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  • 28/05/2025
Ametra Group compte aujourd’hui plus de 200 clients, 750 collaborateurs et a un chiffre d’affaires de 55 millions d’euros. Comment Anne-Charlotte Fredenucci, sa présidente, a su rendre cette entreprise pérenne alors qu’elle est passée à côté d’un plan de licenciement en 2009 ? Comment s’engage-t-elle pour féminiser le secteur de l’ingénierie et mieux y intégrer les enjeux environnementaux ? Elle répond dans ce grand entretien.

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Transcription
00:00Générique
00:00Prêt pour l'impact, c'est la question que je pose chaque semaine à une personnalité qui compte dans notre économie.
00:10Et cette semaine, je reçois Anne-Charlotte Frédé-Nucci. Bonjour.
00:12Bonjour.
00:13Vous êtes la présidente d'Ametra Group.
00:16Alors, on va démarrer par une question très générale de présentation.
00:19Votre métier, c'est l'ingénierie, c'est ça ? Vous produisez pour quel secteur ?
00:23Présentez-nous, Ametra Group.
00:25Bien sûr. Alors, Ametra Group est une société d'ingénierie, mais également de fabrication.
00:30D'assemblage, on y reviendra. Nous sommes 700 collaborateurs sur 12 sites en France et un site en Tunisie.
00:35Notre métier, c'est d'abord le bureau d'études. On commence par concevoir, par dessiner des équipements mécaniques, électriques, électroniques,
00:42pour l'aéronautique, la défense, le nucléaire, le ferroviaire, le naval, le médical, bref, des industries à fortes contraintes et à petite série.
00:49Et ensuite, une fois que nous avons conçu ces produits, nous les transférons dans nos usines.
00:54Une usine en France, une usine en Tunisie qui, elle, intègre, assemble ces équipements.
01:00Intègre, assemble, qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que nous achetons une pièce mécanique, nous achetons des fils, nous achetons des connecteurs, des cartes,
01:06tous les composants électroniques qui vont à l'intérieur. Et nous assemblons, nous intégrons le tout pour livrer un sous-système, un équipement au client.
01:13Par exemple, une partie des commandes de voile du Rafale pour Dassault Aviation, des harnais pour le lanceur Ariane, des sous-systèmes de missiles pour MBDA, des bancs de test de cœur électrique pour Safran.
01:24C'est ultra varié en fait. Et chaque produit est adapté évidemment au grand ensemble dans lequel il va s'intégrer.
01:34Vous avez donné quelques-uns de ces chiffres clés, 750 salariés, 55 millions d'euros de chiffre d'affaires, plus de 200 clients, 3 sites d'intégration, 9 bureaux d'études.
01:42Il y a une volonté de diversification. Je vois plus de 200 clients. Et là, elle est un peu liée à l'histoire familiale, je crois.
01:48Pourquoi vous souhaitez à ce point diversifier vos clients ?
01:51Absolument. Je vois que vous avez lu quelques informations sur l'histoire du groupe.
01:54Quand j'ai repris le groupe en 2009, nous traversions une période extrêmement difficile et nous avons eu une grosse chute d'activité.
02:01Et mon père, à ce moment-là, est venu me voir et m'a dit « Écoute, je crois qu'on devrait fermer l'usine parce que là, on a encore de l'argent pour payer nos collaborateurs pendant quelques mois pour terminer les contrats clients.
02:12Au moins maintenant, on a un peu de trésorerie, on peut déposer le bilan. »
02:15Et là, je lui ai dit « Mais papa, il n'en est pas question, donne-moi les rênes, je suis prête et tu vas voir, je vais sauver l'entreprise. »
02:20Parce qu'on a fait une promesse à nos collaborateurs qu'on leur verserait un salaire à la fin du mois pour qu'ils puissent nourrir leur famille.
02:26On a fait une promesse à nos clients, c'est qu'on leur livrerait les équipements dont ils ont besoin en temps et en heure.
02:30Et cette promesse-là, on se doit de dépenser chaque goutte de sueur pour l'honorer.
02:34Et les difficultés, elles étaient liées à un gros contrat qui s'était terminé, c'est ça ?
02:39Alors, c'était lié à un ensemble de contrats. En fait, vous vous souvenez, 2008, crise des subprimes, 2009, cette crise des subprimes financières se traduit par une crise économique réelle sur le terrain et par beaucoup de pertes d'emploi.
02:51Mais nous étions à l'époque très dépendants de l'aéronautique.
