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Dans ce premier épisode de ÇA VA TOMBER, nous recevons Virginie Plaut, réalisatrice du documentaire "Belle-mère, la place empoisonnée" qui sera diffusé sur Teva le 19 mars 2025 puis disponible en replay.

"En 2019, selon l’Insee, 9% des familles françaises étaient recomposées et 800.000 beaux-parents habitaient avec les enfants de leurs conjoints.

Malgré ce schéma familial répandu, rares sont les représentations positives des belles-mères. Dans la fiction, elles sont caricaturales : tantôt cruelles, tantôt bonne copine. Pas de demi-mesure. Aux yeux de la loi française, elle n’ont pas de statut, pas d’existence reconnue. Au sein de la famille, elles subissent une charge mentale XXL, la solitude et une mise en compétition stérile avec la “vraie” mère. Consacrer un documentaire aux belles-mères, c’est raconter des liens qui n’ont pas de nom, ni d’existence juridique. C’est aussi élargir la notion de parentalité au-delà du seul biologique. S’interroger sur leur absence de place, c’est traverser trente années d’évolution de la famille et déconstruire ses représentations idéalisées dans la société. C’est questionner la capacité de cette institution à faire place à d’autres modèles alors que la PMA des femmes seules et l’adoption par des couples homosexuels dessinent d’autres manières de faire famille. C’est se pencher enfin sur les doubles standards qui sévissent dans la parentalité et se répercutent sur la belle-mère."
Transcription
00:00Bonjour Virginie. Bonjour Delphine.
00:02Aujourd'hui, on t'accueille pour la sortie de ton documentaire
00:05« Belle-mère, la place empoisonnée », donc le 19 mars, sur Teva.
00:08C'est ça.
00:09Je vais commencer direct avec le nom « Belle-mère, la place empoisonnée ».
00:13C'est vrai que le nom « Belle-mère », « Belle-mère », « Marâthe », « Sorcière »,
00:17c'est toujours quelque chose qui est encore compliqué à assumer en 2025.
00:21Oui, encore aujourd'hui dans l'imaginaire collectif.
00:25Mais même, il y a beaucoup de « Belle-mère » que j'ai rencontrées qui me disent
00:28« J'aime pas trop qu'on m'appelle belle-mère »,
00:30parce que derrière, tout de suite, c'est la méchante marâde de Cendrillon.
00:34Exactement.
00:35C'est celle qui veut du mal aux enfants, quoi.
00:37Oui, ça a une image connotée négative, ou alors c'est la mère de notre conjoint.
00:41Donc c'est pareil, c'est un petit peu compliqué de se positionner sur ce mot.
00:47Déjà, c'est un vrai problème, c'est qu'on n'a pas un mot qui nous définit « nous »,
00:51alors qu'en anglais, il y a « mother-in-law » et « stepmother »
00:54qui définissent vraiment deux personnes différentes.
00:58Moi, là, quand je parle de mon documentaire, je dis toujours « belle-mère, la nouvelle femme du père ».
01:03C'est quand même fou.
01:05C'est vrai que chez nous, ça résonne pas mal chez Parents épuisés,
01:07parce qu'on a sorti un podcast qui s'appelle « Belle-mère épuisée »
01:10et sur lequel on a passé des heures à chercher le nom,
01:13justement parce que « belle-mère » n'est pas que la nouvelle femme du conjoint.
01:19Et c'est vrai qu'on s'est dit « bon, on est parents épuisés,
01:21les gens vont quand même comprendre ».
01:24Mais très vite, on a ressenti aussi dans les interviews qu'on a menées,
01:27et peut-être que tu vas nous en parler,
01:28rien que la définition de ce mot résonne avec la place aussi qui n'est pas claire.
01:35De toute façon, tout ce qui n'est pas nommé clairement,
01:39c'est qu'il y a un flou derrière.
01:41Et en fait, quand on devient « belle-mère »,
01:43en tout cas, nouvelle compagne du père, c'est la grosse question.
01:47Qui suis-je ?
01:48Quelle est ma place ?
01:49Qu'est-ce qu'on attend de moi ?
01:50Qu'est-ce qu'on veut de moi ?
01:52Et en fait, j'ai l'impression que ce n'est pas seulement au début,
01:56c'est un peu tout au long de sa carrière de belle-mère.
01:58La carrière.
02:00C'est ça qu'on se pose cette question.
02:03Moi encore, ma belle-fille, aujourd'hui, elle a 21 ans,
02:05mais du coup, maintenant, très honnêtement,
02:08je la considère comme ma fille.
02:09Donc, je me permets de lui dire des choses,
02:12mais parfois, avec le recul, je me dis « Ok, je ne suis pas sa mère.
02:16Est-ce qu'en tant que belle-mère, j'ai le droit de lui donner mon avis ? »
02:20On a aussi un changement sociétal qui s'est quand même opéré
02:23ces 20 dernières années.
02:24C'est-à-dire qu'aujourd'hui, les belles-mères de 2025,
02:26ce n'est pas nécessairement celle des années 80,
02:28ne serait-ce que la garde alternée qui est arrivée de plus en plus.
02:32Ce n'est pas encore le modèle familial le plus répandu
02:35chez les personnes séparées.
02:37Mais c'est vrai que par rapport aux années 80,
02:40où il y avait un week-end sur deux chez le papa,
02:42aujourd'hui, la charge qui est attribuée à la belle-mère
02:44est bien plus importante.
02:46Oui, et puis de toute façon,
02:48même si on a l'impression que la société évolue,
02:50il n'empêche que souvent,
02:52même dans les couples, on va dire, modernes,
02:56naturellement, la femme s'occupe quand même
02:58beaucoup du foyer, des courses,
03:02des lessives, de plein de choses.
