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Nos invités sont Claire Thoury, sociologue et Présidente du Mouvement associatif depuis 2021, et Christophe Robert, sociologue et Délégué général de la fondation pour le Logement des défavorisés. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-jeudi-24-juillet-2025-5561000

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00:01France Inter, Simon le Baron, le 6-9
00:06Ce sont les centres de loisirs où vous avez inscrit vos enfants pour les vacances,
00:10ce sont les bénévoles qui organisent des sorties à la plage ou au musée,
00:13ce sont ceux qui défendent l'environnement, les droits des femmes, les plus démunis tout le reste de l'année,
00:18bref les associations, comment se portent-elles, comment se portent ceux qui les font vivre
00:22et quelles sont leurs inquiétudes à l'heure des restrictions budgétaires.
00:26Nos deux invités vont nous en parler, puisque Claire Toury, bonjour,
00:30vous représentez une association sur deux en France au sein du mouvement associatif dont vous êtes la présidente,
00:36et Christophe Robert, bonjour, vous êtes le délégué général de l'une des plus grosses,
00:39voire la plus grosse association de solidarité en France.
00:44Je vous vois dire que ça n'a pas d'importance, en tout cas c'est la Fondation pour le logement des défavorisés,
00:49l'ex-fondation Abbé Pierre.
00:51Dites-nous, vous qui nous écoutez, ce que le monde associatif représente pour vous poser de nouvelles questions.
00:55en nous appelant au 01 45 24 7000 et en nous écrivant sur l'application de Radio France.
01:00Je parlais des coupes budgétaires.
01:03Si le budget présenté par François Bayrou était adopté en l'État, ce qui est très loin d'être certain,
01:09quelles seraient les conséquences, d'après vous, pour le monde associatif, Claire Toury ?
01:13Merci beaucoup déjà d'organiser cette émission et de donner à voir le monde associatif,
01:18ses difficultés, sa diversité et sa richesse.
01:21Je pense que c'est important qu'on en parle, parce qu'avant de vous répondre, peut-être redire des grands chiffres.
01:24Il y a 1,4 million d'associations aujourd'hui en France, il y a 20 millions de bénévoles,
01:28il y a 1,8 million de salariés dans le secteur associatif,
01:32et il y a environ 70 000 associations qui se créent chaque année.
01:35C'est considérable.
01:36On va faire un panorama.
01:37Pour dire à quel point, effectivement, le monde associatif est important.
01:40Elles sont partout et puissantes et très importantes.
01:41Mais si on vous inquiète sur le budget, les coûts budgétaires.
01:44Ce serait une catastrophe pour le secteur associatif.
01:46Mais c'est déjà extrêmement difficile.
01:49Le budget 2025, il est lourd de conséquences pour le monde associatif.
01:53Des subventions qui baissent, des activités qui s'arrêtent,
01:55des associations qui sont en grande difficulté de trésorerie,
01:58des emplois qui ne sont pas renouvelés, des emplois qui sont supprimés.
02:02Donc, de façon très concrète, si on continue comme ça,
02:05si la dépense publique n'est pas à la hauteur des besoins des personnes derrière les associations,
02:10la situation ne va aller qu'en Saint-Pierre.
02:13À peu près 1,5 million d'associations en France, 1,4 million.
02:17Vous nous avez dit, dans quelle mesure dépendent-elles des subventions publiques ?
02:20C'est 20% de subventions publiques.
02:21C'est intéressant.
02:22Le budget des associations, c'est environ 113 milliards d'euros.
02:2520% de subventions publiques.
02:2629% de commandes publiques.
02:28C'est-à-dire que vous répondez à un marché public.
02:305% de dons mécénat.
02:327% de cotisations.
02:34Et puis, le reste, 36%, je n'aurais pas dû faire ce calcul,
02:37mais c'est de la consommation d'activités.
02:39Donc, globalement, c'est environ la moitié du budget des associations
02:42qui dépendent de financements publics.
02:44Donc, on comprend qu'effectivement, ces économies à venir vont avoir des conséquences
02:50et on va en parler.
02:52Pour vous, Christophe Robert, ce sont les dons qui sont les plus importants
02:57puisque vous dépendez quasi exclusivement de la générosité du public
03:01à la Fondation pour le logement des défavorisés.
03:04Il y a des inquiétudes sur la défiscalisation des dons
03:08ou cette piste-là est plutôt écartée ?
03:11Écoutez, oui, alors nous, c'est un petit peu particulier
03:12parce qu'on est financeurs du secteur associatif.