02:54Et pour venir à votre question, moi, c'est ça que j'ai retenu.
02:57J'ai d'abord redressé l'entreprise avec l'équipe formidable qui était avec moi à l'époque et qui est en partie encore dans le groupe.
03:03Et la deuxième étape, une fois que nous avions redressé, une fois que nous étions revenus à l'équilibre et même en 2011, une fois que nous avions atteint le meilleur résultat historique,
03:13mon obsession, ça a été de rendre cette entreprise la plus robuste possible, la plus pérenne possible pour ne jamais revivre une situation de plan social comme nous avions vécu en 2009.
03:22Et pour ça, nous avions deux axes.
03:24D'abord, apporter plus de valeur ajoutée aux clients parce qu'évidemment, plus on apporte de valeur ajoutée, plus on devient... Alors, indispensable est un mot...
03:31En tout cas, c'est difficile de se passer la métrage.
03:33Plus on devient proche de nos clients et plus il est difficile, effectivement, de se passer de nous.
03:37Et le deuxième axe, c'est votre question, c'était la diversification.
03:40Ne jamais dépendre d'un secteur, ne jamais dépendre d'une industrie.
03:44Et c'est une logique qui est absolument vertueuse pour l'ensemble des acteurs économiques qui sont en contact avec Ametra.
03:49Pour nos collaborateurs, quand en 2020, on a connu une baisse très forte dans l'aéronautique, on a pu les replacer sur des sujets nucléaires ou des sujets défense qui, eux, continuaient à vivre pendant la période de la pandémie.
04:02Pour nos clients, c'est très vertueux parce qu'en sortant de la pandémie, nous n'avons licencié personne, nous avons gardé les effectifs.
04:10Et donc, lorsque l'aéronautique est reparti, nous avions encore des effectifs à disposition.
04:14Et pour l'entreprise, c'est vertueux, évidemment, parce que ça évite des hauts et des bas économiques.
04:19Donc, tout le monde a gagné à cette diversification.
04:21Oui, on va ouvrir un chapitre sur le secteur de la défense.
04:24Déjà, il pèse quel poids dans le chiffre d'affaires d'Ametra ?
04:28L'ensemble des économies, l'ensemble des industries de défense, qu'elles soient défense terrestre, défense aérienne, défense nucléaire, représentent plus de la moitié de notre chiffre d'affaires.
04:37Nous avons tendance à dire, chez nous, la défense que nous appelons défense, c'est-à-dire terrestre, c'est 30%, l'aéro, 25%.
04:43Le nucléaire, 25%.
04:44Et dans le reste, on a le ferroviaire, le médical, etc.
04:47Mais si vous extrayez de l'ensemble de ces industries la partie défense, ça représente plus de la moitié de notre activité.
04:53Alors, justement, sur ce secteur de la défense, on va écouter tout de suite la question de celui qui était à votre place la semaine dernière,
04:59le président du Crédit Mutuel Alliance Fédérale, Daniel Ball.
05:05Bonjour Anne-Charlotte.
05:07Heureux de rencontrer une dirigeante d'une entreprise, de l'aéronautique, de la défense.
05:11Et par rapport à cette activité de défense, j'ai une question.
05:14Moi, en tant que banquier, on a souvent été accusé par certains hommes politiques, parfois même par certains journalistes,
05:20de ne pas accompagner l'industrie de la défense.
05:23Et j'aimerais savoir si vous avez ce même ressenti et si vous croyez vraiment que les banques ont fait des choix,
05:29par rapport à leur politique ESG, de ne pas accompagner une industrie pourtant essentielle en France,
05:35qui est celle de la défense.
05:36Est-ce qu'il y a des banques qui ne financent pas le secteur de la défense ?
05:41Est-ce que ça existe encore aujourd'hui ?
05:42C'est une très bonne question et c'est formidable que ce soit un banquier qui pose la question,
05:47parce que nous avons vu depuis le conflit entre la Russie et l'Ukraine,
05:51clairement un changement de position des banques, des fonds d'investissement, des assureurs, des facteurs.
05:57C'est l'ensemble du secteur financier, on ne parle pas seulement des banques, c'est l'ensemble du secteur financier
06:02qui avait un biais contre le secteur de la défense jusqu'à il y a 2-3 ans.
06:07C'est-à-dire des investisseurs qui classaient l'industrie militaire parmi des secteurs à exclure,
06:12qui font ou ont fait marche arrière, c'est ça ?