03:05Et ce qui fait que, d'autant plus quand il y a un enfant partagé,
03:08on ne va pas faire des courses pour notre enfant à nous
03:11et pas pour nos enfants.
03:13Enfin, c'est ce qui fait que ça nous retombe dessus
03:15d'une manière ou d'une autre.
03:16Oui, j'en profite sur le « ça nous retombe dessus ».
03:19Sur le documentaire, il y avait
03:20« Tu es la responsable du moindre paix de travers
03:23dans la famille recomposée.
03:25Tout ce que tu pourras dire sera retenu contre toi ».
03:27C'est assez fort.
03:27C'est souvent ce qu'on entend.
03:30Par exemple, on peut prendre l'exemple d'adolescent.
03:35Si, par exemple, il y a un beau-fils ou une belle-fille
03:37qui est adolescent, à cet âge-là,
03:39le but d'un adolescent, c'est de s'opposer à ses parents.
03:42Par exemple, la belle-mère, elle est idéale
03:44parce qu'on peut s'opposer à elle
03:46au lieu de s'opposer à sa mère.
03:48Il n'y a pas autant de conséquences, on va dire.
03:50C'est le punching ball.
03:51On pratique la parentalité
03:54sans la reconnaissance sociale qui va avec.
03:57Est-ce que c'est quelque chose
03:58que tu as expérimenté, toi aussi ?
04:00Alors, moi, j'ai eu cette chance
04:02que dans ma famille,
04:04recomposée dans ma famille au sens large,
04:07tout de suite, mon compagnon m'a donné une place
04:09en me disant « on est une famille ».
04:12Et donc, toi aussi, tu as ton mot à dire
04:14et à gérer, y compris la discipline,
04:18le comportement dans les repas, l'école, etc.
04:21Et ma famille de sens,
04:23c'est-à-dire mes parents et ma sœur
04:24sont extrêmement bienveillants
04:26et donc ont toujours compris l'investissement
04:28que je mettais dans cette petite fille
04:31que j'ai connue quand elle avait 4 ans.
04:33Mais c'est vrai qu'autour de moi,
04:35quand je disais « non, je ne peux pas sortir,
04:37je ne peux pas aller dîner
04:38parce que c'est la semaine où on a Eléa »,
04:41mes copines, surtout au début,
04:44elles ne comprenaient pas.
04:44« Enfin, tu n'es pas sa mère, en fait.
04:47C'est bon, elle a un père.
04:48Si tu as envie de t'amuser, tu viens. »
04:51Et en fait, à la fois, on me reprochait.
04:53Quand je sortais, c'était « ah oui,
04:55donc tu laisses ton compagnon tout seul avec sa fille.
04:57Et quand tu ne sors pas, c'est « oui,
04:59tu te prends pour sa mère, en fait,
05:00mais tu n'es pas sa mère. »
05:02Oui, c'est finalement ce statut
05:04où on te reproche de vouloir créer une famille
05:06avec quelqu'un qui, de fait, en avait déjà une.
05:11C'est ça.
05:12Et puis, en fait, quoi qu'il se passe,
05:13tu as tort.
05:14Soit tu en fais trop
05:15et tu te prends pour la mère,
05:18tu oses gérer des choses qui ne sont pas à toi,
05:22soit tu n'en fais pas assez
05:23et du coup, tu es vraiment une ingrate
05:24parce que quand même,
05:25cet enfant, il ne demande que ça.
05:26Donc, en fait, on a toujours tort.
05:29Et dans ce documentaire,
05:30est-ce que tu as rencontré des femmes
05:33qui avaient réussi à passer ce cap
05:36et à faire fi de ça ?
05:38Est-ce que tu sens qu'au bout de…
05:40Je ne sais pas,
05:41est-ce qu'il y a une bonne nouvelle
05:42au bout de quelques années,
05:43on passe de l'autre côté,
05:44on s'y fait ?
05:45Comment ça se passe ?
05:46Alors, en tout cas,
05:47en ce qui me concerne,
05:49je suis très heureuse
05:50et j'ai une relation hyper apaisée
05:52avec ma belle-fille,
05:54avec la mère de ma belle-fille.
05:55Moi, je suis ravie de ma famille élargie.
05:59C'est une nouvelle façon de faire famille
06:01et vraiment, on s'aime tous,
06:03on s'entend bien.
06:04Ce qui m'a marquée dans ce documentaire,
06:06c'est qu'au début,
06:08j'avais peur de ne pas avoir de personnes
06:10qui oseraient s'exprimer
06:12ou surtout à la télé, etc.
06:14Et en fait, très honnêtement,
06:16j'ai reçu même des appels de gens
06:18que je n'avais pas sollicités,
06:19des femmes qui, en fait,
06:21se sentent complètement invisibilisées
06:23par la société,
06:24qui se disent,
06:25là, enfin, je vais pouvoir parler
06:26de ce que je ressens,
06:27de tout ce que je fais
06:28et qu'on ne voit pas
06:29et des douleurs qu'on m'inflige
06:32sans forcément vouloir le faire.
06:34Mais souvent, les pères,
06:36ils ne veulent pas se fâcher
06:36avec leurs enfants
06:37et...
06:38Ni avec leur ex.
06:39Ni avec leur ex,
06:40parce que ça peut vite devenir l'enfer.
06:42Et à la fin,
06:43c'est quand même la belle-mère
06:44qui trinque, quoi.
06:44Quoi qu'il se passe ?
06:45Oui, c'est elle qui fait les efforts,
06:46en fait.
06:46C'est ça.
