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  • 24/07/2025
Dans son édito du 24/07/2025, Agnès Verdier-Molinié revient sur l'assurance chômage.

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Transcription
00:00Et oui, Anthony, ça y est, on commence à en entendre énormément parler.
00:03Il faut dire qu'en France, on a un problème sur l'incitation au retour à l'emploi,
00:07à la fois sur les 2,6 millions de chômeurs qui sont indemnisés par l'UNEDIC,
00:13et puis pour tous ceux qui sont bénéficiaires des minima sociaux,
00:15on n'arrive pas à pousser vraiment vers le retour à l'emploi,
00:18autant que dans les autres pays, beaucoup de pays européens n'hésitent pas,
00:23quand il y a des refus d'offres raisonnables d'emploi,
00:26à sanctionner dès le premier refus les demandeurs d'emploi,
00:30qu'ils soient indemnisés au chômage ou qu'ils soient aux minima sociaux.
00:33Par exemple, en Allemagne, le premier refus, c'est 30% de baisse de l'allocation.
00:39Et par exemple, au Royaume-Uni, c'est la suspension des allocations chômage pendant 3 mois
00:43si on refuse une première offre raisonnable d'emploi.
00:46Alors, on ne sanctionne pas et en plus, on n'a pas de dégressivité non plus, sauf pour les cadres.
00:51Oui, c'est vrai.
00:53Beaucoup de pays en Europe, la Belgique, l'Italie, la Suède, l'Allemagne, l'Espagne, les Pays-Bas,
00:59tous ces pays ont des dispositifs de dégressivité des allocations chômage
01:03pour tous les allocataires après un certain nombre de mois d'indemnisation.
01:07La Suède, par exemple, baisse de 10% à partir du 9e mois,
01:12l'Italie de 3% à partir du 6e mois.
01:14Il y a encore des baisses ensuite par mois de 3%.
01:17Et de notre côté, on a instauré la dégressivité, mais que pour les cadres.
01:22Voilà.
01:22À partir du 7e mois, une baisse de 30%.
01:25Cette dégressivité, elle économise très peu, environ 200 millions d'euros par an.
01:31Et en plus, ça pénalise ceux qui cotisent le plus et qui finalement, proportionnellement, touchent moins,
01:38puisqu'en fait, ils touchent deux tiers de leur cotisation
01:42et qu'avec le tiers restant, ils financent le chômage des autres.
01:45Et alors, dans les autres pays, la dégressivité, elle s'applique à tous.
01:49Et la durée d'indemnisation au chômage, elle est aussi plus courte qu'en France.
01:53Oui, alors c'est environ 15 mois en moyenne.
01:55Je rappelle qu'en France, en dessous de 50 ans, on est à 18 mois d'indemnisation.
02:02Pour les 55-56 ans, on est à 22 mois et quelques.
02:06Et pour les plus de 57 ans, on est à 27 mois.
02:08Les moins de 50 ans, ils passent, Anthony, en moyenne 8 à 10 mois au chômage en France.
02:15La réalité, c'est que tout le monde n'est pas indemnisé 18 mois.
02:18Mais c'est plus quand même que dans la plupart des pays européens.
02:23Et si on prend l'exemple allemand, en Allemagne, un demandeur d'emploi de 40 ans,
02:27il est indemnisé pendant 12 mois maximum.
02:30Donc, qu'est-ce qu'on comprend du projet actuel gouvernemental ?
02:34C'est qu'il voudrait baisser d'un quart la durée d'indemnisation actuelle pour faire 4 milliards d'euros d'économie.
02:41Ils veulent changer aussi la règle.
02:42Aujourd'hui, on cotise 6 mois sur 24 mois pour avoir droit à toucher le chômage.
02:49Maintenant, ce serait, avec la nouvelle réforme, 8 mois sur 20 mois.
02:53Alors, pourquoi est-ce que le gouvernement fait ça ?
02:55On a accumulé 60 milliards de dettes pour le chômage.
02:59Normalement, on ne devrait pas s'endetter pour financer le chômage.
03:03Ça veut dire qu'on repousse les dépenses de chômage des générations actuelles sur les générations futures.
03:10Et il y a quelque chose de très important à comprendre.
03:12C'est que l'assurance chômage, elle doit justement avoir des comptes sains
03:15pour pouvoir assurer le financement du chômage quand on est dans une période très difficile.
03:20Donc, si on s'endette même dans les périodes moins difficiles,
03:23eh bien, on se retrouve dans une situation où l'assurance chômage, peut-être, n'est pas viable.
03:27À condition que l'État ne fonctionne pas de plus en plus en plus.
03:31C'est ça, le problème.
03:33Et d'ailleurs, c'est ce que disent les syndicats ces derniers jours.
03:36Oui, mais en réalité, on fonctionne de plus en plus sur les cotisations des travailleurs, des salariés, du privé.
03:43C'est 4 milliards d'euros par an pour financer, notamment France Travail, dont on connaît les limites.
03:49Il y a très peu de personnes qui retrouvent un emploi grâce à France Travail.
03:53Et les partenaires sociaux, cela dit, ne sont pas tellement clairs, Anthony.
03:56Parce qu'ils veulent à la fois que l'État, finalement, ne leur impose pas des mesures de changement de l'assurance chômage
04:04et des droits des salariés du privé.
04:07Mais en même temps, ils sont bien contents de trouver la garantie de l'État sur la dette de l'assurance chômage.
04:12Et force est de constater que si, comme pour les complémentaires retraites,
04:16ils étaient totalement aux manettes et qu'ils n'avaient pas la garantie de l'État sur la dette,
04:21eh bien, ils auraient déjà pris des décisions.
04:24Alors, peut-être pas les mêmes que celles que le gouvernement,
04:28sur lesquelles il travaille aujourd'hui.
04:30Le gouvernement travaille sur ces pistes.
04:32Mais nous, on considère à la Fondation IFRAP que, finalement, les partenaires sociaux,
04:37ils auraient mis déjà en œuvre plus de dégressivité.
04:42Pourquoi ? Parce que c'est ça qui fonctionne pour faire des économies rapidement
04:46et pour inciter au retour à l'emploi.
04:48Et par exemple, nous, ce qu'on avait étudié, c'était une économie de 3 milliards d'euros
04:53avec une dégressivité de 5% au bout de 9 mois
04:56et ensuite de 3% au bout de 15 mois.
04:59Eh bien, là, c'est 3 milliards d'euros d'économies.
05:01Donc, la réalité, c'est que les partenaires sociaux et les syndicats,
05:05on va dire, qui ne veulent pas de réforme de l'assurance chômage,
05:08eh bien, il faudra en faire une.
05:10La question, c'est laquelle ?
05:12Si on s'inspire des autres pays européens,
05:14c'est plutôt la dégressivité qu'il faudrait adopter.

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