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  • 23/03/2023
Le journaliste et vidéaste Rémy Buisine relaie en direct chaque manifestation pour le média Brut. Cet après-midi il suivra le cortège parisien contre la réforme des retraites. Ce matin, il est l'invité de 9H10.

Retrouvez "L'invité de Sonia Devillers" sur
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-9h10

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Transcription
00:00 Le 7 9 30 sur France Inter.
00:05 Pour une fois l'invité de 9h10 est à 9h10. Sonia, votre invitée a passé la soirée à déambuler smartphone au point dans les rues de Paris.
00:15 Voilà smartphone au point et alors le smartphone il l'a pas quitté, il l'a devant lui et il en a trois autres dans ses poches.
00:20 En fait j'ai jamais vu quelqu'un qui a autant de téléphone. Bonjour Rémi Buzyn.
00:25 Bonjour Sonia.
00:26 Ça fait depuis 2015 que vous vous immergez partout il y a des mouvements sociaux, partout il y a des cortèges, partout il y a des manifs,
00:32 là où ça dégénère et là où ça ne dégénère pas forcément, là où il y a des ronds-points aussi.
00:38 Vous diffusez vos images en live sur la plateforme Brut. Brut c'est un site, c'est une appli à télécharger
00:44 et puis c'est aussi des vidéos qui se baladent sur TikTok, sur Facebook, sur Instagram, sur Twitter, évidemment le live.
00:52 Cette nuit dans Paris, les gens vous reconnaissaient, Rémi Buzyn, on pouvait le voir dans votre direct,
00:57 les gens vous reconnaissaient souvent et vous interpellent assez chaleureusement en disant "Rémi, avec nous, avec nous Rémi".
01:04 Moi je fais mon travail de journaliste, après je pense qu'il y a un lien avec les gens et pas globalement ceux qui sont dans la rue
01:10 mais en dehors aussi parce que c'est vrai que là j'ai dû passer peut-être 45 heures en direct pour Brut en l'espace d'une semaine
01:16 donc obligatoirement, moi je suis là pour informer, contextualiser, donner tous les éléments de ce qui se passe depuis une semaine à Paris dans les manifestations.
01:23 Mais vous êtes devenu un ingrédient des manifs, quelque part, non ? Un visage qu'on retrouve.
01:29 Ah un visage oui, parce que je me disais il y a quelques jours avant de dormir, je me disais "mais combien t'as fait de manifs ces dernières années ?"
01:35 Je pense que ça doit se compter en centaines mais à la fois c'est quelque chose de passionnant
01:38 parce que c'est vrai que dans notre pays on a connu des mouvements sociaux d'une envergure très importante ces dernières années.
01:43 On part en 2016 des manifestations contre la loi travail où il y a eu les rassemblements Place de la République pour Nuits Debout.
01:49 On va ensuite le mouvement des Gilets Jaunes en 2018 avec tout ce que ça racontait notre société
01:53 qu'on a voulu expliquer en détail sur Brut pour comprendre quel était l'essence de ce mouvement.
01:57 Et puis d'autres, la colère lors de la loi Sécurité Globale, la première réforme des retraites qui finalement avait été repoussée par le Covid.
02:03 Et puis là cette deuxième réforme donc qui est en train de passer actuellement.
02:07 Et puis le Covid entre les deux.
02:08 Et le Covid entre les deux, voilà.
02:09 Avec son lot aussi de rassemblements et de manifestations.
02:11 Avec son lot aussi de manifestations, le passe sanitaire aussi.
02:13 Et j'en oublie plein, il y a plein d'autres manifestations aussi.
02:16 Il y a eu la colère des policiers allemands.
02:17 Et qu'est-ce que vous répondez aux gens sur le terrain qui disent "Rémi avec nous, Rémi avec nous".
02:21 Bah c'est gentil mais c'est pas mon rôle.
02:23 Enfin je veux dire le rôle du journaliste il est là pour informer, pour donner le contexte.
02:27 Je remercie toujours les gens qui sont très chaleureux avec moi.
02:29 Mais voilà, mon rôle il n'est pas d'être du côté des manifestants.
02:34 Mon rôle il est d'être avec les journalistes, d'informer, de donner le contexte.
02:38 Comme ce que pouvait faire sur France Inter et que d'autres confrères peuvent faire aussi.
