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Alors que la transition énergétique repose massivement sur des ressources minières en tension, les alertes se multiplient : dépendance à la Chine, capacités de production insuffisantes, recyclage encore marginal… Pour éclairer les décisions publiques et industrielles, l’IFPEN publie un rapport sur l’avenir des métaux critiques. Et les experts de chez Bartle appellent à une stratégie plus sobre, plus souveraine, et mieux préparée à la réalité des ressources.
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00:00Le débat de Smart Impact, on parle matières premières, métaux, terres rares,
00:12toutes ces matières indispensables à la transition environnementale.
00:15Et je vous présente mes invités, Damien Ambroise, bonjour.
00:17Bonjour.
00:18Bienvenue, vous êtes expert énergie et marché de l'électricité chez Bartel,
00:21cabinet de conseil en management certifié Bicorp, d'ailleurs, depuis 2019.
00:25Oui, Marie Malbec, bonjour et bienvenue.
00:28Bonjour.
00:28Vous êtes économiste, prospectiviste chez IFP Énergie Nouvelle.
00:33C'est quoi d'ailleurs, IFP Énergie Nouvelle ?
00:35Alors, IFP Énergie Nouvelle, c'est un EPIC qui est financé à moitié par l'État
00:40et à moitié sur fonds propres, qui fait de la recherche, alors historiquement,
00:45sur tous les hydrocarbures et qui, depuis une quinzaine, une vingtaine d'années,
00:51maintenant, s'est spécialisé plutôt sur les énergies renouvelables
00:54qui représentent 80% de nos dépenses.
00:57Et vous publiez un rapport sur les métaux dans la transition énergétique.
01:02On va évidemment y consacrer notre débat, mais peut-être qu'il y a une leçon principale,
01:05déjà, à partager ?
01:07Oui, alors, il y a beaucoup de leçons.
01:09Je sais bien.
01:10C'est toujours difficile d'en sortir une.
01:11Oui.
01:12C'est un sujet qui, après avoir été longtemps ignoré, revient au centre de l'actualité
01:16depuis une quinzaine d'années, plus précisément depuis cinq ans.
01:23Une leçon, peut-être, c'est qu'il faudra peut-être demander des efforts
01:28ou des réadaptations sur les modes de vie, mais qu'il n'y a rien de très alarmant non plus.
01:37D'accord, ne soyons pas trop alarmis.
01:39C'est évidemment une thématique sur laquelle le cabinet Barthel est engagé depuis longtemps,
01:45cet enjeu de l'approvisionnement, de la souveraineté, de la dépendance à certaines puissances étrangères.
01:52Alors, c'est sûr que, pour nous, les questions d'impact et de durabilité pour nos clients
01:55sont vraiment au cœur de notre activité.
01:58Donc, c'est vrai que, moi, je rejoins ce qui vient d'être dit sur le fait que les matières premières,
02:02c'est un petit peu le parent pauvre des questions de transition énergétique,
02:05qui sont souvent abordées en chambre, mais qui mériteraient quand même
02:08d'être beaucoup plus abordées dans le débat public.
02:11Oui, effectivement.
02:12Avec cette alerte de l'Agence internationale de l'énergie,
02:15ce n'est pas nouveau, ça fait plusieurs années, sur le manque à venir de métaux.
02:18Alors, de quels métaux on parle déjà ?
02:20La liste est longue, mais si on cite les plus importants,
02:23ceux qui sont indispensables à la transition.
02:24Ça dépend desquels.
02:25C'est sûr que ceux qui vont dépendre, ceux qui vont se dépendre de la transition énergétique,
02:29on va parler de cobalt, on va parler de nickel,
02:31on va parler de métaux qui sont parfois un petit peu plus communs,
02:34comme le cuivre, qui est même sans doute le plus important dans les temps à venir,
02:39puisque aujourd'hui, on a des métaux comme le cobalt ou le nickel,
02:43qui sont encore une fois indispensables.
02:45Mais l'AIE, l'Agence internationale de l'énergie,
02:49n'est pas spécialement inquiète sur la question de production dans les années qui viennent.
02:52C'est plus une question de géopolitique.
02:54En revanche, sur le cuivre, là, les projets miniers de production de puits
02:57sont en retard par rapport à nos besoins.
02:59Et là, on a plus un problème à résoudre.
03:01Effectivement.
03:02Et des niveaux de production qui, globalement, ont suffisamment augmenté,
03:08sauf pour le cuivre, c'est ce que je comprends.
03:10Sauf pour le cuivre et pour le lithium.
03:11Et pour le lithium aussi.
