Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 24/06/2025
Chères lectrices, chers lecteurs,

Jeudi 19 juin, nous avons eu le plaisir de recevoir Aude Cirier (éditrice de l'anthologie de Christian Bobin aux éditions Quarto), ainsi que M. Hugues Honoré, journaliste proche de l'auteur.

Dans le cadre des idylles de L'écume, cette rencontre est animée par Marine B.D (@idyllesculturelles)

Vous souhaitant de belles lectures,

L'écume 🌊

La Quatrième Quarto - Les différentes régions du ciel :

« Ce n’est pas pour devenir écrivain qu’on écrit.
C’est pour rejoindre en silence cet amour
qui manque à tout amour.

Je m’assieds devant la table d’écriture
et je laisse venir à moi
les différentes régions du ciel. »

Né en 1951, Christian Bobin bâtit depuis près d’un demi-siècle une œuvre poétique inclassable qui au cours du temps réinvente ses formes. En privilégiant une écriture concentrée, tantôt faite de notes brèves prises sur le vif comme dans un carnet de peintre, tantôt de visions poétiques très denses, creusant au plus profond de la psyché humaine, il aborde des thèmes universels comme l’amour, la mélancolie, l’absence. Touchant les âmes simples comme les érudits, son écriture lumineuse est un rempart contre le désenchantement, mais aussi contre l’irrésistible prolifération d’une « pensée » unique. Il nous parle des voix singulières, des pensées à contre-courant, de visages qui nous rendent vivants, des sourires « ces plus beaux exploits du monde ».
Transcription
00:00Bonsoir, merci d'être avec nous pour cette soirée autour de Christian Bobin.
00:04Il y a plusieurs personnes qui vont donc intervenir pendant cette soirée.
00:09Alors, avant que je te présente...
00:15Vous voulez vous asseoir ?
00:19En fait, l'idée de cette soirée, c'était parce que personnellement, j'aime énormément Christian Bobin.
00:26Ça fait quelques années qu'il nous a quittés.
00:28Et c'est un auteur qui me tient à cœur, que j'ai découvert un peu par hasard et qui depuis est tout le temps présent entre toutes mes lectures.
00:36Et je trouvais ça très important de réunir ce soir des gens qui ont travaillé avec lui dans les derniers mois,
00:41qui surtout l'ont connu d'une autre façon, à la fois professionnelle mais aussi intime.
00:45Parce que dans les derniers mois, on voit aussi que Christian est très proche de toute son œuvre.
00:50Il a écrit plus d'une soixantaine de livres.
00:52Et c'est vrai que dans les derniers mois, dans ses dernières productions littéraires, il a mis encore plus de lui et plus de choses intimes.
00:57Et donc pour commencer, on reçoit Hugues Honoré, qui est journaliste à l'AFP, spécialisé dans les livres et les auteurs.
01:04Et Hugues, vous avez eu la chance de faire un entretien de Christian Bobin à peu près un mois avant qu'il nous quitte.
01:12Près de deux mois, le 28 septembre 2022.
01:15Et il est mort en novembre.
01:16Et moi, je voulais commencer par vous demander quel est votre premier souvenir avec Christian Bobin, en tant que lecteur déjà.
01:27En tant que lecteur, ça remonte très loin et je ne m'en souviens pas.
01:31Je ne sais pas par quel livre j'ai découvert Christian Bobin.
01:35Je me souviens d'avoir face à moi tous ces folios avec des tranches fines et des photos en noir et blanc en couverture.
01:47Et un jour, j'ai fini par m'acheter un part de curiosité puisque ce sont des livres courts en général.
01:52Et je ne sais pas lequel c'est.
01:55Et très vite, au début de votre échange, vous parlez de la nature parce que vous évoquez le fait que tous les deux, vous avez grandi dans des villes industrielles.
02:07Et pourtant, Christian Bobin était très proche de la nature et très proche de l'environnement dans lequel il vivait.
02:13Il aime le beau et à ce moment-là, vous lui demandez son rapport à la littérature et comment il naît la nature du beau.
02:19Oui, c'est ça qui frappe dans le recueil des Quartos, les différentes régions du ciel.
02:26Il explique qu'il vient d'une ville, le Creusot, qui a sa notoriété due à des industries.
02:33Et pour autant, les images qu'on voit, on voit notamment l'image d'un chemin qui mène vers sa maison.
02:39Et c'est un environnement presque isolé, au milieu d'une forêt.
02:47Et c'est quelqu'un qui a choisi de s'entourer principalement d'animaux, d'arbres, dans une maison ancienne qui, la majorité de sa vie, je pense, l'a passé à parcourir la nature.
03:03Et ce sont des choix opposés à ce que j'ai fait moi.
03:06Mais lui, il a été assez radical là-dedans.
03:09Et dans La plus que vive, il parle à un moment de sa venue à Paris et il l'appelle la ville barbare.
03:16Pour lui, tout ce qui est trop minéral, tout ce qui est trop dense, trop chargé en densité humaine, est barbare.
03:25Donc, c'est ça qui me frappe chez lui, c'est ce retour constant à la création, à l'environnement apaisé, qu'on retrouve évidemment dans son écriture, avec des descriptions très vastes de fleurs, de plantes, de champs d'oiseaux, d'environnement bucolique.
03:50Donc, ce livre, sont presque tous des géorgiques.
03:54C'est vrai que très vite dans l'entretien, vous avez évoqué son rapport à la modernité et au fait que finalement, la modernité menace tout ce qui est beau, même si la nature.
04:04Et donc, quel est le regard de Christian à ce moment-là sur la modernité, dans votre échange ?
04:09Je pense que, moi, j'aime bien ce que dit le critique Sainte-Beuve, au XIXe, qui est complètement aujourd'hui dévalorisé parce que Proust a écrit contre Sainte-Beuve et a expliqué qu'il ne fallait pas aborder les écrivains comme ça.
04:25Et là, lui, il dit qu'il faut aller droit à l'auteur, derrière le masque du vide.
04:30Et je crois que la biographie de Christian Bouvain explique beaucoup cette peur, ou ce rejet, ou cette construction contre la modernité.
04:45Et la modernité, pour lui, c'est par exemple le métier de son père, qui fait du dessin industriel.
04:54Donc, lui, visiblement, prend le contre-pied de son père et au lieu de faire du dessin, il écrit.
04:59Et au lieu de faire de l'industriel, il fait du naturel, il fait du bucolique.
05:04Et moi, je crois vraiment que les écrivains sont tous à peu près façonnés par leur enfance.
05:12Et on retrouve ça chez Christian Bouvain constamment.
05:15Il sera toujours fidèle à cette ligne directrice, qui est de se raccrocher à la nature et de critiquer notre modernité de Jean Presset.
05:26C'est quelqu'un qui prend le temps d'écrire des livres courts.
05:31Il en a publié pas mal, mais si on regarde en termes de productivité, nombre de mots par an.
05:37C'est plutôt un écrivain qui a relativement peu écrit, beaucoup publié.
05:44Et beaucoup lu.
05:44Finalement, il a beaucoup lu.
05:46C'est ce qu'il nous a apporté, c'est qu'à la fin, il y a de la densité.
05:52Lui-même ayant absorbé effectivement une quantité phénoménale de lecture, d'influence, très diverse.
06:01Et c'est reflété dans le début de ce quarto.
06:03J'ai trouvé ce choix très intéressant de savoir quels étaient les auteurs qui l'avaient les plus influencés.
06:10Lui, il est le produit de cette réaction à l'idée d'aller très vite dans l'écriture.
06:19Et c'est vrai qu'aussi dans son écriture, il dit dans votre échange, j'ai préféré aller vers ceux qui semblent ignorer le passage du temps.
06:27Comment vous pouvez expliciter cette phrase ?
06:30Oui, alors quand je le rencontre, il me surprend un peu parce qu'il est très sévère contre les journalistes.
06:38La presse, tout ce qui est fugace.
06:46Et aujourd'hui, effectivement, on est dans un monde où on est intéressé par la dernière actualité.
06:52Et on a l'impression que ce qui s'est passé il y a trois heures ou à six heures n'est déjà plus pertinent.
06:58Lui, c'est tout le contraire.
06:59Il cherche les permanences.
07:02Il cherche, c'est ce qu'il m'explique, il cherche à avoir des livres qui racontent des histoires.
07:08Des sensations qui seront encore valables pour les lecteurs dans certains ans et qui sont aussi universels.
07:16Des lecteurs qui, on le sait bien, la sociologie des lecteurs de Christian Bobin, il y a des gens de toutes les classes sociales, c'est ce qu'il m'explique aussi.
07:25Des gens qui lisent beaucoup, qui sont de fin littérés, qui cherchent sa minutie dans le style.
07:33Et des gens qui lisent peu, parce que son avantage, c'est d'écrire des livres courts.
07:39Et si on lit peu, on peut lire tout Christian Bobin.
