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  • il y a 4 jours

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00:00Europe 1 Soir Week-end, 19h21, Guillaume Lariche.
00:04Et pour ce dernier quart d'heure d'Europe 1 Soir Week-end, je suis toujours en compagnie de Sarah Salman et de Nathan Devers.
00:10Sarah, avocate et Nathan, écrivain et philosophe, une petite question, comme ça, une petite devinette.
00:14Est-ce que vous savez de quand ça date la Légion d'honneur ?
00:171802 ou 3 ?
00:19Bravo, à vous !
00:21C'est ça ?
00:21Sous Napoléon, Bonaparte.
00:23Effectivement, 1802, ça distingue environ 2500 personnes par an, dont 300 étrangers.
00:28Là, sur la promotion de cet été, on a eu 589 personnes distinguées.
00:32Maëlle, dans son journal permanent, en a parlé de plusieurs.
00:36Moi, Nathan Devers, ce qui retient surtout mon attention, c'est la décoration de Gisèle Pellicot,
00:40saluée pour son engagement contre les violences sexistes et sexuelles.
00:43Dame, on le rappelle, droguée pendant des années par son mari pour être livrée ensuite à des hommes.
00:47Est-ce que c'est primordial pour vous que l'État distingue aussi cette femme, selon vous ?
00:51J'ai une réserve de principes sur la Légion d'honneur.
00:54On fait souvent la distinction entre l'honneur au singulier et les honneurs au pluriel.
00:58Et peut-être que les deux sont contradictoires.
01:02Quand quelqu'un sert l'intérêt général, quand quelqu'un sert sa nation,
01:07est-ce qu'il a besoin d'avoir une petite médaille qui vient le reconnaître ?
01:12Je n'en suis pas certain.
01:13D'ailleurs, vous parlez de l'histoire de la Légion d'honneur,
01:17ça a été créé entre guillemets pour remplacer l'aristocratie du sang par une aristocratie du mérite.
01:21Donc ça, bon, d'accord, mais est-ce qu'on a besoin quand même d'être attaché à tout ce côté protocolaire
01:26de l'aristocratie et des petites médailles et des lauriers, etc.
01:29Bon, maintenant, si on part du principe que la Légion d'honneur est légitime,
01:35moi j'en doute un petit peu, je comprends qu'on ait voulu la remettre à Gisèle Pellicot.
01:39Parce que Gisèle Pellicot a été incontestablement un visage marquant,
01:45et une personne marquante pour cette année, pour une raison très simple,
01:48c'est qu'elle a décidé que son procès ne soit pas à huis clos.
01:51Elle a, ce faisant, cassé une sorte de loi silencieuse, terrible,
01:56selon laquelle les victimes devaient, après avoir souffert, être humiliées,
02:01avoir honte de leur statut de victime, et donc le silencier se taire.
02:04Et elle a donné, par son courage, la possibilité de porter une lumière vivace,
02:12terrible, difficile, aveuglante, impossible à regarder en face,
02:16sur la réalité des crimes dits de Mazan, et sur la réalité de leur signification.
02:21Et je crois qu'il y a eu véritablement, enfin je constate d'ailleurs,
02:25ce n'est pas une croyance, qu'il y a eu véritablement un avant et un après procès de Mazan,
02:30et que tout cela a reposé sur le courage de cette femme.
02:33Et une dernière remarque, elle a fait face pendant son procès à des stratégies de défense
02:37du côté des avocats de certains accusés, qui étaient parfois vraiment abominables,
02:41indécentes, déloyales, et elle a affronté tout cela avec une très grande détermination.
02:48Je crois savoir qu'un jour il est question qu'elle prenne peut-être la parole à travers un livre,
02:51à travers une série, et peut-être les deux, et je crois que beaucoup de gens ont hâte
02:55d'entendre ce qu'elle dira publiquement.
02:56Alors à l'opposé, Sarah Salman, d'autres personnalités ont été décorées aujourd'hui.