03:1497% de nos ressources, c'est de la générosité du public,
03:17des dons de particuliers, des lègues, des donations, des assurances-vie.
03:21Et on va financer 800 projets par an portés par 500 associations
03:25pour aider les personnes sans domicile, favoriser l'accès aux droits,
03:29construire du logement social, bref, beaucoup d'activités
03:32qui répondent à des besoins essentiels.
03:35Alors, sur votre question sur la fiscalité,
03:37on a vu le Premier ministre il y a 15 jours
03:39à qui on a posé la question parce qu'il y avait un rapport
03:42qui était en cours de l'Inspection Générale des Finances
03:45sur le fait de réduire la fiscalité attractive du don.
03:49Vous savez, quand vous donnez 100 euros,
03:51eh bien, vous pouvez, si vous payez des impôts,
03:54mais tout le monde ne paye pas d'impôts,
03:55mais si vous payez des impôts, défiscaliser 75 euros.
03:58Et donc, ça pousse des gens à donner un peu plus.
04:00Donc, c'est vraiment très, très utile pour la solidarité dans le pays.
04:04Et le Premier ministre a dit non, non,
04:06mais ce n'est pas parce qu'il y a un rapport
04:07qu'il y aura des décisions dans ce sens-là.
04:09Donc, on est plutôt rassuré sur ce point.
04:10Par contre, quand vous regardez la construction du budget
04:13qui nous a été annoncée autour du 14 juillet,
04:15c'est moins 300 millions pour le sport, la jeunesse, la vie associative.
04:19C'est moins 2 milliards d'euros pour la solidarité,
04:22l'insertion, l'égalité des chances,
04:24moins 1,2 milliard d'euros pour la cohésion des territoires dans le logement,
04:27etc., etc.
04:29Et qu'est-ce qui se passe avec les assos, nous, qu'on finance ?
04:31Celles qu'on voit, qu'on soutient,
04:33pour pouvoir apporter des réponses concrètes,
04:35ajustées dans tous les territoires,
04:36en milieu rural, dans les quartiers populaires, dans les métropoles.
04:39C'est qu'elles sont confrontées à un triple problème.
04:42Le premier, c'est qu'elles ont vu leurs coûts fixes
04:44très fortement augmenter.
04:46Mais comme tout un chacun.
04:47Les coûts de l'énergie, notamment.
04:48À cause de l'inflation, ces dernières années.
04:50Exactement. Inflation énergie.
04:51L'inflation qui est revenue à un niveau bas.
04:53Oui, enfin, le niveau de l'énergie, il est resté haut.
04:55Il n'a pas redescendu, vous voyez.
04:56Quand on a augmenté de 5%, de 7%,
04:58ou plus, il n'est pas redescendu.
05:00Non, oui, ça augmente beaucoup moins vite.
05:03Mais on est resté à un niveau,
05:04comme pour la facture des ménages,
05:05pour payer leurs charges.
05:07Premier facteur, c'est ça.
05:08Coûts fixes qui ont fortement augmenté,
05:10et les subventions publiques n'ont pas accompagné
05:11cette augmentation liée à l'inflation.
05:14Deuxièmement, baisse des subventions.
05:15Mais déjà depuis longtemps, Claire Toury le disait.
05:17Des collectivités locales, des départements,
05:19des régions, de l'État.
05:21Et troisième élément, dans le domaine de la lutte contre l'exclusion,
05:23l'explosion des besoins.
05:25C'est-à-dire, vous êtes là,
05:26vous vous occupez d'aider mieux les personnes
05:29avec des aides alimentaires,
05:31accompagner les personnes sans domicile, sans abri.
05:34Et puis, vous avez une augmentation
05:35de 20 à 30% des problèmes.
05:37Des personnes qui rencontrent des difficultés.
05:39Et là, vous n'avez pas la capacité.
05:41Et ça, c'est quelque chose qui est un enjeu de société majeure.
05:44Parce que, d'un côté, vous avez un budget
05:46qui va geler les prestations sociales,
05:48qui va fragiliser encore les plus pauvres.
05:50Et de l'autre, les associations sont moins en capacité
05:52de répondre aux besoins des personnes qui sont réussies.
05:54On va parler de la pauvreté, effectivement,
05:55et de vos inquiétudes sur cette explosion de la demande.
05:58Et notamment, en raison, dites-vous,
06:00de cette année blanche qui est promise par le gouvernement.
06:03On va s'arrêter là-dessus.
06:04Mais Claire Toury, qu'est-ce qu'il faut faire ?
06:05Est-ce que le monde associatif peut se mobiliser ?
