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  • 06/06/2025
Alors que les crédits carbone sont victimes d’une mauvaise réputation, car jugés inefficaces, voire fantômes, l’association Planète Urgence crée un outil alternatif pour que les entreprises puissent agir pour la protection du climat. Il s’agit d’un modèle de philanthropie climatique. Les sociétés financent des ONG, afin que celles-ci utilisent une méthode de suivi de leur impact carbone.

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Transcription
00:00...
00:00L'invité de ce Smart Impact, c'est Amandine Ersan.
00:09Bonjour.
00:09Bonjour.
00:10Bienvenue, vous êtes la directrice générale de Planète Urgence.
00:12C'est quoi Planète Urgence ?
00:14Alors, Planète Urgence, c'est une association, loi 1901,
00:16et notre métier, c'est de réconcilier l'humain et la forêt,
00:19et de pouvoir trouver des endroits, des lieux, des territoires
00:23où les deux peuvent vivre ensemble en bonne intelligence
00:26et que l'humain se développe grâce à la forêt
00:29et pas contre la forêt.
00:30Et donc, pour ça, vous créez un nouvel outil.
00:35Vous appelez ça la philanthropie climatique.
00:37C'est quoi la philanthropie climatique ?
00:39Alors, c'est un outil de financement au service des entreprises
00:42créées par les ONG, et c'est un outil de financement pour le climat.
00:46En fait, ce qu'on s'est rendu compte en tant qu'association,
00:48c'est qu'on avait beaucoup de mal à faire financer nos projets
00:50au service du climat.
00:51Quand on va conserver une forêt, quand on va la restaurer,
00:54quand on va développer des écosystèmes de mangroves,
00:57on va avoir un impact significatif sur la séquestration carbone.
01:00Et en fait, on avait beaucoup de mal à aller chercher des financements
01:02dédiés à ces projets-là, et on s'est rendu compte
01:06qu'on n'était pas la seule association.
01:08On a fait une étude, il y avait 72% des organisations
01:10dans tous les pays qui avaient du mal à aller chercher ces financements-là.
01:15Et face à ça, on a voulu apporter une solution.
01:17Alors, on va expliquer en détail ce qu'est la philanthropie climatique,
01:21mais il y a des crédits carbone, ça existe, ça ne marche pas bien.
01:26Alors évidemment, il y a eu quelques scandales, donc ça a une mauvaise image.
01:29C'est de ce constat-là que vous êtes partie d'une certaine façon ?
01:32Effectivement.
01:33En fait, une entreprise aujourd'hui, quand elle veut avoir une contribution
01:36en dehors de sa chaîne de valeur, elle va acheter des crédits sur un marché.
01:40Et les crédits carbone n'ont pas bonne presse.
01:42Vous l'avez dit, il y a eu plein de scandales à l'international,
01:45mais aussi sur des entreprises françaises.
01:47Il y en a plein qui se sont désistés de ces marchés carbone,
01:50d'autres qui n'osent pas y aller.
01:51Et le problème, c'est qu'on a besoin de financement climat.
01:54Donc pour les entreprises qui vont sur les crédits carbone,
01:56elles peuvent le faire de façon très qualitative.
01:59Et il y a des bons projets carbone.
02:00Mais le problème, c'est qu'il y a beaucoup d'entreprises qui ne veulent plus y aller.
02:03Et donc il y a besoin de leur offrir une autre solution.
02:06Et c'est là où la philanthropie climatique est très intéressante.
02:09Comment ça marche ? C'est quoi la philanthropie climatique ?
02:12Je suis une entreprise, effectivement, je me dis,
02:14bon, je veux participer à la reforestation, etc.
02:18Planète Urgence m'intéresse, par exemple.
02:22Qu'est-ce que je fais de différent des crédits carbone ?
02:25Oui, c'est très simple.
02:27Je veux faire la philanthropie climatique.
02:30Je contacte effectivement une association qui a un impact sur le climat.
02:33Je vais financer grâce à de la philanthropie classique, cette association-là.
02:38Et je lui demande d'utiliser une méthode de suivi de mon impact carbone.
02:42Et cette méthode-là, c'est ça qu'on a créé.
02:44On a travaillé pendant trois années.
02:46Elle a structuré, elle a été testée par des experts.
