La chronique du Dr Milhau du 12/04/2023

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Les conseils de notre docteur Brigitte Milhau sur les sujets santé qui vous concernent dans #BonjourDrMilhau

Transcript

00:00 - Docteur Millot, on en a parlé ce matin, une étude nationale tire la sonnette d'alarme,

00:04 comme on dit, sur le temps quotidien passé devant les écrans par les enfants.

00:09 Vous nous expliquez pourquoi chez les tout-petits, c'est zéro écran jusqu'à deux ans,

00:13 mais pour commencer... - Même jusqu'à trois ans.

00:16 - Même jusqu'à trois ans, et pour commencer, un rappel sur cette étude.

00:19 - Oui, vous en avez parlé effectivement ce matin.

00:21 Regardez les chiffres, c'est assez impressionnant.

00:23 N'oubliez pas que les chiffres, ce sont des moyennes.

00:26 Donc si c'est en moyenne, ça veut dire qu'il y en a la majeure partie qui passe plus de deux heures devant les écrans.

00:32 Alors c'est vrai que quand ils sont devant les écrans, ils sont sages.

00:36 Et pourquoi ils sont sages ?

00:38 C'est parce qu'en fait, ils sont comme médusés, comme hypnotisés par les écrans.

00:43 On va voir ce qui se passe.

00:45 Ce qui est important, c'est de voir ce qui se passe dans le cerveau de zéro à trois ans.

00:49 Pourquoi Boris Cyrulnik, quand même neuropsychiatre réputé,

00:52 dit que c'est zéro écran de zéro à trois ans ?

00:56 On va voir justement ce qui se passe dans le cerveau,

00:58 ou plutôt, on pourrait dire ce qui ne se passe pas en tout cas quand il regarde les écrans.

01:01 Donc à la naissance, le cerveau commence à se fabriquer déjà dans la vie intra-utérine,

01:05 vers six à huit semaines.

01:07 À la naissance, on a déjà 100 milliards de neurones.

01:11 Ce n'est pas rien.

01:13 Mais c'est un petit peu, je ne suis pas très douée, mais ça ne fait rien.

01:17 Comme si vous preniez des câbles électriques, vous voyez,

01:20 vous êtes en train de construire un grand truc,

01:22 vous avez des câbles électriques, c'est bien, mais ils ne sont pas reliés entre eux.

01:26 C'est-à-dire qu'on a toute l'installation, si vous voulez,

01:28 mais en fait, ce qui est important, c'est de créer des circuits,

01:32 c'est que les neurones communiquent entre eux.

01:34 C'est ça l'important, c'est de créer ce qu'on appelle des synapses.

01:37 C'est le moyen de communiquer l'influx nerveux d'un câble, si vous voulez, à un autre.

01:42 Et ça, c'est pendant la petite enfance, de zéro à trois ans,

01:46 qu'on peut créer des connexions.

01:48 On peut en créer des millions chaque seconde.

01:51 C'est là que tout se passe.

01:53 Et pourtant, les gens, comme il y a cette espèce d'amnésie infantile,

01:56 c'est vrai qu'on n'a pas de souvenirs de zéro à trois ans,

01:58 donc on a tendance à se dire que finalement, il ne se passe pas grand-chose.

02:01 Non, c'est là où tout, tout, tout se passe.

02:04 Mais pour que tout se passe, pour que ces réseaux se créent,

02:07 il faut du toucher, du contact, du mouvement, de l'émotion, de l'interaction.

02:13 Sinon, il ne se crée rien.

02:15 Donc on est en train de faire des enfants qui ne s'éclaireront jamais,

02:19 si vous voulez, puisqu'il n'y aura pas ces réseaux,

02:22 ces connexions qui vont se créer, vous voyez ?

02:24 Ce qui est perdu entre zéro et trois ans, ça se rattrape après ?

02:27 Alors, il y a une femme qui travaille beaucoup là-dessus,

02:31 qui dit qu'il faut vraiment...

02:33 Si on arrête, on pourrait récupérer, mais il faut arrêter tout de suite,

02:36 parce que d'imaginer de zéro à trois ans,

02:38 on a l'impression qu'il ne se passe rien.

