Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • avant-hier

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Europe 1. Pascal Prohiv, de 11h à 13h sur Europe 1. Pascal.
00:04Je salue Claire Fourcade qui est avec nous, présidente de la Société Française d'Accompagnement et de Soins Palliatifs.
00:10Bonjour.
00:11Bonjour madame et merci d'être avec nous. C'est un sujet difficile, personnel, où chacun a un avis en fonction de son vécu et parfois de ses croyances.
00:18Faut-il créer un droit à l'aide à mourir ? Les députés votent aujourd'hui à l'Assemblée Nationale.
00:22Deux textes, l'un consensuel sur les soins palliatifs, l'autre sur la création d'une aide à mourir.
00:28Pour être éligible, le demandeur doit remplir plusieurs conditions.
00:31Être majeur, être de nationalité française, être atteint d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qui engage le pronostic vital en phase avancée ou terminale.
00:42Présenter une souffrance physique ou psychologique constante qui est soit réfractaire au traitement, soit insupportable selon la personne lorsqu'elle a choisi de ne pas recevoir ou d'arrêter un traitement.
00:53Être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.
00:56Alors ça, c'est effectivement très difficile à, sans doute, à expertiser, à être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.
01:05Une personne dont le discernement est gravement altéré ne saurait être éligible,
01:10mais une personne dont le discernement n'est pas gravement altéré, mais moyennement altéré,
01:15tout cela me paraît assez difficile là aussi à évaluer.
01:19Et avant d'interroger Claire Fourcade, je voulais que nous écoutions François Bayrou, Premier Ministre, et il a annoncé qu'il ne voterait pas.
01:28Ce que je veux, c'est qu'il n'y ait pas de détournement de la loi pour faire de ce qui devrait être un acte ultime, un acte normal et banal.
01:40Si je vous écoute, François Bayrou, en l'état, vous, député, vous ne le voteriez pas ?
01:44Non, ce n'est pas ce que je dis.
01:46Ce soir, je veux dire. Vous le feriez évoluer éventuellement, mais tel qu'il est aujourd'hui, non ?
01:50Je pense que ce soir, je m'abstiendrai, oui.
01:53C'est intéressant quand même d'entendre un Premier Ministre qui défend d'une certaine manière,
01:58en tout cas qui propose une loi, il ne la défend pas,
02:02et une loi qu'il ne souhaite pas voter.
02:04Oui, je vois là quelque chose qui peut me surprendre.
02:07Madame Fourcade, que pensez-vous de cette loi, de ces deux textes,
02:13et que doit-on faire, selon vous, ces prochaines heures ?
02:17Alors, je pense que c'était vraiment bien qu'il y ait deux textes.
02:20C'était vraiment important, puisque le soutien aux soins palliatifs va pouvoir se manifester, je pense, de manière massive.
02:25Et je pense que sur le deuxième texte, il y a plusieurs contre-vérités, en tout cas dans ce texte.
02:31En tout cas, plusieurs choses qui ne sont pas tranchées, vous l'avez déjà très bien souligné.
02:34La première, c'est est-ce qu'il est question de créer un ultime recours pour des situations exceptionnelles,
02:40ou est-ce qu'il est question d'ouvrir un nouveau droit, le droit de choisir le moment de sa mort,
02:44qui doit être ouvert au plus grand nombre ?
02:46Et dans le texte, on nous dit que c'est un ultime recours,
02:48on rassure les députés en leur disant que c'est un ultime recours,
02:50mais en fait, les critères qui sont fixés sont des critères qui ouvrent très largement un nouveau droit.
02:56Et donc ça, c'est la première contre-vérité de ce texte.
02:59Et puis la deuxième, c'est qu'on dit aux Français que c'est une loi d'autonomie et de liberté.
03:03Et en fait, pour moi, c'est une loi du pouvoir médical.
03:06Parce que c'est le médecin qui va décider qui a droit et qui n'a pas droit.
03:09Et ce pouvoir médical, moi, j'en veux pas.
03:11Sauf que les médecins, si j'ai bien compris, la très grande majorité des soignants,
03:16et vous en faites partie, sont contre ce texte.
03:19Absolument, absolument.
03:21Parce que depuis des années maintenant, on travaille avec les lois qui sont en vigueur
03:25à essayer de rééquilibrer la relation entre les patients et les soignants,
03:29de construire des parcours de soins qui soient adaptés aux demandes du patient.
03:33Et là, on vient nous dire, c'est vous qui aurez le pouvoir de décider qui doit vivre ou qui peut mourir.
03:37Et ça, c'est une responsabilité immense.