06:47Dans ton documentaire,
06:49on l'a ressenti,
06:50et puis nous, dans le podcast,
06:51on l'a ressenti aussi,
06:52qu'il y avait une grande responsabilité,
06:54quand même, du papa
06:55dans l'accueil, justement,
06:57de ce nouveau rôle.
07:00Et malheureusement,
07:00bien souvent,
07:01beaucoup l'acheter,
07:02qui fait qu'il y a une mise en retrait.
07:04Donc, il y avait,
07:05si je ne dis pas de bêtises,
07:06une psychologue,
07:06dans ton documentaire,
07:07qui disait que, voilà,
07:09les papas avaient une forme
07:10de culpabilité auprès de leurs enfants
07:11de s'être séparés
07:13de la mère des enfants
07:14et que, de fait,
07:15prenaient un peu ce recul
07:16et puis regardaient
07:18les choses se passer
07:19sans prendre forcément
07:20ni parti pour l'un
07:21et pour l'autre.
07:22Mais, en fait,
07:23de fait,
07:24ça crée des conflits.
07:26Ce qu'on appelle souvent
07:27les papas Disneyland,
07:28c'est-à-dire qu'en fait,
07:30ils culpabilisent
07:31soit d'être parti,
07:32soit juste
07:33que le couple initial
07:35n'ait pas marché.
07:37Et du coup,
07:37ils veulent que ce soit
07:38toujours à la fête
07:39chez eux
07:40quand il y a les enfants.
07:41Et donc,
07:42ils ne veulent jamais
07:43rentrer en conflit,
07:44etc.
07:45Et donc,
07:46soit c'est le why
07:47à la maison,
07:48soit c'est le conflit
07:50avec la belle-mère
07:51qui ne laisse pas passer.
07:53Il y avait quelqu'un
07:54qui disait
07:54dans ton documentaire
07:56l'invisibilité sélective.
07:59Quand on a besoin,
08:00on sort la belle-mère
08:01du placard
08:01et ensuite,
08:02on l'y remet.
08:03Oui,
08:03c'est exactement ça.
08:04C'est vraiment
08:05ce que ressent
08:06la plupart des belles-mères,
08:07c'est de se dire
08:08« Dans l'absolu,
08:09je n'existe pas. »
08:10Mais de temps en temps,
08:12quand c'est nécessaire,
08:13je ne sais rien,
08:14par exemple,
08:15si un soir par semaine,
08:16il faut garder l'enfant
08:18ou les beaux-enfants,
08:19on ne comprend pas
08:20qu'on dise
08:20« Ah ben non,
08:21moi,
08:22je dois travailler,
08:23moi,
08:23j'ai tennis. »
08:25Alors que le reste du temps,
08:26on nous demande
08:26de ne pas exister
08:27parce qu'on n'est pas la mère,
08:29donc on n'a pas
08:30à aller à la kermesse,
08:31on n'a pas à aller
08:32aux réunions parent-prof
08:34et aucun problème.
08:36Mais du coup,
08:37à l'inverse,
08:37on exige de nous
08:39des choses
08:40qui normalement
08:41n'incombraient qu'aux parents.
08:42Et d'ailleurs,
08:43dans ces choses
08:44qui incombent aux parents
08:45et sur lesquelles
08:45les belles-mères
08:47ont finalement peu de poids,
08:48il y a tout le côté législatif.
08:51Au final,
08:51au niveau de l'école,
08:52on n'existe pas.
08:53Parfois,
08:53les enfants sont arrivés
08:54dans cette famille
08:55recomposée tout petit.
08:57Ils ont été élevés
08:58par cette fameuse belle-mère
08:59qui ne peut pourtant pas
09:01chez le médecin,
09:03à l'école,
09:04etc.,
09:05avoir ce rôle
09:06de pouvoir signer
09:07et de prendre une décision.
09:08Oui, exactement.
09:09En fait,
09:10ça peut très bien
09:10se passer à la maison,
09:12mais au quotidien,
09:14il y a des faits
09:15qui nous renvoient
09:15au fait qu'on n'est personne.
09:17Et jusqu'à ce qu'il se...
09:20Si jamais il y a une rupture,
09:23qu'est-ce qu'on devient ?
09:24Parce qu'il y a des belles-mères
09:24qui, pendant 15 ans,
09:26élèvent,
09:27aiment leurs beaux-enfants
09:28et s'entend hyper bien avec eux.
09:30Et s'il y a une rupture
09:31un peu difficile
09:32avec le papa,
09:33du jour au lendemain,
09:34on peut les perdre.
09:35Oui,
09:36on ne les voit plus.
09:37C'est ça.
09:38Et ça,
09:39d'ailleurs,
09:39tu en as rencontré une
09:40dans ton reportage
09:42qui disait qu'elle avait encore
09:43des relations avec certains,
09:44mais pas tous.
09:45Bon,
09:45ça,
09:46c'est le choix de l'enfant aussi
09:47qui peut-être,
09:48pour une fois,
09:49peut choisir.
09:49Parce que c'est vrai
09:50que le choix de la famille
09:52recomposée,
09:52à l'origine,
09:53ce n'est pas celui de l'enfant.
09:54Et en effet,
09:54quand il devient adulte...
09:56Alors,
09:56quand ils deviennent adultes,
09:58oui,
09:59c'est effectivement
09:59le choix des enfants.
10:01Après,
10:01parfois,
10:02ça se passe
10:02quand ils sont plus jeunes.
10:04Et du coup,
10:04ça peut être aussi
10:04une vengeance du père.
10:06Oui,
10:06si c'est toi qui es parti,
10:07puisque c'est ça,
10:08tu ne verras plus mes enfants.