06:14En fait, on a vu plusieurs mécanismes.
06:16On a vu d'abord à Bruxelles de grands débats pour savoir de quel côté la défense allait tomber dans ce qu'on appelle la taxonomie.
06:22En clair, Bruxelles dit que cette industrie ou ce pan d'activité est vertueux ou ne l'est pas
06:26et la défense était en balottage entre vertueux et non vertueux.
06:31Pour l'instant, nous restons dans le secteur des industries qui ne sont pas blacklistées à Bruxelles.
06:38Mais il y avait tout un débat.
06:39Ensuite, ce débat se traduisait au niveau des banques françaises,
06:42que ce soit à leur direction ou que ce soit sur le terrain.
06:44Je vais vous raconter une anecdote hallucinante.
06:47L'assistante d'un dirigeant d'une entreprise du secteur de la défense s'est vue refuser son prêt immobilier
06:52par le conseiller de l'agence du coin parce qu'elle travaillait dans la défense.
06:56Évidemment, aucune banque n'a jamais donné ce type de directives.
06:58Ce type de consigne, c'était un excès de zèle.
07:01Absolument.
07:02Mais l'agent du coin a pensé que comme sa banque avait dit
07:05« Attention, on va investir dans des secteurs dits vertueux »,
07:08il fallait refuser ce prêt immobilier à cette assistante.
07:10C'était évidemment totalement absurde.
07:12Et aucune consigne n'avait été donnée dans ce sens.
07:15Mais il y avait quand même des consignes.
07:17Il y avait cet état d'esprit général.
07:18Il y avait cet état d'esprit.
07:19Ensuite, il y avait les fonds d'investissement.
07:21Les fonds d'investissement avaient pour certains des politiques d'investissement
07:26qui excluaient de fait le secteur de la défense.
07:28Et quand on a demandé à Ametra au salon du Bourget 2022
07:33d'intervenir devant des journalistes pour parler de ces difficultés de financement,
07:38moi j'ai fait le tour de quelques confrères
07:40et j'ai remonté effectivement des problématiques de financement à l'export,
07:44des problématiques d'assurance, des problématiques de fonds d'investissement.
07:47Donc il y avait des cas concrets.
07:49Aujourd'hui, heureusement, on voit que la plupart des banques, des institutions financières
07:54au sens large, des assureurs ont pris conscience que notre secteur d'activité,
07:58notre industrie de défense est une industrie indispensable à la défense de nos valeurs,
08:04à la protection de nos valeurs dans une période où le président de la République nous dit
08:09nous sommes en économie de guerre, nous sommes au moins en préparation d'un éventuel conflit.
08:14On n'y est pas encore, mais on voit un pays comme la Pologne qui décide de consacrer 5% de son PIB à la défense.
08:21Et puis, les décisions européennes, je vais appuyer sur une citation d'une interview que vous avez donnée
08:25à nos confrères de l'usine Nouvelle, c'était il y a quelques semaines, mars de cette année.
08:29Il faut avoir en tête qu'avant que les annonces des dirigeants politiques ne se traduisent
08:33par des commandes ruisselant au niveau des PME des entreprises de taille intermédiaire, des ETI,
08:37il faut compter beaucoup de temps. Défense, c'est un secteur de cycle long,
08:41autrement dit, le plan européen, j'y viens, de 800 milliards d'euros, c'est une dynamique positive.
08:46Il n'a pas encore irrigué la filière, il générera peut-être de premières embauches d'ici un an.
08:52Est-ce que ça veut dire que vous anticipez que vous êtes dans un plan d'embauche
08:57ou de montée en puissance en prévision de ce ruissellement dont vous parlez ?
09:02Oui et non. Chez Ametra, si je prends la partie usine,
09:06nous formons des câbleurs aéronautiques, défense et ce métier-là ne s'apprend pas sur les bancs de l'école.
09:12Donc nous voyons une accélération de nos commandes pour la fin de l'année
09:16qui s'appuie à la fois sur de véritables commandes de la part de nos clients
09:19mais également sur des prévisionnels liés au plan que nous évoquions à l'instant.
09:25Et comme nous avons besoin de 3 à 6 mois pour qu'une personne rentrée chez nous
09:29commence à fabriquer même un produit simple et après c'est plusieurs années
09:32pour travailler sur l'îlot des commandes de voile du Rafale de Dassault,
09:35comme nous avons besoin de plusieurs mois, si nous voulons 10 ou 20 câbleurs de plus
09:40dans nos effectifs à fin décembre, c'est maintenant qu'il faut s'en préoccuper
09:43pour les embaucher avant l'été et faire en sorte qu'ils soient prêts à fin décembre.