03:39C'est un pouvoir énorme.
03:41Et je pense que l'extrême majorité des soignants, ils ne veulent pas de ce pouvoir.
03:46Ils veulent pouvoir continuer d'écouter les patients.
03:49Et puis, je dirais qu'on a besoin aussi, pour faire le métier qu'on fait,
03:52qui sont parfois des métiers difficiles, tous les métiers du soin,
03:54que la société nous dise, vous tous qui nous écoutez,
03:57que vous nous disiez, ça a du sens pour nous.
03:59Or là, avec cette loi, si la réponse collective de la société,
04:03si les gens souffrent, on peut les faire mourir plutôt que d'essayer de les soulager.
04:07Si on n'a plus la société avec nous pour nous dire, ce que vous faites est important,
04:12ces personnes, on tient à elles, elles sont importantes pour nous.
04:15C'est un changement majeur.
04:16Et je pense que ça inquiète beaucoup les soignants.
04:18Il est 11h23, vous êtes sur Europe 1.
04:19Vous écoutez Claire Fourcade, qui est présidente de la Société Française d'Accompagnement et de Soins Palliatifs.
04:26Je vous entends depuis de nombreuses semaines.
04:28Et c'est vrai que je fais partie des gens qui ont évolué là-dessus.
04:31Parce que je suis bien incapable de savoir comment je réagirais lorsque la mort sera présente,
04:36si tant est qu'elle ne soit pas brutale et que je sois confronté à cela.
04:40Je suis incapable de savoir comment je réagirais.
04:42Je suis comme tout le monde, j'ai envie de ne pas souffrir
04:45et j'ai envie effectivement de ne pas éterniser une vie qui peut-être, au bout d'un moment, n'aurait pas de sens.
04:52Mais là où j'ai changé, c'est que j'étais plutôt convaincu, notamment par Philippe Juvin,
04:56que la sédation profonde permettait ce passage, j'allais dire, en douceur, tant est que ce soit en douceur,
05:03et qu'il n'y avait pas besoin du passage de l'euthanasie.
05:07Et je n'ai pas saisi pourquoi cet deuxième texte existe,
05:12alors que, je le répète, la sédation profonde me paraît une solution qui est une solution de consensus.
05:20Est-ce que je me trompe, Claire Fourcade, dans cette analyse ?
05:23La crainte que vous exprimez pour vous-même est une crainte partagée par très nombreux Français,
05:28à qui on n'a jamais dit, jamais, il y a eu une campagne de communication ou d'information
05:31pour leur dire que depuis 20 ans, il est écrit dans la loi qu'il est interdit aux médecins de laisser souffrir,
05:37qu'on doit soulager quoi qu'il en coûte, même si ça doit raccourcir la vie.
05:40C'est écrit dans la loi depuis 2005.
05:42On fête les 20 ans de cette loi, et je pense que l'immense majorité de ceux qui nous écoutent
05:46ne savent pas que nous avons l'obligation légale de les soulager, quoi qu'il en coûte,
05:51de tout mettre en œuvre pour soulager.
05:53Et de ne laisser souffrir personne.
05:55Cette loi est mal connue, mal appliquée,
05:57et je pense que les Français auraient moins peur de cette période-là
06:00si on leur avait dit, on fera ce qu'il faut pour vous soulager,
06:03comme on le fait nous avec nos patients, et on voit combien ça les rassure.
06:06J'entends bien, j'entends bien, et c'est ce que également Philippe Juvin,
06:10qui était venu sur ce plateau, nous avait dit.
06:13Je vous remercie beaucoup, Claire Fourcade, d'être intervenue ce matin.
06:17Merci beaucoup, et merci pour ce combat.
06:19Et puis on a découvert l'univers des soins palliatifs, je pense à Jeanne Garnier,
06:24où nous avons accompagné, hélas, une de nos jeunes femmes avec qui nous travaillons,
06:29et j'avais découvert cet univers, j'avais été sidéré pour tout vous dire,
06:33combien cette maison accueille, comment elle traite ceux qui sont en fin de vie,
06:37le climat apaisant qu'il existe.
06:39Alors c'est Jeanne Garnier, il n'y a pas des Jeanne Garnier partout, hélas,
06:43dans toute la France, c'est dans le 15e arrondissement,
06:46c'est sans doute très privilégié, mais c'est vrai que ça fait réfléchir,
06:51c'est évidemment les meilleures structures pour accueillir ceux qui sont en fin de vie,
06:58mais ce sont des dépenses importantes, et on se heurte forcément à des arbitrages parfois budgétaires.

Recommandations