06:09Est-ce qu'on peut mobiliser autant d'acteurs
06:12aussi divers et aussi éclatés sur le territoire ?
06:16Oui, je pense que le monde associatif peut et va se mobiliser.
06:19D'ailleurs, on est en train de réfléchir
06:21à une forme de mobilisation.
06:22Je ne sais pas exactement quelle forme ça prendra,
06:24mais à la rentrée.
06:25Parce qu'il faut qu'on donne à voir...
06:26Vous, au sein du mouvement associatif.
06:27Au sein du mouvement associatif et au-delà.
06:28On fédère beaucoup d'associations.
06:29Les associations vont mal, sincèrement.
06:31Et je ne dis pas ça pour faire pleurer dans les chaumières.
06:33Les associations ne vont pas bien.
06:34Il y a une préoccupation qui est très importante.
06:36Moi, je n'ai jamais vu ça.
06:37Franchement, je pense qu'on est dans une situation
06:39qui a été très bien expliquée par Christophe Robert à l'instant.
06:41Une situation où on se retrouve dans des injonctions contradictoires.
06:45Il y a plus de besoins, il y a moins de moyens.
06:47Il y a plus de besoins, il y a une augmentation des charges.
06:50Et face à ça, quand vous êtes une association,
06:52vous ne pouvez pas augmenter vos tarifs.
06:54Si jamais vos charges augmentent...
06:56Je pense à ça il y a trois ans.
06:58Au moment de la crise inflationniste,
06:59les associations du tourisme social qui ont des bâtiments,
07:01certaines se sont retrouvées avec des factures d'énergie de plus 300 000 euros.
07:05Plus 300 000 euros.
07:06La question qui se posait à elles, c'est
07:07est-ce que j'augmente mes tarifs pour les colonies de vacances,
07:11les séjours collectifs,
07:12ou est-ce que je ferme quelques semaines dans l'année ?
07:14À chaque fois, la réponse est insatisfaisante.
07:16Et c'est ça la situation du monde associatif aujourd'hui.
07:19Je vous en prie.
07:20Et je reviens juste sur cette mobilisation
07:22pour essayer d'y voir un peu plus clair.
07:25Comment vous pouvez me mobiliser,
07:27puisque vous nous l'annoncez pour la rentrée ?
07:29C'est à peu près en quelle forme ?
07:30Je ne sais pas encore.
07:31Je ne peux pas vous dire.
07:32En tout cas, je pense qu'il faut que ce soit un peu partout,
07:34territorialisé.
07:35Il faut qu'on montre que les associations,
07:36elles sont absolument partout
07:37et que les citoyennes, les citoyens n'ont pas conscience
07:39que les associations sont à tous les coins de rue.
07:41Crèche associative, aide à domicile en milieu rural,
07:44distribution alimentaire, club de sport.
07:4790% des clubs de sport sont sous statut associatif.
07:50Festival, 2000 festivals chaque année sont sous statut associatif.
07:53Qu'est-ce que je peux vous donner d'autre ?
07:55Comme chiffre des hôpitaux, des comités des fêtes.
07:58Notre société française, on n'en a absolument pas conscience,
08:02mais notre société française, elle tient grandement
08:05grâce à ces associations et grâce à ces citoyens,
08:08c'est ça que ça veut dire,
08:09qui s'organisent, qui se mobilisent pour porter des projets,
08:12défendre des causes, interpeller, vivre ensemble,
08:15partager des moments collectifs très importants,
08:18se dynamiser un territoire.
08:20C'est ça le monde associatif aujourd'hui.
08:21C'est ce monde associatif qui fait vivre aujourd'hui
08:24le fameux modèle social français,
08:26dont on est si fier et qu'on veut préserver, Christophe Robert.
08:30Oui, en tout cas, elle y participe.
08:32Prenons l'exemple de la période Covid.
08:35On est venu chercher les associations.
08:36Nous, on était en relation avec les ministres,
08:38Premier ministre, Président de la République,
08:39au moment où tout le monde paniquait.
08:41Qu'est-ce qui va se passer avec cette histoire du Covid ?
08:43Qu'est-ce qu'on a constaté ?
08:45Que quand on articulait bien la puissance publique,
08:47via les préfets, via les maires, via les départements,
08:51donc l'État, les collectivités territoriales et le monde associatif,
08:54on est capable de faire des choses extraordinaires dans ce pays.
08:57Pourquoi ? Parce qu'elles sont présentes partout.
08:59Elles sont capables d'identifier les signaux faibles,
09:02des évolutions.
09:02Vous voyez, souvent, la protection sociale,
09:05c'est des grosses machines.