02:41 Donc ça...
02:42 - Et il y en a à qui vous répondez, on vous entend dire ça dans les lives.
02:45 "Le jour où je viendrai avec vous, je créerai mon site et ça s'appellera Rémi Buzine s'exprime".
02:51 Mais c'est là, c'est pas mon job.
02:52 - Bien sûr, je pense aussi que je ne suis pas là pour donner mon avis dans les commentaires.
02:56 Il y a des gens qui disent "mais t'en penses quoi de la réforme des retraites ? Tu penses quoi de ceci, cela ?"
02:59 Mais moi en tant que journaliste, je ne suis pas un éditorialiste.
03:02 Donc je leur dis tout le temps, si vous êtes sur mon live, c'est pour avoir de l'information, pour avoir du contexte.
03:06 Par contre, mon avis, ben oui, je suis un citoyen comme tout le monde.
03:09 J'ai mes idées, je pense à plein de choses, mais c'est pas le lieu pour les exprimer.
03:14 Et je les garde pour moi, je pense que j'ai une réserve vis-à-vis de ça qui est tout à fait normale.
03:17 Chacun son rôle. Si je voulais donner mon avis, je ferais de la politique.
03:21 - Un citoyen de 32 ans, voilà, qui a grandi entre Valenciennes et Lille, dans un village de 2500 habitants.
03:28 On va raconter comment vous vous êtes fabriqué et imposé, fabriqué une patte.
03:34 Comment vous vous êtes emparé de ces outils et comment vous vous êtes imposé dans le métier.
03:38 Mais d'abord, la question de vous sur le terrain. Ça, c'était il y a deux jours.
03:41 *Bruit de bruit de bruit*
03:47 - C'est la presse ? C'est la presse, monsieur ?
03:50 - C'est la presse, c'est la presse, c'est la presse. C'est à la terrasse d'un café à Paris.
03:55 Racontez ce qui s'est passé.
03:56 - Ce qui se passe à ce moment-là, c'est que quelques secondes plus tôt, il y a une jeune femme qui est interpellée.
04:00 Donc avec plusieurs confrères, on est en train de la filmer.
04:02 Et ce qui arrive malheureusement parfois, c'est que...
04:04 - Interpellée par les forces de l'ordre ?
04:05 - Oui, interpellée par les forces de l'ordre.
04:07 C'est une interpellation qui est assez musclée.
04:09 Et puis la femme qui se fait interpeller, elle n'a pas trop envie d'y aller non plus.
04:14 Et en fait, au bout d'un moment, il y a d'autres policiers qui vont nous repousser et nous empêcher de filmer.
04:19 Et c'est ce qui va arriver régulièrement.
04:20 C'est-à-dire qu'on peut avoir des entraves, des fois, dans notre travail pour pouvoir filmer une situation jusqu'au bout,
04:25 sans gêner cette situation.
04:27 Et donc là, on se retrouve avec plusieurs confrères à être...
04:31 On nous dit d'aller plus loin.
04:33 Donc on doit reculer.
04:35 Et puis finalement, moi je recule dans le coin d'un bar,
04:38 ils vont carrément venir me chercher pour m'emmener encore plus loin.
04:40 Donc ça, c'est des situations qui peuvent arriver.
04:42 - Quand on entend "c'est la presse, c'est la presse", ça signifie quoi pour la presse ?
04:46 C'est-à-dire qu'on a bien vu, pendant les Gilets jaunes,
04:50 on a vu des manifs antivax qui ont été d'une violence inouïe pour les confrères journalistes,
04:54 enfin ceux qui étaient sur le terrain.
04:57 Mais ce que je veux dire, c'est qu'on a bien vu le métier basculer et hésiter entre deux postures.
05:03 Soit on est clairement identifié, avec brassard, avec logo sur les caméras, sur les micros.
05:10 Soit au contraire, on se fait de plus en plus discret.
05:12 C'est-à-dire que si on n'est pas identifié, on se prend la violence parfois des forces de l'ordre.
05:16 Si on est identifié, on peut se prendre la violence des manifestants.
05:19 - Moi j'essaie d'être identifiable tout de même.
05:21 C'est-à-dire que j'ai toujours un brassard presse.
05:23 Par exemple, cet après-midi, il y aura une manifestation et donc j'aurai...
05:26 - Sans blague !