07:43Et c'est vrai qu'il dit, beaucoup de choses sont écrites très proches de la matière journalistique.
07:48Comment tu vois ça, puisque toi-même, tu es journaliste, que tu écris, comment tu interprètes ça ?
07:54Pourquoi il avait cette dent un petit peu dure à ce moment-là ?
07:59Moi, je pense qu'il y a de très, très bons livres qui se sont écrits dans la littérature française à partir de faits qui ont été rapportés par les journalistes.
08:08Je pense à un moment de Paris, au rouge et au noir, mais lui ne s'intéresse pas vraiment à l'actualité.
08:18Il estime que tout l'univers peut être contenu dans ce qu'il voit quand il marche dans le Creusot,
08:26et quand il marche dans les forêts bourguignones, dans sa saunée noire natale, qui est relativement peu quittée.
08:34Il a l'impression d'avoir un monde en soi, parce que Christian Bobin est ce qu'on appellerait aujourd'hui un hypersensible.
08:41Il est capable de percevoir des choses infimes, là où d'autres ne posent quand même pas le regard.
08:47Le fait de rejeter notre sur-sollicitation, je dirais, notre incapacité à nous arrêter,
08:57c'est ce qui fait que certains lecteurs qui ont la même sensibilité, qui se trouvent sans doute trop agressés par le monde moderne,
09:08trop agressés par tout ce dont on nous bombarde aujourd'hui, trouvent un repos, un apaisement.
09:17Les livres de Christian Bobin ne sont pas tous joyeux, évidemment, ils posent des questions très profondes,
09:26certains parlent de la mort, mais en tout cas, ils ont ce caractère d'être apaisants.
09:32Mais je continue sur l'écriture journalistique, mais un moment dans votre échange,
09:35il fait le parallèle entre l'écriture vraie, qu'il associe à l'amour.
09:39Oui, il m'a beaucoup parlé d'amour dans cet entretien, là aussi, c'était une surprise.
09:46Quand je prépare l'entretien, moi, comme avec n'importe quel auteur,
09:50j'essaye de lire le maximum de choses sur lui, et ce dont je me rends compte,
09:56quand je m'intéresse au parcours, à la vie de Christian Bobin,
10:01c'est qu'on sait très peu de choses de sa biographie, il s'est peu livré,
10:05et en revanche, il a beaucoup parlé des gens qui l'entourent.
10:11Il a beaucoup décrit l'amour qu'il pouvait porter à ses proches.
10:17Et le plus facile pour lui, semble-t-il, c'est de parler des autres.
10:22Et un livre formidable, c'est l'un des, à mon avis, le plus difficile à écrire,
10:32c'est la plus que vive, où il ne parle que très, très peu de lui,
10:37et il parle de quelqu'un d'autre.
10:38Pour moi, la performance, là, d'écrivain, de ne pas parler de soi,
10:43parce qu'on déborde d'autofictions, on déborde de livres inspirés de la vie des auteurs,
10:51ça, c'est comme d'autres vies que la mienne, d'Emmanuel Carrère,
10:54ce sont des livres extrêmement difficiles à écrire, de parler d'autrui et de s'oublier.
11:01On est toujours présents dans l'écriture, et ça, Christian Gauvin, on est bien conscients,
11:05mais cet amour qui transparaît des autres,
11:11évidemment, les lecteurs de Christian Gauvin adorent,
11:16ils retrouvent aussi le don de soi qu'ils peuvent avoir pour leurs proches.
11:23C'est vrai que dans l'entretien, il disait, il y a beaucoup de gens que j'aime, plus que moi,
11:28et à ce moment-là, vous allez lui poser d'autres questions,
11:31vous allez lui demander, ben voilà, pourquoi Novalis, quelles sont ses influences,
11:36et donc c'était quoi un peu les auteurs préférés de Christian Gauvin,
11:40ceux vers lesquels on pourrait se tourner ?
11:42Je n'ai pas retenu tout ça dans les différentes régions du ciel.
11:46Si je reprends, de qui parle-t-il ?
11:50Heinrich von Kleist ?
11:52Dickinson.
11:53Dickinson, oui, ils sont des...
11:57Ah oui, Nobelstein.
12:00Oui, ils sont des...
12:01Les poètes sont des monstres aussi, ils parlent beaucoup des poètes.
12:04Oui, ce sont des auteurs qui sont assez peu lus aujourd'hui,
12:09parce qu'ils sont des auteurs...
12:11Grosjeans aussi.
12:12Oui, des auteurs qui ne sont pas considérés comme très commerciaux.
12:15Oui, ça, quand un auteur ne réussit pas, mais continue à avoir un lectorat très longtemps pour lui, ça c'est le gage de qualité.
12:24Évidemment, quand on pense aux poètes du 19e siècle, ce n'est pas Novalis qui vient le premier en tête.
12:31Et pourtant, aujourd'hui, il y a toujours des fans de Novalis.
12:34Je ne sais pas quelle place dans la postérité, lui, concevait.
12:40C'est une question que personne n'a osé lui poser, mais je pense qu'il devait espérer, comme dit Stendhal, être lu encore deux siècles ou un siècle plus tard.
12:53Oui, mais en même temps, dans votre échange, il n'a pas envie d'être muséifié.
12:56Et très vite aussi, quand vous allez lui demander, par exemple, s'il a des héritiers, s'il y a des gens qui, aujourd'hui,
13:03qui reconnaîtraient comme ses héritiers, il va très vite dire, non, je n'ai pas envie de ça et je ne sais pas.
13:10Et en fait, il va plutôt parler des autres qu'il admire, des gens qu'il estime au-dessus de lui.
13:14Et il est quand même assez humble face à sa création.
13:16Oui, il est extrêmement humble.
13:17C'est une difficulté qu'a eue la presse, c'est que par rapport à tous ces auteurs qu'on peut rencontrer et qui vont se laisser le col,
13:29lui, c'est compliqué de lui faire parler de ses propres mérites.
13:33Et quand je lui pose la question, effectivement, des héritiers qui se voient, ce qu'il me dit, c'est qu'il faudra que vous me reposiez la question,
13:40parce que je n'ai pas de réponse.
13:42Malheureusement, deux mois plus tard, il n'était plus là pour nous fournir la réponse.
13:48Mais une autre anecdote, c'est que cet entretien, et ça, ce n'est pas dans la retranscription,
13:54puisque c'est quelque chose que je n'ai pas enregistré.
13:57Moi, mon objectif, c'était de le convaincre de se faire prendre en photo par l'agence France Presse,
14:02parce que c'est des photos qui sont diffusées à tous nos clients, donc tous les médias.
14:09Et quand on vous fait prendre en portrait par l'agence France Presse, vous allez vous retrouver très vite avec cette photo dans Google Images.
14:15Donc, elle a intérêt à être réussie et on essaye de faire les choses bien, on prend le temps.
14:19Et ce qu'il m'a répondu, lui, c'est pas vraiment mon genre.
14:25Et ce que je lui ai dit, c'est, on va essayer de faire quelque chose qui vous ressemble.
14:31Donc, c'est une discussion.
14:33Et le dernier mot qu'il a eu, c'était pour dire, oui, mais si je me fais prendre en photo, ça ne me ressemblera pas.
14:39Et aussi, dans l'entretien, il dit qu'il ne veut pas, que les photos en noir et blanc, il trouve ça un peu figé, c'est ça ?
14:50Oui, l'intérieur du quarto a des photos de lui en noir et blanc.
14:56Oui, mais la couverture.
14:57La couverture, il s'est plié à la couleur.
14:59Et moi, j'ai tendance à trouver que c'est un bien meilleur choix, que toutes ces photos en noir et blanc sur les folios avaient un peu de tendance à figer son image.
15:12Lui, il voyait une forme de permanence, encore une fois, ça permettait d'avoir une image identifiable.
15:19Et il trouvait, c'est ce qu'il m'explique, il trouvait qu'un livre devait être beau de bout en bout, y compris sa couverture.
15:24Mais l'écriture de Christian Beaumain, elle est très colorée, puisqu'il parle évidemment de la nature, et dans la nature, ça regorge de couleurs.
15:34Et le fait, effectivement, je lui fais une comparaison avec Annie Arnault, qui a choisi pour son quarto d'être en noir et blanc sur la couverture.
15:44Et lui m'explique que non, le noir et blanc, ça fige, ça nous ramène au passé, et qu'à l'âge qui se voit encore comme un auteur actuel.
15:53Alors qu'il reste deux mois à vivre.
15:57On peut considérer que c'est le message qui nous règle, c'est que c'est toujours un auteur actuel.
16:03Et il y a eu un livre post-thume d'ailleurs, donc qui sait s'il ne reste pas d'autres choses de vue à publier.
16:11Oui, Christian Beaumain, auteur toujours vivant.
16:14Et quand vous faites cet échange, qu'est-ce que vous remarquez, parce que vous avez interviewé plein d'auteurs ?