09:48Donc oui et en même temps on ne peut pas non plus anticiper sans commande.
09:53Aucune entreprise ne construit un bâtiment, ne crée des emplois
09:58si on n'a pas la certitude d'avoir une commande.
10:01Et donc ça veut dire qu'il y a un peu de retard à l'allumage entre la volonté politique
10:05et la commande ferme aux industries de défense ?
10:09Oui, il y a un peu de retard à l'allumage.
10:12Nous voyons par exemple que la commande publique vers les grands industriels,
10:16la commande publique de défense vers les grands industriels,
10:18est plutôt en train de diminuer en 2025 par rapport à 2024 que d'augmenter.
10:23Et ça, ça se traduit nécessairement six mois plus tard par des diminutions de commandes
10:28vers ce qu'on appelle la BITD, la Base Industrielle et Technologique de Défense,
10:31c'est-à-dire des sociétés comme Ametra.
10:33Et dans le même moment, dans la même période, on entend beaucoup de politiques,
10:37ministres, chefs d'État, mettre la pression sur l'industrie de la défense
10:41en disant il faut accélérer la cadence, il faut produire plus, plus d'obus, plus de rafales, etc.
10:47Donc il y a une sorte de contradiction.
10:49Est-ce que vous, vous êtes quand même obligé d'augmenter la cadence en ce moment ?
10:53Vous avez complètement raison.
10:54Chez Ametra, nous ne sentons pas cette pression des pouvoirs publics
10:57parce que nos grands clients sont KNDS, TNS, Safran, Dassault, etc.
11:01Nous ne travaillons pas en direct pour les armées ou pour la DGA, la Direction Générale.
11:04Mais ça peut être par effet de capillarité.
11:07Ça peut être par rebond, effectivement par effet de capillarité, comme vous dites.
11:12Pour l'instant, nous voyons réellement des augmentations de cadence.
11:16Ça, c'est une certitude.
11:17Mais nous ne voyons pas d'accélération liée aux annonces de l'Europe sur les centaines de milliards d'euros
11:24qui devraient être injectés dans l'industrie de défense.
11:27Ça, nous ne l'avons pas vu.
11:28Et nos grands clients nous disent qu'ils ne l'ont pas vu non plus.
11:31Vous avez évoqué l'histoire familiale.
11:34Vous avez repris le groupe de Roux créé par votre père Claude de Roux en 2009.
11:37Quelle leçon vous en tirez ?
11:40Et là, je généralise sur l'industrialisation ou la réindustrialisation.
11:45Comment maintenir, comment créer des emplois industriels en France ?
11:49La première réponse, c'est la passion.
11:51Il faut des équipes passionnées qui aient envie, qui aient envie de se donner au quotidien.
11:56C'est d'abord une aventure d'hommes et de femmes, que ce soit l'industrie ou d'autres activités, bien sûr économiques.
12:02Mais ce que je vois dans nos métiers, c'est que ce sont des métiers très techniques
12:06qui passionnent les hommes et les femmes qui y travaillent.
12:10Que ce soit dans les bureaux d'études, quand on travaille sur l'avion à hydrogène de demain,
12:16quand on travaille sur un projet, je pense à un de nos clients, Flying Wells,
12:19sur des projets de gros ballons dirigeables qui vont demain assurer du transport de bois,
12:26de marchandises de façon moins carbonée ou presque décarbonée.
12:32Ça, ce sont des projets qui sont tellement passionnants qu'ils embarquent tous les bureaux d'études d'Ametra.
12:36Il y a la valeur ajoutée aussi, j'imagine.
12:38Bien sûr, la passion est le premier élément.
12:41Mais juste pour finir sur la passion, c'est important de dire qu'elle est partagée aussi dans nos entreprises,
12:49jusqu'aux câbleurs.
12:50Si vous voulez, on a récemment fait venir un pilote de chasse du Rafale
12:54qui a parlé aux collaborateurs de l'entreprise et qui leur a dit
12:57« Mais vous savez, moi, quand je suis en l'air en train de mener des actions, des opérations extérieures,
13:01il faut que mon avion soit hyper fiable. »
13:03Et donc, ce que vous faites au quotidien...
13:05C'est mon assurance-vie.
