00:00Bonne matinée avec nous, ici Orléans, il est quasiment 8h15, c'est l'heure de retrouver Lydie Lay.
00:05Bonjour Lydie !
00:05Bonjour Marc, bonjour à tous !
00:07Je suis Sologneau, mais je me soigne.
00:09C'est le titre du dernier ouvrage de Dominique Labarrière, paru il y a quelques jours.
00:13L'écrivain, passionné d'histoire, auteur de très nombreux livres, nous parle de sa Sologne, ses paysages, ses légendes et ses figures célèbres.
00:20Et il est notre invité ce matin, Lydie.
00:22Bonjour Dominique Labarrière, merci d'être là ce matin.
00:24Ah non, merci à vous de m'inviter.
00:26Alors ce livre...
00:26Vous avez tout dit.
00:27Il a tout dit, c'est vrai.
00:28Il a tout dit, donc je m'en vais.
00:29Ce livre restait là, ce livre, dans une collection sur les identités régionales, il y a Je suis breton, mais je me soigne, je suis parisien, mais je me soigne, et donc le vôtre.
00:37Pourquoi est-ce que vous qui avez écrit des dizaines d'ouvrages sur l'histoire, pourquoi est-ce qu'on vous retrouve là, dans ce registre-là ?
00:44C'est tombé au bon moment, si vous voulez.
00:48Je commence à avoir un certain âge, ma vie est raisonnablement longue, si vous voulez.
00:51Plus on avance en âge, plus on s'aperçoit qu'il est important de s'identifier à quelque chose.
00:56Et l'endroit où on a ouvert les yeux, je pense, participe de votre formation.
01:02Vous devez... Ce que vous êtes, vous le devez aussi à l'endroit d'où vous venez.
01:05Et donc, c'était une opportunité pour moi très heureuse de pouvoir évoquer ça.
01:11De dire, voilà, je suis d'ici, je ne suis pas d'ailleurs, et c'est comme ça.
01:14Vous êtes né à Gien, dans le Loiret, mais vous le dites, enfant de la Loire, enfant, la Loire était mon terrain de jeu, mais la Sologne était mon terrain de rêve.
01:23Oui, oui, parce que j'avais une double appartenance, si vous voulez, pour...
01:27Ma mère vivait à Gien, mon père vivait à Veillet-en-Sologne, si vous voulez, donc il y avait une espèce de bipolarité, si vous voulez, pour envoyer des mots.
01:34Donc, je traînais de la Loire à la Sologne en permanence, quoi.
01:39Mais Gien, pour moi, ça a été longtemps la plus belle ville du monde.
01:42Et la Sologne, le plus beau pays du monde, probablement.
01:44La Sologne, un pays singulier où les siècles prennent plus de temps qu'ailleurs à passer, c'est ce que vous écrivez.
01:49Oui, alors ça, on retrouve ça dans le reportage que vous avez fait, qui est tout à fait intéressant.
01:55Il y a une dame qui vient de la Martinique, et c'est... Il faut du temps.
01:59Il faut du temps. Les Sologne, ils vivent dans une... C'est une île, la Sologne.
02:03Oui, c'est ça, vous parlez d'insularité.
02:05Oui, on est bordé de régions prospères, la Sologne ne l'est pas.
02:10Donc, il y a la Beauce, il y a le Berry, il y a le Sancerrois, le Pays-Fort, il y a tout ça.
02:17Il y a la Loire, il y a le Cher, et donc on est presque dans l'insularité,
02:20et on a une espèce de réflexe de rester entre soi.
02:25L'entre-soi soloniaux est très important.
02:27J'ai cherché, je n'ai jamais trouvé de personnage à la D'Artagnan, si vous voulez,
02:31qu'il soit allé à la cour pour briller à la cour du roi, ou dans les armées du roi,
02:36ou entrer dans la marine pour découvrir des... Non, non, les Seigneurs vivent entre eux.
02:41Et il y a un commentateur, il était début du XVIIIe, qui dit qu'ils se contentent de peu,
02:49parce que peu leur suffit.
02:50Des gens qui suffisent à eux-mêmes, parce que peu de choses leur suffit.
02:52Voilà, c'est ça.
02:53Et il dit aussi, même leurs Seigneurs sont avant tout de leur pays.
02:57C'est-à-dire qu'il y a une espèce de microcosme, comme ça, qui se fait entre nous,
03:02et qu'on retrouve.
03:03C'est encore vrai aujourd'hui.
03:05C'est pour ça qu'on peut dire qu'on n'est pas, peut-être, formidablement accueillants,
03:08mais il faut nous laisser le temps de devenir accueillants.