16:24Je ne sais pas, qu'est-ce que vous pouvez nous dire d'autre sur lui, de personnel qui filtre, que vous voyez de lui ?
16:30Est-ce qu'il est fidèle à ces mots ?
16:32Moi, ce qui me surprend énormément, pour quelqu'un qui a tenu à s'exprimer, surtout par l'écrit,
16:41qui, je pense, a accordé peu d'interviews, puisque je n'en ai pas trouvé beaucoup,
16:46il est extrêmement à l'aise à l'oral.
16:48Vous n'avez pas eu d'enregistrement, mais il faut l'écouter, il faut écouter sa voix aussi.
16:58Ça sort tout seul à un rythme vraiment constant, de la même manière, je pense, que l'écriture.
17:06Et ça, ça m'a beaucoup étonné, c'est qu'il n'y avait aucune idée, question que j'allais lui poser.
17:13Alors, évidemment, c'est un auteur qui a beaucoup réfléchi, qui arrive à un moment de sa vie,
17:18il sait ce qu'il aime, et il sait très bien parler de son travail.
17:22Mais, quelle que soit la question, la réponse, elle est comme écrite.
17:28À l'oral, il y a une éloquence exceptionnelle.
17:35J'en ai croisé peu, qu'il fallait qu'on retranscrive exactement leurs mots,
17:42telles qu'elles avaient été prononcées.
17:44Et je vous ai envoyé la retranscription d'entretien.
17:48Ça peut paraître très réécrit, mais non.
17:51En fait, c'est exactement comme ça qu'il l'a prononcée, sans hésitation.
17:55Il est vraiment très à l'aise avec la langue française,
17:59parce qu'il la côtoie depuis très longtemps.
18:02Mais il a, je trouve, des changements de rythme, des phrases, des phrases,
18:07une syntaxe qui évolue au fil des réponses.
18:11Il est très, très fort.
18:15Pour finir, j'aimerais aussi vous demander, vous l'avez challengé à un moment donné,
18:20parce que vous lui avez posé la question des journalistes
18:22qui aiment bien mettre Christian Bobin quand même dans une case.
18:25Généralement, ils aiment bien le traiter soit de niais, de simpliste.
18:28Je ne vais pas citer certains journalistes, mais il y en a quelques-uns
18:31qui m'ont beaucoup agacée, parce qu'ils ont dit du mal de lui avant qu'il décède.
18:35Et en même temps, il y a aussi des gens qui disent qu'il est très érudit,
18:38qu'il s'adresse à un certain public, etc.
18:41Donc, vous l'avez un peu challengé.
18:42Et pourquoi, vous, par exemple, quel regard vous portez là-dessus ?
18:45Vous pensez qu'il est de quel côté de la barrière, Christian ?
18:49Je suis assez partagé sur cette question.
18:52Et quand j'ai préparé l'entretien, j'ai trouvé une étude universitaire
18:56qui expliquait ça, qu'il avait une première partie de sa carrière
19:02qu'il mène dans une certaine obscurité,
19:05où les critiques sont relativement indifférents à son œuvre,
19:11ou alors ont l'impression de faire une trouvaille
19:15et de dire, c'est exceptionnel, il faut que vous lisez Christian Bobin,
19:20parce que, eux, ça les montre en découvreur.
19:24À un certain moment, je pense que c'est dans les années,
19:29fin des années 110, début des années 80,
19:31ils commencent à avoir beaucoup de succès en librairie.
19:34Et là, le regard change.
19:37C'est-à-dire que ceux qui l'avaient découvert,
19:41ceux qu'ils connaissaient avant, continuent à l'aimer.
19:44Mais ceux qu'ils n'avaient jamais découvert,
19:46et qu'ils se rendent compte que le phénomène leur échappe,
19:49qu'ils n'ont pas vu venir un auteur aussi original,
19:55ces gens-là, effectivement, ont un ressentiment contre lui.
20:00Et vont chercher la petite bête.
20:03Pour la trouver, on trouve toujours la petite bête.
20:05Quand on cherche, si on est critique littéraire,
20:08il y a toujours des choses qui sont plus ou moins réussies,
20:10et on peut appuyer là où ça fait mal.
20:12Donc, lui, il est assez indifférent,
20:15mais c'est ce que décrivait cette étude universitaire.
20:18C'est que des gens vont dire,
20:19mais c'est pas si bien écrit, en vérité,
20:22on ne comprend pas pourquoi ce succès populaire.
20:24Et je lui pose cette question.
20:26Et c'est là où il y a une réponse formidable,
20:30qu'il faudrait que je relise.
20:31Je vais d'ailleurs le faire.
20:33Allons-y.
20:34Il faut que je la retrouve, ça me fait.
20:35Donc, je lui demande,
20:47la critique a dit que vous étiez hermétique,
20:50et à l'inverse, parfois, que vous étiez simpliste.
20:53Sur le spectre entre la clarté et l'obscurité,
20:55où vous vous situez-vous ?
20:56Il lui répond, tout simplement.
20:58Moi, j'adore ces deux étiquettes qui me sont collées.
21:01Simple, au risque d'être naïf,
21:02et obscur, au risque d'être concentré,
21:04au risque d'être éthique.
21:05Je ne cherche rien en vérité.
21:07J'aurais du mal à qualifier mon propre travail.
21:10Mais je suis assez heureux que, par exemple,
21:12mes livres, parfois, touchent des gens
21:14qui sont très simples,
21:15et parfois très érudits.
21:17Ça, c'est la réponse la plus remarquable.
21:19C'est que, pour lui,
21:21la critique n'est pas du tout juge.
21:24On peut construire une œuvre
21:26sans n'avoir rien à faire.
21:28Et notamment, lui,
21:30comme il reste Creusot,
21:31qui n'a aucune ambition d'édition,
21:35de succès, de prix, de best-seller,
21:38et qui continue à tracer son sillon
21:41comme un artisan tout simple.
21:44Et dans le quarto,
21:44ce qui est remarquable, par exemple,
21:45c'est qu'on voit une photo
21:47de la première presse
21:49où est imprimé son livre de 1977.
21:52L'artisanat le plus pur, lui,
21:55le côté industriel de la littérature,
21:57le côté star,
21:58le côté, il faut vendre en librairie,
22:01il faut avoir un produit
22:01qui soit vraiment intéressant,
22:03il passe complètement à côté,
22:05et il reste fidèle à cette ligne-là.
22:06Et à la fin, il dit,
22:08si je suis hermétique, tant mieux,
22:09si je suis trop simple, tant mieux.
22:11C'est vous qui le voyez.
22:13Oui, il aime les lecteurs, surtout.
22:14Merci beaucoup, Hugues.
22:19J'aimerais vous lire quelques passages
22:22quand même de cet entretien
22:23parce qu'il y a des phrases sublimes de Christian.
22:28Je reprends.
22:29Je ne suis pas sûre que la simplicité
22:31soit quelque chose qu'on puisse voir
22:32en une seconde et balayer ensuite.
22:34J'ai préféré aller vers ceux
22:35qui semblent ignorer le passage du temps.
22:39Et il y a beaucoup de gens
22:40que j'aime plus que moi.
22:42Par les visages des gens que je croise,
22:43je reçois des nouvelles du monde
22:45pas très bonnes.
22:49Merci beaucoup, Hugues Honoré.
22:51Merci, Marie.
22:59Merci.
22:59Alors, maintenant, j'invite Aude Sirier,
23:04qui est éditrice de la collection
23:10Quarto chez Gallimard,
23:11qui a très bien connu Christian Bobin
23:14et surtout qui a fait ce Quarto
23:16un peu avant qu'il ne s'échappe,
23:19malheureusement.
23:21Mais il ne s'est pas échappé,
23:22il est toujours avec nous.
23:28Avant de reprendre sur ce Quarto,
23:31dont il était aussi sujet avec Hugues Honoré
23:33puisqu'il l'a interviewé
23:35dans le cadre de la sortie de ce Quarto,
23:36qui est vraiment une publication particulière,
23:38j'ai envie de vous dire un mot sur aussi
23:40ce que disait Hugues sur le côté simple
23:42et très littéraire de Christian
23:44et le fait qu'il n'y avait pas d'enjeu
23:45en fait éditorial.
23:47Vous verrez à laquelle,
23:48vous allez voir pas mal de poches
23:49de lui chez Foglio,
23:50il est édité chez Gallimard,
23:51mais il a aussi fait plein de projets éditoriaux
23:53avec des maisons comme Lettres Vives,
23:55qui est une petite maison d'édition sublime.
23:57D'ailleurs, on en croise certains
23:58dans le Quarto.
24:00Et voilà, c'est ce genre de petit livre merveilleux.
24:02Et c'est vrai que c'était quelqu'un
24:04qui était très attaché aux papiers,
24:05aux belles choses
24:06et au fait de travailler avec des gens
24:07qui l'aimaient.
24:08Et je pense aussi que c'est pour ça
24:09qu'il a voulu travailler avec Odisirier
24:11et que vous avez fait ce beau projet.