10:09Ça peut être aussi
10:10des enfants
10:10qui sont manipulés
10:13de l'autre côté
10:13quand c'est conflictuel.
10:14Après,
10:15j'ose espérer
10:15qu'il y a plein de pères
10:17et belles-mères
10:17qui sont très intelligents
10:19et que quand il y a
10:19des liens forts
10:20qui sont créés,
10:20on peut continuer
10:21à revoir les beaux-enfants.
10:22Mais en tout cas,
10:23je sais que moi,
10:24ça a longtemps été
10:26une angoisse
10:27de me dire
10:28qu'on ne sait jamais
10:29ce qui peut se passer
10:30dans un couple
10:31et de me dire
10:31cette petite fille
10:32que j'aime
10:33et que je contribue
10:35à élever,
10:36qu'est-ce qui se passe
10:37si dans deux ans
10:39je me sépare
10:39de son père ?
10:41Et tu avais réussi
10:41à en discuter ?
10:43Après,
10:43je ne sais pas
10:44si on s'était séparés,
10:45comment est-ce que ça
10:45se serait passé,
10:46mais je sais que
10:48lui m'avait dit
10:49que de toute façon,
10:50j'avais toute la place
10:52auprès d'Elea
10:53donc elle s'appelle Elea
10:54et qu'évidemment,
10:56il espérait que quoi
10:56qu'il se passe,
10:57ce lien ne serait jamais rompu
10:59et même la mère d'Elea
11:01m'avait un jour dit
11:02que je faisais partie
11:04de l'équilibre de sa fille
11:05et que de toute façon,
11:07elle espérait effectivement
11:08que je serais toujours
11:08dans la vie de sa fille
11:09d'une manière ou d'une autre.
11:10Donc nous,
11:11c'est un peu les bisounours
11:11à la maison.
11:13Je te rassure,
11:14j'ai la situation
11:14bisounours aussi
11:16de mon côté,
11:17mais c'est vrai que
11:18lors des interviews
11:20qu'on a pu mener
11:21avec toutes ces belles-mères,
11:23bon,
11:24le royaume des bisounours
11:25existe très rarement
11:26et on se rend très vite compte
11:27qu'en fait,
11:28ce sont des histoires d'adultes.
11:29C'est rarement
11:30des adultes bisounours
11:32face à un enfant
11:33en crise.
11:35C'est-à-dire que l'enfant
11:36soit va répercuter
11:37des choses
11:39qu'il a entendues
11:39chez sa mère,
11:40etc.,
11:41soit va faire payer
11:41à son père
11:42une certaine situation.
11:43C'est vrai qu'on se rend compte
11:44souvent que les enfants
11:45sont tributaires d'adultes
11:47qui n'ont pas réussi
11:48à bien se séparer finalement.
11:50Ça, c'est beaucoup
11:52de spécialistes de la question
11:54disent en fait
11:54quand ça se passe mal
11:55entre un beau-parent
11:56et les beaux-enfants,
11:57les responsables,
11:58ce n'est ni le beau-parent
11:59ni le bel-enfant,
12:00c'est soit le père,
12:01soit la mère,
12:02soit les deux,
12:02mais en tout cas,
12:03c'est vraiment
12:04l'influence
12:05du couple parental
12:07à l'origine
12:07qui crée les conditions
12:09d'une bonne relation
12:11ou pas.
12:11Donc justement,
12:12en parlant de l'ex,
12:15il y a quelqu'un
12:15qui dit dans ton reportage
12:16le passé est présent.
12:18Alors, en tant que mère,
12:19on est quand même ravis
12:21d'exister encore.
12:23Heureusement que le passé
12:24est encore présent,
12:25mais c'est vrai
12:25que pour la belle-mère,
12:26que ça se passe bien
12:27ou pas bien,
12:28ce n'est pas anodin.
12:29Les retombées
12:30sont assez énormes.
12:32Et puis déjà,
12:33rien que dès le début,
12:34moi, je viens
12:35d'une famille très classique.
12:37Mes parents,
12:3870 et 71,
12:40ils sont toujours ensemble.
12:42Il n'y avait pas
12:42de divorce chez moi,
12:43pas de famille recomposée.
12:44Et moi,
12:46dans mon idéal,
12:48je n'imaginais pas
12:49que mon mec
12:51allait avoir
12:52au téléphone
12:54ou en vrai,
12:56son ex
12:57toutes les semaines
12:58pour parler
12:58de leur enfant
12:59ou plus.
13:00Je veux dire,
13:00quand on commence
13:01une histoire d'amour,
13:03on ne se dit pas,
13:04on va encore avoir
13:06l'ex de son mec.
13:07Donc déjà,
13:08le postulat de départ
13:09est là.
13:10Donc la vraie question,
13:11c'est,
13:12est-ce que je suis prête
13:13à ça ?
13:14Et si je vais
13:15dans cette relation,
13:17il faut l'accepter.
13:19La mère est là,
13:20elle a une histoire
13:21avec mon compagnon,
13:24elle a une histoire
13:24avec ses enfants,
13:27je ne peux pas lutter
13:28contre elle.
13:28C'est impossible.
13:30Donc elle fera partie
13:30du paysage,
13:31elle décidera
13:32d'où j'habite,
13:33parce que moi,
13:33je n'avais pas décidé
13:34d'habiter à cet endroit-là.
13:36Elle décidera
13:37de mes dates de vacances,
13:38elle décidera
13:39de l'organisation
13:40de mes week-ends.
13:41Alors est-ce qu'on est prête
13:42ou pas ?
13:42Mais en tout cas,
13:43on ne pourra pas lutter
13:43contre ça,
13:44ou sinon,
13:44c'est rendre tout le monde
13:45malheureux.