05:27 - Voilà, encore une !
05:28 Donc ça va être mon dixième jour d'affilée sur le terrain pour la suivre sur Brut.
05:32 Et on a là un casque, et sur le casque, pareil, identifiable en tant que presse.
05:36 Je pense que par exemple, je ne pourrais pas me plaindre de ces situations visées des forces de l'ordre
05:41 si je n'étais pas forcément identifiable.
05:43 Je le suis, et donc quand il y a ces situations-là, je prends cet endroit de me dire,
05:46 bon, et ce qui arrive à moi arrive aussi à d'autres confrères.
05:49 C'est vrai qu'on a vu pas mal d'images circuler me concernant.
05:52 C'est peut-être aussi parce que les lives étaient très suivis,
05:54 mais il y a aussi d'autres confrères qui vivent des situations pareilles, même parfois pires.
05:58 Mais c'est pas filmé à ce moment-là, ils sont pas en direct.
06:01 Moi j'ai cette notion du live où quand il m'arrive quelque chose, les gens le voient tout de suite.
06:05 - Les gens le voient tout de suite et y participent.
06:10 Justement, dans ce live, à vos débuts, vous avez imprimé votre patte aussi
06:16 parce que vous étiez dans un dialogue permanent, contrairement à une chaîne d'info.
06:20 Et aux reporters de chaînes d'info ou aux journalistes qui sont duplex,
06:23 vous étiez dans un dialogue permanent, ce que vous permettait Twitter et ce que vous permettait Facebook.
06:28 Aujourd'hui, que votre audience a considérablement grossi avec Brut,
06:33 vous continuez d'interagir, de répondre aux questions, de dialoguer avec ceux qui vous suivent ?
06:37 - C'est la base.
06:38 Je pense que si les gens ont peut-être apprécié, des fois m'interpeller dans la rue de façon très familière,
06:42 c'est que je parle avec les gens, je réponds à leurs questions, à leurs commentaires.
06:47 On a vraiment créé un lien de communauté, d'interaction.
06:49 - Et vous avez des lives qui sont suivis par 5 millions de personnes, parfois même plus.
06:54 - Je ne peux pas répondre à tous les commentaires, ça on n'en aura jamais la prétention,
06:57 mais l'idée c'est quand même de pouvoir lire ces commentaires et même parfois de se dire
07:01 que quand on n'a pas le temps de le faire, on va garder un moment pour ça.
07:03 Je me suis rendu compte ces derniers jours où il y a eu des moments quand même très tendus,
07:06 où justement dans ces moments-là, c'est un peu compliqué de filmer, contextualiser et en même temps lire les commentaires,
07:11 de garder un temps à la fin du live.
07:13 Et je dis tout le temps, quand les choses vont se calmer, quand ce sera posé, on va se prendre 20-30 minutes
07:17 et j'échange avec les gens. Et pendant les 20-30 minutes, je vais lire les questions sur TikTok,
07:21 il y a plein de commentaires qui défilent.
07:23 Et l'idée c'est vraiment de répondre à leurs questions, parce que vous avez des gens qui sont parfois très investis,
07:28 qui sont même des gens dans la lutte sociale qui nous suivent et qui eux sont très au courant.
07:32 Mais vous avez, je pense, et quand je lis les commentaires, une majorité de gens qui ne sont pas forcément dedans.
07:37 - Qui sont partout en France. - Voilà, partout en France, même ailleurs des fois.
07:40 - Et qui ont besoin aussi de dézoomer, c'est-à-dire qu'on a beaucoup reproché aux chaînes d'info
07:46 des plans fixes sur des poubelles qui crament alors qu'à deux rues de là, il ne se passe rien et plus rien.
07:51 C'est-à-dire que vous êtes ambulants, vos séquences durent très longtemps.
07:56 C'est-à-dire que c'est ça aussi que les gens cherchent quand ils vous suivent Rémi Buzine.
08:00 C'est-à-dire une capacité à dézoomer, à être...
08:03 - Dézoomer, contextualiser toujours et oui, de répondre.
08:07 Des fois, ça arrive qu'il y ait des questions qui soient très simples de l'avis des gens.
08:10 Il y a quelqu'un qui voit une situation où c'est très tendu dans Paris et qui me dit
08:13 "Bah oui, non, moi je ne vais pas sortir ce soir".