02:49Il y a l'ADEME, il y a SWIP, il y a le CIRAD,
02:51des experts de ces organisations-là qui sont intervenus.
02:55Et donc on a une méthodologie derrière qui permet de dire,
02:57j'ai eu tel financement pour tel projet et j'ai eu tel impact en face.
03:02C'est basé sur la science ?
03:03C'est basé sur la science, évidemment.
03:05On a pris aujourd'hui ce qu'il y a de plus avancé d'un point de vue carbone.
03:08On a travaillé avec Amercop, qui est une structure internationale
03:12qui travaille justement sur les certifications carbone.
03:15Et donc il y a les méthodes les plus avancées.
03:18Et puis en plus, après, on l'a testé.
03:19Donc ce n'est pas simplement basé sur la science,
03:21c'est aussi pragmatique.
03:22Et on l'a testé sur des terrains d'intervention,
03:25voir comment ça fonctionne,
03:26si c'est adapté à des petits projets, à des niveaux ONG,
03:30et si c'est pratique pour pouvoir avoir le plus d'impact possible sur le terrain
03:34et en même temps avoir cette attestation.
03:37Alors où et comment vous l'avez testé, racontez-nous ?
03:39On est allé sur trois terrains, très différents les uns des autres.
03:42Le premier, c'est la France, avec de l'agroforesterie.
03:45Et c'est Ferme d'Avenir qui l'a mis en place.
03:47Et puis après, nous, chez Planète Urgence,
03:49on est allé en Indonésie, sur de la mangrove.
03:51Et puis on est allé à Madagascar,
03:53sur des sujets de bois énergie et de conservation de forêt.
03:57Et alors, quelles entreprises se sont engagées ?
04:00On l'a testé, ça veut dire qu'il y a une entreprise
04:02ou plusieurs entreprises qui vous ont accompagné sur ces projets, c'est ça ?
04:05Oui, on a eu une entreprise qui s'appelle Davidson Consulting,
04:08qui dès le démarrage a dit,
04:09moi je veux avoir un impact sur le climat,
04:11par contre je n'ai pas besoin de certificat.
04:13Je n'ai pas besoin de pouvoir revendre et de spéculer derrière avec des certificats,
04:17mais je veux une garantie d'impact.
04:19Oui, je veux pouvoir aussi communiquer d'ailleurs,
04:21sur l'intégrer à mon bilan extra-financier, etc.
04:24Exactement, intégrer dans les reportings.
04:26Donc on a travaillé ensemble à structurer cette méthode-là,
04:29ils ont été les premiers financeurs,
04:31et on l'a lancée très récemment.
04:34Et il y a beaucoup d'entreprises qui viennent nous contacter,
04:36en disant, moi ça m'intéresse,
04:38il me manquait quelque chose,
04:39il me manquait une solution,
04:41et là ça peut faire partie de mon portefeuille.
04:43Alors, vous parlez de révolution, pourquoi ?
04:45Est-ce que vous pensez que ça peut être massif ?
04:48Il faut que ça soit massif.
04:49Aujourd'hui, on manque de financement pour le climat,
04:53on voit bien qu'on perd du temps en ce moment sur les sujets climatiques,
04:57et que le temps ne l'a plus beaucoup.
05:00Et ce temps-là, il peut être rattrapé
05:02si on va massivement sur des projets à impact climatique,
05:06mais on a besoin d'argent.
05:07Il faut qu'on multiplie par 6,5 les financements
05:11à horizon 2030 pour le climat.
05:146,5 2030, c'est demain.
05:16C'est demain, on y est déjà.
05:17Voilà, 2050, c'est par 13 qu'il faut les multiplier.
05:19Et donc il faut qu'on aille chercher des nouveaux modes de financement.
05:22Parce que les États sont défaillants ?
05:23Parce que les États ne font pas ce qu'ils s'étaient engagés à faire.
05:28On a la COP qui va arriver à Bellem,
05:31qui va être une COP importante,
05:32mais on voit bien que les résultats aujourd'hui
05:33ne sont pas au niveau attendu.
05:34et les entreprises, elles ont un rôle massif aujourd'hui
05:37à jouer sur les sujets de financement.
05:40Qu'est-ce qui peut convaincre les entreprises ?