24:14Je ne suis pas sûre qu'il ait choisi.
24:16Mais il a été très heureux de ça
24:18et de cette collaboration.
24:21C'est une expérience.
24:23Alors moi, je vais rebondir justement
24:25sur Luc disait que Christian avait porté
24:32un certain soin à ses textes,
24:35à ce qu'il écrivait, à ses écrits.
24:36Mais effectivement, la forme, le papier,
24:39le support, c'était quelque chose.
24:41En fait, c'est un tout, cette simplicité.
24:43En fait, c'est des très beaux ouvrages.
24:44Il y a plein de petites plaquettes,
24:46des très, très beaux ouvrages.
24:47Et c'est cette simplicité-là,
24:49en fait, je pense,
24:51qui le définit en grande partie
24:52et qu'on retrouve dans toutes ces belles publications
24:57jusqu'aux toutes dernières
24:58qui sont des poètes sont des monstres.
25:02Oui, les poètes sont des monstres.
25:04Voilà.
25:05Il se fait à Morgana, que je n'ai pas cité,
25:06où il a fait un livre, par exemple,
25:08sur Antonin Artaud,
25:09qui s'appelle « Les cas du solitaire ».
25:11Parce qu'il aimait bien parler des gentilèmes,
25:12en fait, dans tous ses livres.
25:14Et dans « Les poètes sont des monstres »,
25:15il parle de Mandelstein,
25:17il parle de Zvetayeva, d'Akmatova.
25:20C'est ce que j'allais dire d'Akmatova aussi.
25:22Il y avait une question ?
25:25Ben, j'arrive, je l'ai posé.
25:27Non, je crois que je vais oublier la question,
25:28c'est pour ça.
25:31Alors, les différentes régions du ciel.
25:33Oui.
25:34Comment s'est fait ce projet avec Christian Baudin ?
25:38Alors, il faut savoir qu'avec ce livre,
25:42on a inauguré une série
25:43dans la collection Quarto
25:48qui est dédiée aux auteurs contemporains.
25:51contemporains, ça veut dire vivants.
25:55Donc, pendant 18 mois, 12 mois, 15 mois peut-être,
25:59on a travaillé avec Christian sur ce projet,
26:01on en a parlé avec Antoine Delimar,
26:03il a accepté l'idée de recueillir
26:06un certain nombre de textes, pas tous.
26:08Cette série, elle diffère de la série patrimoniale,
26:14je dirais, parce que dans la série patrimoniale,
26:16il y a une chronologie très détaillée
26:18de la vie de l'auteur,
26:19qui est illustrée par des archives,
26:22avec une date, un lieu,
26:25toutes les années défilent,
26:27ce qui n'est pas forcément simple pour,
26:30enfin, un Dickens ne pose pas de problème,
26:32mais un auteur vivant,
26:33c'est un peu plus compliqué pour lui
26:35de faire ce travail-là,
26:36de repasser tout le cours de sa vie.
26:38Donc, on s'est dit que pour les auteurs vivants,
26:40ce qui avait déjà été fait, en fait,
26:42chez Quarto, pour Annie Ernaud et Patrick Modiano,
26:46c'était de leur demander des documents
26:49qui les touchaient d'une façon ou d'une autre,
26:51qui allaient évoquer un endroit,
26:54un lieu des personnes.
26:55Et la règle, au départ, c'était,
26:59enfin, il n'y a pas vraiment de règle,
27:00l'idée, au départ, c'était d'illustrer
27:02avec des textes autobiographiques
27:04qui venaient, comme ça,
27:06expliquer telle ou telle,
27:07en petite légende.
27:09C'est l'idée qu'on s'est donnée.
27:12On a vraiment travaillé sur la maquette,
27:14même avec Christian.
27:17Voilà.
27:18Et on a essayé,
27:20on sait d'abord,
27:20on a listé tout ce qu'il avait écrit.
27:23Alors, il m'a dit, mon Dieu !
27:24Même si ce sont de petits livres,
27:29il y en a une grande, grande quantité.
27:32Donc, on a vraiment réfléchi
27:33à ce qui pouvait être intéressant.
27:35Il a écarté de lui-même
27:36un certain nombre de titres.
27:38Moi, je l'avais rencontré,
27:40je l'avais rencontré comme actrice
27:42par la Dame Blanche,
27:43consacrée à Indy Dinsson,
27:45pour mille raisons.
27:48Et je l'avais retrouvé
27:50avec un bruit de balançoire,
27:51avec Rio Can,
27:52mais pour être japonais.
27:52Et puis,
27:55il me dit,
27:56ben oui,
27:57mais ceux-là,
27:58alors il m'explique Dinsson,
27:59oui,
27:59mais c'est pas,
28:01en fait,
28:01il l'aime bien,
28:02mais c'est pas celui
28:03qu'il préfère.
28:04C'est bon,
28:04très bien.
28:05Je le tiens beaucoup,
28:06quand même.
28:06Est-ce que je peux te,
28:07je voudrais juste dire quelque chose,
28:09en fait,
28:09parce qu'au cas où,
28:10si vous connaissez Quarto ou pas,
28:12parce que je me dis,
28:12je vais quand même préciser,
28:13c'est un livre
28:14qui vous permet
28:15d'avoir une anthologie
28:15assez condensée,
28:17et en fait,
28:18ça vous permet
28:18de découvrir un auteur
28:19à la fois parce qu'il y a
28:20la partie personnelle,
28:21vu que là,
28:22c'est un Quarto contemporain,
28:24donc l'auteur vivant participe,
28:25il a donné des photos d'archives,
28:26il rédige toute une partie,
28:27mais après,
28:28il choisit dans son œuvre
28:29les textes
28:30qui vont être mis
28:31avec toi,
28:32et c'est pour ça
28:33que vous retrouvez
28:33des textes
28:34en version intégrale
28:35dans ce livre.
28:36Voilà,
28:36c'est une anthologie
28:37plus que complète.
28:39Là,
28:39il y en a quand même 18.
28:40Voilà.
28:40C'est quand même
28:41un record,
28:41je suis...
28:42Oui.
28:4318 livres
28:44en un volume.
28:45Ce qui est beau,
28:451000 pages,
28:46de plaisir.
28:461024 pages.
28:4826 euros,
28:48bon voilà,
28:49il ne faut pas s'en priver.
28:51Et c'était la page intérieure.
28:53Mieux qu'une pléiade.
28:54Et donc,
28:55plus sérieusement,
28:55on reprend.
28:56Donc, Christian,
28:57on va savoir
28:58ce qu'il préfère.
28:59Alors,
29:00c'est ce qu'il préfère
29:01et c'est difficile.
29:03En fait,
29:03il y a un choix.
29:04Par exemple,
29:04on a exclu,
29:05alors,
29:06je vais dire nous,
29:07parce que c'est vraiment
29:08un...
29:09On a passé un après-midi entier
29:10à essayer de discuter,
29:11de voir ce qu'on pouvait.
29:13On a exclu,
29:14par exemple,
29:15les récits.
29:16Je pense à Isabelle Rouge,
29:17à Gé,
29:18qui ne sont pas dedans.
29:19On s'est concentré
29:20beaucoup sur les formes
29:21plus poétiques.
29:22Alors,
29:23bien sûr,
29:23il y a quand même
29:23Pierre Virgule à la fin,
29:25il y a
29:25La nuit du cœur,
29:27mais il y a quand même
29:28une grande,
29:29grande partie de poésie.
29:31Et puis,
29:31surtout,
29:32il est arrivé un jour
29:34dans mon bureau
29:35en me disant,
29:36j'ai ça.
29:37Je lui dis,
29:38qu'est-ce que c'est, Christian ?
29:39Il me dit,
29:39c'est mon premier texte
29:40qui n'a jamais été publié.
29:42Oui,
29:42ça,
29:42c'est très,
29:42très beau.
29:43Je lui dis,
29:43mais racontez-moi l'histoire,
29:45ce n'est pas possible.
29:46Et il me dit,
29:46donc,
29:47il est dedans,
29:47ça s'appelle
29:48L'eau des miroirs
29:48et il n'existe que là.
29:52Oui.
29:52Voilà.
29:53Comment appâter le chien ?
29:54C'est moche.
29:55C'est moche.
29:56Non,
29:56en fait,
29:56je vous explique l'histoire
29:57parce que l'histoire
29:58est vraiment intéressante.
29:59Il me dit,
30:00ce texte,
30:00je l'ai écrit
30:01à la fin des années 70,
30:0279 à peu près.
30:05Mon père
30:05l'a fait relier.
30:07Donc,
30:07il me donne,
30:08il me tend effectivement
30:09un dossier,
30:09il avait tout tapé
30:10et il l'avait fait relier.
30:13Puis,
30:13je l'ai confié
30:13à ce moment-là
30:14la bibliothécaire d'Otan
30:16où je travaillais.