13:46Oui, bien sûr.
13:47Devenir belle-mère,
13:47ça veut dire ça.
13:48Et effectivement,
13:50on le voit aussi,
13:52il y a une psychologue
13:53dans ton reportage
13:53qui dit,
13:54il ne faut pas être,
13:56je ne sais plus si c'est
13:56exactement formulé comme ça,
13:58mais il ne faut pas être
13:58narcissique quand on est
13:59belle-mère.
14:00Il ne faut pas avoir
14:00une blessure à réparer
14:02en soi
14:03avec un égo trop important
14:06parce qu'en fait,
14:07la jalousie va sinon
14:09s'installer,
14:09etc.
14:10Et c'est un combat
14:11perdu d'avance.
14:12La mère des enfants
14:13restera toujours
14:14la mère des enfants.
14:15Donc,
14:15c'est vrai que...
14:17Oui, c'est ça.
14:17C'est qu'il y a des femmes
14:19qui, effectivement,
14:20ont vécu des choses
14:21qui font qu'elles auraient
14:23besoin d'exclusivité,
14:25mais exclusivité avec le père
14:27et peut-être aussi
14:27exclusivité avec les enfants.
14:29Or, ça n'arrivera jamais
14:31et ce n'est pas à souhaiter
14:33que les beaux-enfants
14:35nous aiment plus
14:36que leur mère.
14:37Bien sûr, exactement.
14:38Et si c'est le cas,
14:39c'est vraiment très triste
14:40pour eux.
14:41Donc, ça,
14:41il faut savoir l'accepter.
14:42Mais ce n'est pas toujours évident.
14:44Non.
14:45C'est effectivement
14:46j'imagine une petite mécanique
14:49jusqu'où on peut
14:51slash doit
14:52s'impliquer
14:53quand on est belle-mère.
14:54La frontière, finalement,
14:55elle est assez
14:56compliquée à trouver.
14:57Est-ce que je donne tout,
14:59je les aime
15:00comme mes propres enfants ?
15:01Est-ce que je prends
15:02un peu de recul ?
15:03Tu en parlais tout à l'heure
15:04parce que peut-être
15:05que je ne serai pas là
15:06tout le long de leur parcours,
15:07etc.
15:09Est-ce que finalement,
15:10s'impliquer trop,
15:11ce n'est pas prendre
15:12trop de balles perdues non plus
15:13et en même temps,
15:14être trop en recul,
15:15ce n'est pas passer
15:16pour celles
15:16qui ne veulent pas accepter
15:17les enfants
15:19d'une précédente union ?
15:22Comment on fait, en fait ?
15:23Bienvenue dans le cerveau
15:24des belles-mères.
15:26C'est vraiment...
15:28Ce sont les questions
15:30auxquelles j'avais besoin
15:31de répondre
15:32un peu toute ma vie
15:33parce que, encore une fois,
15:35moi, j'avais zéro modèle
15:36et en fait,
15:37ces questions,
15:38j'avais un peu honte
15:39d'en parler
15:40parce que moi,
15:41je n'avais pas de copine
15:42belle-mère à l'origine
15:43et en fait,
15:44personne ne pouvait comprendre.
15:46Donc, moi,
15:48en ce qui me concerne,
15:49j'ai tâtonné,
15:50j'ai tenté des trucs.
15:51Après, il se trouve
15:52que cette petite fille
15:53était assez en demande
15:54que je m'implique.
15:55Donc, en fait,
15:56moi, je me suis laissée
15:57happer.
15:57Alors, peut-être trop.
15:59En plus, j'ai un modèle
15:59de mère qui est un peu parfaite.
16:02Enfin, ma mère est super.
16:03Elle fait énormément
16:04de choses pour nous.
16:05Elle a fait énormément
16:05de choses pour nous.
16:06Donc, ce modèle,
16:07je l'ai répliqué
16:09en faisant énormément
16:11de choses aussi.
16:12Mais après,
16:13je ne sais pas du tout
16:14si c'est la bonne solution.
16:15Et quand je posais la question
16:16à mon compagnon,
16:17tu fais ce que tu veux.
16:20Mais après...
16:21On ne se mouille pas.
16:23C'est ça.
16:23Tu fais comme tu le sens.
16:24Je te remercie.
16:25Mais en fait,
16:26tu attends quoi de moi ?
16:27Mais je n'attends rien.
16:28OK, bon,
16:29je vais le faire
16:29un peu comme ça.
16:30Et en fait,
16:30en vieillissant,
16:31j'ai eu de plus en plus
16:32de copines
16:32qui sont devenues belles-mères
16:35et qui ont commencé
16:36à me parler.
16:37Et en fait,
16:38on avait toutes
16:38les mêmes interrogations.
16:40Et oui.
16:40Et après,
16:41j'ai discuté
16:41avec des chefs,
16:43même mes chefs au travail
16:45qui sont pour moi
16:46des femmes hyper accomplies,
16:48hyper fortes.
16:49Et quand elles ont su
16:49que j'étais belle-mère,
16:50elles m'ont raconté
16:51leurs interrogations aussi.
16:52Je me disais,
16:53OK,
16:53donc si même ces femmes
16:54de pouvoir
16:55se posent des questions
16:57sur qu'est-ce que c'est
16:58qu'être belle-mère,
16:59c'est qu'il y a quand même
17:00un sujet
17:00et qu'il faut quand même
17:01qu'on en parle.
17:02Complètement.
17:03Est-ce que tu penses
17:04qu'il y a une différence
17:05entre les belles-mères
17:07qui ont déjà des enfants
17:08ou celles qui découvrent
17:10la parentalité
17:11via la famille recomposée ?
