- il y a 5 jours
Retour de la Vasque olympique au jardin des Tuileries cet été : "Je ne cherchais pas à impressionner, mais à aller chercher les plus réticents" vis-à-vis des Jeux olympiques, explique son concepteur, le designer français Mathieu Lehanneur.
Retrouvez « L'interview de 9h20 par Léa Salamé » L'interview de 9h20 avec Léa Salamé sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20
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00:00Léa, ce matin vous recevez un des plus grands designers français.
00:03Et bonjour Mathieu Lehanneur.
00:05Bonjour.
00:05Bienvenue, merci d'être avec nous ce matin.
00:07Si vous étiez un personnage historique, un objet et un défaut, vous seriez qui, vous seriez quoi ?
00:14Un personnage historique ?
00:16J'aime l'univers marin et aquatique, donc je serais celui qui a ouvert les eaux, je trouve que ça avait de la gueule.
00:25Celui qui a ouvert les eaux ?
00:26Oui, vers la mer comme ça.
00:28D'accord, vous seriez Dieu quoi.
00:30Oui, enfin, un de ses représentants.
00:32Moïse, un objet ?
00:35Un objet, je serais sans doute un airbag, c'est-à-dire qui passe la plupart de son temps caché dans votre volant
00:44et puis qui apparaît en un quart de seconde et qui vous sauve la vie.
00:48Et un défaut ?
00:50Sans doute l'impatience, je vis avec une sorte d'état d'urgence permanent.
00:55Le célèbre graphiste américain Milton Glaser, celui qui a créé le logo « I love New York » qui est mis partout, disait « il y a trois réactions devant une création ».
01:04Oui, non et « Wow ». « Wow » est celle qu'on doit viser.
01:09Est-ce que vous aussi, quand vous créez un objet, ce que vous visez, c'est l'effet « Wow » ?
01:13Non, le « Wow », il est important pour capter votre attention parce qu'on est entouré de millions et de milliards de choses
01:21qu'on voit, qu'on a inclus dans notre mémoire, dans notre culture.
01:25Et donc ce « Wow », il est important juste pour vous attraper, comme une personne que vous croisez dans la rue
01:31et qui, pour X raisons, vous attrape le regard et l'attention.
01:33Mais il ne peut pas suffire parce qu'un « Wow », on ne va pas passer sa journée avec un « Wow ».
01:37C'est assez fatigant.
01:38Donc, il faut que le « Wow » soit là, mais ensuite, il faut que l'objet soit suffisamment dense, riche,
01:44pour qu'au fil des jours, au fil des semaines, au fil des décennies, il ait quand même toujours quelque chose à vous raconter, à vous apporter.
01:51Oui, vous dites d'ailleurs à vos clients, vous dites qu'il faut que cet objet survive à votre mort.
01:56C'est-à-dire qu'il faut qu'il dure 100, 150 ans et qu'il reste, en fait.
02:00Oui, alors ça crée toujours un petit moment de, pas de tension, mais ça crée un petit silence
02:04quand, effectivement, un client qui s'apprête à acheter une pièce, vous lui dites « Ce que vous apprêtez à acheter, vous survivra ».
02:11Donc, vous le mettez face à sa propre fin.
02:15Mais c'est vraiment la mission que mes équipes et moi, on se donne.
02:19C'est-à-dire que c'est que l'objet est tellement compliqué à produire, est souvent coûteux à produire.
02:25Il faut, effectivement, qu'il aille bien au-delà d'une seule vie.
02:28Je ne vous l'ai pas demandé, mais si vous étiez un morceau de musique, Mathieu Le Hanner, forcément, vous seriez ça.
02:40Parade ! Vous me regardez ! Parade ! C'était l'hymne de tout l'été, les Jeux Olympiques, les Jeux Paralympiques.
02:47Vous n'en souvenez plus ?
02:48Si, je m'en souviens, mais j'ai mis un peu de temps à la retrouver.