30:18Et puis,
30:18elle l'a lu
30:19et puis,
30:20elle l'a gardé.
30:21Puis,
30:21elle l'a oublié.
30:22Et puis,
30:22lui aussi.
30:23Et puis,
30:23en 2017,
30:24cette dame,
30:24elle est partie
30:25à la retraite.
30:26Elle dit,
30:26Christian Bobin,
30:27c'est à vous ça.
30:28Et le texte
30:29est réapparu
30:30en 2017.
30:31Donc,
30:31moi,
30:31j'arrive en 2021
30:33comme une fleur
30:34et je lui dis,
30:36mais lisez-le,
30:37vous me direz.
30:38Et en fait,
30:39ce texte,
30:40ça retrace aussi,
30:42c'est à mettre,
30:43Hugues a dit quelque chose
30:44de très juste tout à l'heure,
30:45c'est à mettre en parallèle
30:46de son parcours.
30:48C'est un texte
30:48qui,
30:49dans l'écriture,
30:50alors bien sûr,
30:50si on lit les derniers textes
30:51de Christian Bobin,
30:52on est vers cette phrase
30:54très,
30:56je ne vais pas dire sèche
30:56parce qu'elle n'est pas sèche,
30:57mais très brève,
30:58des formes très brèves
30:59d'écriture.
31:00Là,
31:00on est dans des phrases
31:01beaucoup plus longues.
31:01On est dans un récit
31:02écrit à la première personne
31:04du féminin,
31:04qui déroute un petit peu.
31:07Et vraiment,
31:08il y a,
31:08je ne sais plus,
31:10il y a 80 ou 100 pages.
31:11C'est un texte long.
31:12Après,
31:13on va aller vers cette forme
31:15plus pure.
31:16Ce qu'a dit Hugues
31:17tout à l'heure
31:17à propos du parcours
31:18et de la vie
31:18et du lien vie et œuvre
31:20auquel moi,
31:21évidemment,
31:21je ne sais pas,
31:22je suis très,
31:22très attaché,
31:23c'est Christian,
31:25quand on a travaillé
31:26et qu'on a mis une photo
31:27de ce marteau pilon
31:28qui est au cœur du creusot,
31:31c'est cet endroit
31:32des usines
31:33où on fabrique l'acier
31:34et c'est noir,
31:36c'est noir.
31:37Et il dit,
31:37en fait,
31:37j'ai cherché à tendre
31:39toute ma vie
31:39vers la lumière.
31:41Et c'est exactement ça,
31:42c'est partir
31:42de quelque chose
31:44de lourd,
31:46noir,
31:47sombre,
31:47ce que n'est pas
31:48le demi-enoir,
31:49ce n'est pas ce que je veux dire,
31:49mais on va vers une forme,
31:51voilà,
31:51vers une pureté
31:52en fait,
31:53aussi bien dans la forme
31:54et vers la lumière.
31:55C'est un adjectif
31:57qui me semble
31:58le définir,
31:59c'est lumineux,
32:00c'est quelqu'un de lumineux,
32:01sa présence
32:02illuminait votre bureau,
32:04littéralement.
32:05Je suis intéressable,
32:06je ne sais pas.
32:12Vous connaissez Christian ?
32:13Moi, ça m'étonne absolument pas.
32:16Mais non,
32:17il l'a donné à lire comme ça.
32:19Ben oui.
32:21Mais l'histoire est folle.
32:22l'histoire est absolument folle.
32:23Je pense qu'en fait,
32:24c'est d'écriver beaucoup,
32:25de ce que je sais.
32:26C'est quelqu'un
32:27qui écrivait tout le temps,
32:28tous les jours,
32:28et donc je pense
32:29qu'il n'avait aucune logique éditoriale.
32:31Ah non, c'est clair.
32:32En fait, c'est vraiment quelqu'un
32:33qui avait le plaisir des mots
32:34et qui avait envie d'écrire
32:35et voilà,
32:36il ne se posait pas ces questions-là.
32:37Donc moi non plus,
32:37ça ne m'étonne pas tant de ça,
32:38mais c'est vrai que c'est fou.
32:39Mais ce qui est fou aussi,
32:41c'est que le texte,
32:43il est écrit en 79-80,
32:45enfin 79 je crois,
32:48et en 84,
32:49en 84 pardon,
32:51il écrit un petit texte
32:53qui s'appelle
32:54On écrit,
32:56et je vous lis juste
32:56les premières phrases.
32:57On est en 84.
32:59On écrit,
33:00pourquoi on ne saurait dire
33:01une habitude,
33:02une manie,
33:03plusieurs manuscrits.
33:04Le premier s'appelle
33:05Les différentes régions du ciel.
33:08Et
33:08Les différentes régions du ciel,
33:10c'est le titre
33:11qu'il a voulu donner
33:11à ce recueil
33:12en me disant
33:13en fait,
33:14c'est le titre de mon nom.
33:16En 84,
33:17on l'a fait en 2022,
33:18c'était passé 40 ans.
33:21C'est fou, hein.
33:25L'eau des miroirs,
33:26c'est un texte
33:27qui est quand même inédit,
33:28mais pour d'autres raisons.
33:29Est-ce que
33:29tu peux nous expliquer pourquoi ?
33:32Parce que c'est un texte
33:32qui est à la première personne,
33:33qui est au féminin.
33:34C'est aussi un texte
33:35un peu plus sensuel.
33:37Et ça,
33:38ça change parce que...
33:39C'est très différent
33:41d'après
33:42de ce qu'il va écrire.
33:43Oui,
33:43parce que c'est vrai
33:44que Bobin est quand même
33:45traversé par la notion
33:46de pureté.
33:47Et c'est ça aussi
33:47qui est très beau.
33:48Tout est en suspens
33:49dans ses textes.
33:50Et tout est discret.
33:52Il est obsédé aussi
33:53par le visage
33:54qui catalyse tout.
33:55D'ailleurs,
33:55il y a l'autre visage
33:56qui est un très beau texte,
33:58un splendide
33:59qui est chez l'être vide.
34:00Donc,
34:01ça catalyse tout
34:01plus que le corps.
34:02Alors,
34:03pourquoi ce texte ?
34:04Est-ce qu'il t'a donné
34:05quelques explications ?
34:06Il n'a pas donné
34:06d'explications.
34:07Mais il y a fait que...
34:08Non.
34:08Alors,
34:09juste pour vous dire
34:09le début,
34:10en fait,
34:10c'est une...
34:11Alors,
34:12c'est pas très gai,
34:12je vous...
34:13Au départ,
34:14en tout cas,
34:14enfin,
34:15ça l'est pas du tout
34:15même à la suite,
34:16mais...
34:17Mais,
34:18en fait,
34:19je le vends
34:19très très mal,
34:20je suis désolée.
34:21En fait,
34:22c'est une femme
34:23qui
34:23commet une tentative
34:27de suicide
34:27en s'ouvrant
34:28les veines.
34:29Voilà,
34:29ça,
34:29c'est les premiers
34:32veines,
34:32le sang coule.
34:34Le sang coule,
34:34ce sont les mots.
34:35Et là,
34:36en fait,
34:36il y a vraiment
34:36toute un...
34:38Voilà,
34:38une espèce
34:38de grande logorée
34:40qui est extrêmement
34:43poignante,
34:44en fait.
34:44Et moi,
34:45quand je l'ai lue,
34:45je me suis dit,
34:46on est loin de la forme
34:48qu'on connaît aujourd'hui
34:48de Christian Bobin,
34:49mais il y a
34:50tous les thèmes
34:51de Bobin dedans.
34:53C'était ça
34:54que je trouve intéressant
34:56et qui est intéressant.
34:58Et c'est vrai
34:58que dans l'œuvre,
35:00il y a plusieurs choses
35:00qui traversent
35:01dans sa vie privée,
35:02va influencer l'œuvre.
35:03Donc,
35:03je ne sais pas
35:04si vous êtes
35:04toutes lecteurs
35:05de Christian Bobin
35:06ou pas,
35:07mais je pense
35:07quand même
35:07que oui.
35:08Mais c'est vrai
35:09qu'il y a
35:09La plus que vivre
35:10dont parlait tout à l'heure
35:10Hugues,
35:11qui est un livre
35:12essentiel
35:12parce que ça parle
35:13de Ghislaine
35:14ou Ghislaine,
35:15je ne sais pas
35:15comment on dit.
35:16Ghislaine.
35:17De Ghislaine.
35:18Et c'était
35:19son grand amour,
35:20son grand amour amical.
35:22Enfin,
35:22on ne sait pas précisément
35:23ce qui s'est passé,
35:24mais qui est morte
35:25tragiquement dans sa quarantaine
35:26et elle avait des enfants.
35:27Ils ont toujours été
35:28très liés.
35:28Il y a eu
35:29La plus que vivre
35:30en avant après.
35:31Il y a aussi
35:31après Le carnet du soleil
35:32qui reparle aussi
35:34de cette histoire.