03:12C'est-à-dire que, historiquement, les métaux qu'on a déjà cités étaient un petit peu en retard,
03:16mais les projets d'augmentation ont été là.
03:18En revanche, ils se concentrent de plus en plus vers les mêmes pays que sont la Chine
03:21et, dans le cas du nickel, l'Indonésie.
03:25En revanche, dans le cas du cuivre, là, l'AIE est en train de nous dire que,
03:28d'ici 2035, dans cette trajectoire, on risque de manquer de 30% de cuivre
03:31pour répondre à la demande.
03:33Et quand on parle de projets miniers qui peuvent mettre entre 10 et 21 à ouvrir,
03:37ça risque d'être compliqué.
03:38C'est du très long terme, évidemment.
03:39Alors, on fait de la pédagogie.
03:42Louis-Marie Malbec, c'est dans quelle...
03:45On les utilise où ?
03:46Les batteries ?
03:47Le photovoltaïque ?
03:48Enfin, là aussi, la liste est vraiment longue.
03:51Effectivement, on l'a vu récemment, notamment avec les annonces de Donald Trump
03:54et les terres rares en Ukraine.
03:57On a parlé de beaucoup de terres rares sans exactement savoir où on les retrouve.
04:01Alors, dans les batteries de véhicules électriques, on retrouve...
04:03On n'a pas de terres rares.
04:04On a du nickel, du lithium, du cobalt, du manganèse.
04:08Ça dépend du fer et du phosphate.
04:10Ça dépend des technologies de batterie, mais pas de terres rares.
04:13Les terres rares, on va les retrouver plutôt dans les moteurs électriques
04:16ou dans les génératrices.
04:17Donc, dans les véhicules électriques côté moteur ou dans les éoliennes.
04:21Plutôt, d'ailleurs, les éoliennes offshore que les éoliennes onshore.
04:24Donc, en fonction des technologies, effectivement,
04:26on ne va pas retrouver exactement les mêmes éléments.
04:29Juste pour nuancer peut-être ce que vient de dire Damien Ambroise,
04:34sur effectivement les projections.
04:36Alors, moi, je suis prospectiviste.
04:37Mon boulot, c'est de regarder dans le futur.
04:40On a quand même fait l'exercice de faire l'inverse
04:43et de regarder vers le passé, et notamment sur le cuivre.
04:46On a les données de production du cuivre depuis 1900.
04:49Et la croissance du cuivre depuis 1900, c'est 3% par an.
04:52C'est-à-dire que chaque année depuis 1900, depuis un siècle et quelques,
04:56la production de cuivre augmente de 3% par rapport à l'année précédente.
04:59Si on regarde les projections de l'AIE, pour la transition énergétique, entre autres,
05:03et qu'on regarde jusqu'à 2050, quel doit être le taux de croissance
05:06de la production de cuivre, on tombe sur 3%.
05:07Donc, au final...
05:10Donc, vous nous rassurez, vous vous dites qu'on doit pouvoir suivre.
05:13Transition énergétique ou pas, le rythme de croissance de la production de cuivre est le même.
05:16Alors, ça ne veut pas dire que parce qu'il a cru de 3% par an depuis un siècle,
05:20on va être capable de le faire.
05:21Les projections peuvent être alarmistes.
05:22Effectivement, il y a des temps d'ouverture de mines qui sont longs.
05:25Mais, en même temps, on voit que le passé montre aussi
05:29que c'est quelque chose qu'on a été capable de faire, en tout cas par le passé.
05:31Et alors, juste en quelques mots, la différence entre métaux rares et terres rares,
05:36on parle de la même chose ou pas ?
05:37Non, non, terres rares, c'est un groupe d'éléments, de 17 éléments
05:41qui sont spécifiques et qui ont des propriétés spécifiques
05:46et qu'on trouve notamment dans les aimants permanents.
05:48Les métaux rares, c'est plutôt une notion plus géologique,
05:52question de est-ce qu'on en a ou pas.
05:55Les terres rares, en soi, ne sont pas si rares que ça, d'ailleurs.
05:57Alors, c'est plutôt historiquement qu'on les a nommées comme ça, mais elles ont...
06:01Avec, vous parliez de géopolitique, avec une domination chinoise
06:06qui est réelle sur le raffinage, c'est ça ?
06:10Avant tout sur le raffinage.
06:11C'est-à-dire que dans les métaux qu'on a cités, par exemple,
06:14le cuivre, finalement, on en a quand même beaucoup en Europe.
06:17Le lithium, il y en a aussi.
06:18On essaie d'ouvrir une mine dans l'Allier.
06:20Le cuivre, beaucoup en Amérique du Sud.
