Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • avant-hier
Emmanuel Macron et le Premier ministre britannique Keir Starmer doivent aborder la question de l'immigration illégale dans la Manche. Depuis le début de l'année, plus de 20.000 hommes, femmes et enfants ont réussi à rejoindre le Royaume-Uni. . Ils sont prêts à tout pour rejoindre l'Angleterre : qui sont-ils ? Pourquoi l'Angleterre à tout prix ? Brigitte, 69 ans, est retraitée depuis 7 ans. Il y a 20 ans, des réfugiés sonnent chez elle pour demander de l'eau. Depuis, celle que l'on surnomme aujourd'hui "Mamie charge" leur ouvre trois fois par jour son garage, près de Calais, pour recharger leurs téléphones, manger et se réchauffer un peu...
Regardez L'invité de RTL Matin avec Stéphane Carpentier du 10 juillet 2025.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:007h10, RTL Matin, avec Stéphane Carpentier.
00:04A 8h18, en vous souhaitant la bienvenue, on va ouvrir le dossier des migrants ce matin, car c'est l'actualité.
00:09Le sujet sensible sera au cœur des discussions du jour à Londres, lors du 37e sommet franco-britannique.
00:14Emmanuel Macron est outre-Manche, la Manche que de plus en plus de migrants traversent depuis nos plages.
00:20Pour rejoindre les côtes anglaises, 20 000 hommes et femmes depuis le début de cette année, record depuis 2018, 7 000 de plus que l'an dernier.
00:28« Eux ont réussi, beaucoup échouent et certains meurent ».
00:32Et je voudrais qu'on en parle en direct ce matin avec Brigitte Lips, une habitante des environs de Calais, qui est connectée en direct.
00:38Bonjour à vous.
00:40Bonjour, bonjour Stéphane.
00:41Brigitte, ça fait des années que vous aidez ces personnes qui rêvent d'Angleterre, qui fuient des pays en guerre.
00:46Vous leur ouvrez chaque jour votre garage pour leur servir un café, pour qu'ils se réchauffent quand il fait froid, pour qu'ils rechargent leur téléphone portable.
00:54Vous avez été rebaptisée d'ailleurs « Mamie Charge », on va y revenir.
00:57Je voudrais d'abord qu'on explique les choses aux auditeurs, Brigitte, ensemble.
01:01Vous qui les voyez, vous qui les côtoyez, qui sont-ils ces exilés ?
01:06Alors actuellement, j'ai un très grand groupe d'Erythréens.
01:10Donc ils fuient l'Erythré parce qu'ils sont pour la plupart enrôlés à vie.
01:15Ils sont jeunes et beaucoup arrivent d'Allemagne actuellement.
01:23Ils fuient l'Allemagne parce qu'ils ont peur que leurs papiers ne soient pas renouvelés.
01:27Parce que pour beaucoup, ils ont des papiers.
01:30Donc là, en ce moment, c'est plutôt des réfugiés érythréens qui fuient l'Allemagne
01:35parce qu'ils ont peur de ne pas avoir leurs papiers renouvelés.
01:40Et ils veulent passer en Angleterre.
01:42Ils fuient leur situation, évidemment.
01:44Généralement, ils fuient des pays en guerre, c'est ça ?
01:47Oui, oui, oui.
01:49Alors, pour les Érythréens, ils sont enrôlés à vie dans l'armée.
01:54Et ça ne finit jamais, en fait.
01:57Pour les Érythréens, c'est ça.
01:58Pour les Soudanais, forcément, il y a la guerre chez eux.
02:01Les Iraniens, c'est pareil.
02:04J'ai beaucoup d'Érythréens, d'Éthiopiens, d'Iraniens, de Soudanais.
02:09C'est des vagues, en fait.
02:11Comme le camp des Érythréens est près de chez moi,
02:14c'est plus facile pour eux de venir à la maison.
02:17Vous nous dites, Brigitte, qu'ils sont régulièrement plutôt jeunes.