17:13Je pense que c'est
17:14vraiment très différent.
17:15Parce que je pense
17:15que quand on a déjà
17:16des enfants,
17:18on existe en tant que femme
17:19et en tant que mère,
17:21déjà,
17:22et que du coup,
17:23même si l'ex est là,
17:25l'ex qui est elle aussi mère,
17:27en fait,
17:27il n'y a pas de déséquilibre.
17:30Ces femmes sont accomplies
17:32sur tous les points,
17:33etc.
17:34Moi,
17:34je n'ai pas encore
17:35d'enfant à moi
17:36et j'ai d'autres personnes
17:39que j'ai rencontrées.
17:41Il y a vraiment
17:42une grosse question
17:42de légitimité.
17:43Parce que,
17:44moi,
17:44je me disais,
17:46on va se dire,
17:47elle n'y connaît rien,
17:48elle ne sait pas
17:49comment élever un enfant.
17:50J'avais peur
17:51que tout ce que j'allais faire,
17:52on allait me dire,
17:53mais non,
17:54laisse tomber,
17:54reste à ta place,
17:55tu ne sais pas
17:55t'occuper d'enfant,
17:56la preuve,
17:56tu n'en as pas,
17:57donc reste dans ton coin.
17:58Je pense que cette quête
18:00de la légitimité
18:01est encore plus forte
18:02chez une femme
18:04qui n'a pas d'enfant.
18:06C'est vrai que
18:07dans l'un des témoignages,
18:08on le ressent,
18:09il y a aussi cette question
18:10de,
18:11finalement,
18:12on est quand même
18:12toujours en compétition
18:13d'une manière
18:13ou d'une autre
18:14avec la mère
18:14et de se dire,
18:15« Elle, au moins,
18:16elle a eu un enfant.
18:17Elle, elle a eu un enfant avec lui.
18:19Du coup, moi,
18:19je suis quoi ?
18:20Notre lien,
18:21c'est quoi
18:21si on n'a pas d'enfant ? »
18:23Donc ça,
18:23c'est une question
18:24très importante,
18:25je pense.
18:26Peut-être qu'on se sent
18:27un peu moins en compétition
18:29avec la maman
18:30si nous-mêmes,
18:31on a ce rôle en face.
18:33C'est-à-dire que
18:33si on a nous-mêmes des enfants,
18:34ça veut dire
18:35qu'on a potentiellement
18:36une famille.
18:37C'est ça.
18:38Enfin,
18:38de l'autre côté,
18:39une autre...
18:40Encore une famille recomposée.
18:41Il y a une autre belle-mère
18:43de l'autre côté.
18:44On peut peut-être
18:44plus facilement se dire,
18:46« Ok, là,
18:47je suis la belle-mère,
18:48mais dans l'autre situation,
18:50je suis la mère
18:50face à une autre belle-mère. »
18:52Peut-être que ça peut,
18:53chez certaines,
18:54générer un peu plus d'empathie,
18:55on va dire.
18:56Oui, je pense aussi.
18:57Et puis même
18:57dans la relation aux enfants,
18:58c'est-à-dire que
18:59quand tu n'as pas d'enfant,
19:01quand il n'y a que
19:01les beaux-enfants,
19:03s'ils te rejettent,
19:05tu peux le prendre
19:05vraiment pour toi.
19:07Je ne sais pas faire
19:07avec les enfants,
19:08ces enfants même pas,
19:09etc.
19:09Quand tu es mère,
19:10en fait,
19:13en relation avec tes enfants,
19:14tu sais comment sont
19:15les enfants aussi
19:16et que parfois,
19:17ils peuvent être injustes
19:18et ce n'est pas grave
19:19et ça n'implique pas
19:20la fin du monde.
19:22L'ingratitude,
19:23ce n'est pas dans le package.
19:25Je pensais.
19:26On m'a trompée.
19:27Pour moi, vraiment.
19:28Il y a une autre question
19:29qui est assez importante
19:30dans le documentaire
19:31et c'est vrai que
19:32je ne l'avais pas identifiée
19:34en amont,
19:35c'est la charge financière.
19:37Parce que c'est vrai que,
19:38bon,
19:38c'est déjà un gros sujet
19:40dans un couple classique.
19:42Il y a des tas d'études
19:43maintenant aujourd'hui
19:43sur le sujet
19:44qui montrent quand même
19:45un gros déséquilibre,
19:47surtout à l'arrivée des enfants.
19:49Et c'est vrai que
19:50quand on prend le rôle
19:51de belle-mère
19:52et que donc,
19:53on se met à habiter
19:54conjointement
19:55avec le compagnon
19:57et ses enfants,
19:58comment se passe
19:58la gestion financière ?
20:00Ça,
20:00c'est vraiment
20:01un vrai souci
20:02et un angle mort
20:03et on sent un vrai tabou.
20:05Parce que j'en ai beaucoup parlé
20:06avec Anaïs Richardin
20:08qui a une newsletter
20:09sur le sujet,
20:11entre autres,
20:11que j'interview
20:12dans le documentaire.
20:14Et en fait,
20:15quand t'arrives
20:16la question de l'argent,
20:17on nous oppose
20:18toujours les sentiments.
20:19C'est-à-dire que,
20:20ah oui,
20:20tu ne veux pas payer
20:21pour mes enfants,
20:21c'est que tu ne les aimes pas.
20:23Alors que ça n'a rien à voir.
20:25C'est juste une question
20:26d'égalité,
20:28d'équité.
20:30Mais donc,
20:31il y a beaucoup de couples
20:32qui n'osent pas
20:33aborder la question.
20:34Beaucoup de femmes
20:35qui n'osent pas pour...