13:06Voilà, ça a un impact sur mon assurance-vie, effectivement, ma capacité à survivre,
13:11mais aussi ma capacité à mener à bien la mission dont la France a besoin
13:13quand on est en opération extérieure.
13:15Et après, il nous a passé un film de ces vols.
13:18Et évidemment, tous les câbleurs et toutes les câbleuses de l'atelier étaient passionnés, impressionnés.
13:23Donc, il faut maintenir cette passion.
13:25Je pense qu'il faut donner du sens à tout ce que nous faisons au quotidien,
13:29que ce soit dans les bureaux d'études ou dans les usines.
13:31J'entends cet argument.
13:32Mais s'il n'y a pas la valeur ajoutée, on peut avoir toute la passion du monde.
13:36On ne va pas survivre face à une concurrence étrangère, par exemple.
13:39On est tout à fait d'accord.
13:40Vous vous souvenez que tout à l'heure, je vous ai dit que nous avions eu pour première stratégie
13:44d'apporter davantage de valeur ajoutée à nos clients.
13:47Qu'est-ce que ça veut dire concrètement ?
13:48Quand j'ai repris le groupe, on avait un bureau d'études qui faisait des projets mécaniques,
13:52des projets de conception mécanique d'un côté et puis un atelier de sous-traitance électronique de l'autre
13:56où nous recevions ce qu'on appelle des paniers gardis dans nos métiers,
14:00c'est-à-dire nous recevions les composants de la part de nos clients et nous assemblions à façon.
14:04Vous voyez bien que d'un côté comme de l'autre, il n'y a pas beaucoup de ponts entre ces activités
14:07et puis on n'apporte pas énormément de valeur ajoutée.
14:10Donc, on s'est mis côté bureau d'études chez Ametra Engineering à remonter dans la chaîne de valeur,
14:15c'est-à-dire à prendre des projets de plus en plus complexes avec des métiers nouveaux
14:18comme la conception électronique, la conception électrique, comme le calcul, la simulation.
14:23Nous avons embauché des docteurs dans un département qu'on appelle Ametra Research
14:26pour faire de la R&D en interne.
14:28Bref, nous sommes allés de plus en plus loin, de plus en plus en amont
14:31dans les projets de R&D de nos clients.
14:34Et du côté usine, pour apporter davantage de valeur ajoutée,
14:37nous avons là aussi créé un petit bureau d'études en interne
14:40pour avoir des ingénieurs immédiatement collés à l'atelier.
14:43Nous avons acheté des machines 3D pour, lorsque nous avions des idées d'amélioration,
14:48des machines d'impression 3D pardon, lorsque nous avions des idées d'amélioration dans l'atelier,
14:52pouvoir imprimer immédiatement les petits outillages qui permettaient aux collaborateurs
14:55de gagner du temps, de réduire la pénibilité à leur poste,
14:58même s'il n'y en a pas beaucoup dans nos métiers, mais c'est très important.
15:01Nous avons mieux piloté notre supply chain, nos fournisseurs, nous avons mieux acheté,
15:07nous avons dit à nos clients que nous n'allions plus accepter les paniers garnis,
15:10mais que nous allions gérer la totalité de la fabrication.
15:13Et nous avons rapproché les deux entreprises pour proposer à nos clients
15:16une prestation complète de l'étude jusqu'à la réalisation,
15:19tout en renforçant notre présence dans les pays à bas coût.
15:22On continue à créer de l'emploi en France, bien sûr,
15:24mais il faut absolument proposer cette présence bas coût à nos clients.
15:27Voilà, et c'est ce package global qu'est le nouveau groupe Ametra, si je puis dire,
15:32qui apporte davantage de valeur ajoutée aux clients.
15:34Alors, on va parler de RSE et on va commencer par le S, la question sociale et sociétale.
15:39Vous menez un certain nombre de combats, notamment pour la féminisation des métiers de l'ingénierie.
15:46Déjà le constat, on part d'où ? Un petit tiers de femmes dans les métiers de l'ingénierie, moins que ça ?
15:51Moins que ça. Aujourd'hui, sortent des écoles d'ingénieurs entre 20 et 23% de femmes.
15:57Ça n'est pas suffisant et c'était déjà le même chiffre il y a 20 ans, il y a 30 ans, il y a 40 ans.
16:04Donc, on ne voit pas de nette amélioration chez les jeunes femmes en matière de choix de métiers scientifiques.
