:16 Ainsi le rapport parle, je crois que c'était des fonctionnaires de la DGSI qui avaient été auditionnés,

02:21 et il parle de la capture par les Russes de, je cite, "certaines élites",

02:26 capture qui serait favorisée par la naïveté et la connivence, je cite encore, d'élus et de fonctionnaires français.

02:34 Ben écoutez, oui, c'est tout à fait passionnant et même inquiétant,

02:39 mais quels élus, quels fonctionnaires, quels faits, quels actes en contrepartie ?

02:44 Il y a aussi un raisonnement tordu pour accuser le RN dans l'affaire du prêt.

02:49 C'est le grand nœud de ces accusations. Ce prêt a été accordé en 2014.

02:54 Alors d'abord, rappelons que si Marine Le Pen a dû aller chercher de l'argent en Russie,

02:59 c'est qu'aucune banque ne lui prêtait, ce qui est démocratiquement scandaleux.

03:03 Mais ce n'est pas le sujet.

03:05 Donc au même moment où ils ont ce prêt, le RN soutient l'annexion de la Crimée,

03:11 d'ailleurs beaucoup de monde, et tout le monde en réalité, la communauté internationale, regarde largement ailleurs.

03:17 Et la conclusion que fait le rapport, c'est que le prêt, pardon, le soutien sur la Crimée est la contrepartie du prêt.

03:25 C'est une confusion entre une coïncidence et une corrélation,

03:29 et ça permet d'accuser n'importe qui de n'importe quoi, parce qu'en réalité il n'y a pas de preuve de corruption.

03:35 Et je finis en disant que le plus grave, ce qui est peut-être le plus grave, c'est pour la liberté d'opinion, c'est un procès politique.

03:42 Oui, il y a un tropisme russe du RN qui est réel, qui se revendique de la géopolitique gaullienne.

03:49 C'est une position tout à fait contestable, mais elle n'est pas interdite.

03:53 Et la question c'est de savoir si on a le droit de défendre aujourd'hui des idées, des opinions dissidentes par rapport à l'opinion majoritaire.

04:00 Parce que beaucoup d'élus ont des relations avec des pays plus ou moins amis comme la Chine,

04:05 et le risque d'instrumentalisation, bien sûr, il existe Benjamin, il existe toujours.

04:10 Et même, s'agissant de Poutine, il est même particulièrement préoccupant.

04:14 On a donc le droit, les électeurs ont le droit, de demander des comptes et des explications au RN sur ses liens avec la Russie.

04:21 Et d'ailleurs, la question russe devrait être l'objet d'un beau et grand débat où toutes les opinions,

04:27 les plus scandaleuses, pourraient se faire entendre et pourrait être combattues.

04:31 Mais on ne peut pas se défendre dans un procès de Moscou.

04:35 Merci beaucoup Elisabeth Lévy.