03:11Et une fois que les gens sont adoptés, ils sont adoptés.
03:13Il y a beaucoup de références à l'histoire, évidemment.
03:15L'histoire de la Sologne, dans votre livre.
03:17Les châteaux, les rois de France, le génie, Léonard de Vinci.
03:20Rabouliot aussi, Maurice Genevoix, il faut l'avoir lui, il faut le relire.
03:23C'est le centième anniversaire de l'apparition.
03:26Exactement.
03:26L'édit de Romorantin, également.
03:28L'édit de Romorantin, j'y tiens beaucoup, parce que la laïcité, aujourd'hui, c'est le fondement.
03:34On l'a fait d'édit de Romorantin, le prolongement d'édit d'Amboise, c'est faux.
03:38L'édit d'Amboise, c'est une amnistie.
03:40L'édit de Romorantin, c'est là où il écrit clairement,
03:43un édit royal dit que les affaires religieuses ne relèvent pas du tribunal civil,
03:48et que c'est du ressort de l'évêque et pas de l'inquisition.
03:50L'édit de Romorantin a protégé la France sur toutes les déviances religieuses de la mainmise de l'inquisition.
03:56Ça n'est pas rien.
03:57La chasse, c'est ce qui vient en tête quand on pense à la Sologne.
04:00Le colteux, le braconnier rusé malin, celui-là, vous l'aimez bien ?
04:04Je l'aime bien, parce que c'est ce que j'appelle un anarchiste tranquille,
04:08c'est-à-dire qu'il est en marge, mais le système lui convient bien, si vous voulez.
04:13Le braconnier n'est pas un voleur,
04:14parce que le gibier, c'est le res nullus du droit romain.
04:21Ça n'appartient à personne.
04:22Donc, ils ne volent pas.
04:24Et en fait, ceux qui volent, c'est ceux qui ont grillage.
04:28Alors, ceux-là, par contre, vous les allumez, entre guillemets, quand même.
04:32Alors, ils sont très riches, j'en ai rien à faire.
04:35Ils soient très riches, tant mieux pour eux.
04:36Mais c'est le grillage qui ne me plaît pas.
04:37Pourquoi ça ne me plaît pas ?
04:38Parce que le gibier cesse d'être du gibier.
04:41La qualification, la nature même du gibier,
04:43c'est d'être res nullus, comme il est dit dans le droit romain.
04:46C'est-à-dire de ne pas tenir à personne.
04:48Dès que vous l'engrillagez, vous vous appropriez.
04:50Donc, ils cessent d'être du gibier.
04:52Ils deviennent cibles vivantes,
04:53et le tir sur cibles vivantes, en France, est interdit.
04:56C'est ça qu'il faut mettre dans la tête de ces gens-là.
04:59Qu'ils enlèvent leur grillage, puis tout ira bien.
05:01Est-ce qu'on a une mauvaise image des soloniaux ?
05:04L'image des soloniaux, on n'a pas fait grand-chose
05:06pour qu'elle soit très, très favorable.
05:08L'image des soloniaux, c'est ça,
05:10c'est des gens qui se suffisent eux-mêmes,
05:13qui, en fait, ils ont une relation.
05:16Moi, j'ai une relation,
05:17et le braconnier a cette relation-là.
05:19C'est-à-dire, le pays ne nous appartient pas,
05:21on appartient au pays.
05:23Ça, c'est très important.
05:25Pour les vrais soloniaux, on appartient au pays.
05:27Moi, c'est depuis plusieurs générations,
05:29mais on appartient au pays.
05:30La nature, les arbres, c'est ça ?
05:33C'est votre socle ?
05:34Oui, oui.
05:35Et donc, on est un peu malheureux
05:38quand on est dépossédé,
05:39soit par l'engrillagement,
05:41soit par la restriction des cheminements possibles.
05:45Moi, quand je suis né,
05:46quand j'étais enfant,
05:46j'allais partout.
05:48Aujourd'hui, je ne peux plus aller partout.
05:49Et ce livre, donc, il est destiné à tout le monde.
05:54Il va intéresser tout le monde.
05:55Pas ceux qui habitent dans ce pays,
05:56pas que ceux.
05:58Voilà, il y a des choses,
05:59je parle de Gien un peu,
06:00parce qu'il y a des attachements.
06:02Gien, j'évoque une tragédie de Saint-Joseph,
06:05l'école Saint-Joseph dans laquelle j'étais,
06:06mais en 1933,
06:08il y a eu deux enfants noyés à l'étang du Puy.
06:10Et c'est quand j'ai rencontré
06:12un braconnier de l'étang du Puy.
06:14J'ai eu des cas de braconnage absolument extantaires.