02:54Mais sans doute parce que pendant la durée des Jeux Olympiques, j'avais des sortes d'acouphènes permanents.
03:01Et c'est mes yeux qui prenaient toute la place.
03:02Voilà, vous étiez obsédé par une seule chose.
03:05Par le fait que tous les jours, la vasque olympique que vous avez créée, avec la torche,
03:10mais la vasque olympique s'envole au coucher du soleil, s'envole dans le ciel de Paris.
03:14Cette vasque olympique qu'on a admirée, que des millions de gens ont adoré.
03:20C'est la grâce de cette mongolfière fête de lumière et d'air monte dans le ciel.
03:26Tous les soirs, vous étiez là pour son envol.
03:28Tous les soirs, vous étiez là flippé pour son envol, que tout se passe bien.
03:32Et elle revient, la vasque olympique.
03:35Elle revient à Paris, puisque samedi prochain, pour la fête de la musique,
03:39elle va s'envoler à nouveau dans le ciel de Paris.
03:41Et alors là, moi, quand j'ai lu ça, je me souviens vous avoir interviewé l'été dernier pour les JO
03:45et vous dire, bon, parce qu'on se demandait ce qu'on allait faire de cette vasque.
03:48Alors, il y avait ceux qui voulaient la garder, ceux qui voulaient en finir.
03:51Et vous étiez de ceux-là.
03:53Vous aviez dit, non, il faut que ça s'arrête avec la fin des JO.
03:56Il ne faut pas garder cette vasque comme une relique terminée.
03:59Vous avez changé d'avis, Mathieu Lohaner.
04:00Non, je n'ai pas changé d'avis.
04:02Mais c'est l'éternelle question de qu'est-ce qu'on fait de nos morts
04:07ou est-ce qu'il faut rappeler ses ex ?
04:09Ce n'est pas la même chose.
04:11Non, mais c'est-à-dire qu'à un moment, effectivement,
04:13on a vécu une chose absolument incroyable,
04:15qui était absolument insoupçonnée, soyons clairs.
04:18Enfin, pour moi.
04:20Et ensuite, l'histoire s'arrête et qu'est-ce qu'on fait ?
04:23Est-ce qu'effectivement, on essaie de réactiver de force une chose,
04:27un sentiment, une émotion, où on accepte qu'elle disparaisse ?
04:32Et vous, vous étiez plutôt favorable à la disparition,
04:34en disant que c'était ce moment-là ?
04:35J'ai alterné, oui, absolument. J'ai alterné.
04:38J'avoue n'avoir eu beaucoup de mal à me prononcer.
04:41Mais je crois très sincèrement que la décision finale
04:44qui est revenue au président de la République,
04:47de dire qu'elle revient...
04:50Donc oui, ça devient un peu un monument, probablement,
04:53mais un monument plutôt léger, plutôt saisonnier.
04:56Je trouve ça assez beau.
04:57Parce que ça va revenir tous les étés, en fait.
04:58Elle va s'envoler tous les soirs de l'été,
05:01à partir de samedi et jusqu'au 14 septembre.
05:03Et puis ensuite, elle va venir tous les étés
05:04jusqu'aux Jeux Olympiques de Los Angeles en 2028.
05:07Exactement.
05:08Trois étés d'affilée.
05:09Vous allez rappeler votre ex, en fait.
05:12C'est ce qui va se passer.
05:12Je vais rappeler mon ex ou réveiller mes morts.
05:16Donc, vous rappelez votre ex, vous rappelez la vasque
05:18et on va la voir avec le même émerveillement,
05:21nous, monter dans le ciel.
05:23Ce sera samedi pour la fête de la musique,
05:25pour le grand concert de la fête de la musique.
05:27Thierry Reboul, qui est l'organisateur
05:29de toutes les cérémonies d'ouverture, de fermeture
05:31des JO et de cette fête de la musique,
05:34dit qu'elle sera l'une des chanteuses
05:36du spectacle de samedi soir.