03:01J'aimerais revenir sur Gisèle Pellicot, parce que vous avez raison de souligner la souffrance
03:05qu'elle a endurée, je pense qu'on est tous d'accord là-dessus, c'est innommable,
03:08c'est terrible, mais est-ce que pour autant c'est le rôle de la Légion d'honneur
03:13de récompenser Madame Pellicot ?
03:14Et pour autant, je ne nie absolument pas sa souffrance.
03:16Non, on peut s'interroger, sans forcément...
03:18Quand on regarde, il y a des critères, et les critères sont assez clairs,
03:22c'est notamment avoir au moins 20 ans de service ou d'activité professionnelle
03:26rendant des services remarquables à la France.
03:29Elle a énormément souffert pendant plusieurs, je crois que c'est 10 ans à peu près,
03:32je me trompe peut-être, mais est-ce que ça rentre dans les critères ?
03:36C'est la simple question que je me pose, parce qu'une fois qu'on a décoré Madame Pellicot,
03:39et personnellement ça ne me pose aucun problème,
03:41est-ce que demain, il faudra décorer d'autres victimes,
03:44et si oui, est-ce que le critère sera la souffrance en durée ?
03:47Est-ce que ce sera d'avoir laissé le huis clos ou pas ?
03:50Et qu'il y aura finalement des nouveaux critères ?
03:52Donc est-ce que ça fait jurisprudence d'une certaine manière ?
03:55Et maintenant, d'autres victimes pourront dire
03:56« Moi aussi, j'ai énormément souffert, et pourquoi je n'ai pas été décoré ? »
04:00C'est une question qu'on peut se poser.
04:01Ou alors, on considère que finalement, les critères initiaux n'existent plus tellement,
04:06et vu la liste qu'il y a, oui, on peut s'interroger.
04:08Il est 20h51, vous écoutez Europe 1 soir, week-end.
04:10Justement, la liste est importante, on fait le grand écart,
04:13Léa Drucker, Marc Lévy, l'écrivain, l'humoriste Sofia Aram,
04:16ou encore l'historienne Mona Ozouf,
04:18même Jean-Louis Hubert, le musicien.
04:21On parle de sens quand même aussi là-dedans, c'est ce que vous évoquez ?
04:23Oui, et dans le même temps, vous avez des personnes qui se voient retirer
04:25leur Légion d'honneur, comme Nicolas Sarkozy,
04:27ce qui est quelque chose qui, moi, me choque,
04:29parce que parmi les personnes à qui on a retiré la Légion d'honneur,
04:32il y a eu, je crois, le maréchal Pétain et Nicolas Sarkozy.
04:34Donc ça pose quand même un problème.
04:36Et sur Nicolas Sarkozy, il a été président de la République, on le sait,
04:39mais il aurait pu aussi avoir la Légion d'honneur pour ce qu'il a fait en,
04:43je ne sais plus si c'était en 93 ou 95,
04:46pour Human Boom, quand il a libéré des enfants Neuilly.
04:50Exactement, donc rien que pour ça, il aurait pu l'avoir,
04:52c'était sous Mitterrand, il ne l'a pas eu.
04:53Et là, on lui retire.
04:54Donc moi, c'est quelque chose qui me pose quand même un problème,
04:56qu'on lui retire et dans le même temps,
04:58on donne la Légion d'honneur.
05:00Alors, est-ce qu'il y a du copinage ?
05:01Oui, sûrement.
05:02Est-ce qu'il y a des gens qui le méritent ?
05:03Oui, également.
05:04Mais pas dans les gens que vous avez cités,
05:06mais parmi les 500 noms,
05:07il y a des gens où, oui, on peut s'interroger.
05:09Alors, vous parlez de copinage,
05:11je vais vous laisser la parole, Nathan, dans un instant.
05:13Justement, certains noms d'anciers responsables politiques
05:15font un peu grincer des dents.
05:16On a, par exemple, Bruno Le Maire,
05:18Éric Ducont-Moretti,
05:19Stanislas Guérini,
05:20Stéphane Le Foll, ancien ministre de l'Agriculture,
05:22l'ex-secrétaire général de l'Elysée,
05:24ex-écoleur.
05:25Ça ressemble un petit peu à de l'entre-soi,
05:26un petit peu du copinage, justement, Nathan Devers.