09:06Les décisions publiques, les décisions ministérielles,
09:08c'est des grosses machines.
09:09Mais là, elles permettaient de voir où se situaient les enjeux
09:12et elles sont capables de faire le dernier kilomètre.
09:15C'est-à-dire qu'à la fois, elles sont dans le repérage,
09:17dans l'innovation, dans l'apport de réponses ajustées
09:19à des problématiques nouvelles,
09:21ou existantes en tout cas sur les territoires.
09:23Et puis le jour où on veut développer une grande politique publique,
09:25on veut développer la protection sociale.
09:27Ce n'est pas ce qui se passe en ce moment.
09:28Mais si on veut le faire,
09:30l'État, il n'a pas forcément les bras pour le faire.
09:32Ça peut être aussi les bras armés de notre action collective,
09:35de notre action citoyenne.
09:36Et il faut qu'on embarque tout le monde.
09:38Et ce que dit Claire Tourie est très important,
09:39c'est-à-dire qu'on sent une fatigue.
09:41On sent, vous savez,
09:43c'est une gestion désintéressée, les associations.
09:45Donc si jamais elles n'ont que des bâtons dans les roues,
09:47si on ne leur permet pas d'agir,
09:48si on freine leur capacité d'action
09:50pour aider les gens à s'insérer dans l'emploi,
09:52pour faire de la prévention dans les quartiers populaires,
09:55pour apporter des réponses aux personnes isolées,
09:57aux personnes âgées,
09:58il y a un moment où il y a de la fatigue.
09:59On parle des fois de fatigue démocratique.
10:01Moi, je parle de fatigue associative.
10:02Je crois qu'on est au milieu du guet.
10:04Et ce moment-là que nous vivons,
10:06où dans le budget, on voit bien
10:08qu'il y a une lecture très macroéconomique,
10:10à coup de tableur Excel,
10:11mais qui fait fi de toutes ces réalités,
10:13de ces envies d'agir,
10:14de cette bonne volonté que l'on voit partout,
10:16si on ne l'accompagne pas,
10:17si on ne l'encourage pas,
10:18il faut faire attention,
10:20parce que cette fatigue,
10:20elle peut créer des formes de démission, entre guillemets.
10:2220 millions, c'est ça, de bénévoles ?
10:25Vous nous disiez, Claire Toury,
10:2667 millions de bénéficiaires.
10:28Je pense que tous les Français vont un jour ou l'autre,
10:32voire tous les jours,
10:32dans une association ou toutes les semaines.
10:35Question d'Emmanuel, au standard de France Inter.
10:37Bonjour, Emmanuel.
10:38Oui, bonjour.
10:39Emmanuel Rivry,
10:40je suis maire de la commune du Lourou-Bautreau,
10:43près de Nantes.
10:45Donc, c'est un témoignage de maire.
10:46Alors, on vous écoute.
10:47Oui, c'est plutôt un témoignage.
10:48Désolé, c'est un témoignage.
10:49Mais non, ne soyez pas désolé, on vous écoute.
10:51Ma commune, c'est 9000 habitants,
10:54c'est plus d'une cinquantaine d'associations.
10:56C'était aussi des actions intergénérationnelles.
10:59Ça couvre, en effet, de l'enfant jusqu'aux personnes isolées,
11:01vous en parliez, des personnes âgées.
11:03C'est un acte citoyen.
11:04Donc, en fait, tout ce lien social qui est créé
11:07à travers les associations,
11:08qui, pour des communes rurales comme la mienne,
11:10enfin, proches rurales, on va dire,
11:12est un poumon et un dynamisme pour des communes
11:14comme la nôtre.
11:15Donc, il faut soutenir, en effet, ces associations.
11:17Les bénévoles qui ont tendance aussi à vieillir
11:20et à, du coup, rendre plus difficile la vie d'associatif.
11:25Donc, nous, en tant que mairie,
11:26on est là pour aider à la fois financièrement.
11:29On a augmenté, nous, nos subventions de 5 à 10 %,
11:31en tout cas cette année,
11:32pour atteindre pas loin de 60 000 euros.
11:34Et puis, surtout, on vient aussi en arrière-plan
11:37pour l'aide logistique,
11:39l'aide aussi humaine,
11:41quand nos agents viennent aider les associations.
11:43Vous, vous investissez davantage,
11:46donc, si je vous écoute, Emmanuel,
11:49dans votre commune,
11:50mais la plupart des collectivités,
11:52en tout cas, beaucoup d'entre elles,
11:53réduisent leurs subventions partout sur le territoire
11:56et quel que soit le bord politique.