35:35Le noir clair.
35:36En fait,
35:37elle traverse son oeuvre.
35:37Il y a beaucoup de deuils
35:38qui traversent son oeuvre.
35:39Il y a aussi son père,
35:40le Christ de Kokiko.
35:42Et donc,
35:42tous ces deuils
35:43traversent son oeuvre.
35:43Donc,
35:44la mort n'est jamais très loin
35:45dans sa poésie.
35:46Comme ça,
35:46on comprend mieux aussi
35:47les lignes.
35:48Et il y a la présence
35:48de Lydie.
35:50Et donc,
35:50moi,
35:50je trouve ça très important
35:51qu'on parle enfin
35:52de Lydie Datas
35:53qui était sa dernière compagne
35:55et je crois
35:55qu'elle a eu
35:56une vraie présence
35:58dans la création
35:58de ce quarto.
36:00Comment tu les as rencontrés ?
36:01Est-ce que tu as travaillé
36:02avec les deux ?
36:03Alors,
36:03avec les deux.
36:03En fait,
36:04ils étaient très,
36:06je veux dire,
36:07complémentaires.
36:07C'est une façon
36:08un peu rapide
36:08de dire les choses.
36:09Mais en fait,
36:11quand on décide
36:12de faire un quarto,
36:13il y a plusieurs façons.
36:14Les auteurs ont plusieurs
36:15façons de l'aborder.
36:15Chacun la sienne,
36:16en fait.
36:17Et là,
36:18très vite,
36:19Christian et Lydie,
36:20ensemble,
36:22ont réfléchi
36:23à ce que Christian,
36:25avait envie de partager.
36:27Donc,
36:27c'est effectivement,
36:29on l'a dit,
36:29il y a quelques photos
36:31d'abord sur lesquelles
36:32il apparaît,
36:32mais vraiment très peu.
36:35Je crois qu'il y en a
36:36trois ou quatre.
36:37Il y a d'autres auteurs
36:38qui m'en donnent
36:39beaucoup plus.
36:41Mais,
36:43en fait,
36:44on retrace vraiment
36:45ce parcours-là.
36:47On part du marteau-pilon,
36:48du creusot,
36:49de cette famille,
36:49de cette mère
36:50qui l'enferme,
36:52en fait,
36:52littéralement chez lui.
36:53Il est devenu
36:53agoraphobe
36:54par la pression
36:56de sa mère,
36:57en fait,
36:57qui l'empêche
36:58à aller à l'école,
36:58qui le laisse,
36:59qui est vraiment
37:00le surcouf.
37:02Elle l'enferme chez lui.
37:03Il y a cette notion
37:03d'enfermement aussi
37:04beaucoup chez Christian.
37:06Et lui,
37:06justement,
37:07il va essayer
37:07de tendre à travers
37:08la lecture et l'écriture
37:10à se libérer.
37:10C'est cette forme-là.
37:12Et,
37:12en fait,
37:13il a choisi,
37:15il dit,
37:15évidemment,
37:16je pense qu'ils ont
37:17beaucoup discuté
37:17tous les deux.
37:18ils ont choisi
37:20un certain nombre
37:21de documents,
37:23de portraits.
37:25Là,
37:25je vois,
37:25il y a Dostoyevsky,
37:27il y a certaines œuvres
37:29d'art très contemporaines
37:30aussi.
37:30Il y a un sculpteur japonais
37:32qui l'aimait beaucoup.
37:33Et puis,
37:34ce qu'il a fait,
37:35et ça,
37:35c'est assez inédit aussi,
37:37c'est que pour,
37:38non seulement,
37:39il a,
37:39parfois,
37:40on a cité des textes
37:41qui existaient déjà,
37:42mais là,
37:42il a vraiment composé
37:43des pages complètes
37:44pour nous.
37:46Il y a plein de petits textes,
37:47des petites phrases,
37:49enfin,
37:50voilà,
37:51sur l'écriture,
37:51sur la vie,
37:52des gens qu'il admirait.
37:55Il y a...
37:56Des extraits de livres
37:57qu'il aimait.
37:57Des extraits de livres.
37:58Comme de Julien Grac.
38:00Exactement.
38:01Alors,
38:01on a quelques documents,
38:03quelques documents.
38:04Alors,
38:04Hug parlait tout à l'heure
38:05de la presse,
38:06la première presse
38:07qui est en 77,
38:09sur laquelle a été imprimé
38:12l'être pourpre.
38:14Voilà,
38:14c'est vraiment,
38:14c'était vraiment
38:15partager,
38:17en fait,
38:17son amour des choses,
38:18des gens,
38:18de la littérature,
38:19de l'art aussi.
38:23Voilà,
38:24donc,
38:24c'est quelque chose
38:25qui s'est fait,
38:27je dirais,
38:28assez naturellement.
38:31Ils ont composé ça.
38:32Alors,
38:33voilà,
38:33tout était très réfléchi.
38:36C'est-à-dire que c'était pas,
38:37on mettait pas une photo
38:38pour une autre.
38:39Il y a un moment,
38:41il y a une photo de,
38:43comment s'appelle ça ?
38:44cette violoniste Dupré,
38:45Jacqueline Dupré,
38:46à qui il voue vraiment
38:47une admiration.
38:49Et il fallait que ce soit
38:50exactement celle-là
38:52où,
38:54en fait,
38:55elle tient l'archer,
38:56il y a une position particulière.
38:58J'en ai trouvé l'autre,
38:58non,
38:59c'était pas celle-là,
38:59c'était celle-là.
39:00C'était un peu plus compliqué.
39:02Et,
39:02parce que des fois,
39:03on trouve,
39:03des fois,
39:03on ne trouve pas.
39:04On a fini par chercher,
39:05trouver,
39:05etc.
39:06Et vraiment,
39:07c'était,
39:07chaque chose,
39:08en fait,
39:08il n'y avait rien
39:09laissé au hasard.
39:10Moi,
39:10c'est quelqu'un avec qui,
39:12voilà,
39:12c'est assez rare
39:13que ce soit
39:14dans cette précision-là,
39:16dans cette méticulosité.
39:17Mais cette méticulosité
39:19qu'on a dans son écriture,
39:21le choix du mot,
39:22le choix du rythme,
39:23le choix de la phrase,
39:24tout est choisi vraiment
39:26d'une façon extrêmement soignée.
39:30Et ça a vraiment été ça.
39:32Donc,
39:32on a passé
39:33beaucoup d'heures
39:35au téléphone,
39:36beaucoup,
39:37parfois,
39:38deux,
39:39trois heures au téléphone
39:40pour essayer de voir.
39:41Et quand on a terminé
39:42que le livre est parti
39:44chez l'imprimeur,
39:44il me rappelle.
39:45Je lui avais dit
39:46que c'était fini.
39:47C'était parti.
39:48Il m'appelle,
39:49il y avait ce rire inoubliable.
39:51Et il me dit,
39:52non,
39:53mais je vous appelle
39:53parce que j'avais tellement l'habitude.
39:54C'est tellement agréable
39:55de discuter avec vous.
39:56Donc,
39:57voilà,
39:57on a parti.
39:57Je dis,
39:57mais continuez à m'appeler,
39:58Christian,
39:58il n'y a pas de problème.
39:59Mais c'était,
40:00voilà,
40:00c'était son attachement aussi.
40:02C'est une façon
40:03de prolonger
40:05parce qu'il y a quelque chose
40:06de très violent
40:07quand on est éditeur
40:08et que le livre se finit.
40:11Voilà,
40:11on a fait une petite travail.
40:12Là,
40:13on a passé
40:13une grosse année
40:15vraiment ensemble
40:16avec des contacts
40:18tous les semaines,
40:19tous les quinze jours.
40:20Ça dépendait des périodes.
40:22Et puis,
40:22surtout à la fin,
40:23vraiment beaucoup.
40:25Et la couleur seule,
40:26ça s'arrête.
40:27C'est violent.
40:27Donc,
40:28on ne voulait pas.
40:28On ne voulait pas
40:29que ça s'arrête.
40:30Et alors,
40:31je vais revenir là-dessus,
40:32mais j'ai envie
40:33de te demander,
40:34parce que là,
40:34on voit l'écriture de Christian,
40:35vous connaissez sûrement.
40:37Tu as vu son écriture
40:38beaucoup de fois,
40:39je suppose,
40:39tu l'as beaucoup vu passer.
40:41Oui.
40:41Et qu'est-ce qu'elle dit de lui ?
40:43Je pense qu'il y a une écriture sincère.
40:57C'est une écriture sincère.
40:58Elle est généreuse.
40:59Il est généreux.
41:00Il est généreux dans ce qu'il écrit.
41:01Il est généreux dans son rapport aux autres.
41:04Alors,
41:04évidemment,
41:05on connaît ce côté un peu homme recrut.
41:07Mais en fait,
41:09c'est quelqu'un d'extrêmement généreux
41:10quand il était en confiance.
41:14Il n'y a rien qui se crée.