05:38Ça veut dire quoi, ça, en langage de Thierry Reboul ?
05:41Elle va chanter la vasque ?
05:42Alors, d'abord, c'est très compliqué de comprendre
05:43le langage de Thierry Reboul, d'une manière générale.
05:45Mais honnêtement, je ne sais pas.
05:47C'est-à-dire que je ne suis pas du tout impliqué
05:50dans tout le scénario et tout ce qui va se produire ce soir-là.
05:54Moi, j'ai passé une bonne partie de ma nuit
05:56là, aux Tuileries, pour m'assurer avec les équipes
06:00que tout fonctionnait bien.
06:02Donc, tout est prêt.
06:03Qu'est-ce qui va se passer le soir de la fête de la musique ?
06:05Je sais qu'à un moment, effectivement,
06:06elle va s'envoler.
06:07À quel moment ? Je ne sais pas.
06:09Il dit qu'il y aura un moment particulier
06:11et il va se passer quelque chose.
06:13Moi, je vous soupçonne de savoir.
06:14Elle n'est pas vouloir nous dire au micro.
06:15Je ne sais pas, je ne vous le dirai.
06:17Je n'ai rien à vous toucher.
06:17En tout cas, on va regarder ce que ça donne.
06:19Vous avez été sélectionné.
06:21On a sélectionné votre projet,
06:22cette vasque et cette torche que vous avez designé.
06:26Après un appel d'offres,
06:27vous avez été choisi par le comité olympique.
06:29Est-ce que c'est vrai que dix jours avant de présenter le projet,
06:32vous n'aviez toujours pas trouvé l'idée ?
06:33Moins que dix jours.
06:35D'abord, on avait très peu de temps.
06:36On avait trois semaines.
06:38Ils avaient présélectionné une dizaine de designers
06:40avec qui ils étaient intéressés de travailler.
06:42Et donc, on avait chacun trois semaines
06:43pour dessiner la torche olympique,
06:45le chaudron du relais,
06:46qui est un petit objet qui va suivre le relais olympique,
06:48et puis la vasque olympique.
06:50Trois semaines, c'est évidemment très court.
06:51Et donc, on ne vous demande pas d'avoir résolu
06:53tous les problèmes potentiellement techniques,
06:55mais en tout cas, d'avoir une vision assez claire
06:56du dessin, du message que vous voulez transmettre, etc.
07:00Et vous ne l'aviez pas ?
07:01Et je ne l'avais pas parce qu'on s'était concentrés.
07:04On avait commencé à se concentrer avec mon équipe
07:05sur la torche olympique.
07:06Comme tous les autres.
07:07Apparemment, vous avez été choisi
07:08parce que contrairement à tous les autres
07:10qui se sont concentrés sur la torche olympique
07:13et pas tellement sur la vasque,
07:14à la fin, en trouvant cette idée de Montgolfière,
07:16vous les avez sciés.
07:17À la fin, en tout cas, oui.
07:20Quand je présente le projet,
07:21quand je pose le projet sur la table,
07:23c'est un peu comme ici,
07:24comme ce plateau, ce studio.
07:25Et donc, ils sont très nombreux autour
07:27et vous posez sur la table cette idée de dire
07:29« Et si on faisait une vasque olympique volante ? »
07:32Donc là, il y a encore un petit silence.
07:35Et donc, j'avais fait quelques images
07:37pour voir à quoi ça pouvait ressembler
07:38dans le ciel de Paris la nuit.
07:40Et vous aviez la tour Eiffel sur la droite,
07:41vous aviez le Grand Palais
07:42illuminé dans la nuit sur la gauche
07:44et puis un ballon illuminé dans le ciel de Paris.
07:47Et il y avait une sorte d'évidence.