11:57En effet, pour cette année, en fait,
11:59on l'a maintenu,
11:59parce qu'en effet, vous avez parlé de crise énergétique,
12:01etc.,
12:02les associations nous l'ont remonté.
12:04Pardon, nous, pour cette année,
12:06en effet, que ce soit le sport,
12:07la culture et le social,
12:08on a augmenté un petit peu les subventions,
12:10entre 5 et 10 % à peu près.
12:12Et encore une fois,
12:13on fait avec nos moyens, bien sûr,
12:15qui sont, à un moment donné,
12:17limités, bien entendu.
12:18C'est pas commun.
12:18Mais c'est important de les soutenir, pardon.
12:20C'est pas commun d'augmenter les subventions.
12:22En effet, en tout cas,
12:22c'est pas la tendance,
12:23nous dit Christophe Robert.
12:25Je retiens un point
12:26dans ce que nous disait
12:27le maire, donc,
12:28de cette commune près de Nantes.
12:30Merci, Emmanuel,
12:31de nous avoir appelés
12:32au Standard d'Inter.
12:33Je retiens un point,
12:33c'est sur le manque de bénévoles.
12:36Aurélie nous dit aussi
12:37sur l'application de Radio France,
12:38comment répondre au manque
12:39d'investissement humain
12:41dans son entourage, dit-elle.
12:42Beaucoup ne veulent plus s'engager
12:43pour ne pas avoir de contraintes.
12:45Est-ce qu'il y a un problème ?
12:46Ah oui, c'est beaucoup plus compliqué que ça.
12:48Je pense qu'il faut tout de suite se dire
12:49qu'il n'y a pas de crise du bénévolat en France.
12:51On a une crise du bénévolat de gouvernance.
12:53C'est très différent.
12:54C'est-à-dire que vous avez des gens
12:55qui veulent bien donner de leur temps
12:56pour monter un projet,
12:57faire des actions,
12:58et heureusement, par contre,
13:00accéder à des responsabilités associatives,
13:02c'est plus compliqué.
13:02Pour plein de raisons,
13:04plein de raisons qu'on pourrait détailler,
13:05mais notamment pour les raisons
13:06qu'on est en train de poser ce matin.
13:08On ne fait pas...
13:08En fait, quand on s'engage
13:09dans une association,
13:10ça ne nous rapporte rien.
13:11Il faut avoir ça en tête.
13:12Ça ne nous rapporte rien.
13:13Ce n'est pas comme ça
13:13qu'on va devenir riche.
13:15On fait ça parce que...
13:15C'est possible du bénévolat.
13:16On fait ça parce qu'on a un...
13:17Ça rapporte de l'humain,
13:18de la ratifiant.
13:20Bien sûr, ça rapporte plein de choses
13:21sur le plan personnel,
13:22mais ce n'est pas pour s'enrichir.
13:23On le fait parce qu'on a envie,
13:25parce qu'on est habité,
13:26parce que ça nous apporte plein de choses
13:27sur le plan personnel et collectif,
13:28parce que ça rend service
13:29pour tant de raisons.
13:31Mais quand vous avez
13:32cette espèce de sentiment
13:34que malgré des efforts
13:36toujours plus importants,
13:37toujours plus grands,
13:38un travail collectif
13:39toujours plus fort, etc.,
13:41il n'y a pas les moyens
13:42qui sont en face.
13:43Et en fait, tous les jours,
13:45nous, au mouvement associatif,
13:46tous les jours,
13:46on nous appelle pour nous dire
13:47telle association va fermer,
13:49telle association arrête ses activités,
13:51telle association se pose
13:53la question de renouveler
13:54tel ou tel départ de son salarié.
13:56Tous les jours.
13:56Et on nous demande comment faire,
13:57comment on fait pour faire face
13:58à cette situation
13:59et on n'a pas de réponse.
14:00Et donc, c'est ça qu'on a envie
14:01de dire ce matin, en fait.
14:03C'est pour ça qu'on a envie
14:03d'alerter largement.
14:04On entend avec force,
14:05effectivement, vos craintes.
14:07Et ça m'amène à la question
14:09de la pauvreté
14:10que vous évoquiez tout à l'heure,
14:11Christophe Robert.
14:12On parlait de cette année blanche,
14:14c'est-à-dire la non-augmentation
14:15des prestations sociales,
14:18notamment du RSA, entre autres.
14:20C'est votre principale crainte
14:21alors que le taux de pauvreté
14:23est au plus haut déjà depuis 30 ans,
14:25nous dit l'INSEE ?