20:36Je veux dire,
20:36il y a déjà tellement
20:37de sujets de conflit
20:39que si en plus,
20:40on remet ça
20:41sur le tapis,
20:43on repart pour un tour.
20:45Mais le fait est que,
20:47par exemple,
20:47quand on loue un appartement,
20:49il faut des chambres.
20:52Il faut des chambres,
20:53chose qu'on n'aurait pas prise
20:54si on n'avait pas
20:55les beaux-enfants.
20:56Or, souvent,
20:57si on travaille,
20:58logiquement,
20:59on partage le loyer en deux.
21:03Quand on fait les courses,
21:04souvent encore,
21:05ce sont les femmes
21:06qui gèrent les courses
21:06d'une manière ou d'une autre.
21:07Qu'est-ce qu'elle va faire ?
21:08Elle ne va pas faire
21:08ses courses pour elle
21:09et laisser le papa
21:12faire les courses
21:12pour les enfants.
21:13Ce n'est pas jouable.
21:15Et c'est ce qu'on voit
21:16dans les couples hétéros
21:17en général,
21:18où les femmes font
21:19les dépenses du quotidien,
21:20mais qui, du coup,
21:22ne sont pas des investissements.
21:24Il y a un nom pour ça,
21:25il me semble.
21:26Oui, c'est ça.
21:27C'est la théorie du pot de yaourt.
21:28La théorie du pot de yaourt,
21:29voilà.
21:30C'est ça.
21:30C'est que les femmes achètent
21:32les potes de yaourt,
21:33le quotidien, etc.
21:34Mais ça ne reste pas.
21:35Et les hommes, eux,
21:36vont acheter la voiture,
21:37acheter le scooter,
21:38acheter éventuellement l'appart.
21:40Et à la fin,
21:40si jamais, malheureusement,
21:41il y a une séparation,
21:42les potes de yaourt,
21:43on ne peut pas investir là-dessus.
21:46Alors que la voiture,
21:47la maison, tout ça,
21:48ça fait déjà un apport
21:49pour le reste, quoi.
21:51Et donc, quand on est belle-mère,
21:53cette inéquité,
21:54on le vit aussi,
21:55mais on le vit pour des enfants
21:56qui ne sont pas les nôtres
21:57et qui, du jour au lendemain,
21:58peuvent nous être enlevés,
21:59en tout cas à la rupture.
22:01Donc, il y a une charge financière
22:03supplémentaire et invisible.
22:06Et qu'est-ce que tu as réalisé
22:07en faisant ce documentaire ?
22:09Est-ce qu'il y a des choses
22:10que ton expérience à toi
22:12n'avait pas encore levées
22:14et qu'en rencontrant ces femmes,
22:16tu t'es dit
22:17« Ah ! »
22:18Alors déjà,
22:19j'ai vraiment ressenti
22:21beaucoup de souffrance
22:23d'une partie de ces femmes.
22:26Ça, ça m'a beaucoup marquée
22:27parce que, en fait,
22:29je me dis « Mais comment elles font ? »
22:31Parce que leur couple dure.
22:33Oui.
22:34Malgré ça.
22:35Malgré ça.
22:36C'est vrai qu'il y a quand même…
22:37C'est assez impressionnant.
22:39Alors après,
22:39on a quand même des femmes
22:40qui nous ont dit
22:40« Si c'était à refaire,
22:41je ne referais pas. »
22:42Oui.
22:42Je ne referais pas.
22:44Il faudrait m'arrêter tout de suite
22:45avant que je tombe amoureuse.
22:46Je ne referais pas.
22:48Le parcours, finalement,
22:50envalait pas tant la chandelle
22:51sur les souffrances engendrées.
22:55Mais c'est vrai que la plupart des femmes
22:58qu'on a interviewées
22:59sont encore dans cette configuration-là.
23:02Donc, je ne sais pas
23:02si elles serrent les dents
23:03jusqu'aux 18 ans de l'enfant.
23:04Mais c'est vrai qu'en général,
23:06elles y sont encore.
23:06Ça, ça m'a vraiment beaucoup marquée.
23:09Après, effectivement,
23:09moi, le côté financier,
23:11je fais partie des bisonnances.
23:14Je ne m'étais jamais posée la question.
23:16Pour moi, c'était une évidence
23:17qu'on partage la vie,
23:18on partage tout le reste.
23:19Et que si j'avais décidé
23:20d'aimer cet enfant,
23:21je suis participée à quasi tout.
23:24Mais en fait,
23:25je me suis rendue compte
23:26que vraiment,
23:27c'était un sujet.
23:29Et ce qui m'a assez marquée aussi,
23:31c'était les belles-mères lesbiennes.
23:33Et ça, en fait,
23:33je n'avais pas du tout réfléchi à ça.
23:35Mais c'est vrai que quand Bertie me dit
23:37« En fait, nous, on est à égalité
23:40parce qu'elle ne l'a pas portée non plus. »
23:42Et là, je suis un peu jalouse.
23:45C'est vrai.
23:46Oui, et puis elle disait aussi
23:47que mine de rien,
23:49sa compagne était déjà très impliquée
23:52dans l'éducation des enfants.
23:54Elle mettait un petit tac le père
23:55en disant « Bon, nous, de toute façon,
23:56on n'est que des femmes,
23:57donc tout le monde s'occupe des enfants. »
24:01Donc, c'est vrai que j'imagine
24:02que la configuration est un peu différente.
24:05En plus, avec un vide juridique
24:08qui a perduré quand même encore très longtemps
24:10et qui a encore beaucoup de failles.
24:13C'est-à-dire que même pour la mère des enfants,
24:16ce n'est déjà pas simple.