07:48Il y avait une chose finalement assez naturelle
07:51pour Paris d'avoir cet astre gonflable
07:54qui veille à sa destinée.
07:56Et quand vous avez vu,
07:57lors du premier vol,
07:59le premier soir,
08:00votre petite fille pleurer,
08:02s'effondrer en larmes, vous dites.
08:03Elle s'est effondrée en larmes
08:04quand elle a vu la vasque s'envoler.
08:05Là, vous avez dit « Ça y est, c'est gagné. »
08:08Oui, parce que c'est vraiment ce que je cherchais.
08:10C'est-à-dire que je ne cherchais pas du tout
08:12à faire du spectacle.
08:13Je ne cherchais pas à impressionner.
08:17Mon objectif, c'était vraiment...
08:18J'étais concentré.
08:19C'était vrai pour la torche,
08:20mais encore plus vrai pour la vasque.
08:21Pour aller chercher les plus réticents.
08:24Voilà, c'est vers eux que j'essayais d'aller
08:26parce qu'en France,
08:27ils étaient assez nombreux
08:27à l'approche des Jeux Olympiques.
08:30Et comment aller chercher ceux-là
08:32qui ne sont pas très intéressés par le sport,
08:33qui sont assez réticents vis-à-vis des Jeux Olympiques ?
08:35Ou les cyniques, quoi.
08:36Ceux qui disaient « Nous nous gonfons avec ces JO ».
08:38Qu'est-ce qu'il faut mettre en place
08:39pour envoyer une sorte de flèche invisible
08:41dans le cœur
08:42et que ça leur foute les poils ?
08:45C'est ça.
08:46Vous dites les poils et les larmes,
08:48ça fait partie des objectifs
08:49quand je crée un objet.
08:50Il faut qu'il y ait de l'émotion.
08:51Vous dites « Je veux ramener de la magie
08:52dans ce monde rempli de technologies
08:53qui ne fait plus rêver ».
08:55Comment on fait pour encore émerveiller, en fait ?
08:59Non, mais c'est ça.
09:00Il y en a qui parlaient du sang et des larmes.
09:02Moi, c'est les poils et les larmes.
09:03C'est peut-être mon moment.
09:04C'est peut-être ma devise, finalement.
09:07Comment on fait pour émerveiller ?
09:09On quitte sa tête
09:12et on essaie de camper
09:13dans la tête des personnes
09:14auxquelles on s'adresse.
09:16Alors, dans le cas des Jeux Olympiques,
09:17mais pour d'autres,
09:18on s'adresse à quelques milliards de personnes.
09:20Donc, ce n'est pas absolument simple
09:21d'aller camper dans toutes ses têtes,
09:22mais se dire
09:23« Moi, si j'ai une expertise,
09:26c'est d'au-delà de l'esthétique.
09:28L'esthétique, ce n'est pas vraiment une fin en soi.
09:29C'est de me dire
09:30qu'est-ce qu'il faut
09:31qu'on mette en place,
09:32quels sont les éléments,
09:33les ingrédients,
09:34la composition de ce qu'on propose
09:36pour envoyer, effectivement,
09:37une sorte de vibration.
09:39Il n'y a pas de message.
09:41C'est plutôt un mode de vibration
09:42pour créer une magie,
09:44créer une attirance,
09:46créer un émerveillement.
09:47Et c'est là où vous allez dire
09:48« J'envole dans les airs ».
09:50Et vous dites
09:50« Je me suis inspirée de Jules Verne ».
09:52Jules Verne, je vois bien
09:54avec la montgolfière,
09:55mais vous dites aussi
09:56d'Antoine de Saint-Exupéry.
09:57Pourquoi le petit prince ?
09:58En l'occurrence,
09:59je n'ai jamais ni cité
10:00Jules Verne ni Saint-Exupéry.
10:01Ah si, j'ai retrouvé dans les papiers ?
10:03Parfois, ça brode.