05:43On peut refaire la liste.
05:44Il y a le risque réputationnel.
05:48Qui les faisait hésiter à s'engager dans les crédits carbones, par exemple ?
05:52Exactement.
05:52Je pense que ça, c'est un risque majeur pour les entreprises.
05:55Elles ont peur de l'image qu'elles vont avoir
05:57si elles achètent des crédits carbones
05:59et s'il y a des mauvaises presses derrière ces crédits carbones-là.
06:02Elles ont peur aussi du mot compensation.
06:04Et donc là, nous, on propose une solution.
06:06On est sur de la contribution pure,
06:08100% vertueuse,
06:09et qui change le paradigme.
06:11Où les entreprises, elles vont pouvoir dire
06:13« Moi, j'ai financé ce projet. »
06:15Oui, il y a une logique de transparence.
06:17C'est-à-dire que c'est de l'argent,
06:18un projet bien précis,
06:20et l'impact du dit projet.
06:22Exactement.
06:23Il va y avoir une attestation d'impact
06:25qui va être fournie aux entreprises
06:27et avec un suivi pendant 10 ans
06:29où elles vont pouvoir regarder ce qui s'est passé
06:31d'un point de vue climatique sur les 10 années.
06:33Est-ce que vous vous êtes quand même inspiré
06:35des méthodes de financement du crédit carbone
06:38pour aboutir à cette solution ?
06:40En fait, on a regardé ce qui se faisait mieux
06:42dans le crédit carbone.
06:42Oui, scientifiquement, les méthodes,
06:44elles sont robustes de suivi.
06:45C'est celles qui sont aujourd'hui les plus robustes.
06:47Ça dépend des sujets.
06:48Je ne vais pas rentrer dans le détail,
06:49mais ça dépend des sujets.
06:50On a pris ce qui était le plus avancé,
06:52le plus robuste,
06:53et tout ce qui va être séquestration,
06:55agroforesterie, mangrove,
06:57on a des méthodes intéressantes.
06:58Donc on s'est appuyé sur ce qui avait déjà été testé
07:00dans plein de pays différents
07:02pour savoir ce qui était le plus réaliste sur le terrain
07:05et on a adapté à la philanthropie.
07:08Avec quelle échéance ?
07:09C'est-à-dire l'impact du projet qui est financé,
07:13vous le suivez pendant combien de temps ?
07:15Parce qu'on ne voit pas forcément le résultat tout de suite.
07:18Donc est-ce que c'est un résultat dans 5 ans,
07:20dans 10 ans, dans 40 ans ?
07:22C'est quoi l'échéance finalement
07:23que vous donnez aux entreprises qui vont s'engager ?
07:25Alors déjà, globalement,
07:26quand on fait un projet de séquestration carbone,
07:29c'est un impact sur des dizaines,
07:31des centaines d'années.
07:32Quand on va restaurer une forêt
07:34et si la forêt est maintenue,
07:36l'impact est très long terme.
07:37Nous, le suivi qu'on va faire,
07:39ça va être sur 10 ans.
07:40Puisque si la forêt est toujours là
07:42dans 10 ans,
07:43on a des grandes chances
07:44qu'elle le soit dans 40, 50.
07:46De toute façon, on ne gère rien.
07:49Ceux qui vont vous dire
07:50qu'ils savent ce qui va se passer
07:51dans 40 ans dans une forêt,
07:53voilà, j'ai des doutes.
07:54Ça marche partout ?
07:55Ça peut marcher sur tous les continents ?
07:57Vous nous disiez,
07:57on a testé en France,
07:59en Indonésie,
08:00en Madagascar,
08:00ça peut vraiment marcher partout.
08:01C'est adaptable à tout type de projet
08:03et donc à toute taille d'entreprise
08:07ou stratégie d'entreprise aussi ?
08:09Oui, complètement.
08:10C'est pour ça qu'on l'a testé
08:11sur différents écosystèmes.
08:13Et c'était important pour nous
08:14puisqu'il faut que ça puisse servir
08:15là où il y a des besoins
08:16les plus importants.
08:18La forêt,
08:19elle est en difficulté
08:21très très très forte
08:22sur les trois grands bassins,
08:23Amazonie,
08:24bassin du Congo
08:25et Asie du Sud-Est.
