Pep Guardiola est-il le meilleur entraîneur de l’histoire du football ? C’était l’un des débats de l’After foot ce mardi soir. Et Daniel Riolo n’a pas mâché ses mots pour qualifier les personnes qui « n’aiment pas » le manager de Manchester City.
00:00 En ce moment il marche sur l'eau on va dire.
00:02 Oui c'est ça, je me répète, juste avant que Daniel ne me répète, mais en tout cas de la façon dont moi je le vois,
00:08 pour juger un entraîneur ou ce genre de débat là, il y a trois critères qui sont sûrement les plus importants.
00:14 Un c'est les résultats bien sûr, les trophées, ce que tu gagnes etc.
00:17 Deux c'est le style de football que ton équipe pratique, voire les styles de football dont ton équipe pratique.
00:24 Et le troisième c'est la progression individuelle de tes joueurs, peu importe d'où ils viennent,
00:28 si c'est déjà des grandes stars, si c'est des jeunes joueurs, si c'est des joueurs à 50 millions, à 100 millions,
00:32 voir si tu les fais progresser ou pas.
00:34 Moi je pense que ces trois points on devrait prendre le temps d'en discuter Julien parce que je les trouve très intéressants.
00:40 Et en introduction, ce que je voulais dire c'est que pour moi à la limite le débat c'est le plus grand, c'est pas le plus grand,
00:48 ça m'intéresse pas trop, à toutes les époques il y en a eu des très importants, à chaque fois on cite les mêmes,
00:53 que ce soit Sakir, Inus Mikkels, Cruyff, il y a différentes tendances, c'est pas tant ça moi qui m'importe,
01:02 de toute façon Guardiola avant même d'aller à City, ce qu'il avait fait au Barça, en gros prendre cette équipe là,
01:08 faire des choix forts en enlevant certains mecs qui étaient importants dans le vestiaire, lancer des jeunes dont Messi,
01:14 parce que finalement Messi c'est avec Guardiola qu'il est né finalement, qu'il a progressé, qu'il a atteint les sommets.
01:21 - Les vraies cartes qu'il lance. - Oui, mais c'est dans l'équipe de Guardiola qu'il s'épanouit et qu'il en fait un titulaire,
01:28 parce qu'en enlevant d'autres joueurs de l'équipe pour lui laisser la place de s'épanouir complètement.
01:33 Ce qu'il avait fait à ce moment là et ce qu'il a fait dans son passage au Barça déjà faisait que cette équipe s'inscrivait dans l'histoire,
01:41 au même titre que l'Ajax des 70's, le Milan des années 80, donc voilà c'était ça.
01:48 Moi ce qui m'a toujours étonné ces derniers temps, c'était certains observateurs et même supporters de foot qui nous appelaient.
01:57 On avait l'impression, et on a toujours l'impression, qu'il y a certaines personnes qui attendent et qui kiffent que Guardiola se plante,
02:05 comme si on reprochait au génie, en fait comme si on n'aimait pas les premiers de la classe,
02:10 c'est un petit peu ce phénomène qu'on a toujours observé dans notre vie, on n'aime pas les gens doués.
02:15 On n'aime pas les gens plus forts au-dessus, qui sont même parfois un peu prétentieux dans ce qu'ils ont envie de mettre en place,
02:21 dans leur ambition, et Guardiola est prétentieux, il a de l'ambition dans ce qu'il veut mettre en place,
02:28 parce que c'est un jeu extrêmement ambitieux, c'est un jeu qui veut dominer, et il y a toujours des gens qui veulent que Guardiola se plante.
02:34 - C'est parce qu'il y a un élément que tu n'as pas cité Julien, il y a un quatrième critère je crois, qui est l'exemplarité.
02:40 C'est-à-dire, et ce n'est pas l'exemplarité au sens "il est gentil, il est formidable", c'est l'exemplarité au sens où il a ressuscité un football,
02:49 où il est devenu une référence, tant pour limiter, beaucoup ont essayé de limiter, et en même temps comme référence,
02:57 c'est-à-dire qu'il a créé lui-même un critère de jugement supplémentaire, c'est un des critères pour évaluer.
03:03 C'est-à-dire que c'est devenu une référence pour s'y opposer.
03:06 - Guardiola a transformé Mourinho.
03:08 - Tu le mesures à l'influence qu'il a, notamment dans les centres de formation, et chez les nouveaux entraîneurs.
03:15 Il est la référence absolue de tous les grands entraîneurs, tous les directeurs de centres de formation.
03:20 Pourquoi ? Parce que son City, c'est un peu comme Federer au tennis.
03:23 C'est le football tel qu'il devrait être joué.
03:26 Quand tu dois montrer une sortie de balle, tu montres une sortie de balle de City.
03:29 Quand tu montres un latéral qui vient vers l'intérieur du jeu, tu montres Cancelo.
03:33 Il est une forme de réalisation d'une idée complètement utopique d'un football hyper collectif, etc.
03:41 Et qui fait que ça en devient une référence, et ce qui le rend aussi très agaçant pour beaucoup.
03:46 Parce qu'effectivement, quand tu deviens une référence, t'as forcément certains, et c'est le jeu.
03:50 - Oui, mais moi je veux m'arrêter là-dessus, et je veux une explication.
03:54 Je veux que vous m'aidiez à trouver cette explication.
03:56 - T'appelles le ressentiment.
03:57 - Qui fait qu'il peut provoquer chez certains une forme de haine.
04:01 Je les connais, les consultants, on travaille avec eux.
04:03 Il y en a beaucoup, j'ai toujours entendu.
04:05 Mais j'ai l'impression que c'était un kiff de voir Guardiola perdre.
04:09 - Perdre de jalousie ?