10:05Mais non,
10:06l'idée du ballon,
10:08c'est au départ
10:09comment faire un objet
10:10qui soit léger,
10:13sans doute assez merveilleux
10:14et qui soit visible
10:15d'un maximum de points
10:16possibles de la capitale.
10:18Donc ça veut dire
10:18qu'il faut prendre de la hauteur.
10:19Et puis,
10:20je n'avais pas de velléité
10:22à faire une tour monumentale
10:23pour mettre une flamme au-dessus.
10:25Et puis,
10:26en travaillant sur cette idée-là
10:27et en commençant
10:28à modéliser un peu la chose,
10:30je découvre,
10:30mais un peu par hasard
10:31pour être honnête,
10:32toutes les inventions
10:33des frères montgolfiers,
10:35jusqu'ensuite des physiciens
10:37qui ont développé
10:37des ballons à hydrogène,
10:38etc.
10:39Et qui ont été,
10:40en plus,
10:40testés aux tuileries
10:41pour les premières fois.
10:42Et là,
10:42on parle de 1783.
10:44Et je découvre,
10:46à ce moment-là,
10:46que c'est la première fois
10:47de l'histoire de l'humanité
10:49qu'un humain vole.
10:50Donc ça veut dire
10:51que ce n'est pas rien,
10:52quand même.
10:52Donc c'est une chose
10:53dont on peut être,
10:54je crois,
10:55collectivement assez fier.
10:58Et les premiers vols
11:00ont lieu à ce moment-là.
11:01Et donc je me dis,
11:01il faut qu'on reboucle
11:02avec cette histoire-là.
11:02Mathieu Lehanner,
11:03vous dites,
11:04peu importe le beau et le lait,
11:05ce n'est pas ça
11:06qui guide vos choix.
11:06On l'entend bien ce matin,
11:07c'est l'émotion,
11:08c'est l'émerveillement.
11:10Grande designer,
11:11elle aussi,
11:11André Putman disait,
11:12ne pas oser,
11:13c'est déjà perdre.
11:14Et elle parlait
11:15du geste de la création,
11:16de la transgression,
11:17du fait d'oser.
11:19Et elle répondait,
11:19on va l'écouter,
11:21à ceux qui lui disaient,
11:22oui, mais enfin,
11:22les objets,
11:22parfois,
11:23ne sont pas confortables.
11:23Le confort,
11:24la notion de confort
11:25quand on crée un objet.
11:26Ça me fait de la peine
11:27quand la première chose
11:28que les gens demandent,
11:29oui, mais le fauteuil,
11:30est-ce qu'il est confortable ?
11:32On verra.
11:33Essayons-le d'abord,
11:34voyons si nous le trouvons beau,
11:36déjà.
11:37C'est vrai,
11:38je sais que j'ai été repéré
11:40pour avoir dit ça,
11:41parce que je trouve ça secondaire.
11:44Pour moi,
11:44le confort,
11:45c'est beaucoup plus visuel,
11:46c'est beaucoup plus lié
11:47à quelque chose
11:49qui vous amène à la paix,
11:51à une certaine sérénité,
11:54à une certaine douceur,
11:55d'ailleurs, aussi.
11:55Vous en pensez quoi ?
11:59D'abord,
11:59j'aime bien entendre sa voix
12:02et sa rectitude
12:03et son côté assez radical.
12:05Cette idée de confort,
12:06effectivement,
12:06ce n'est pas une valeur absolue,
12:08c'est-à-dire qu'aller marcher
12:09dans la forêt,
12:10vous trouvez un tronc par terre,
12:11vous asseyez dessus,
12:12en fait,
12:12il est extrêmement confortable,
12:13ce tronc.
12:14Alors qu'effectivement,
12:14concrètement,
12:15ce n'est pas dingue.
12:17Donc,
12:18cette idée de confort,
12:19elle n'est pas à prendre
12:20uniquement au sens
12:21du moelleux de votre postérieur
12:23et qu'est-ce qui vous accueille.