08:16 Moi je réponds, je fais "Peut-être que si, vous allez pouvoir sortir parce qu'en fait,
08:19 oui, ok, on vit une situation qui est très tendue dans ce quartier.
08:22 Des informations font peut-être état qu'il y a d'autres quartiers parce que ces derniers jours,
08:26 des fois c'était tendu dans plusieurs endroits en même temps.
08:28 Mais non, Paris n'est pas en feu.
08:30 Je veux dire, il y a énormément de quartiers où les gens vivent paisiblement,
08:33 où ça se passe très calmement et c'est important de le rappeler régulièrement
08:36 pour dire "Oui, il y a ça, mais à côté, il y a aussi du calme".
08:39 - C'est ça. Il est 9h18, vous écoutez France Inter, Rémi Buzine.
08:42 Et mon invité, on va parler de ce parcours assez atypique.
08:45 Vous n'êtes pas un pur produit des écoles de journalisme, très loin de là même.
08:49 - Ah oui.
08:51 - Salut.
08:53 - Salut.
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11:01 [Musique]
11:10 [Musique]
11:27 - Gorillaz chante "Silent Running".
11:30 - France Inter, le 7 9 30, l'interview de Sonia De Villers.
11:36 - 30 secondes d'arrêt de jeu, on n'en peut plus. Le titre qui est tout près.
11:40 La tête de fouet, M. Bata qui met le siffle à sa bouche et qui siffle.
11:45 Il siffle à la fin du match. Dansé champion de France pour la première fois de son histoire.
11:51 [Musique]
11:54 - Il avait 8 ans mon invité, il s'appelle Rémi Buzine.
11:58 Il a grandi à quelques encablures de Lille et de Valenciennes.
12:03 Et le RCLens c'est resté quand même le cœur, le poumon.
12:07 - Bien sûr, c'est mon club de cœur, ça a été un peu mon échappatoire d'une scolarité parfois un peu difficile.
12:13 Et la chaleur de ce club, de ses supporters, voilà quand j'entends les coraux, moi j'ai toujours les frissons.
12:20 J'ai presque envie de les chanter ici mais je vais éviter pour vos auditeurs parce que ça va les faire fuir.
12:24 - Nous on adore.
12:25 - Mais non vraiment, c'est un club pour lequel j'ai une passion particulière.
12:29 - Et ça va bien en ce moment. C'est quand même la belle histoire du championnat de France, c'est le RCLens.
12:34 Ils sont 3e, ils étaient 2e, ils sont 3e. Ils ont été rachetés bien sûr mais ça reste un budget assez modeste.
12:40 Ils ont un gardien qui vient d'être sélectionné, Cocorico, dans l'équipe de France.
12:46 - Non mais on a vécu 15 ans très compliqués entre la Ligue 2, le risque de dépôt de bilan et puis un club qui souffrait
12:52 parce qu'il avait perdu un peu ses valeurs. Et c'est vrai qu'en 2017, il y a Joseph Fougourlian qui a racheté le club
12:57 et qui a vraiment restructuré tout et remis les valeurs au devant.
13:01 Et c'est vrai qu'on le voit aujourd'hui, quand on va à Lens, on voit des joueurs qui mouillent le maillot,
13:04 une institution qui a redoré son blason et ses couleurs et ça fait du bien.
13:08 Parce qu'au-delà des résultats à Lens qu'on a toujours voulu, c'est des joueurs qui mouillent le maillot
13:12 et qui ont un respect pour l'institution, pour le club. Et on avait perdu ça.
13:16 - Rémi Buzine, vous êtes fils d'ouvrier, vous avez grandi dans une famille ouvrière du Nord.
13:21 Une famille ouvrière où on ne se projette pas journaliste. - Pas du tout.
13:26 - Surtout pas journaliste à Paris. Votre grand-mère lisait La Voix du Nord.
13:29 - C'est un peu le déclenchement. J'apprends à lire, j'ai 6-7 ans, tous les dimanches il y a ma grand-mère qui vient à la maison.
13:35 Elle était abonnée à La Voix du Nord, mes parents non, grossière erreur.
13:39 Et oui, en fait, j'apprends à lire en regardant La Voix du Nord.
13:46 - Vous apprenez à lire en lisant le journal ? - Oui.
13:49 Et je suis passionné par ce que je lis dedans, par la presse écrite.