02:20Est-ce que ce sont particulièrement des hommes ?
02:24Oui, mais il y a des femmes aussi.
02:26Mais les femmes sont sur le camp.
02:27Moi, je vois des femmes de temps en temps, quelquefois le midi.
02:31Mais les femmes restent sur le camp, comme dans le temps.
02:35Chez nous, les mamans, elles étaient à la cuisine et à la lessive.
02:39Les femmes tiennent le camp.
02:40C'est pour ça qu'on les voit moins.
02:42Alors, ils fuient, ces migrants, ces exilés.
02:45Ils effectuent un vrai périple.
02:47Quelles sont leurs motivations ?
02:48Ils ont vraiment le sentiment qu'une nouvelle vie va s'offrir à eux,
02:51de l'autre côté de la Manche ?
02:53Oui, bien sûr.
02:53Alors, ils vont rencontrer une de leurs communautés,
03:01quelquefois des cousins, des frères, des sœurs.
03:05Mais s'ils n'ont pas de lien avec quelqu'un en Angleterre,
03:12ils arrivent dans une communauté et ils sont accueillis.
03:14C'est ça l'objectif.
03:17C'est l'Angleterre à tout prix.
03:19Il y a ces migrants qui réussissent, d'autres qui échouent.
03:22Il y a ces migrants qui meurent en mer aussi.
03:25Ils connaissent les dangers avant de se lancer.
03:28Oui, oui.
03:29Alors, souvent, quand je leur demande
03:31« Est-ce que tu savais que c'était comme ça les camps à Calais ? »
03:35Ils me disent « Non, on ne s'y attendait pas du tout. »
03:38Mais je dis « Si tu avais su que c'était comme ça,
03:42est-ce que tu serais venu quand même ? »
03:44Et là, ils disent « Oui ».
03:46On n'a pas le choix.
03:48On fuit le pays.
03:50On fuit la dictature, beaucoup, pour beaucoup.
03:54Et ils veulent apprendre.
03:56Ils ont soif d'avoir un métier, d'apprendre.
04:00J'ai eu une petite Turque la fois dernière, 26 ans,
04:05qui a fui son pays parce qu'elle ne peut pas étudier
04:08et qui veut aller en Angleterre à tout prix
04:11pour pouvoir faire des études et être professeure.
04:15Ça, elle, c'est son but.
04:17L'Angleterre à tout prix, vous nous dites, Brigitte Lips,
04:19alors qu'ils ne sont pas forcément les bienvenus sur place.
04:21Les Anglais, ils voudraient qu'on empêche les bateaux de partir,
04:24ces fameux Zodiacs à bord desquels ils s'entassent.
04:26Le ministre de l'Intérieur aussi, en France, chez nous,
04:29souhaite durcir les choses.
04:30Ça, c'est la réalité.
04:31Est-ce qu'ils arrivent à le mesurer, ça ?
04:33Non. Bien sûr que non.
04:35Pour eux, un jour ou l'autre, ils passeront.
04:37Ils n'ont pas réussi aujourd'hui.
04:39Ils n'ont pas réussi demain.
04:41Ils réussiront forcément un jour.
04:43Pour eux, c'est leur but ultime.
04:47Et puis, si, alors je dis, mais tu peux mourir en mer,
04:50eh bien, c'est que Dieu l'aura voulu.
04:52Le naufrage du 27 octobre, l'année dernière,
04:58j'en ai eu 10 d'une équipe d'ici,
05:01qui venait régulièrement, tous les jours.
05:03J'en ai eu 10 qui sont morts.
05:05Et j'ai Youssi, qui lui, il savait nager,
05:09parce que généralement, ils ne savent pas nager.
05:12Lui, il savait nager.
05:13Il a eu la vie sauf grâce à ça.
05:15Et il a dit, mamie, Nati est mort.
05:20Un tel, un tel, un tel est mort.