12:24C'est un tout.
12:26Qu'est-ce que ça vous envoie
12:27comme message
12:27et quel est le contexte
12:28qui le met en place ?
12:29Votre actu,
12:30Mathieu Lehaner,
12:31ce n'est pas seulement la vasque,
12:33ça se passe aussi à New York
12:34où vous venez d'inaugurer
12:35un showroom piète à terre
12:37où vous déployez
12:37votre univers créatif
12:38et il y a un vrai engouement
12:41des Américains
12:42pour les designers français.
12:43Il y a vous,
12:43Pierre Jovanovitch,
12:45Laura González.
12:46Il y a même eu un article
12:47dans M,
12:47le magazine du monde
12:48il y a quelques semaines.
12:49La cote de certains designers
12:50et architectes d'intérieur
12:51tricolores auprès
12:52des ultra-riches new-yorkais
12:53flirte avec la skyline.
12:55Pourquoi il plébiscite
12:57comme ça
12:58les designers français,
13:00les objets français,
13:01le savoir-faire français,
13:02l'artisanat français ?
13:03C'est quoi ?
13:04Qu'est-ce qui se passe
13:04avec les Américains ?
13:05Et est-ce que Donald Trump
13:06et sa guerre droite de douane,
13:09sa guerre commerciale,
13:10est-ce qu'elle ne va pas vous nuire ?
13:12Non,
13:13elle ne nuit pas véritablement.
13:16Ce qui est sûr,
13:17c'est qu'il y a probablement
13:19une forme de...
13:20Il y a deux choses.
13:20Il y a une forme probablement
13:21de complexe américain
13:22vis-à-vis d'une histoire
13:23très longue.
13:25Française et histoire,
13:27dans mon cas,
13:28ça concerne aussi
13:29tous les savoir-faire
13:30qui sont encore là,
13:32qui sont encore vivants
13:34et intenses
13:35et que les Américains n'ont pas.
13:38Donc,
13:38quand vous posez une pièce
13:39qu'on développe ici
13:40sur le sol américain,
13:42ils l'ont peut-être déjà vue
13:43sur les réseaux sociaux,
13:44dans la presse, etc.
13:45Mais quand ils voient,
13:46quand ils touchent,
13:46ils disent
13:46mais on serait incapable
13:48de faire ça ici.
13:49On ne saurait pas faire.
13:50Donc,
13:50il y a cette approche-là.
13:51Et puis,
13:52c'est sûr qu'il y a une forme
13:56probablement d'amour de la France.
13:59Et puis,
14:00je crois que le dernier élément,
14:01c'est que là où des Français
14:03qui auraient le même niveau financier
14:04pour s'acheter une pièce
14:05un peu coûteuse,
14:06vont réfléchir,
14:07vont dire,
14:08je ne sais pas,
14:08je vais voir,
14:09c'est bien,
14:10mais les Américains,
14:11ils ont une espèce de chose.
14:12Si je peux et que je l'aime maintenant,
14:13je la prends maintenant.
14:14Je l'achète.
14:15Mathieu Lohaner,
14:16vous êtes né à Rochefort-sur-Mer,
14:18dernier né d'une fratrie
14:19de sept enfants.
14:21Comment on trouve sa place
14:22quand on est le septième
14:23d'une fratrie de sept enfants ?
14:25On ne la trouve pas.
14:26On ne la trouve pas.
14:28Mais c'est une très bonne école
14:29dans le sens où,
14:30moi,
14:31ce que je vis en arrivant,
14:35c'est finalement ce qu'on vit tous.
14:36C'est-à-dire qu'on vit tous
14:37dans des micro-communautés,
14:39que ce soit votre société,
14:42votre ville,
14:43votre pays,
14:43votre planète,
14:43etc.
14:44Donc,
14:45on est tous soumis à ça.