16:11Et ça, c'est tout à fait dommage parce que dans une société comme Ametra,
16:13on ne peut pas retrouver 50% d'ingénieurs femmes si sortent des écoles d'ingénieurs 22% de jeunes filles.
16:19Ça n'est pas possible.
16:20Donc, le premier combat pour la féminisation de ces métiers, c'est un combat qui démarre au collège et au lycée.
16:27Aller rencontrer les jeunes, qu'ils soient garçons ou filles d'ailleurs, mais particulièrement les jeunes filles,
16:32puisqu'on sait qu'elles ont du mal à choisir ces métiers après, pour leur dire venez dans nos métiers.
16:36Ce sont des métiers passionnants.
16:37Vous êtes partenaire de l'association Bouge ta boîte, c'est ça qui porte un peu ces enjeux-là ?
16:43Absolument. Alors, Bouge ta boîte, 100 000 entrepreneurs, 100 000 entrepreneurs pour aller dans les collèges et lycées parler aux jeunes.
16:48Et Bouge ta boîte, c'est une très belle association créée par Marie-Éloi qui a deux objectifs.
16:54Aider les femmes entrepreneurs lorsqu'elles créent leurs activités et puis aider les femmes dans les entreprises
16:58pour qu'elles aient davantage confiance en elles, puisqu'on voit bien que l'une des difficultés à faire monter les femmes dans les entreprises,
17:06c'est le plafond de verre qu'elles s'auto-imposent elles-mêmes.
17:09C'est ce que Marie-Éloi essaie de faire bouger dans les entreprises.
17:11Et effectivement, 100 000 entrepreneurs, c'est là que vous y allez vous, dans les collèges et les lycées porter la bonne parole en quelque sorte.
17:18Oui, oui, absolument. 100 000 entrepreneurs, c'est moi qui vais parler aux collégiens et lycéens.
17:22Et c'est toujours un grand plaisir parce qu'ils ont des questions qui sont très intelligentes, très pertinentes
17:27et parfois des questions qui sont très naïves mais qui sont rafraîchissantes aussi.
17:30Et qui obligent à se poser une problématique qu'on n'avait pas en tête.
17:33C'est ça. Et c'est bien quand des jeunes disent, mais en fait, vous ne pensez pas qu'il y a des métiers pour les hommes et pour les femmes ?
17:38Eh bien non, on va en parler ensemble. Mais c'est bien, merci d'avoir posé la question parce que dans d'autres environnements,
17:43on n'ose plus se poser la question et donc on n'ose plus apporter la réponse, qui moi me semble être la réponse de bon sens, qui est non, bien sûr.
17:49Sauf à évidemment parler de métiers qui réclament une force physique telle que là, pour des raisons statistiques, on va dire,
17:56ça serait plutôt des hommes que des femmes. Mais non, merci d'avoir posé la question.
18:00Vous avez conscience d'être une sorte de rôle modèle quand vous intervenez dans ces classes ?
18:06Je n'aime pas beaucoup ce mot qui me met mal à l'aise parce que moi, je n'ai jamais eu de rôle modèle dans mon environnement.
18:13Je préfère dire que ce sont des hommes et des femmes proches de moi. Je ne parle pas de Simone Veil, que je n'ai jamais connue,
18:18qui était certainement une femme formidable et donc parcouru remarquable. Mais je ne l'ai pas connue, donc je ne dirais pas qu'elle m'a inspirée.
18:23En revanche, je vois des femmes, des hommes autour de moi qui ont des parcours, notamment d'équilibre vie privée, vie professionnelle,
18:30que je trouve particulièrement marquables.
18:31Oui, mais quand vous allez dans une classe, pardon de nous interrompre, vous devenez un peu, entre guillemets, un peu proche.
18:37Vous voyez ce que je veux dire ? C'est-à-dire, d'un seul coup, il y a une incarnation d'un parcours qui peut inspirer.
18:42Et là, l'expression rôle modèle peut trouver son sens.
18:45Je vois ce que vous voulez dire. Mais pour moi, le côté rôle modèle est trop grandiloquent par rapport à ce que j'essaie d'incarner.
18:50J'essaie d'incarner juste une personne qui est à côté de leur professeur et qui vient leur parler et qui se veut la plus proche possible de ses élèves.
18:58En revanche, pour parler de rôle modèle, je vous ai dit que je n'ai pas beaucoup ce mot,
19:03mais pour parler de la façon dont nous allons à la rencontre des jeunes,
19:07il y a également les ambassadeurs de l'ingénierie, qui est un engagement d'Ametra,
19:11qui a appelé à candidature parmi ses collaborateurs et collaboratrices.