41:15C'est vraiment quelqu'un.
41:17Et je pense que c'est ça,
41:18en fait.
41:19C'est ça.
41:20Et donc,
41:21tu as été,
41:21je suppose,
41:22plusieurs fois chez lui,
41:23au Creusot ?
41:24Jamais.
41:25C'est vrai ?
41:25Jamais.
41:26Ah mince.
41:26Il est toujours venu.
41:28Ah mince.
41:29Je pensais que tu avais nous parlé
41:30de sa bibliothèque.
41:30que j'étais crééreuse.
41:31Je l'ai vu en photo,
41:32c'est la bibliothèque.
41:33Ah.
41:35Elle est là.
41:35Elle est là.
41:36Elle est là,
41:37la bibliothèque de Christian.
41:38Enfin,
41:38une des bibliothèques de Christian.
41:40Non.
41:40Non.
41:41Mais en fait,
41:41ça dit aussi
41:45cette réserve.
41:47Cette réserve
41:48de cette tête.
41:52Voilà.
41:54C'était...
41:55Non,
41:55en fait,
41:56la seule fois que je suis au Creusot,
41:57c'est pour ses obceps.
41:58Je ne pense pas qu'il y a passé.
41:59Mais non,
42:00on a travaillé.
42:01C'est toujours lui qui est venu
42:02et beaucoup de téléphones.
42:03Alors,
42:04il m'a dit
42:05à cause de vous.
42:06Je ne savais pas
42:06si c'était à cause.
42:07Ce n'est pas bien à cause.
42:08Mais c'était tellement
42:10à l'inverse de lui.
42:11Il avait ouvert une boîte mail
42:13et il avait un téléphone portable.
42:16J'ai dit
42:17parce que
42:18quand il fallait finir
42:19les dernières petites choses,
42:20on voyait des pages,
42:21il y avait tout un truc.
42:22Au départ,
42:22il fallait envoyer
42:23chez un reprographiste,
42:26un copy top,
42:27un copy fac,
42:28là où on va faire
42:29les photocopies,
42:30les impressions,
42:31etc.
42:31Donc,
42:32on l'envoyait.
42:32J'ai envoyé un mail au monsieur
42:33en disant
42:34j'ai envoyé un mail
42:35pour Christian.
42:37À un moment,
42:38il y avait trop d'échanges.
42:40En fait,
42:40ils se sont prêtés au jeu
42:42vraiment avec Didi.
42:42il faisait des petites maquettes
42:46que le monsieur scannait
42:48qui m'envoyait.
42:49Et en fait,
42:50quand j'ai créé
42:51une adresse mail,
42:53je me suis dit
42:53ça y est,
42:53c'est cool,
42:55je l'ai perverti,
42:56je l'ai perverti.
42:57Dans la modernité.
42:58Non,
42:59ce n'était pas mon but.
43:00Et par exemple,
43:01dans les 18 textes
43:02que vous avez choisis
43:04dans l'anthologie,
43:05tu pourrais nous en recommander
43:07trois
43:07et nous dire
43:08pourquoi il faut les lire
43:09pour entrer dans l'œuvre
43:11de Christian Bobin
43:12ou le comprendre mieux
43:13ou ne pas passer à côté.
43:16Trois c'est dur.
43:18Alors,
43:18si,
43:19bon,
43:20c'est complètement arbitraire.
43:22L'éloge du rien.
43:24Petit texte
43:25qu'il aimait beaucoup
43:28et qui dit beaucoup,
43:30beaucoup de choses
43:30de Christian.
43:33En général,
43:34moi,
43:34quand on me demande
43:35par quel livre
43:36il faut commencer,
43:36je donne la petite robe
43:38de fête
43:39qui est un des plus connus
43:41et qui permet vraiment
43:42de le découvrir.
43:46Le problème,
43:46c'est que je les aime tous.
43:47C'est vraiment très compliqué.
43:49La plus belle,
43:49il est absolument bouleversant.
43:54Pierre,
43:55sur Pierre Soulages,
43:57voilà,
43:57c'est aussi très très beau.
43:58En fait,
43:58ça dépend.
43:59Il a quand même,
44:01je dirais,
44:02je ne vais pas dire
44:03une palette,
44:04mais il touche quand même
44:05beaucoup de sujets
44:06et de personnes,
44:08de personnalités
44:09etc.
44:09Et en fait,
44:10c'est un peu en fonction
44:11de chacun.
44:12Je trouve que chacun
44:12lit son oeuvre
44:15un peu en fonction
44:16de ses goûts.
44:19Je sais qu'il y a
44:20des gens qui aiment
44:21beaucoup ces petits récits
44:22qu'on avait écartés
44:24comme j'ai
44:25pour des raisons.
44:28Voilà,
44:28parce que c'est aussi
44:29notre forme.
44:30Il y a quelque chose
44:31de drôle.
44:31ce n'est pas l'image
44:33qu'on a de Christian
44:33Bobin comme ça
44:34spontanément,
44:35mais voilà,
44:35c'est très beau.
44:37Ok,
44:38tu penses qu'il aurait
44:39gardé surtout la poésie
44:40en fait ?
44:41C'était le plus important
44:42pour lui ?
44:43Je pense,
44:43peut-être,
44:44oui.
44:45Je ne peux pas
44:45l'affirmer,
44:46mais je pense que,
44:46en tout cas,
44:47la forme poétique.
44:48Après,
44:48ce n'est pas
44:49de la versification,
44:52c'est de la forme poétique.
44:57Et j'allais ajouter,
45:01c'est vrai que là,
45:01il y a beaucoup
45:02de livres fragmentés,
45:03ce qui est merveilleux
45:04parce que vous pouvez
45:05picorer ce quarto,
45:06ça c'est l'humain.
45:08Et en même temps,
45:08il y a quand même
45:09quelques romans
45:10auxquels je pense
45:10qui sont formidables,
45:11dont Louise Amour,
45:13que j'adore,
45:14mais que je ne vois pas
45:15souvent passer.
45:16Pas beaucoup de gens
45:16en parlent,
45:17mais c'est un genre
45:17où vous avez l'occasion
45:18de le lire.
45:19En tout cas,
45:19c'est un très beau livre
45:19qui parle d'une histoire
45:21d'amour entre une femme
45:22qui est née,
45:22qui crée des parfums
45:23et un homme.
45:25Et cet homme,
45:26d'ailleurs,
45:26je trouve qu'il ressemble
45:26beaucoup à Christian
45:27dans la description.
45:29Ça qui est rigolo,
45:29peut-être que c'est une histoire
45:30vraie,
45:30qui ne pensait pas grand-chose
45:31de sa vie personnelle.
45:33Et ça,
45:33c'est un très beau roman.
45:34Et après,
45:35c'est vrai que dans ce quarto,
45:36en même temps,
45:37je regarde,
45:38mais si je peux vous recommander
45:39certains livres,
45:40Lettres d'or,
45:41c'est un très beau petit texte
45:43qui parle de l'amour
45:44des lettres,
45:44de l'amour de l'écriture
45:46et qui vit l'écriture
45:47à l'amour.
45:48Et surtout,
45:49on sait que Christian Maubin
45:49a eu beaucoup de correspondances.
45:51Peut-être que dans l'Assemblée,
45:52on a des gens
45:52qui ont déjà eu des lettres
45:53de Christian Maubin
45:54ou qui en ont reçu.
45:55Je me tourne vers eux.
45:57Ils ont envie de le partager.
46:00Mais je crois qu'il écrivait
46:00beaucoup de lettres.
46:01Beaucoup.
46:02Beaucoup.
46:03Beaucoup de correspondances.
46:04Beaucoup de correspondances.
46:05C'est le fait de vivre
46:06effectivement dans une ville
46:07un petit peu à l'écart
46:09du monde.
46:11Très longtemps aussi,
46:12pendant une maison
46:13qui était au bout
46:14d'un chemin dans la forêt.
46:15Donc, vraiment,
46:16même pas en centre-ville.
46:17Après, à la fin de sa ville,
46:18il était dans le centre-ville
46:19du Crenon.
46:22Et donc,
46:22les lettres,
46:23les lettres,
46:24ça impose
46:25un autre rythme,
46:27une autre temporalité
46:28aussi.
46:30Et ça, c'est lui aussi.
46:32De ne pas être justement
46:33dans cette immédiateté,
46:34dans l'effet de mode.
46:36Et c'est vrai,
46:38quand il est décédé,
46:39il y a eu au ministère
46:40de la Culture
46:41pour la nuit de la lecture,
46:43il y a eu un hommage
46:44qui a été rendu.
46:46Et il y avait beaucoup de gens
46:48qui venaient témoigner,
46:49qui venaient faire une lecture.
46:50Et le nombre de personnes
46:52qui ont dit à un moment
46:55ou à un autre
46:55qu'eux avaient correspondu
46:57avec l'histoire.
46:58C'était à moitié de la salle.