06:23En fait, la Chine, eux, ils ont aussi beaucoup de métaux,
06:25mais ils ont surtout fait tout un travail ces dernières années
06:28pour concentrer entre leurs mains les moyens de raffinage.
06:31Et ça fait, ils se sont placés là où ils étaient capables
06:33de concentrer ces moyens de production.
06:37Donc, aujourd'hui, ça nous fait quand même des leviers
06:40à l'échelle mondiale, en fait, pour augmenter nos propres capacités
06:43de raffinage et moins dépendre de la Chine.
06:46Avec, alors toujours, moi j'ai consacré pas mal de débats,
06:49ce principe de mine urbaine,
06:52donc l'idée d'un recyclage qui permettrait de prendre le relais.
06:57On n'y est pas encore ?
06:59Qu'est-ce qu'on peut en dire de ça ?
07:00Alors, pas encore, mais pour une raison simple,
07:02c'est qu'on n'a pas assez de déchets.
07:04C'est trop tôt.
07:05Tout à fait.
07:05C'est-à-dire qu'aujourd'hui, on va avoir un besoin croissant
07:08dans ces métaux-là.
07:09Vous prenez, par exemple, un véhicule électrique,
07:11c'est trois, quatre fois plus de cuivre
07:13qu'un véhicule thermique.
07:14Donc, si on veut remplacer notre parc thermique
07:17par un parc électrique,
07:18on a un besoin à court terme de cuivre.
07:19Mais le cuivre, c'est un matériau qui, en fait, est très durable.
07:23Vous le mettez quelque part dans un ouvrage,
07:25il va durer 20 ans, 40 ans.
07:26Il n'y a pas de raison de l'enlever.
07:28Aujourd'hui, vous avez déjà presque, en Europe,
07:30presque la moitié du cuivre qui est utilisé
07:32a déjà été recyclé.
07:34Donc, vous avez déjà une filière recyclage qui est là.
07:36Donc, ce qui va se passer dans les prochaines années,
07:37c'est que vous allez avoir un besoin de matière première
07:39qui va être très important.
07:41Et le temps qu'on renouvelle la flotte de véhicules électriques,
07:45qu'on dépole les éoliennes dont on a besoin
07:46et les autres usages,
07:48vous allez avoir plus de cuivre qui va être présent sur le territoire.
07:51Et là, d'ici 15 à 20 ans,
07:53on va avoir besoin d'une filière recyclage
07:54qui doit être prête à prendre le relais.
07:56C'est intéressant.
07:57Ça veut dire qu'il ne faut pas investir trop tôt,
07:59d'une certaine façon.
08:00C'est ça.
08:00C'est-à-dire que trop tard,
08:02on rate la question de la souveraineté.
08:05Et trop tôt, on se retrouve avec des actifs échoués.
08:07Mais c'est bien pour ça aussi que tous les investissements
08:10qui ne se font pas du jour au lendemain
08:11sur le recyclage et sur le raffinage
08:12ont besoin de long terme,
08:13d'une politique qui soit stable.
08:15Donc, de ce qui nous en fait,
08:16qu'il soit rassurant pour se dire
08:17que si là, aujourd'hui,
08:18je commence à réfléchir à un projet de recyclage,
08:21que dans 15 ans,
08:22mon business plan tienne toujours la route.
08:24Oui, effectivement.
08:24Vous avez développé, je crois,
08:26chez IFP Énergie Nouvelle,
08:28un modèle d'analyse, justement,
08:31de prospective sur les besoins
08:32en nouvelles technologies,
08:34en matériaux nécessaires
08:35à la transition environnementale.
08:36Oui, oui.
08:37Et c'est exactement un du travail
08:40qu'on effectue en tant que prospectiviste.
08:42On essaye de regarder, effectivement,
08:44en fonction de différents scénarios
08:45de déploiement des technologies,
08:47les besoins en métaux qui seront associés.
08:51Notamment, sur le déploiement de l'hydrogène en Europe,
08:53on a pu montrer que, voilà,
08:55sur l'iridium,
08:56il y aurait peut-être un problème
08:58en fonction des technologies qui sont employées.
09:00Sur les batteries,
09:01et pour rebondir sur le recyclage,
09:02notamment aussi pour les batteries
09:03de véhicules électriques,
09:04ce qu'on voit apparaître,
09:06c'est que le recyclage,
09:07c'est une solution du temps long,
09:09en fait.
09:09Un véhicule électrique,
09:10une batterie,
09:11c'est de l'ordre de 15 ans.
09:12Donc, ça veut dire que,
09:13entre maintenant et dans 15 ans,
09:15il faut produire les métaux
09:17dont on a besoin.