19:19Et donc, nous avons des ambassadeurs et ambassadrices de l'ingénierie qui vont dans les écoles d'ingénieurs.
19:24Là, c'est plutôt après le bac.
19:27Nous allons à la rencontre des jeunes pour leur dire, vous allez avoir un diplôme d'ingénieur formidable.
19:32Vous avez envie d'aller dans la finance, d'accord.
19:34Mais il y a aussi l'industrie, l'ingénierie, des métiers passionnants.
19:37N'oubliez pas ces métiers qui ont besoin de vous et dans lesquels on peut faire des carrières absolument remarquables.
19:41Est-ce que le fait de, je m'intéresse maintenant, eux, de RSE, l'environnement,
19:48est-ce que c'est vraiment un enjeu pour faire baisser l'impact carbone d'une entreprise comme la vôtre ?
19:52Oui, absolument.
19:53C'est un enjeu d'abord parce que ça correspond à mes valeurs.
19:55Je n'ai pas envie de laisser à mes quatre enfants, à mes quatre fils, une planète salie avec mes enfants
20:02qui pourraient me dire, mais qu'est-ce que tu as fait pour la planète ?
20:04Rien.
20:04Donc déjà, à titre personnel, c'est un engagement.
20:08Si ça ne l'était pas et que j'étais un peu plus mercantile,
20:12je regarderais simplement ce que les collaborateurs et les candidats réclament
20:16et ce que les clients et les prospects réclament.
20:18Et de toute façon, on ne peut plus aujourd'hui faire l'impasse sur le E de RSE.
20:22On est obligé de se poser les questions de bilan carbone.
20:25Chez Ametra, nous avons fait notre premier bilan carbone en 2023
20:29avec lecture des résultats et mise en place des premières mesures en 2024.
20:34parce que nos clients nous mettaient une pression.
20:37On savait qu'on devait le faire, on avait envie de le faire.
20:39Mais le déclencheur a été la réclamation d'un client qui nous a dit, c'est maintenant.
20:43Et on a compris qu'il avait raison, qu'il fallait qu'on le fasse.
20:46Et donc, l'audit permet d'identifier les leviers les plus efficaces.
20:50Par quoi vous commencez ou sur quoi vous accélérez en quelque sorte ?
20:54Pour faire baisser le bilan carbone.
20:56Absolument. Nous avons commencé notre audit dans la partie usine.
20:59La partie ingénierie viendra en 2025.
21:01Dans les usines, je vous ai parlé de la date de création de l'entreprise 1978,
21:05ou c'est vous qui me l'avez évoqué,
21:07nous avions des bâtiments qui avaient besoin d'un petit rafraîchissement.
21:10Donc, on a commencé tout simplement par changer les luminaires,
21:13changer les ampoules, ce qui a permis de réduire notre consommation
21:16d'à peu près deux tiers, rien qu'avec sur la partie consommation.
21:21On est passé en LED, en fait, c'est ça ?
21:22Exactement. On est passé en LED et on a réduit de manière significative notre consommation.
21:28On a également changé les systèmes de chauffage et les systèmes de climatisation
21:32qui avaient besoin là aussi d'être au goût du jour.
21:37Nous avons travaillé sur des ponts thermiques.
21:39Il y avait des fenêtres qui étaient particulièrement des ponts thermiques.
21:42On a rajouté des joints à l'intérieur.
21:44Voilà. Tous ces sujets-là qui avaient été mis en évidence.
21:47On a également joué sur la température en été comme en hiver.
21:50On a mis des systèmes de contrôle automatisés.
21:54On a sensibilisé les collaborateurs de l'entreprise pour leur dire,
21:57écoutez, on a offert des doudounes aux collaborateurs de l'entreprise aussi
22:01avec un beau logo à Métra en leur disant,
22:03si vous avez un petit peu froid dans l'usine, mettez une doudoune
22:07et en même temps, on protégera plus la planète
22:08si on se maintient entre 19 et 20 dans l'atelier.
22:11Et idem en été, on ne peut pas mettre la clim à 20 en été quand il fait 32 heures.
22:15Alors, je suis 100% d'accord avec vous sur le fait qu'on ne puisse plus passer à côté de cet enjeu,
22:22même cyniquement pour des questions de business.