47:00C'était vraiment très,
47:02très impressionnant.
47:02Et c'est quelque chose
47:03qui était vraiment important
47:05pour lui.
47:07Donc,
47:08on aura peut-être
47:08un teint
47:09en Christian.
47:10Ce serait bien.
47:13Donc, c'est vrai
47:13que Lettres d'or,
47:14c'est un très beau texte.
47:16Il y a aussi
47:17Éloge du Rien,
47:18comme tu disais.
47:19La plus que vive.
47:21Les ruines du ciel,
47:22Noir clair.
47:23Noir clair aussi,
47:24c'est fragmenté.
47:24C'est très joli.
47:25Et je pense à ça,
47:27mais ressuscité,
47:28qui n'est pas dedans,
47:29mais qui est très beau.
47:31Et d'ailleurs,
47:31il y a cette phrase,
47:32il y a une étoile mise
47:33dans le ciel
47:34pour chacun de nous,
47:35assez éloignée
47:36pour que nos erreurs
47:36ne viennent jamais
47:37la ternir.
47:39Noir clair,
47:39on peut aussi garder
47:40cette phrase,
47:41le sourire est la seule preuve
47:42de notre passage sur terre.
47:45Et en même temps,
47:46j'en profite,
47:48dans la part manquante,
47:49ce n'est pas pour devenir
47:50écrivain qu'on écrit,
47:51c'est pour rejoindre en silence
47:52cet amour qui manque
47:54à tout amour.
47:55Je m'assieds devant
47:55la table d'écriture
47:56et je laisse venir à moi
47:57les différentes régions
47:58du ciel.
47:58Merci Aude Cyrillé,
48:01je t'en prie.
48:01Je t'en prie.
48:07Est-ce que vous avez
48:08des questions
48:08ou est-ce que vous voulez
48:10nous partager votre,
48:11je ne sais pas,
48:11rencontre avec Christian Beaubin ?
48:14Votre première lecture
48:15de Christian Beaubin ?
48:19Il faut un premier pour se sentir.
48:20Oui.
48:21Ne soyez pas timide.
48:21Ah !
48:22Je t'en prie.
48:52Je t'en prie.
48:53Je t'en prie.
48:55Je t'en prie.
48:59Il m'a rendu sensible
49:02plus que n'importe quel autre historien,
49:04je ne sais pas,
49:04je t'en prie.
49:09Et justement,
49:11ça rejoint tout à fait
49:12attention à l'autre
49:13en tant qu'il avait
49:14de l'homme
49:15qui n'a pas situé
49:15à refituer une âme
49:18qu'il n'a même pas connu.
49:19C'est l'un des historiens
49:20qui ne l'ont pas dans le siècle
49:21mais il me l'a fait
49:23le point de vue
49:24dans la vie
49:27on a vraiment
49:29saisi l'âme
49:30de ce sens
49:32la meurtrière
49:38je l'ai pas lu
49:42en plus je suis médiéviste
49:45ah oui c'est dans la part manquante
49:47d'accord
49:48et ben moi récemment
49:54pour tout vous dire
49:55il y a quelqu'un qui m'a offert
49:58la part manquante avec un envoi de Christian Bobin
50:00donc je suis trop contente
50:02donc il faut que je le lise là
50:03je suis trop contente
50:04ok donc ça c'est la meurtrière
50:07et toi c'est quoi le premier livre que tu as lu
50:10de Bobin ?
50:11je crois que c'est la dame blanche
50:12parce que
50:15j'ai vécu à Emmerst
50:17à 50 mètres de la maison d'Emmerie Dickinson
50:19donc clairement
50:19c'est un espèce de tropisme
50:23mais ça aurait pu être Marguerite Porret
50:24étant médiéviste moi-même
50:26donc
50:27mais je l'avais pas
50:28je l'avais pas à ce moment là
50:29est-ce que vous voulez
50:32partager aussi
50:33votre rencontre avec Christian Bobin
50:34ou poser une question ?
50:36je l'avais pas à ce moment là
50:38je l'avais plus à
50:40en fait un moment je l'avais plus à
50:41en fait un moment je l'avais plus à
50:42je l'avais plus à
50:44je l'avais plus à
50:44mais en fait il s'est fait énormément
50:46donc j'avais pas à mon point
50:48mais j'avais une opinion
50:49qui m'a fait comme ça
50:50et un moment je l'avais mis de l'eau
50:52et j'ai vu tout c'est l'eau
50:54et je dis mais il y a plus de l'eau
50:55parce que ça fait l'eau
50:56donc j'ai vu une petite fête de crêpe
51:00je l'avais mis de l'eau
51:02il est déjà rouge oui
51:03et donc je l'avais mis de l'eau
51:04mais je l'avais mis de l'eau
51:05mais je pensais le pergo
51:06et en vrai j'étais hyper couchante
51:09hyper très signalée
51:11et comme tu dis très bien
51:13en vrai c'est hyper étonnant
51:14parce que c'est un homme qui a le fait
51:16un mérmite qui m'a le fait
51:17et qui a le fait
51:18et qui a le saisi du
51:19c'est un très très bon lecteur
51:21ouais
51:22je l'avais dit pas une belle chose
51:23parce que sur la religion
51:24parce que sur l'histoire
51:25mais aussi sur la technologie
51:27et il y a une phrase qui est très belle
51:29je pense qu'il est très belle
51:30sur Diane Saint-Témoire
51:32dans la technologie
51:34valeur à celui qui est là
51:35et ses rêves
51:36et je trouvais ça que
51:38c'était très grande
51:39et je trouvais ça que
51:41et je trouvais ça que
51:42je voulais me coucher
51:43oui
51:44oui
51:45oui
51:46oui
51:47ouais
51:48oui
51:50oui
51:51oui
51:52il y a vraiment
51:53Sous-titrage MFP.
52:23Sous-titrage MFP.
52:53Sous-titrage MFP.
53:23Sous-titrage MFP.
53:53Sous-titrage MFP.
54:23Sous-titrage MFP.
54:53Sous-titrage MFP.
55:23Sous-titrage MFP.
55:53Sous-titrage MFP.
56:23Sous-titrage MFP.
56:54Et en plus, comme on tâtonnait encore beaucoup, on s'est dit non, on va en faire un très bien.
57:00Enfin, on va en faire un, vraiment se concentrer dessus.
57:03Et en fait, j'ai enchaîné après les autres.
57:05Et le suivant, c'était Ridley Lucas.
57:07Donc, voilà, c'est pour ça.
57:10Et en fait, c'est un auteur que j'aime, ça ne m'aura peut-être pas, j'en sais rien.
57:17Mais quand j'aime bien les auteurs.
57:19Mais quand j'aime bien les auteurs, en plus, j'aime bien faire ce genre de proposer.
57:22Je propose en premier, d'abord des auteurs que j'aime.
57:25Voilà, des auteurs que j'aime.
57:26Donc, Christian, ça...
57:27Ah ben, ça, j'ai pas dit que ça avait été facile.
57:32Et puis, en plus, c'était lui proposer quelque chose qui n'existait pas.
57:37Donc, mais je sais pas, il y a eu un...
57:41Merci.
57:42Oui, il a dit oui.
57:44Après, on a vraiment mis du temps à trouver la bonne forme, la bonne formule,
57:48qui lui reconvienne, parce que c'est toujours pareil.
57:50Et Christian est vraiment l'exemple parfait.
57:53C'est qu'il fallait que ça lui convienne.
57:55Il fallait que le contenu, dans le choix des photos, l'accompagnement, les textes,
58:00c'est exactement la photo, comme ci, comme ça.
58:02Il fallait qu'il s'y retrouve.
58:06Alors, ça, c'est...
58:07Ben oui, mais c'est lui qui l'a choisi, ce petit.
58:11Eh ben, oui.
58:12Oui, alors, moi, on va sûrement conclure.
58:16Et en même temps, j'ajoute quelque chose.
58:18Franchement, si vous ne l'avez pas, Squarto, c'est pas...
58:20Bon, moi, je le trouve génial.
58:21Je l'aime beaucoup.
58:22Je le trouve très bien fait.
58:23Donc, si vous aimez vraiment Christian Bobin et que vous n'avez pas tous ses textes,
58:27il est merveilleux.
58:28Et au-delà de ça, il y a d'autres livres que vous pouvez retrouver ce soir qui sont en poche
58:32et à côté desquels, je pense qu'il ne faut pas passer, comme Noir clair,
58:35qui sont des livres aussi merveilleux à offrir.
58:38Si vous aimez des gens, offrez-leur Christian Bobin.
58:41Moi, j'offre Christian Bobin aux gens que j'aime.
58:44Et donc, voilà, j'espère que cette soirée vous a plu.
58:47Et merci beaucoup pour votre présence.
58:48Merci beaucoup.
58:49Merci à toi.
58:51Merci.
58:52Merci.
58:53Merci.
58:54Merci.
58:55Merci.
58:56Merci.

Recommandations