14:27Écoutez, triste et enceintement,
14:28en colère, pour dire les choses
14:29simplement, quand on a vu
14:31les annonces du Premier ministre,
14:33pas un mot sur ces chiffres
14:34de la pauvreté qui ont augmenté
14:36à un niveau jamais connu
14:37depuis qu'on suit cette statistique
14:38depuis 30 ans.
14:40Tant dans l'augmentation
14:40que le taux, donc 15,4%
14:43de ménage sous le seuil
14:44de pauvreté.
14:45Le seuil de pauvreté, je le rappelle,
14:46c'est 1 288 euros par mois.
14:48Oui, et vous avez à peu près
14:5010 millions de personnes
14:50qui sont concernées,
14:51mais en réalité, c'est plutôt
14:5212 millions si on prend
14:53les territoires d'outre-mer,
14:54si on prend les personnes
14:56sans domicile qui ne sont pas
14:56dans la statistique de base
14:57de l'INSEE.
14:59Des chiffres qu'on n'avait
14:59jamais connus,
15:01plus creusement des inégalités.
15:03Et qu'est-ce que nous annonce
15:04le Premier ministre ?
15:05Sans même faire écho,
15:06personne du gouvernement
15:07n'a réagi sur ces chiffres-là.
15:08C'est la première fois,
15:09moi, que je vois ça.
15:10Ça fait 20 ans
15:10que je suis à la fondation.
15:12On ne peut pas se dire
15:12« Ben voilà, ça fait 8-10 ans
15:14qu'on est au gouvernement,
15:15président de la République,
15:16et on a vu augmenter
15:17la pauvreté du fait
15:19de décisions successives
15:20qui font que les plus pauvres
15:21s'enfoncent,
15:22que les inégalités se creusent,
15:24parce qu'on n'a pas su
15:25redistribuer les richesses. »
15:27Et qu'est-ce qu'on nous annonce
15:28simultanément
15:28à ces chiffres de la pauvreté
15:30extrêmement préoccupants
15:31qu'on va geler
15:32toutes les prestations ?
15:34C'est-à-dire, on dit à quelqu'un
15:35« Vous êtes au RSA,
15:36vous avez 650 euros,
15:37il n'augmentera pas votre RSA
15:39parce que tout le monde
15:39doit faire des efforts. »
15:41Ça veut dire que c'est
15:41un peu plus de 100 euros
15:42en moins dans l'année.
15:44Je pense qu'il y a une lecture
15:45technocratique,
15:46voire idéologique du sujet
15:47parce qu'on ne se rend pas compte
15:48ce que ça veut dire
15:4910 euros, 20 euros
15:50quand vous avez 650 euros
15:52par mois pour pouvoir survivre.
15:54Pour les associations
15:55que vous aidez,
15:57vous avez dit
15:57l'un des grands rôles
15:59de la Fondation pour le Logement
16:01c'est de financer,
16:03grâce aux dons que vous recevez,
16:05des centaines de projets associatifs
16:07de solidarité partout
16:08sur le territoire.
16:09Ça veut dire plus de demandeurs,
16:11plus de gens qui vont venir
16:12toquer à leur porte.
16:13Mais ça fait déjà 3-4 ans
16:14qu'on tire la sonnette d'alarme.
16:15Ces chiffres de l'INSEE
16:16viennent simplement qualifier
16:18par la statistique publique
16:19des réalités sociales,
16:20des souffrances énormes.
16:22dans ce pays.
16:23Et si vous voulez,
16:23ce budget,
16:24il n'est ni fait ni affaire
16:25et on demande sa révision
16:26à l'intention du gouvernement
16:29et des parlementaires
16:31pour pouvoir vraiment inverser.
16:32Je pense qu'il faut inverser
16:33complètement la logique.
16:34Juste une chose,
16:35on peut faire mieux.
16:37Nous avons fait les propositions
16:38avec le mouvement associatif
16:39et le pacte du pouvoir de vivre
16:40pour un budget
16:41qui aille redistribuer
16:43davantage les richesses,
16:44qui aille faire la chasse
16:45aussi aux dépenses inutiles,
16:46à des niches fiscales
16:47qui ne sont pas pertinentes
16:50en quelque sorte.
16:50Donc on a conscience
16:51de l'état budgétaire du pays,
16:52de la dette.
16:53Ce n'est pas quelque chose
16:54d'aveug ce qu'on est en train de dire.
16:55On a contribué.
16:56Je vous invite,
16:56j'invite vos auditeurs
16:57à aller voir cette contribution
16:58du pacte du pouvoir de vie.
16:59Mais qu'est-ce que nous a dit
17:00le Premier ministre ?