22:25Mais est-ce qu'il faut quand même être en bonne santé financière,
22:28je parle de l'entreprise, pour se lancer dans ces investissements-là ?
22:32Et si c'était l'inverse ?
22:33Et si pour attirer les bons collaborateurs, les bons candidats,
22:37pour séduire de nouveaux clients et gagner des nouveaux contrats,
22:40on n'avait pas besoin d'abord de montrer patte blanche sur l'environnement ?
22:44Ça devient une vraie exigence sociétale.
22:46Donc, bien sûr, vous avez raison, on ne peut pas aller trop loin dans des démarches environnementales
22:51si l'entreprise est en difficulté.
22:53La première responsabilité de l'entreprise, c'est de préserver sa propre pérennité,
22:57ses emplois et de servir ses clients.
23:00Ça, j'en suis convaincue.
23:02C'est-à-dire qu'en 2009, vous n'auriez pas pu le faire ?
23:04Non. En 2009, on n'aurait pas pu le faire parce que, de toute façon,
23:07on était tellement pris par sauver l'entreprise, préserver les emplois,
23:11servir nos clients que nous n'avions pas le temps de regarder ces sujets-là.
23:15Mais attention, mettre comme prérequis une excellente santé économique
23:18avant de se pencher sur les questions environnementales,
23:21c'est, à mon avis, inverser la charrue et les bœufs.
23:24Oui, je suis assez d'accord avec vous.
23:26Si on continue de rentrer dans le détail des mesures,
23:31par exemple, sur les déplacements, la flotte de véhicules,
23:34vous travaillez aussi là-dessus ?
23:36Tout à fait. J'ai commencé par l'usine,
23:37mais l'un des principaux chantiers que nous avons lancés,
23:40c'est déjà l'optimisation des transports.
23:42Je vous ai expliqué que nous achetions des composants,
23:46des mécaniques qui venaient de l'extérieur,
23:48et puis qu'ensuite, nous allions livrer nos clients de ces systèmes.
23:50Nous avons cherché à optimiser la logistique de ces achats
23:56et de ces livraisons chez les clients.
23:58Parce qu'on se rend compte que si on s'organise un petit peu mieux
24:00et qu'on fait une livraison par semaine plutôt que deux,
24:04eh bien, on diminue presque de moitié notre bilan carbone sur le fret.
24:08Et comme nous avons également une usine en Tunisie,
24:09les allers-retours entre la Tunisie et la France
24:12ont été aussi travaillés pour optimiser les dépenses carbone.
24:16Qui contrôle ?
24:18Parce que là, il y a beaucoup d'actions qui sont mises en œuvre.
24:21Donc, comment vous évaluez vos progrès
24:25pour pouvoir éventuellement faire encore mieux dans quelques années ?
24:28Alors, in fine, c'est moi.
24:29Mais nous avons évidemment cherché à avoir des indicateurs extérieurs.
24:34Nous sommes, par exemple, certifiés Ecovadis.
24:36Nous avons été Ecovadis Silver jusqu'à ce que Ecovadis remonte sa notation.
24:40Nous sommes repassés bronze.
24:41Et là, toute l'équipe d'Ametra est en train de pédaler
24:43pour que nous repassions Silver en 2025.
24:46C'est notre objectif.
24:46Donc, déjà, les certifications extérieures.
24:48Nous sommes également labellisés UIMM, engagés et responsables.
24:52Ça, ça apporte un regard extérieur avec des critères,
24:54avec des notes, avec des évaluations.
24:56Ensuite, dans l'organisation, il faut que ces sujets soient suivis
24:59au niveau du Codire.
25:00J'en suis convaincue.
25:01C'est stratégique.
25:02Absolument.
25:03Si vous prenez un apprenti, ce que nous avons fait, par ailleurs,
25:05nous avons engagé une jeune femme apprentie
25:08qui gère ces sujets au quotidien.
25:10Mais si vous ne les remontez pas au niveau du Codire,
25:12ils ne sont pas pilotés correctement.
25:13Donc, c'est votre responsabilité.
25:15Donc, c'est ma responsabilité avec un membre du Codire
25:17qui est dans chacune des branches qui a été désignée
25:20et qui pilote ces sujets de RSE.
25:22Merci beaucoup, Anne-Charlotte Frédénucci.
25:24Et à bientôt sur Bsmart for Change.
25:26On passe tout de suite à notre rubrique Startup.
25:28Et à bientôt sur Bsmart for Change.

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