05:29Mais oui, mais est-ce que c'est nouveau ?
05:30Tout le monde a en tête le film génial,
05:33le grand restaurant.
05:33C'est pour ça que je vous disais que j'étais un peu dubitatif
05:38sur le principe même de la Légion d'honneur.
05:40Vous vous souvenez de ce film très, très drôle,
05:41Le Grand Restaurant ?
05:42Enfin, en tout cas, le début est très drôle.
05:44Et quand De Funès va voir le commissaire
05:46qui joue le patron du restaurant,
05:47va voir le commissaire Blié tout au long du film,
05:48et c'est le running gag du film,
05:50il lui demande absolument la Légion d'honneur
05:51pour service rendu,
05:53alors qu'il s'agit de retrouver le président Morales
05:55qui avait été enlevé.
05:57Et Louis De Funès incarnait ça de façon tellement drôle,
06:00ce côté un peu mesquin, un peu arriviste,
06:03de vouloir avoir sa petite médaille
06:05et le jouer avec quelque chose de tellement mesquin
06:08que ça reflétait bien un regard burlesque
06:10sur la Légion d'honneur.
06:11Je crois que oui, c'est intrinsèque à la logique
06:13depuis, pour le coup, Napoléon.
06:15Quand vous avez des ministres,
06:18des présidents de la République, etc.,
06:20qui distribuent des médailles,
06:23eh bien, par principe,
06:24vous avez toutes sortes de courtisans
06:26qui sont prêts à tout faire pour avoir la médaille.
06:28Et puis, vous avez des gens,
06:29je ne sais pas, Jean-Paul Sartre,
06:31je crois que Thomas Piketty avait fait ça,
06:34qui refusent les médailles
06:35et qui les refusent parce qu'ils disent
06:37je n'ai pas besoin,
06:38il avait dit ça au sujet du Nobel,
06:40qu'une assemblée de vieux messieurs
06:42puisse décider si mes livres sont bons ou non.
06:44Je veux que ce soit les lecteurs qui en décident.
06:46On pourrait dire pour un musicien,
06:48ses auditeurs et ses admirateurs, etc., etc.
06:52Si on vous la propose, vous allez la refuser ?
06:53On ne me la proposerait pas.
06:54Et je crois qu'il faut un peu candidater quand même.
06:56Il faut un peu faire campagne.
06:57Et surtout, il faut 20 ans d'ancienneté.
06:59Il faut 20 ans d'ancienneté.
07:00On peut voir loin.
07:02Non, je ne vois pas pourquoi je le ferais
07:04parce que ce côté médaille,
07:06moi, je ne le trouve pas très attirant.
07:08En tout cas, pour moi.
07:10Sarah Salmane, ça vous a fait réagir ce que je disais.
07:12Vous alliez lui proposer, lui dire,
07:13oui, si jamais on vous propose.
07:15Oui, parce que vous parliez de Jean-Paul Sartre
07:16qui l'avait refusé.
07:17Et c'est vrai qu'il y a plus de gens
07:19qui essaient de l'avoir
07:20que de gens qui la refusent.
07:22C'est quand même un titre honorifique.
07:24Alors après, il y a quand même beaucoup...
07:26C'est ça, c'est honorifique
07:26puisque ça distingue au départ
07:27les militaires comme les civils
07:28qui ont rendu des services éminents à la nation.
07:30Oui, c'est pour ça que je disais le pellicot.
07:33Même si elle a beaucoup souffert,
07:34je me posais la question
07:35est-ce que ça rentre vraiment dans la définition ?
07:37Et là, on parle de gens...
07:38Peut-être pour les femmes,
07:39pour arriver à décomplexer justement la parole
07:41et d'arriver à le dire
07:42et à s'affirmer.
07:43Oui, c'est une construction intellectuelle.
07:45On peut estimer que c'est un service rendu.
07:47Après, ça veut dire que les critères
07:48sont assez extensifs.
07:49Et encore une fois,
07:50moi, ça ne me pose aucun problème
07:52qu'elle l'ait reçu.