14:46Là où j'ai eu une chance
14:48ou une malchance,
14:49c'est que moi,
14:49je n'ai pas eu d'état de grâce
14:51de l'enfant unique
14:53ou du premier enfant
14:54qui arriverait comme un miracle.
14:56On s'en foutait,
14:56vous dites.
14:57On s'en foutait de moi.
14:58Au suivant.
14:58Au suivant,
14:59comme disait Brett.
14:59Et là,
15:00vous dites,
15:00je décide à 5-6 ans
15:01de faire une OPA
15:02sur le nom de Lohaner
15:03et vous dites,
15:04désormais,
15:05quand on tapera Lohaner
15:06sur Google,
15:06vous dites ça,
15:07gamin,
15:08il y aura Mathieu devant.
15:10Oui,
15:10je ne le dis pas tout haut,
15:13et je me dis,
15:14il va falloir effectivement
15:15qu'on est trop nombreux
15:16à partager le même nom.
15:17Il va falloir trouver
15:18une façon de se l'approprier
15:20d'une certaine manière.
15:21Vous avez réussi.
15:22Études à l'École nationale
15:23des Beaux-Arts.
15:24Non,
15:25un peu des Beaux-Arts
15:25et ensuite l'École nationale
15:27supérieure de création industrielle,
15:28les ateliers de Paris.
15:30Votre projet d'étudiant,
15:31c'était sur le design
15:31des médicaments,
15:32mais pas les boîtes de médicaments,
15:33sur les pilules.
15:34Exactement.
15:35Parce qu'en fait,
15:36aujourd'hui encore,
15:37on sait qu'un médicament
15:38sur deux n'est pas pris correctement.
15:39Parce qu'on en prend trop,
15:41on n'en prend pas assez,
15:41on commence le traitement,
15:42on l'arrête, etc.
15:43Et ça,
15:44c'est parce qu'on n'a plus
15:46tenu compte
15:47de la dimension psychologique,
15:49affective, émotionnelle
15:50d'un patient,
15:50d'un humain,
15:51d'une certaine manière.
15:51Et qu'est-ce qui fait
15:52que je continue à croire ?
15:54Qu'est-ce qui fait
15:54que je continue
15:55à vouloir suivre ?
15:57Qu'est-ce qui fait
15:57que je me souviens,
15:58en prenant mon médicament,
15:59du discours du médecin ?
16:00Le médecin,
16:00il va s'adapter toujours
16:01à son patient.
16:02Il y en a un qui va alerter,
16:03d'autres conforter,
16:04etc.
16:04D'autres être plus pédagogues.
16:06Mais si le médecin,
16:07vous le voyez,
16:0715 minutes,
16:08qu'est-ce qui fait
16:08qu'un traitement
16:09va être capable
16:09de porter ce message ?
16:10En dessinant la pilule.
16:12En dessinant absolument
16:12une dizaine de propositions
16:14de l'antibiotique,
16:15au somnifère,
16:16en passant par l'antiasmatique.
16:18Ça, c'est quand
16:18vous étiez étudiant.
16:19On vous a aussi demandé
16:20un objet pour les services
16:21de soins palliatifs.
16:22Vous avez fait un hublot
16:23pour que les malades
16:23en fin de vie
16:24puissent voir le ciel.
16:25Oui, absolument.
16:26Qui est installé
16:26dans chacune des chambres
16:27et qui permet
16:28au patient
16:29d'être devant un ciel
16:30qui va être un ciel en mouvement.
16:31Vous avez un écran
16:32qui est à l'intérieur.
16:33Et laissant la possibilité
16:35au patient
16:36d'abord de voir
16:37ce que sera le ciel
16:37du lendemain.
16:38Même si le lendemain
16:39pour lui va être
16:40une vision
16:41possiblement impossible.
16:44Mais potentiellement aussi
16:45qu'il choisisse
16:45sous quel ciel
16:46il veut partir.