08:27On a une déforestation
08:28qui a augmenté de 80%
08:29l'année dernière.
08:31Donc du coup,
08:31il faut qu'on puisse aller
08:32sur ces zones
08:32où on peut encore conserver
08:34et on doit encore restaurer
08:35ce qui vient d'être abîmé.
08:37On peut prendre des exemples
08:38de projets que Planète Urgence...
08:40Parce qu'elle existe
08:40depuis combien de temps,
08:41l'association ?
08:4225 ans.
08:4325 ans.
08:43Un quart de siècle.
08:44On a un peu de recul pour...
08:46Moi, ce qui me frappe,
08:47là, on discutait
08:47du sommet sur l'océan
08:52qui se tient en ce moment
08:53à Nice.
08:54On en parlait notamment
08:55avec Romain Troublé,
08:56le directeur de Tara Océan,
08:59qui dit la rapidité
09:01à laquelle la nature marine
09:04peut se reconstituer.
09:06C'est-à-dire que si on laisse
09:07tranquille un espace,
09:09notamment une aire marine protégée,
09:11elle se reconstitue très vite.
09:12Est-ce que c'est vrai aussi
09:13des forêts ?
09:15Est-ce que ça va si vite que ça ?
09:17Vous voyez ce que je veux dire ?
09:17C'est vrai aussi des forêts.
09:19C'est assez magique
09:21ce qui peut se passer
09:22avec le vivant.
09:23Moi, il y a un écosystème
09:24de mangroves
09:25sur lequel je suis retournée.
09:27On était intervenus
09:28dix ans auparavant.
09:29Il n'y avait plus rien.
09:30Ils avaient coupé
09:31pour faire de la crevette
09:33en Indonésie.
09:34On a restauré l'écosystème
09:36à travers de la plantation,
09:38mais aussi de la régénération.
09:39C'est-à-dire qu'on laisse
09:40le vivant revenir naturellement.
09:43Et en fait,
09:43je me suis retrouvée
09:43dix ans après
09:44dans une forêt
09:45qui faisait trois mètres de haut
09:47de mangroves.
09:48Il y avait des poissons
09:49qui venaient frayer,
09:50du coup,
09:50des pêcheurs
09:51qui venaient chercher
09:52leur nourriture,
09:53les oiseaux qui chantaient.
09:55Donc oui,
09:55c'est magique.
09:57Laissons-lui le temps.
09:57Et en France,
10:00l'enjeu, c'est quoi ?
10:02L'enjeu, c'est plutôt
10:03la variété des essences
10:04qu'on peut planter.
10:08Parce que la forêt française,
10:09elle est plutôt en train
10:10de progresser en kilomètres carrés,
10:13c'est ça ?
10:14Donc c'est quoi l'enjeu
10:15si on veut accompagner
10:16un projet français ?
10:17Alors sur la France,
10:18je suis moins spécialiste,
10:19mais ce que je sens de la France,
10:21c'est qu'il y a un enjeu
10:21plutôt agricole
10:22de comment est-ce qu'on remet
10:23l'arbre dans le modèle agricole,
10:25sur des haies,
10:26sur de la grosse foresterie.
10:27Pour venir nourrir le sol,
10:29limiter l'érosion, etc.
10:32Sur la forêt en tant que telle,
10:33c'est plutôt limiter
10:34les coupes blanches.
10:36Garder une forêt
10:37avec un couvert forestier
10:38d'une sylviculture,
10:40on va aller prélever
10:41les arbres les uns
10:42après les autres
10:42à des moments différents
10:44de leur vie,
10:45mais de façon plus continue.
10:47Donc je pense que c'est
10:48plutôt un changement de pratique
10:49qu'il nous faut en France
10:50que de la reforestation
10:52à grande échelle
10:53ou comme on peut voir
10:55sur nos pays d'intervention.
10:56Merci beaucoup Amandine Ersan
10:58et à bientôt
10:59sur Be Smart for Change.
11:00On passe tout de suite
11:01à notre débat
11:02comment briser
11:03l'isolement
11:04des seniors
11:06LGBT plus
11:07ou malades du sida.
11:08à bientôt.
11:09Sous-titrage Société Radio-Canada

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