07:52Mais pour d'autres victimes
07:54qui diront
07:55moi aussi, j'ai beaucoup souffert,
07:56ça peut poser question.
07:57Et il y a aussi
07:57beaucoup d'anonymes,
07:59de gens qui tous les jours
08:00triment et rendent beaucoup de services
08:01à la France
08:02qui font des travaux pénibles et tout
08:04et qui eux ne seront jamais récompensés.
08:06Alors justement, Sarah,
08:07il y a une nouveauté cette année,
08:07la mise en place
08:08de l'initiative citoyenne
08:09pour décorer une vingtaine de personnes
08:11parmi les citoyens méritants
08:12comme des responsables associatifs,
08:14des élus locaux,
08:14des professeurs, des médecins.
08:16N'attendez vers ce mécanisme
08:17instauré par Nicolas Sarkozy
08:19en 2008 et réactivé cette année
08:20permet d'adresser directement
08:21des candidatures
08:22à la grande chancellerie
08:23pour faire émerger
08:24des profils hors des circuits
08:25tradis, j'ai envie de dire,
08:27par les ministères.
08:28Est-ce que c'est une bonne chose
08:29selon vous, Nathan de Vert ?
08:30Oui.
08:31Parce que pour Sarah,
08:31je pense qu'elle va dire oui.
08:32Oui, mais plutôt aussi.
08:35Ce n'est pas forcément
08:36des personnalités célèbres,
08:40des gens influents,
08:42des gens qui ont un grand pouvoir
08:43symbolique,
08:44qui servent le mieux la France.
08:46On parlait tout à l'heure
08:47du coronavirus
08:48et tout le monde se souvient
08:49qu'au moment du coronavirus,
08:50ceux qui ont soutenu
08:51la France à bout de bras,
08:53c'était des gens,
08:54je n'aime pas le mot,
08:54mais entre guillemets
08:55ce qu'on appelle des anonymes,
08:56c'est-à-dire des gens
08:57qui n'avaient pas d'existence publique.
08:59Et il y a quelque chose,
08:59c'est pour ça que je vous disais,
09:00j'ai un peu de mal
09:01avec cette notion
09:01de Légion d'honneur.
09:03Pourquoi faudrait-il
09:04être un chanteur super connu,
09:06un écrivain
09:07qui vence des best-sellers,
09:09un ancien ministre,
09:10un grand militaire,
09:12pour servir la France
09:13plus que les autres ?
09:15Il y a des gens
09:15qui servent la France
09:16et qui servent notre société.
09:18Après, sur les plus de 500,
09:19on cite les plus connus,
09:20c'est normal,
09:21il y en a d'autres.
09:21500, ça fait beaucoup de monde.
09:22Il y en a à peu près
09:232500 par an.
09:24Oui, c'est ça.
09:24Parce qu'il y a une promotion
09:25en janvier aussi.
09:26Exactement.
09:27Mais les gens
09:28qui sont allés bosser
09:29pendant le coronavirus,
09:30qui ont tenu la France
09:32à bout de bras,
09:33les gens qui se lèvent tôt
09:34pour aller travailler,
09:35les gens, vous le citez,
09:35qui font des associations
09:38et un travail formidable,
09:40bénévole, etc.
09:42Ces gens-là,
09:42ils servent la France.
09:43Mais ils ne sont jamais récompensés.
09:44Et ils ne sont jamais récompensés.
09:45Et jamais remerciés.
09:46Et ils n'ont pas de reconnaissance.
09:48Et ils sont mal payés.
09:49Et en plus,
09:49ils sont mal payés.
09:50En tout cas,
09:50demain, 14 juillet,
09:51ça va être au tour des militaires
09:53d'être récompensés
09:54et fêtés
09:54lors du défilé du 14 juillet.
09:56Je serai devant ma télé.
09:57Je ne sais pas
09:57où est-ce que vous serez.
09:58À la télé, peut-être.
10:00En tout cas,
10:01merci Nathan Devers.
10:01Merci à vous.
10:02Merci à vous.
10:02Merci à vous.
10:02Merci à vous d'avoir participé
10:03ce soir à Europe 1 Soir Week-end.

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