Le gouvernement réussira-t-il à augmenter le nombre d’étudiants en médecine ? C’est l’objectif d’une proposition de loi qui sera examinée aujourd’hui au Sénat.
Retrouvez « L'édito politique de Patrick Cohen » sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-edito-politique
00:00L'édito politique Patrick Cohen, le gouvernement réussira-t-il à augmenter le nombre d'étudiants en médecine ?
00:07C'est l'objectif d'une proposition de loi qui sera examinée aujourd'hui au Sénat, originale.
00:12Le texte avait été déposé par le député LR Yannick Noderre et voté par l'Assemblée en décembre 2023.
00:18Député depuis entré au gouvernement, c'est donc le ministre Noderre qui ira défendre la proposition Noderre,
00:25par lequel nous en avait parlé jeudi dernier ici même, la loi vise après le numerus clausus à supprimer le numerus apertus.
00:32Et de quoi s'agit-il ?
00:33Ah oui, parce qu'avant de se former en médecine, il faut réviser son latin.
00:37Le numerus clausus, littéralement nombre fermé, c'est l'idée de génie imposée en 71 par les syndicats de médecins et par l'État.
00:44Les premiers voulaient limiter la concurrence et se garantir de bons revenus,
00:48tandis que les pouvoirs publics se disaient que plus il y a de médecins, plus on dépense en frais de santé.
00:52C'est comme ça qu'on est passé de 8600 étudiants admis par an en deuxième année de médecine au début des années 70 à moins de 4000 dans les années 90.
01:01La pénurie était programmée, mais personne ne la voyait venir parce qu'il aurait fallu regarder loin devant 10 à 12 ans pour former un médecin
01:10et qu'aucun outil de pilotage n'avait été mis en place.
01:13Ce n'est que 30 ans après 2003 qu'est créé l'Office national de la démographie des professions de santé
01:18et que le nombre de places augmente à nouveau jusqu'à 9300 en 2019, l'année de la réforme portée par Agnès Buzyn et de la suppression du numerus clausus.
01:28Le système français, Patrick, a donc découragé des vocations de médecins ?
01:33Beaucoup d'étudiants ont poursuivi leur formation à l'étranger.
01:35La Cour des comptes estime qu'ils sont environ 1600 chaque année, soit 10% de ceux qui échouent à entrer en deuxième année en France.
01:42C'est considérable, ils vont se former en Espagne, en Roumanie, en Belgique, au Portugal.
01:47La plupart reviennent ensuite exercés en France.
01:50En 2023, plus de 15% des médecins inscrits à l'ordre avaient obtenu leur diplôme à l'étranger.
01:57Et ce sont d'abord ces étudiants que Yannick Noder espère ramener dans les facs françaises.
02:01En supprimant donc le numerus apertus.
02:03Le nombre ouvert qui a remplacé le numerus clausus.
02:07C'est un minimum de place pour les 5 ans à venir, fixés par les universités et les agences régionales de santé, ARS, en fonction des besoins des territoires.
02:16Dans le futur système, les ARS pourraient demander aux facultés d'augmenter leur capacité et d'accueillir plus d'étudiants.
02:22Mais les responsables universitaires sont dubitatifs.
02:25La présidente de la conférence des doyennes et doyens de médecine souligne qu'en 30 ans, on a triplé le nombre de nouveaux étudiants.
02:3212 000 aujourd'hui, quand le nombre d'enseignants-chercheurs a diminué de 3%.
02:37Manque d'encadrement et de terrain de stage, locaux saturés, il faudrait pousser les murs.
02:42Le gouvernement l'an dernier avait prévu de monter à 16 000 étudiants en 2027.
02:47Cela représente 120 places supplémentaires par faculté.
02:50La leçon de cette histoire ?
02:52Le volontarisme ne suffit pas à la suppression des numerus.
02:56On peut répondre par un autre mot latin, quid des moyens, en se souvenant que les décisions d'aujourd'hui feront la démographie médicale du pays dans 10 à 15 ans.