04:11 - Trop intellectuel, parce qu'il tente trop de choses.
04:16 Quand il perd en Ligue des Champions, qu'il n'y arrive pas avec City.
04:19 Toujours d'ailleurs, au terme de matchs rock'n'rollesques, où lui ne se remet pas en question.
04:23 Il applique ses principes, et les autres répliquent.
04:27 Lui applique les autres répliques.
04:29 Quand il perd contre Tottenham, après un match absolument délirant,
04:33 les gens sont contents.
04:35 Beaucoup de gens sont contents.
04:37 Quand il perd contre le Real l'année dernière, c'est l'expérience du Real,
04:41 le mental de machin, le ceci, cela et tout.
04:44 Et on ne veut pas lui reconnaître que de la deuxième minute du match allé
04:49 à la 90ème du match retour, City mange le Real.
04:52 "Ouais, mais l'efficacité, c'est mieux que le beau jeu, c'est mieux que ceci, cela."
04:56 Alors que le beau jeu gagne tout le temps.
04:58 Seville est en finale.
05:00 D'ailleurs, on va se refaire un nouvel épisode de ça avec Seville-Romain,
05:04 puisque Mourinho va opposer le béton à ce que Seville va essayer de faire.
05:08 Et si Mourinho gagne, ça va être le génie Mourinho,
05:11 parce que c'est comme ça qu'il faut jouer au foot.
05:13 - On peut peut-être avoir les deux qui gagnent plus d'Europe.
05:15 - Évidemment.
05:16 - Il a apporté un truc.
05:18 Il faut se souvenir comment était le football en 2008, avant qu'il arrive.
05:21 C'est la finale en France-Italie 2006, où ça bétonne des deux côtés.
05:24 On est dans un jeu de transition, il ne se passe pas grand-chose.
05:28 Et arrive avec Guardiola toute une école de pensée qui avait un peu disparu,
05:32 ce qu'on a appelé ensuite le jeu de position,
05:35 qui ensuite a été repris par les Allemands, repris par énormément de gens.
05:39 C'est-à-dire, qu'est-ce que c'est que le jeu de position,
05:41 la différence entre le jeu de position et le jeu de transition ?
05:43 Le jeu de position, c'est que tu organises ton équipe à partir du ballon.
05:45 Le jeu de transition, tu organises ton équipe à partir de l'espace.
05:48 Et donc, ça veut dire que tout ton jeu est organisé à partir de la possession du ballon,
05:52 et donc, par un jeu collectif, tu te mets proche les uns des autres
05:55 et tu organises ton jeu, et tu fais action de jeu sans avoir le ballon.
05:58 Et ça, c'était quelque chose qu'on ne faisait plus du tout,
06:00 et que Kreuth faisait de manière intuitive, et que lui a complètement systématisé.
06:04 Et ça, c'est devenu une philosophie de jeu,
06:09 qui a inspiré dans le football allemand, regardez, la révolution du football allemand,
06:12 la révolution du football italien, la révolution du football espagnol,
06:15 regardez l'influence que... Et c'est pourquoi je dis que c'est, à mon avis, le plus important,
06:19 pas parce que qualitativement, il est effectivement au niveau des Michels,
06:23 au niveau des Ferguson, au niveau des titres, mais il est à la fois,
06:26 ce que sont pas les autres, parce que t'as d'un côté des entraîneurs à titre,
06:29 et de l'autre côté, les entraîneurs à idées.
06:31 Et souvent, tu dois un peu choisir, Saki, c'est plutôt idées.
06:33 Il a gagné quelques titres, Ferguson, c'est quand même beaucoup plus titre.
06:37 Et sans aucun mépris, simplement, lui, il est les deux à la fois.
06:43 C'est-à-dire qu'il est à la fois, c'est le troisième entraîneur le plus titré de l'histoire,
06:46 pour l'instant, il est à la fois un entraîneur à titre et un entraîneur à idées.
06:50 Et ça, c'est la seule fois dans l'histoire du foot où on a un titre.
06:53 - Qu'est-ce qui provoque, chez certains, ce rejet ?
06:55 Un ressentiment, une jalousie ? - Je pense que c'est une ignorance.
06:58 - Un discours ? - C'est une ignorance.
06:59 - Comment encore aujourd'hui, c'est une question que je vois,
07:02 comment aujourd'hui, quelqu'un qui aime le foot peut préférer Mourinho à Guardiola ?
07:08 - Au nom de quoi ? Je sais pas si Julien va pouvoir répondre, là.
07:11 - Je sais pas, mais... - Pour moi, c'est inab...
07:14 Si on me dit "il n'y a pas qu'une seule façon de jouer le foot et tout",
07:17 ok, j'entends ce discours, mais préférer, si t'aimes le foot, le ballon,
07:21 la façon dont bougent des joueurs sur un terrain, dont bouge le ballon sur un terrain,
07:26 l'esthétisme du jeu et du sport, comment tu peux préférer Mourinho à Guardiola ?
07:32 Ça, je ne comprends pas.
07:34 Comment tu peux espérer, quand t'es neutre, quand tu regardes un match,
07:37 comment tu peux espérer que Guardiola se plante pour pouvoir dire
07:40 "ouais, mais sa méthode, machin..."
07:42 - Mais je pense que l'un n'empêche pas l'autre.
07:44 - Ça, je ne comprends pas. Pour moi, ceux qui n'aiment pas Guardiola, ce sont des médiocres.
07:49 Je le pense sincèrement, pour moi, ce sont des gens médiocres.
07:52 C'est les mêmes qui n'aiment pas les premiers de la classe,
07:54 qui préfèrent les mecs au fond de la classe qui font des conneries
07:57 et qui trouvent que c'est génial. - Il y a beaucoup d'ignorance, en fait.