24:17Donc, pour la belle-mère d'enfants
24:19dans ces cadres-là,
24:20oui, j'imagine que ce n'est pas aisé.
24:23Mais en même temps,
24:24elles sont tellement déjà à la base,
24:27en dehors de la famille hétéronormie,
24:30qui est traditionnelle,
24:32que finalement,
24:32les choses sont beaucoup plus vite acceptées.
24:36C'est un fait et c'est comme ça.
24:38Alors que nous, encore aujourd'hui,
24:39on va peut-être en parler,
24:41mais le fait qu'aujourd'hui,
24:42il n'y ait toujours pas de statut de beau-parent,
24:44alors qu'il y ait quand même 50 % des couples
24:47qui se séparent.
24:48C'est fou, parce que c'est ça qu'on se dit,
24:50c'est qu'on a l'impression qu'on est encore
24:53un peu dans cette image des années 80
24:55où quand on allait chez son père,
24:58on n'était pas vraiment chez soi
24:59parce qu'on y allait un week-end sur deux
25:01et que finalement,
25:01c'était chez son père et sa belle-mère, etc.
25:04Bon, là, il y a quand même des modèles familiaux
25:05qui se sont transformés,
25:08qui concernent près d'une famille sur deux.
25:10Et pourtant...
25:11Et pourtant,
25:12ce n'est pas comme si nos présidents,
25:14ils n'étaient pas beaux-pères.
25:15Oui.
25:15Parce qu'en fait,
25:17les trois derniers présidents,
25:18ils sont tous beaux-pères.
25:19C'est vrai.
25:20Donc effectivement,
25:20on se parle de statut
25:21qui n'a pas de légitimité légale aujourd'hui
25:25ni en cas d'achat, etc.
25:28Il y a quand même des choses
25:29où il faut faire très attention
25:31quand on est belle-mère.
25:32On ferait mieux de se marier finalement.
25:34Alors oui, déjà,
25:35mais même par exemple pour la transmission,
25:38c'est-à-dire que...
25:39Enfin, voilà, moi, ma belle-fille,
25:40maintenant, ça va faire 17 ans
25:42que c'est ma belle-fille.
25:44Si jamais demain,
25:45il m'arrive quelque chose,
25:46j'aimerais pouvoir lui transmettre des choses.
25:49Or, en fait,
25:49c'est quelqu'un qui n'existe pas
25:51dans ma famille légale.
25:54Et donc, pour l'instant,
25:55la seule solution,
25:56ce serait de faire une adoption simple,
26:00chose que sans doute,
26:01on arrivera à faire nous
26:02parce qu'il faut l'accord de l'enfant.
26:05Quand l'enfant est mineur,
26:06il faut l'accord des deux parents aussi.
26:08L'enfant garde toujours ses deux parents naturels,
26:12mais il y a une personne supplémentaire
26:14qui vient s'ajouter en adoption simple
26:16et qui peut, du coup,
26:17lui transmettre un héritage
26:19si jamais il lui arrive quelque chose.
26:21Mais je veux dire,
26:22on est obligé de passer par ces subterfuges-là
26:24pour pouvoir avoir un lien juridique
26:26avec ces enfants qu'on élève au quotidien.
26:28Ce n'est pas la même situation
26:29pour les beaux-pères.
26:31Tu en parles aussi dans le documentaire
26:34et j'aimerais qu'on finisse là-dessus.
26:36C'est quand même fou
26:37et ça dit beaucoup de choses de notre société
26:39que ce soit encore les femmes
26:41parce que finalement,
26:42il y a un papa qui en parle très bien.
26:45Le beaux-père, c'est le héros.
26:46Il vient jouer et tout.
26:47Tout est cool.
26:48Mais la belle-mère,
26:49ça reste la sorcière dans le beau film.
26:53On attend que la belle-mère
26:54soit naturellement dans le soin,
26:57présente, qu'elle fasse des choses.
26:58Mais en même temps,
26:59tout ce qu'elle fait,
27:00c'est soit trop, soit pas assez.
27:02Et le beaux-père, en fait,
27:03c'est un peu le sauveur de la mère
27:05qui déjà arrive et vient apporter des sous
27:07à ce foyer
27:08qui a sans doute été délaissé par un homme.
27:11En plus, il est sympa.
27:12Lui, il ne va pas faire à manger
27:13ou dire « range ta chambre ».
27:15Lui, il va emmener au foot,
27:16il va emmener au zoo, etc.
27:18Et donc, du coup,
27:19tout ce qu'il fait, c'est formidable.
27:20C'est un super-héros.
27:21Pour moi, c'est vraiment
27:22la continuité du patriarcat, en fait.
27:25Mais c'est encore un pan méconnu du patriarcat
27:27vu qu'on ne parle pas des belles-mères.
27:29En tout cas, merci Virginie
27:30de nous avoir rejoint
27:31pour parler de ton documentaire.
27:33Je ne sais pas, peut-être que tu travailles
27:34sur un autre documentaire maintenant.
27:36Je travaille sur un autre documentaire,
27:38mais pour l'instant,
27:39ce n'est encore pas vendu.
27:41Donc, on va rester...
27:42On attend le petit potin.
27:44C'est ça.
27:45Donc, je rappelle
27:46qu'il s'appelle
27:47« Belle-mer, la place empoisonnée »
27:48et qu'il sera disponible
27:50le 19 mars sur Teva.
27:52Exactement.
27:53Merci beaucoup.
27:54Merci à toi.
27:54Sous-titrage Société Radio-Canada
27:55Sous-titrage Société Radio-Canada
27:56Sous-titrage Société Radio-Canada

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