05:22Et comme j'avais fait un reportage,
05:24on a repassé les images.
05:26Et il m'a montré les images de ceux qui étaient morts en mer.
05:30Et quand il se noie, il ne crie pas help.
05:35Il crie leur nom.
05:37Il crie leur nom pour que ceux qui sont rescapés
05:40puissent dire à leur famille qu'ils sont morts en mer.
05:43C'est une situation, Brigitte Lips,
05:45qui n'est pas facile à gérer chez nous, dans votre région.
05:48D'abord par les policiers, évidemment,
05:50par les bénévoles d'associations qui les soutiennent.
05:52Il y a des habitants qui n'en peuvent plus de leur présence
05:55parce qu'il y a des violences.
05:56Ça divise forcément ?
05:58Oui, bien sûr.
06:00Moi, dans ma rue,
06:02il y a beaucoup de gens qui ne sont pas d'accord
06:05avec l'action que je fais.
06:07Mais moi, je leur dis,
06:08ils ne viennent pas spécialement de la Corne d'Afrique
06:10pour venir charger leur téléphone chez moi.
06:13Et puis, il y a un point de fixation
06:16pour donner les repas.
06:17Le gouvernement français a très bien fait les choses.
06:21Il y a un point de fixation tout près de chez moi.
06:23Donc, ils ne viennent pas forcément que chez moi.
06:26Ils vont aussi chercher leur repas.
06:29Mamie Charge, c'est votre survie.
06:31Oui, c'est ce qu'ils m'ont dit, oui.
06:33Parce qu'évidemment, ils viennent chez vous,
06:34donc dans ce fameux garage
06:36où vous leur permettez de charger le téléphone portable
06:38ou vous leur servez quoi ?
06:40Té café, la chaleur humaine aussi ?
06:43Oui, mais beaucoup plus.
06:44Oui, beaucoup de chaleur humaine.
06:46Le matin, là aujourd'hui,
06:48j'en ai un qui arrive.
06:49Hier matin, j'en avais 15.
06:51Eh bien, ils sortent les chaises,
06:53ils sortent la table
06:54et ils prennent le petit déjeuner.
06:56Donc, thé café.
06:57J'ai eu du pain encore hier soir gratuitement.
07:00J'ai eu des prunes.
07:02Donc, il y a des gens qui me portent des vêtements,
07:05du sucre.
07:07Donc, je suis un petit peu aidée comme ça.
07:09Et là, ce matin, il y a du fromage
07:11pour mettre sur le pain
07:12ou de la crème fraîche.
07:14C'est ce que j'ai trouvé.
07:16Brigitte, ma question va peut-être vous paraître
07:18un peu stupide,
07:18mais pourquoi vous faites ça ?
07:21Ah, je fais ça ?
07:22Alors, au nom de ma foi,
07:25de ma foi chrétienne.
07:26Je suis créée et les évangiles nous demandent
07:33de nous occuper des petits.
07:36Alors, il y a des fois,
07:37les gens qui disent,
07:39oh, et les SDF ?
07:41Eh bien, figurez-vous,
07:42aussi, de temps en temps,
07:43quand ils ont besoin d'un coup de main,
07:45dans les associations,
07:47je vais et je donne de mon temps
07:49ou de mon savoir-faire.
07:52Je fais un repas.
07:55quand c'est utile
07:58et quand on a besoin.
08:00Merci à vous d'avoir partagé tout cela
08:02avec les auditeurs.
08:03Depuis chez vous, en direct,
08:05en pleine activité,
08:05on l'entend,
08:06puisque ces migrants
08:07ne sont pas chez vous quotidiennement,
08:08trois fois par jour,
08:09si je ne me trompe pas.
08:10Et votre histoire,
08:11votre générosité,
08:12elle est parfaitement racontée
08:12dans Mamicharge,
08:13donc,
08:14une vie au service des migrants.
08:16C'est aux éditions...

Recommandations