17:01Il n'a pas dit,
17:02on va aller chercher,
17:02il a parlé un peu rapidement
17:03des hauts patrimoines
17:04en étant très imprécis.
17:06Mais il a bien dit,
17:07on va geler les APL,
17:08on va geler le RSA,
17:09on va geler les pensions
17:10des retraites,
17:11y compris des ménages
17:12les plus fragiles.
17:14Ça veut dire qu'on va continuer
17:15à accentuer la pauvreté
17:16et creuser les inégalités
17:18dans ce pays.
17:19Juste pour vous mesurer
17:20de fil en aiguille
17:21ces petites décisions.
17:22Parce qu'on nous dit
17:22c'est 100 euros par an,
17:23ce n'est pas énorme.
17:24Mais ces petites décisions
17:25année par année,
17:25elles font que, par exemple,
17:27le RSA a décroché
17:28par rapport au SMIC.
17:29Quand on a créé le RMI en 88,
17:31il représentait à peu près
17:3240% du SMIC,
17:34le montant du RSA.
17:35Aujourd'hui, on est à 33,
17:36si vous voulez.
17:37Donc, sous couvert de
17:38Asistana, des débats
17:40qui ne sont ni faits ni à faire
17:41et qui sont complètement décalés
17:43par rapport à la réalité
17:44de ce que vivent les gens,
17:45eh bien, on finit par prendre
17:46des décisions,
17:46y compris vis-à-vis
17:47des plus pauvres.
17:48Franchement, c'est inacceptable.
17:49Alors, puisque vous dites,
17:49nous, on est prêts à discuter
17:50de solutions pour faire
17:52des économies, etc.
17:53Vous nous parliez
17:54de cette mobilisation
17:55que vous promettez
17:56à la rentrée, Claire Toury,
17:58avec le mouvement associatif.
17:59Il faudra discuter
18:00de la forme, dites-vous.
18:02Mais est-ce que
18:03le mouvement associatif
18:04est prêt à aussi discuter
18:06avec le gouvernement
18:06pour poser des pistes ?
18:08Puisque François Bayrou
18:09dit qu'il reste 2-3 mois
18:10avant l'examen du budget,
18:12discutons.
18:12On discute, nous.
18:13C'est notre boulot
18:14de discuter avec les pouvoirs publics.
18:15On passe notre temps
18:16à discuter.
18:16Donc, il n'y a pas de problème.
18:17La question, ce n'est pas de discuter.
18:18La question, c'est
18:18quelles sont les réponses
18:19qu'on peut offrir.
18:20Ce que dit Christophe Robert,
18:21c'est très important.
18:22C'est très important
18:23parce que ça veut dire quoi ?
18:24Ça veut dire que sous couvert
18:25de faire des économies,
18:26on crée des besoins
18:28la semaine prochaine,
18:29l'année prochaine.
18:30Et qui va devoir rattraper ça ?
18:31Les acteurs associatifs.
18:38Très, très fortement
18:39pour soutenir ce secteur associatif
18:41qui est absolument indispensable,
18:42dont on a absolument besoin
18:43et qui produit des choses merveilleuses.
18:45Il y a ça aussi
18:46qui est très important à rappeler.
18:47C'est merveilleux
18:48ce que le secteur associatif peut faire.
18:49Du pouvoir d'agir,
18:51du vivre ensemble,
18:51du collectif,
18:52du bien-être.
18:53Et puis une intervention
18:53là où personne d'autre ne va,
18:55ni le marché,
18:56ni l'État.
18:57Et c'est vertueux.
18:57Et un euro investi
18:58dans l'associatif,
18:59ça rapporte à terme ?
19:01Ça rapporte forcément.
19:02Alors, je ne veux pas
19:03me lancer dans ce chiffrage-là
19:04parce qu'il y a des débats
19:05d'économistes
19:06qui sont complexes.
19:07Mais en tout cas,
19:08ça rapporte forcément.
19:09Et donc ça,
19:09c'est très important de le dire.
19:10Et ça rapporte aussi
19:11sur le plan démocratique.
19:12Ça veut dire que c'est des gens
19:13qui sont en capacité
19:14de se rassembler
19:15pour faire des choses ensemble.
19:16Et donc,
19:17quand on voit
19:18les tempêtes démocratiques
19:19qu'on traverse,
19:20je pense qu'on a mieux à faire
19:21que d'embêter le monde associatif.