13:52 Et je me dis, mais ce métier c'est fabuleux, tu vas sur le terrain, tu vois un événement, tu restitues ce qui se passe.
13:57 Et c'est quand même assez incroyable en soi. - Sauf que vous avez fait un BEP, Vente et Pas une école de journalisme.
14:03 - Oui, parce que l'école c'était pas trop mon truc, j'avoue que d'être derrière une table toute la journée j'avais du mal.
14:07 Donc du coup, l'école a été très très dure pour moi parce que moi quand j'avais 11-12 ans, je me souviens, j'étais en difficulté scolaire.
14:14 Et les réunions de parents-profs c'était très violent, on me disait que j'étais bon à rien, qu'il fallait très vite m'évincer du système scolaire classique.
14:21 Je me suis retrouvé en 4ème techno dans une filière de paysagisme, qui était pas du tout ce que je voulais faire.
14:26 Mais on me disait, il habite dans un village, il a des jardins à côté de chez lui, donc il va aimer faire ça.
14:30 On m'a même pas demandé mon avis, donc en soi je subissais les événements et donc j'étais de plus en plus en décrochage.
14:36 Et les écoles de journalisme, qui sont réservées à ceux qui ont les meilleurs résultats, elles m'étaient éloignées.
14:41 Et donc c'est vrai que quand j'avais 14-15 ans, devenir journaliste pour moi c'était presque comme certains ont le rêve à 5-6 ans de devenir pilote de Formule 1.
14:49 C'était inaccessible. Mais j'ai toujours gardé ça dans un coin de ma tête en me disant, il va falloir que j'y aille parce que ce qu'on me propose là c'est pas ce que j'ai envie de faire.
14:58 Vraiment, et donc j'ai continué.
15:01 Alors ça on va vous entendre dans les manifs, c'est à dire que 2015 avec Twitter naît un outil qui s'appelle Periscope.
15:09 Donc la possibilité de filmer, de diffuser en live. Et il y a quelque chose que vous imposez, et vous n'êtes pas le seul à l'imposer, vous êtes toute une génération en fait,
15:20 de gamins qui ont grandi sur le terrain, qui se sont formés sur le tas, avec l'idée que le live ce sont des images sans montage.
15:28 Dans le même temps, Rémi Buzine monte en France et partout ailleurs une grande méfiance vis-à-vis des médias traditionnels, vis-à-vis des médias institués, vis-à-vis des chaînes d'information.
15:38 Une grande violence, une grande méfiance, une grande critique.
15:42 Avec l'idée que peut-être dans cette manière de faire, il y aurait plus d'authenticité, il y aurait plus de vérité.
15:49 C'est ce que j'ai parfois entendu, c'est vrai que je me souviens pendant le mouvement des Gilets jaunes,
15:53 il y avait quelqu'un qui était venu vers moi qui me disait "mais je te réponds à toi, c'est pas parce que c'est Rémi Buzine, c'est juste parce que toi t'es en direct,
15:59 si t'étais en enregistré, je ne te répondrais pas parce que tu vas m'interviewer pendant 4-5 minutes et je vais avoir la crainte, la peur de savoir ce que vous allez restituer derrière".
16:08 C'est-à-dire que dans l'imaginaire collectif, et peut-être à raison, montage est devenu le synonyme de mensonge, ou en tout cas de manipulation de l'image.
16:18 C'est ce qu'on entend régulièrement sur le terrain, et c'est vrai que cette défiance a monté au fur et à mesure des années pour atteindre je pense un très haut niveau au moment des Gilets jaunes.
16:24 Et c'est vrai que c'était cette notion de montage de dire "vous filmez toute la journée, mais vous êtes contraints de faire un 2 minutes, 2 minutes 30 pour le journal de 20h,
16:30 qu'est-ce que vous allez raconter dessus ? Qu'est-ce que vos éditorialistes en plateau vont commenter et raconter sur ces images ?"
16:35 Donc c'était ça toutes ces difficultés, et le live, les gens disaient "je sais que tout ce que je vais dire va être diffusé".
16:40 Donc il n'y a pas de coupure, il n'y a pas de montage, c'était cette notion-là, que j'entends encore aujourd'hui, de dire "c'est en live, c'est en continu,
16:47 donc du coup ça permet de passer cette défiance vu que je sais que tout va être montré".