02:40 Mais quand je vous dis que c'est là que tout se passe,

02:42 non seulement tout se passe de zéro à trois ans,

02:45 mais en plus, ça va rester toute la vie.

02:48 C'est-à-dire que même si par hasard, vous souffrez un jour d'une maladie d'Alzheimer,

02:52 la mémoire, la mémoire sémantique,

02:54 celle qui s'est fabriquée de ces zéro à trois ans, elle reste.

02:57 C'est là où vous apprenez à marcher, c'est là où vous apprenez à parler.

03:01 Je vous signale quand même que de zéro à trois ans,

03:04 on peut apprendre deux, trois, quatre langues.

03:06 Donc on a des connexions comme ça qui se créent,

03:09 et c'est à ce moment-là qu'il faut le faire.

03:10 Après, c'est un peu plus compliqué.

03:12 À mon âge, c'est beaucoup plus compliqué.

03:14 Donc c'est très important d'être dans l'interaction pendant ces moments-là.

03:21 Il faut redonner ces lettres de noblesse au jeu.

03:24 C'est pendant le jeu que tout se passe.

03:26 Le jeu, c'est tout.

03:27 C'est se cacher, c'est faire semblant.

03:29 C'est là qu'ils vont comprendre qu'un rond, ça ne rentre pas dans un carré.

03:33 Et donc quand ils voient ça, ça va développer leur raisonnement, leur analyse, etc.

03:37 Vous voyez, c'est là le toucher aussi, les odeurs aussi.

03:40 Un écran, ça ne sourit pas.

03:42 Un écran, ça ne fait pas les gros yeux.

03:44 Donc après, vous n'avez pas d'empathie.

03:47 Vous avez un trouble de la relation à l'autre,

03:49 qui va d'ailleurs souvent se retourner contre soi-même,

03:52 avec de la violence contre soi-même, ou de la violence contre les autres.

03:56 Vous voyez, je vous ai mis les principales répercussions sur la santé.

04:01 On va avoir des troubles du comportement.

04:04 On a des troubles du sommeil, des troubles de l'attention, des troubles de l'humeur.

04:08 Ce sont des enfants qui sont incapables de se concentrer

04:11 quand il reste une surexposition aux écrans.

04:14 Des troubles du langage, l'absence de mots, la perte de mots.

04:18 C'est à cet âge-là qu'il faut leur parler tout le temps, tout le temps, tout le temps.

04:22 Et aussi, évidemment, un surpoids.

04:25 Donc je crois qu'il faut vraiment arrêter de...

04:27 - Surpoids parce qu'on ne bouge pas.

04:29 - Pardon ?

04:30 - Surpoids parce qu'on ne bouge pas.

04:31 C'est pourtant le fait.

04:32 - Parce qu'on ne bouge pas et parce qu'on mange de manière...

04:34 - Oui, on ne bouge pas normalement.

04:35 - Devant un écran, comme ça, sans penser, sans rien.

04:37 - Oui.

04:38 - Enfin voilà.

04:39 Donc vraiment, quand on le dit, je crois que le dire pour le dire, ça ne suffit pas.

04:44 Il faut informer les gens, leur expliquer à quel point c'est important

04:48 pour le développement de leur enfant, justement, de les stimuler.

04:51 Quand je dis « redonner ses lettres de noblettes au jeu », je parle sérieusement.

04:55 Il faut vraiment jouer.

04:56 Cette interaction, elle est essentielle.

04:59 L'empathie, c'est essentiel.

05:01 C'est à cet âge-là que tout se fait, que tout se crée.

05:04 Et on s'en souviendra toute la vie, même si on a l'impression de ne pas avoir de souvenirs.

05:09 De zéro à trois ans, on en a plein.

05:11 - Même adulte, on n'en abuse pas, d'ailleurs, des écrans.

05:13 - Oui, bien sûr.

05:14 - Même adulte.

05:15 - Oui, mais là aussi, l'importance, parce que l'enfant, si vous voyez vous avec votre écran,

05:20 on a des adultes qui donnent à manger avec leur enfant en regardant leur écran.

05:24 Enfin, je veux dire, non, non.

05:25 - Il a pleuré.

05:26 - Non.

05:27 - Franchement, il a pleuré.

05:28 - C'est ça, Brigitte.

05:29 (Générique)

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