09:18Et la question qui se pose,
09:19notamment pour le montage
09:20des filières de recyclage,
09:22on le voit actuellement,
09:24Stellantis s'est retiré,
09:25Rameth s'est retiré
09:25de leur projet de recyclage
09:27parce qu'effectivement,
09:28ils n'arrivent pas à sécuriser
09:29les intrants de leurs usines.
09:31Et par ailleurs,
09:32ils n'ont pas de marché,
09:33de débouchés
09:33pour leurs produits recyclés derrière.
09:36Il y a une autre incertitude
09:37qui pèse,
09:38notamment sur les véhicules électriques
09:39et sur les batteries,
09:40c'est qu'on ne sait pas encore
09:41exactement quelle technologie de batterie
09:42va prendre le plus de part de marché.
09:45On va rester probablement,
09:46au moins dans les 15 prochaines années,
09:48sur des batteries lithium-ion,
09:49mais à l'intérieur,
09:50il y a différents types.
09:51Et si on met en place
09:52une usine de recyclage
09:53qui est centrée sur un type
09:54et qui finalement,
09:55c'est l'autre qui se déploie,
09:56on a investi un peu pour rien.
09:57Donc c'est pour ça
09:58qu'il y a une incertitude
09:59en plus de l'approvisionnement
10:00qui pèse aussi sur les technologies.
10:01Et puis avec une question aussi
10:03de comportement.
10:04Alors bon,
10:05moi je roule en SUV,
10:06donc voilà,
10:07j'assume.
10:08Mais c'est vrai que
10:09voir autant de grosses voitures
10:12qui pèsent très lourd
10:13et qui sont forcément,
10:14qui consomment beaucoup
10:14de matières premières,
10:16c'est assez incohérent.
10:17Alors c'est vrai que là aujourd'hui,
10:19quand on est dans une petite transition
10:21énergétique,
10:22on sait qu'on va avoir
10:22des contraintes
10:23en termes de production énergétique
10:24mais aussi d'accès aux matières premières,
10:26on peut jouer sur les deux volets.
10:27On peut chercher
10:28à augmenter la production,
10:29on en a parlé,
10:31il y a des solutions,
10:32c'est un défi qui est important,
10:34mais il y a toujours un risque
10:35finalement,
10:36qu'il soit géopolitique,
10:37de stock
10:37ou de lead time industriel.
10:40On peut aussi jouer
10:40sur la question de la demande.
10:43C'est-à-dire que
10:44se déplacer,
10:45c'est un besoin économique,
10:46c'est un besoin vital.
10:47se déplacer en SUV,
10:50là on est plutôt...
10:51On peut un peu plus en discuter.
10:52On peut un peu plus en discuter.
10:53Donc si jamais,
10:54se dire qu'on part vers
10:55un déploiement à grande échelle
10:57des SUV met en danger
10:58le fait d'avoir plutôt
10:59des petites voitures
11:00pour tout le monde,
11:01qui permettent à tout le monde
11:02de garantir un accès
11:03à l'électricité
11:04et mobilité.
11:06Là, il y a des choix politiques,
11:08mais on est plutôt
11:08une question de gestion de risque.
11:10Oui, et puis on retombe
11:10sur la question
11:11de l'acceptabilité,
11:12de la liberté de chacun
11:13de choisir
11:14quelle voiture
11:16il va utiliser.
11:17Donc trouver le discours
11:18pour faire comprendre
11:19que, oui,
11:20il faut faire des choix,
11:21peut-être un peu de sobriété
11:23qui vont nous permettre
11:23de profiter
11:25d'un mode de vie différent
11:26à côté, c'est ça ?
11:28Tout à fait.
11:28Là, on est plus
11:28dans une question psychologique
11:29et de dire aujourd'hui,
11:31j'accepte en fait
11:31de réduire mon choix
11:33pour que dans 5 ans
11:34à 10 ans,
11:34justement,
11:35j'en ai beaucoup plus
11:36parce qu'aujourd'hui,
11:37j'ai épargné
11:38sur les matières premières
11:40auxquelles j'ai accès,
11:40sur l'énergie
11:41que je suis capable de produire.
11:42Pour sécuriser finalement
11:44mon mode de vie
11:44dans 10 ans.
11:45Donc c'est une question
11:45de vision à long terme.
11:47Effectivement.
11:47Merci beaucoup.
11:48Merci à tous les deux
11:49et à bientôt
11:50sur Be Smart for Change.
11:51On passe tout de suite
11:52à notre rubrique consacrée
11:54aux startups éco-responsables.
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