16:51 Alors que le live, ça n'en reste pas moins quelque chose de profondément subjectif.
16:56 C'est-à-dire que c'est vous Rémi Buzyn, vous choisissez où vous placez votre smartphone, vos 3 smartphones,
17:01 parce que je n'ai jamais vu quelqu'un qui en a autant sur lui, mais où vous les placez dans Paris, où vous vous situez, à quelle heure vous tournez, où est-ce que vous tournez la caméra ?
17:09 Au fond, tout ça est une question de choix, autant que le montage ?
17:13 Autant que le montage, je dirais presque, parce qu'en soi, oui, évidemment, quand on choisit de se positionner à un endroit plutôt qu'un autre, c'est un choix éditorial,
17:19 et ça je l'explique aussi aux gens.
17:21 Donc oui, dans une manifestation, si on choisit de s'adresser à telle personne plutôt qu'une autre, c'est un choix,
17:26 de se dire "on va remonter toute la manip dans l'autre sens à tel moment et pas un autre", bien évidemment.
17:31 Donc je veux dire, il y a ce que donne la vie des gens, et il y a une réalité qui je pense est peut-être un peu plus nuancée.
17:37 C'est-à-dire que oui, le live, il y a des choix, il y a un choix de le lancer, il y a un choix de le couper, et donc on fait des choix éditoriaux comme peuvent le faire les gens.
17:44 Le plus long live que vous ayez ?
17:46 12 heures.
17:47 12 heures ! D'accord. C'était où et c'était quand ?
17:49 Alors c'était des circonstances exceptionnelles, c'était le 1er décembre 2018, l'acte III des Gilets jaunes, l'arc de triomphe.
17:56 Là on était dans des circonstances exceptionnelles, où on arrive à 6h du mat et on part à minuit,
18:00 parce que c'était une journée sûrement historique dans l'histoire des luttes sociales en France,
18:07 et donc du coup il fallait être à la hauteur de ce qui se passe et on n'a pas eu le temps de faire une petite pause.
18:12 Et à force d'être devenu une référence brute, qui est le média sur lequel vous diffusez votre travail,
18:18 vous a choisi pour interviewer Emmanuel Macron en 2020, et vous a choisi pour interviewer l'ENA Situation,
18:26 qui est la youtubeuse la plus influente de France. Pourquoi à votre avis ?
18:31 En fait ce qui est bien à Brut, c'est qu'on touche un peu à tout. Je veux dire on n'est pas dans des cases,
18:35 il n'y a pas un journaliste politique, un journaliste culture.
18:38 Si le matin vous arrivez à la rédac, vous avez une bonne idée dans un sujet sport,
18:42 ou le lendemain sur un sujet culture ou politique, vous allez pouvoir y aller.
18:45 Mais vous incarnez quelque chose aujourd'hui ?
18:47 Peut-être, il faudrait demander aux gens, il faudrait demander à Laurent Lucard, Renaud Le Manquim et Guillaume Lacroix,
18:52 qui sont les cofondateurs de Brut, pourquoi ils m'ont choisi, ils me font confiance.
18:56 Mais je pense qu'il y a aussi un lien qui est fort, parce que je suis arrivé au tout début de l'histoire de Brut.
19:00 Moi il y a une histoire presque d'amour avec ce média, parce que j'étais là au tout début,
19:05 moi quand je signe mon contrat, quand je rencontre Laurent Lucard à Place de la République,
19:08 quand il me dit "on va lancer un nouveau média qui va s'appeler Brut", ça n'existe pas encore.
19:12 C'est un pari quand je signe quelque part, et c'est un pari aussi de lancer ce média.
19:15 Donc quand on voit toute l'évolution en France, à l'international, en l'espace d'un peu plus de 6 ans,
19:21 c'est impressionnant. Aujourd'hui j'arrive à la rédaque, quand je vois tous les développements,
19:24 on est à peu près entre 250 et 300 personnes.
19:26 C'est ça, et c'est 350 millions de personnes qui regardent les images de Brut dans le monde.
19:30 Merci Rémi Buzine, vous filez où là ?
19:32 On va filer Place de la Bastille, début d'après-midi, pour couvrir la manifestation.
19:36 Très très original, allez Place de la Bastille, allez bon courage, et dormez un peu !
19:42 - Merci Sonia.

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