Corinne Lhaïk, journaliste au service politique de l’Opinion, revient sur la relation compliquée que le chef de l’Etat entretient avec son actuel Premier ministre
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00:00Emmanuel Macron reproche à François Bayrou d'être en fait ce qu'il est,
00:04c'est-à-dire d'être quelqu'un qui procède avec lenteur.
00:11Depuis le 13 décembre 2024, est la nomination de François Bayrou à Matignon.
00:21On se rappelle que François Bayrou a forcé la main d'Emmanuel Macron
00:25pour obtenir ce poste, que Macron s'est résigné à le nommer alors qu'il aurait préféré nommer Sébastien Lecornu.
00:32Et depuis, la relation ne cesse de se dégrader.
00:35Il faut bien comprendre qu'Emmanuel Macron et François Bayrou sont des alliés politiques.
00:39Depuis l'élection de 2017, on pense que le ralliement de François Bayrou à la candidature du jeune et inconnu Emmanuel Macron
00:46a joué un rôle décisif dans l'élection.
00:49Depuis, les deux hommes nourrissent une relation qui est faite, disent-ils, de respect et d'affection réciproque,
00:55mais qui n'exclut pas le rapport de force.
00:57Jusqu'à présent, le rapport de force s'était surtout exercé quand il s'agissait de nommer des candidats aux élections législatives
01:02où le modem voulait se tailler, la part du lion face aux députés macronistes.
01:07À présent, la situation a complètement changé.
01:10La relation entre un Premier ministre et le Président de la République
01:13n'est pas celle que pouvaient entretenir les deux hommes quand ils étaient alliés politiques.
01:16Et Emmanuel Macron reproche à François Bayrou d'être en fait ce qu'il est,
01:21c'est-à-dire d'être quelqu'un qui procède avec lenteur et qui a une méthode
01:25qui consiste à vouloir consulter les partis politiques, les corps intermédiaires
01:30et que lui-même interprète comme une manière de ne pas décider.
01:39François Bayrou est un homme de l'ancien monde, de cette vieille politique
01:43qu'Emmanuel Macron a voulu remiser, lui se revendiquant du Nouveau Monde.
01:47Et dans cet ancien monde, on ménage les élus, on ménage les parlementaires,
01:52on ménage les syndicats, enfin en principe.
01:55Et François Bayrou a lancé de nombreux chantiers qui consistent à consulter les partenaires sociaux,
02:01par exemple pour la réforme de la réforme des retraites, où il a créé un conclave.
02:05Ce conclave devrait rendre ses conclusions entre la mi-juin et la fin du mois de juin.
02:09Il a consulté les élus locaux en ce qui concerne les collectivités territoriales,
02:13sachant que l'essentiel du travail de François Bayrou consiste à faire adopter le budget 2026.
02:19Or, l'adoption de ce budget 2026 est extrêmement périlleuse,
02:23dans la mesure où il doit faire 40 milliards d'euros d'économie.
02:26Il a confirmé ce chiffre dans son interview à BFM TV le 27 mai
02:31et s'est engagé à amener les finances publiques à l'équilibre.
02:35En réalité, il ne s'agit pas de les ramener à l'équilibre,
02:37mais de les faire passer sous la barre des 3% en termes de PIB d'ici à 2029.
02:43C'était l'engagement du gouvernement Barnier.
02:45C'est aussi le sien et il l'a repris.
02:52Cette méthode, on pourra en juger d'après son efficacité.
02:57C'est difficile de prendre des risques à ce stade.
03:00Mais François Bayrou se met la pression sur lui-même,
03:02et il la met très fortement,
03:04parce que le 14 juillet, il devra délivrer ce qu'il a promis.
03:08Et s'il n'y parvient pas, il risque soit la motion de censure,
03:11si jamais il faisait des propositions qui franchissent les lignes rouges fixées par les différents partis,
03:16soit le procès en incapacité et en immobilité,
03:20puisqu'il ne sera pas parvenu à remplir sa mission.
03:22Face à sa méthode, François Bayrou reçoit une volée de critique.
03:27On l'a dit, le chef de l'État trouve qu'il ne va pas assez vite,
03:30parce qu'il douterait qu'on continue à transformer le pays.
03:32De son côté, François Bayrou redoute d'être renversé par une motion de censure,
03:36donc il est obligé de respecter les lignes rouges que lui fixent les partis pour ne pas le renverser.
03:41Mais il est extrêmement sûr de sa méthode,
03:44et les critiques glissent sur lui comme de l'eau sur la toile cirée.
03:47C'est-à-dire qu'il pense que si jusqu'à présent,
03:49on n'est pas parvenu à faire des économies et à transformer le pays,
03:53c'est parce qu'on n'avait pas la bonne méthode.
03:54Lui-même est persuadé d'avoir la bonne méthode
03:57et de parvenir par le dialogue, par la persuasion, par la pédagogie
04:01à convaincre les Français, les syndicats, les élus locaux, les parlementaires
04:05que l'on peut faire 40 milliards d'euros d'économies.