16:47Et donc,
16:48en fonction de là
16:49où vous venez,
16:50moi peut-être,
16:51vous parliez de Rochefort,
16:51ma ville de naissance,
16:52peut-être que dans ce service-là
16:53je me connecterai sur Rochefort
16:55en disant
16:56voilà, moi je veux partir
16:56sous le ciel de Rochefort.
16:57Ou celui de Melbourne
16:58parce que j'aurais
16:59mon frère, ma soeur,
17:00ma mère
17:00qui vivraient.
17:01Donc, de quelle façon
17:02on crée une sorte de fenêtre
17:04mais vers demain
17:05et ailleurs.
17:07Les impromptus pour terminer
17:08Mathieu Lehanneur,
17:09meilleur souvenir des JO
17:102024 ?
17:12C'est sûrement
17:14l'envol de la vasque
17:16avec ma fille
17:17à mes côtés
17:17et ma famille.
17:18L'objet que vous auriez
17:19aimé inventer ?
17:23Je reviens à l'airbag.
17:24Il n'y a pas mieux que ça.
17:25Franchement.
17:26L'objet le plus moche
17:27que vous ayez inventé ?
17:29Que j'ai inventé ?
17:31Je n'en sais rien,
17:35il y en a eu quelques-uns
17:35mais j'ai veillé
17:37à ce qu'ils disparaissent.
17:38Le centre Pompidou
17:39ou le MoMA ?
17:41Vous êtes exposé
17:43dans les deux.
17:43Oui, le centre Pompidou
17:46pour l'audace
17:47du geste.
17:48New York ou Paris ?
17:50Paris, incontestablement.
17:51Norman Foster
17:52ou Frank Gehry ?
17:55Frank Gehry.
17:58Philippe Starck
17:59ou Charlotte Perriand ?
18:02Oh,
18:03Philippe Starck.
18:04Est-ce que vous utilisez
18:05l'intelligence artificielle ?
18:08Non, pas beaucoup.
18:09Par définition,
18:11elle utilise
18:11tout ce qui a déjà eu lieu.
18:12donc elle fait
18:13la statistique
18:15de tout ce qui s'est déjà produit
18:16et donc si je l'interroge,
18:18je ne crée pas
18:18une vasque olympique
18:19qui vole.
18:20Elon Musk,
18:20il vous fascine
18:21ou il vous angoisse ?
18:23Ni l'un ni l'autre,
18:25il me fatigue un peu.
18:28Liberté, égalité, fraternité,
18:29vous choisissez quoi ?
18:31Je ne crois pas
18:32qu'il faille les dissocier déjà
18:33parce que c'est le trio
18:34qui est assez beau
18:35mais je pense que je choisis
18:37la devise belge
18:38l'union fait la force.
18:39Et Dieu dans tout ça ?
18:41Et Dieu dans tout ça ?
18:43On a été copains
18:44pendant une partie de ma vie
18:46et puis
18:47quand j'ai vu
18:50qu'il était écrit
18:52qu'il avait créé
18:52l'homme à son image,
18:55je me suis dit
18:55ce n'est pas incroyable
18:56comme perspective
18:57donc j'ai moins eu envie
18:58de le revoir.
18:59Merci beaucoup
19:01Mathieu Lehaner.
19:02On regardera donc
19:03cette vasque
19:03s'envoler dans le ciel
19:04de Paris à nouveau
19:05samedi soir
19:07pour le grand concert
19:08de la fête de la musique
19:10et tous les autres soirs
19:11et on peut y aller,
19:12c'est gratuit.
19:13Pas de réservation,
19:14pas de QR code.
19:15On peut aller regarder,
19:16il faut juste être à Paris.
19:17C'est Open Vask.
19:17Merci
19:18et belle journée à vous.
19:19Open Vask.
19:20Sous-titrage Société Radio-Canada
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