19:22Je m'arrête une minute
19:23sur la fondation
19:24pour le logement
19:25Christophe Robert
19:26dont on a beaucoup parlé
19:27ces derniers mois
19:29puisqu'après plus de 30 ans
19:30d'existence,
19:31vous avez dû changer de nom
19:32à cause des multiples accusations
19:35de violences sexuelles
19:37contre votre fondateur
19:39feu l'abbé Pierre.
19:40Est-ce que vous encalsez le choc ?
19:42Est-ce que des donateurs
19:43se sont détournés ?
19:45D'abord,
19:46nous sommes convaincus
19:47que c'était le bon choix
19:48avec le mouvement Emmaüs
19:48qu'à partir d'un premier témoignage,
19:51ouvrir une cellule d'écoute
19:52pour écouter,
19:53savoir s'il y avait eu
19:54d'autres victimes.
19:54Il y en a eu d'autres.
19:55C'est extrêmement grave.
19:56Des graves agissements
19:57de l'abbé Pierre.
19:58Donc,
19:58il n'y avait pas d'autres alternatives.
19:59Il fallait accompagner les victimes.
20:01Désormais,
20:02le mouvement Emmaüs
20:02va même aller vers
20:03des réparations financières
20:05conférences des évêques de France.
20:07Et il fallait changer de nom
20:08parce que c'est le combat
20:08qui importe.
20:09Le combat contre le mal-logement,
20:10contre les inégalités,
20:11contre l'indifférence,
20:12contre la précarité,
20:13contre les discriminations.
20:15Alors oui,
20:15il y a eu une baisse de dons
20:17qui ne nous empêche pas d'agir
20:18parce qu'on a une grosse capacité
20:19et il y a beaucoup de soutien
20:21de gens aussi
20:21qui nous ont encouragés
20:22dans cette démarche-là
20:23face à ce qui était impossible
20:25pour nous il y a encore deux ans.
20:26Donc,
20:27il y a eu une baisse de dons
20:27notamment de personnes
20:28qui ne sont pas contents
20:29qu'on ait enlevé l'abbé Pierre
20:31de notre nom.
20:32Bah oui.
20:33Oui, oui,
20:33parce que c'était une personnalité
20:34qui a beaucoup marqué le pays
20:35et qui a agi pour la solidarité.
20:37Voilà,
20:38donc on...
20:38Mais il y a beaucoup de gens
20:39aussi qui nous soutiennent.
20:40Maintenant,
20:40on a changé de nom.
20:41Nous,
20:41on veut se concentrer sur ce combat,
20:43ce combat contre le mal-logement,
20:44contre les injustices
20:45et les inégalités.
20:46Il y a beaucoup de soutien.
20:47Alors oui,
20:47ça réduit notre capacité
20:48d'aider les associations.
20:50Mais juste,
20:51je reviens sur notre sujet
20:52en deux mots.
20:52En disant,
20:53ce pays,
20:54il se caractérise aussi
20:55par sa force de protection sociale.
20:56On est au milieu du guet.
20:57Qu'est-ce qu'on fait ?
20:58Est-ce qu'on continue
20:59à être un des pays
21:00les plus puissants au monde
21:01dans la logique de solidarité,
21:03dans la logique de protection sociale,
21:05via les associations,
21:06via la contribution politique publique ?
21:09Parce que c'est aussi ça qu'il faut dire.
21:09Ce sera la conclusion
21:10en quelques secondes,
21:11mais c'est aussi ça qu'il faut dire
21:11qu'on a un modèle...
21:12Bien sûr.
21:13Mais attention,
21:14on est au milieu du guet.
21:16Moi,
21:16j'entends aujourd'hui
21:17des responsables politiques
21:17qui voudraient baisser la voilure,
21:19qui disent
21:20c'est plus possible de faire ça.
21:21Alors qu'on l'avait vanté
21:22à chaque fois qu'il y avait des crises
21:23en 2008
21:24avec la crise financière,
21:25en 2020
21:25avec la crise Covid,
21:26en disant
21:27on a un modèle formidable.
21:28Mais ce modèle formidable,
21:29il est bon
21:30tout au long de l'année,
21:31pas que face à des crises.
21:32Merci à tous les deux
21:34et on a entendu
21:34la puissance en effet
21:36de votre cri d'alarme
21:37pour le monde associatif.
21:39Ce matin,
21:40dans ce qu'on tient
21:40sur France Inter,
21:42Claire Toury,
21:43présidente du mouvement associatif
21:45qui représente
21:45une association sur deux en France
21:46et Christophe Robert,
21:48délégué général
21:48de la Fondation
21:49pour le logement
21:50des défavorisés.
21:51Dans quelques secondes,
21:52la revue de presse.
21:54, la revue de presse.
21:54Et la revue de presse.

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